Mariage célébré entre le 1er septembre 1992 et le 28 janvier 2019

RÉDIGER : L’acte notarié français dans un contexte international

L'acte authentique et l'institution de l'authenticité

Le statut du notaire et de l'acte authentique notarié selon le droit européen

Préparation et rédaction de l'acte : enjeux et méthodologie

La circulation internationale de l'acte

La fiscalité internationale

Rémunération et protection sociale : les enjeux de l'international

Les trusts

L'assurance vie dans un cadre international

Mariage célébré entre le 1er septembre 1992 et le 28 janvier 2019

En l'absence de choix effectué par les époux, la détermination de la loi applicable au régime matrimonial est définie par l'article 4 de la Convention de La Haye du 14 mars 1978.
Les critères retenus sont au nombre de deux : le principe est celui de la première résidence habituelle des époux et l'exception celui de la loi nationale commune.

Principe : loi de la première résidence habituelle des époux

L'article 4, alinéa 1 de la convention désigne comme applicable la loi de la première résidence habituelle des époux après le mariage 1531037113897.
– Résidence. – Il s'agit là de la résidence, notion de fait, et non du domicile, notion de droit, qui induit un élément intentionnel.
– Résidence habituelle. – La convention reprend le système du droit commun français qui applique le critère de premier domicile matrimonial. Avec toutefois une différence : dans la convention, il n'y a pas lieu de rechercher une durée minimale. Une installation des époux dans un pays quelques mois après le mariage est suffisante pour établir une résidence habituelle commune.
Un arrêt rendu par la Cour de cassation en 2012 1538830972827le précise : deux Français résidant aux États-Unis se marient dans l'État de New York et y vivent pendant un an avant de rentrer en France. La durée du séjour est courte (un an) et les époux ne semblent pas avoir eu l'intention de s'établir aux États-Unis. Mais la Cour de cassation considère que les époux se sont trouvés soumis à la loi de l'État de New York (équivalant à une séparation des biens), loi de leur résidence habituelle, et ce depuis leur mariage jusqu'à leur retour en France (lequel retour en France a provoqué la mutabilité de leur régime matrimonial en faveur du régime légal français ainsi qu'il sera étudié plus loin).
Pour déterminer cette résidence habituelle après le mariage, le notaire pourra utilement solliciter des époux divers documents administratifs tels que : taxe d'habitation ou équivalent, avis d'impôt sur le revenu, bulletins de salaire, abonnements divers ou encore enregistrement dans le cadre d'assurances sociales…
Dans certains cas toutefois, le critère de résidence principale s'effacera au profit de celui de la loi nationale commune des époux.

Exception : loi nationale commune des époux

– Notion de loi nationale commune. – L'article 15 de la Convention de La Haye du 14 mars 1978 définit ce qu'elle entend par la notion de nationalité commune des époux.
Elle vise trois hypothèses :
  • les époux avaient la même nationalité avant le mariage ;
  • un des époux a acquis volontairement la nationalité de l'autre au moment du mariage ou après le mariage ;
  • les deux époux ont acquis volontairement cette nationalité après le mariage.
La convention exclut le cas (qui devrait être rare) où les époux ont plus d'une nationalité commune : dans ce cas, l'article 15 de la convention ne s'applique pas.
La loi nationale commune peut trouver à s'appliquer dans deux situations différentes :
  • le premier cas est simple : les époux n'ont pas de première résidence habituelle commune (C) ;
  • le second est plus complexe : les époux ont une première résidence habituelle commune. Toutefois, ils sont tous deux :

Déclaration faite par l'État de la nationalité commune prévue à l'article 5 de la convention : cas des époux néerlandais

– Principe d'application de la loi nationale commune. – L'article 4, alinéa 2-1 1531039346179de la convention désigne la loi nationale commune des époux applicable lorsque l'État membre a effectué la déclaration prévue par l'article 5 1531573445150. Seuls les Pays-Bas ont effectué cette déclaration.
Ainsi, concernant des époux néerlandais mariés et résidant en France après leur mariage, le notaire français appliquera à leur régime matrimonial la loi néerlandaise, loi de leur nationalité commune et non la loi française, loi de leur première résidence après le mariage.
– Exception à l'application de la loi nationale commune : loi de la résidence habituelle. – L'article 5, alinéa 2 1531040017774de la convention limite les effets de cette déclaration. En effet, si les époux se sont installés de manière stable avant le mariage dans l'État de la résidence, c'est la loi de cet État qui s'appliquera.
Ainsi à des époux néerlandais qui résidaient en France depuis plus de cinq ans avant de s'y marier, le notaire français appliquera la loi française, loi de la résidence et non la loi néerlandaise, loi de la nationalité commune.
– Exception à l'exception : retour à l'application de la loi nationale commune. – L'article 5, alinéa 2 in fine 1531040580139vise le cas où la règle de conflit de l'État de la résidence de plus de cinq ans désigne la loi nationale commune des époux. Dans ce cas, pour permettre aux différents pays concernés de donner une solution identique, il est fait retour à la loi nationale commune.
Les États dont le droit international privé prescrit l'application de la loi nationale commune sont les suivants : Afghanistan, Albanie, Algérie, Allemagne, Angola, Autriche, Belgique (jusqu'au 1er octobre 2004), Bulgarie, Cap-Vert, Corée, Égypte, Émirats arabes unis, Espagne, Finlande, Grèce, Hongrie, Indonésie, Irak, Italie, Japon, Jordanie, Koweït, Liban, Liechtenstein, Maroc, Pologne, Portugal, Roumanie, Sénégal, Somalie, Suède, Syrie, Tchad, République tchèque, République slovaque, Thaïlande, Tunisie, Turquie, Vatican, Yougoslavie, Haïti, République dominicaine, Surinam.
Ainsi, à des époux néerlandais résidant habituellement en Allemagne après le mariage et qui y résidaient depuis plus de cinq ans avant de s'y marier, le notaire français appliquera la loi néerlandaise, loi de la nationalité commune.
Récapitulatif pour des époux tous deux de nationalité néerlandaise :
a) qui établissement leur première résidence habituelle en France :
  • après le mariage : loi néerlandaise,
  • après le mariage et avant le mariage depuis plus de cinq ans : loi française ;
b) qui établissent leur première résidence habituelle dans un pays dont le droit international privé prescrit l'application de la loi nationale commune : loi néerlandaise.
Il est rappelé que cette situation ne se présentera que pour des époux de nationalité néerlandaise, les Pays-Bas ayant seuls fait la déclaration de l'article 5 de la convention.

Convergence des systèmes de conflit de lois en faveur de la loi nationale

La convention, dans son article 4, alinéa 2-2° 1531573929842vise le cas où :
  • l'État de la nationalité commune des époux ;
  • et l'État de leur première résidence habituelle.
envisagent chacun l'application de la loi nationale commune des époux (V. liste des États ci-dessus).
Dans ce cas, la loi de la première résidence habituelle doit être écartée au profit de la loi nationale commune.
Ainsi, des époux tous deux de nationalité portugaise qui s'installent à Athènes juste après leur mariage seront soumis au régime légal portugais de la communauté : en effet, tant la Grèce que le Portugal prescrivent au titre de la détermination du régime matrimonial, la loi nationale commune des époux.
En pratique, le notaire devra :
  • détecter les époux de même nationalité ressortissant d'un État figurant sur la liste susvisée ;
  • puis vérifier s'ils se sont installés dans un État figurant sur cette même liste.
Et, dans l'affirmative, il devra leur appliquer la loi de leur nationalité commune à la place de la loi de leur résidence habituelle commune.

Absence de résidence habituelle commune après le mariage

L'article 4, alinéa 2-3° de la convention 1531575246233envisage le cas où les époux n'ont pas de résidence habituelle après le mariage dans le même État : dans ce cas, on leur applique la loi nationale commune.
L'absence de résidence habituelle commune est souvent limitée dans le temps ; la convention a prévu qu'à partir du moment où les époux adoptent une résidence habituelle commune, cette loi viendra s'appliquer automatiquement et remplacer la loi nationale commune jusque-là applicable.
L'article 7 de la convention de La Haye précise : « La loi compétente en vertu des dispositions de la Convention demeure applicable aussi longtemps que les époux n'en ont désigné aucune autre et même s'ils changent de nationalité ou de résidence habituelle. Toutefois, si les époux n'ont ni désigné la loi applicable, ni fait de contrat de mariage, la loi interne de l'État où ils ont tous deux leur résidence habituelle devient applicable, aux lieu et place de celle à laquelle leur régime matrimonial était antérieurement soumis : 1. à partir du moment où ils y fixent leur résidence habituelle, si la nationalité de cet État est leur nationalité commune, ou dès qu'ils acquièrent cette nationalité, ou 2. lorsque, après le mariage, cette résidence habituelle a duré plus de dix ans, ou 3. à partir du moment où ils y fixent leur résidence habituelle, si le régime matrimonial était soumis à la loi de l'État de la nationalité commune uniquement en vertu de l'article 4, alinéa 2, chiffre 3 ».

Rattachement subsidiaire en faveur de l'État qui présente les liens les plus étroits avec les époux

L'article 4, alinéa 3 de la convention vise des cas rares en pratique 1531575782218 : lorsque des époux :
  • n'ont pas de résidence habituelle commune dans le même État après le mariage ;
  • et n'ont pas de nationalité commune (ou ont plusieurs nationalités communes).
Leur régime matrimonial « est soumis à la loi interne de l'État avec lequel, compte tenu de toutes les circonstances, il présente les liens les plus étroits ».
Il faut donc rechercher l'État avec lequel les époux sont les plus proches. Il pourra être pris en compte le centre de leurs intérêts pécuniaires, le lieu de situation de leurs biens, le domicile ou la nationalité d'un époux.
Pour ces époux, le notaire conseillera utilement un changement volontaire de loi avec rétroactivité 1544345426531.