Le régime matrimonial objectif (en l'absence de choix de loi)

RÉDIGER : L’acte notarié français dans un contexte international

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L'assurance vie dans un cadre international

Le régime matrimonial objectif (en l'absence de choix de loi)

À défaut de choix des époux, le notaire ne sera pas pour autant confronté à une situation de vide.
En effet, dans ce cas, le régime matrimonial fera l'objet d'une détermination établie au moyen de critères objectifs.
Ces critères diffèrent selon la date du mariage. Là encore, trois dates clés existent en la matière.
La détermination du régime matrimonial a évolué au fil du temps. Tout d'abord, avant le 1er janvier 1992, la jurisprudence a dégagé le critère de l'autonomie de la volonté caractérisé par le « premier domicile commun ». Puis la Convention de La Haye du 14 mars 1978 a consacré le principe de la première résidence habituelle commune des époux, assorti de quelques exceptions notamment en faveur de la loi nationale commune. Le règlement n° 2016/1103, quant à lui, s'inspire largement des dispositions de la convention de La Haye.

Mariage célébré avant le 1er septembre 1992

Lorsque les époux n'ont pas clairement choisi leur régime matrimonial lors du mariage, il y a lieu de déterminer celui qu'ils ont implicitement choisi. La doctrine parle alors de « rattachement objectif ».

Détermination du choix tacite des époux

En l'absence de choix exprès des époux, la jurisprudence aurait pu faire appel à des critères objectifs tels que le lieu du mariage ou la nationalité commune. Elle n'a toutefois pas fait ce choix et a retenu la volonté présumée des époux.
Il est vrai que cette volonté n'est pas facile à déterminer en présence d'époux qui, n'ayant pas fait de contrat de mariage, n'ont que peu de connaissances relatives à leur régime matrimonial.
Ce principe a été affirmé dès 1935 par la cour de Cassation dans les termes suivants : « Il appartient aux juges du fond d'apprécier souverainement d'après les faits et circonstances de la cause, (…) le statut que des époux étrangers mariés sans contrat ont eu la volonté d'adopter pour le règlement de leurs intérêts pécuniaires » 1522915079779.
Pour déterminer le régime matrimonial des époux, il y a lieu de rechercher leur volonté à l'aide de critères dégagés par la jurisprudence (A). Cette détermination pouvant être incertaine, la jurisprudence française a admis la possibilité d'introduire une action déclaratoire afin de déterminer la loi applicable au régime matrimonial  (B).

Les éléments pris en compte pour déterminer la volonté des époux

Élément prépondérant : premier domicile commun effectif
Les époux qui n'ont pas choisi de loi applicable à leur régime matrimonial sont généralement présumés avoir fixé leurs intérêts pécuniaires au lieu de leur premier domicile commun.
La Cour de cassation a tout d'abord indiqué qu'il y avait lieu de tenir compte notamment de ce critère 1522915742171, puis principalement de celui-ci 1522916226869.
La question s'est posée de la durée de ce premier domicile matrimonial : en effet, la Cour de cassation ne fixe pas de durée précise mais retient seulement un domicile effectif. Les Cridon, dans leurs consultations, ont estimé que seul un premier domicile commun de plus de deux ans pouvait présenter un tel caractère effectif. Cette solution a été approuvée par la doctrine.
Il faut signaler que l'indice du premier domicile commun, s'il est prépondérant, constitue une présomption simple qui peut être détruite par tout élément de preuve pertinent ainsi que cela a été précisé par la Cour de cassation en 2005 1522917542115.
Il y a lieu d'analyser les autres éléments pouvant être pris en compte pour déterminer la volonté implicite des époux.
Les autres éléments pouvant être pris en compte
Ces éléments à retenir peuvent être concomitants (a) ou postérieurs (b) au mariage.
Indices concomitants au mariage
La jurisprudence a dans certains cas retenu :
  • le lieu de célébration du mariage, dans la mesure où il coïncide avec le domicile matrimonial : il permet de renforcer la présomption en faveur du premier domicile commun ;
  • la nationalité commune des époux : pour des époux vivant en France qui retournent se marier dans leur pays d'origine. La nationalité d'origine et le lieu de célébration du mariage peuvent exceptionnellement caractériser la volonté des époux et permettre d'identifier leur régime matrimonial.
Indices postérieurs au mariage
La Cour de cassation a affirmé à plusieurs reprises que pour déterminer le régime applicable au régime matrimonial d'époux mariés sans contrat, il y avait lieu de se placer au moment du mariage.
Toutefois, les juges peuvent prendre en compte des circonstances postérieures au mariage. Le plus souvent, cela sera pour renforcer la présomption en faveur du domicile commun. Certains arrêts utilisent cependant des éléments postérieurs à la célébration pour désigner la loi applicable au mariage suivant le principe de proximité 1522919784389.
Cette possibilité de retenir des indices postérieurs au mariage a été critiquée en doctrine.
Concernant les époux mariés en Algérie avant l'indépendance fixée au 1er janvier 1963, il convient de distinguer selon leur religion pour déterminer leur régime. En effet, la France reconnaissait avant l'indépendance le statut personnel des Algériens et pour les musulmans l'absence de régime matrimonial ou un régime assimilable à celui de la séparation de biens.

Régime matrimonial mentionné dans un acte notarié

Dans certains cas, il arrive que le régime matrimonial des époux soit mentionné dans un acte notarié, par exemple un acte de vente établi après le mariage. Il faut souligner que même si l'acte a été conclu par les deux époux, cette déclaration faite postérieurement au mariage est sans effet. Afin d'éviter toute ambiguïté, le notaire devra recueillir la déclaration des époux sur leur premier domicile commun et définir ainsi leur régime matrimonial 1535544663081.

L'action déclaratoire

Lorsque les éléments de fait sont ambigus, notamment parce que le premier domicile commun est difficile à déterminer, l'action déclaratoire peut être utile.
Cette jurisprudence, élaborée par le tribunal de grande instance de Paris, a admis la possibilité d'introduire une telle action sur assignation du ministère public. L'action est exercée de façon conjointe par les époux, en dehors de tout litige et est dirigée contre le ministère public. Elle permet aux époux de s'adresser au juge pour lui demander de fixer leur régime matrimonial.
Toutefois, la portée de ce jugement est limitée : en effet, il n'est pas opposable aux tiers. Selon l'expression du professeur Philippe Malaurie il n'est qu'un « très habile pis-aller » 1523805069607.
ll est vrai que depuis l'entrée en vigueur au 1er septembre 1992 de la Convention de La Haye sur les régimes matrimoniaux, cette action déclaratoire était devenue sans intérêt. En effet, les époux mariés avant cette date pouvaient utiliser l'article 6 de la convention à l'effet de désigner une loi interne à leur régime matrimonial autre que celle jusqu'alors applicable. Avec l'entrée en vigueur du règlement européen, cette possibilité leur est offerte par l'article 22.

Conséquences du choix tacite des époux

Une fois la loi applicable au régime matrimonial déterminée, il y a lieu d'analyser son champ d'application.

Indivisibilité du régime matrimonial

Le régime matrimonial ainsi déterminé va s'appliquer à l'ensemble des relations patrimoniales des époux. Il va régir notamment la composition du patrimoine des époux, leurs pouvoirs quant à leurs biens et quant à la liquidation de leur régime matrimonial.
Ainsi la Cour de cassation a confirmé que la liquidation des biens d'époux ayant leur premier domicile conjugal à l'étranger doit s'effectuer selon les règles régissant leur régime matrimonial 1526723625019.

Exclusion du renvoi

Il s'est posé la question de savoir si, à défaut de choix exprès de loi applicable, le choix tacite opéré par les époux s'est porté sur le droit interne de l'État ou sur ses règles de droit international privé autorisant ainsi le renvoi.
Cette question a été soumise à la Cour de cassation qui a très tôt écarté le renvoi, et ce à deux reprises à l'occasion des arrêts Lardans en 1969 1526725097613et Goutherz en 19721526725124788.
Dans les deux cas, les conséquences étaient importantes car les époux passaient d'un régime de séparation des biens à un régime de communauté. La Cour de cassation a précisé que « les époux ont pensé au régime légal interne et non à la règle de conflit dont il n'est pas raisonnable qu'ils aient soupçonné l'existence ».
Plus récemment, la Cour de cassation a confirmé que « les époux sont présumés avoir soumis leur régime matrimonial à la loi interne de l'État sur le territoire duquel ils ont établi leur première résidence habituelle après le mariage » 1526725414402.

Évolution du droit interne

Selon le système de droit commun, la loi qui détermine le régime matrimonial est fixée au jour du mariage. Elle n'est pas par la suite modifiée, par exemple par un changement de nationalité des époux ou un changement de résidence : on parle de fixité du rattachement dans le temps. Cette règle a été rappelée par la Cour de cassation le 12 mai 2010 1535545171251.
La question se pose de savoir ce qui se passe lorsque le droit interne ainsi désigné évolue : doit-on tenir compte des modifications du droit interne ou au contraire figer le régime matrimonial tel qu'il existait au jour du mariage ?
Cette situation est fréquente compte tenu des réformes souvent rétroactives qui ont eu lieu dans différents pays 1535545426889.
Le droit français considère qu'il y a lieu de tenir compte des évolutions internes du droit étranger conformément aux dispositions de droit transitoire prévues par la loi étrangère. La Cour de cassation a énoncé de façon générale en 1987 « qu'en cas de modification ultérieure de la loi étrangère désignée, c'est à cette loi qu'il appartient de résoudre les conflits de lois dans le temps » 1526727229353.
Une exception à ce principe existe toutefois pour les réfugiés : on parle alors de pétrification de la loi applicable.
Une difficulté est apparue pour les personnes ayant fui un régime totalitaire. Si on appliquait le principe ci-dessus, il aurait fallu leur appliquer la loi de l'État qu'ils ont fui en cas de changement rétroactif.
Pour éviter cette solution, la jurisprudence pétrifie leur régime matrimonial, c'est-à-dire qu'elle le fige au jour de la célébration du mariage. On appliquera donc la loi en vigueur au jour du mariage et non la nouvelle loi rétroactive 1535545605431.
La Cour de cassation lie la pétrification au statut des réfugiés prévu par la convention de Genève du 23 juillet 1951. Cette pétrification a lieu même si par la suite les époux changent de nationalité.
Cela a été précisé par la Cour de cassation en 2006 pour le cas de deux époux de nationalité roumaine mariés sans contrat en Roumanie en 1941 et qui s'étaient installés en France en 1954 pour y être naturalisés. Il leur a été appliqué le régime de la séparation des biens, régime légal de la loi roumaine au jour de la célébration du mariage et non le nouveau régime légal roumain de la communauté 1535546082822.

Mariage célébré entre le 1er septembre 1992 et le 28 janvier 2019

En l'absence de choix effectué par les époux, la détermination de la loi applicable au régime matrimonial est définie par l'article 4 de la Convention de La Haye du 14 mars 1978.
Les critères retenus sont au nombre de deux : le principe est celui de la première résidence habituelle des époux et l'exception celui de la loi nationale commune.

Principe : loi de la première résidence habituelle des époux

L'article 4, alinéa 1 de la convention désigne comme applicable la loi de la première résidence habituelle des époux après le mariage 1531037113897.
– Résidence. – Il s'agit là de la résidence, notion de fait, et non du domicile, notion de droit, qui induit un élément intentionnel.
– Résidence habituelle. – La convention reprend le système du droit commun français qui applique le critère de premier domicile matrimonial. Avec toutefois une différence : dans la convention, il n'y a pas lieu de rechercher une durée minimale. Une installation des époux dans un pays quelques mois après le mariage est suffisante pour établir une résidence habituelle commune.
Un arrêt rendu par la Cour de cassation en 2012 1538830972827le précise : deux Français résidant aux États-Unis se marient dans l'État de New York et y vivent pendant un an avant de rentrer en France. La durée du séjour est courte (un an) et les époux ne semblent pas avoir eu l'intention de s'établir aux États-Unis. Mais la Cour de cassation considère que les époux se sont trouvés soumis à la loi de l'État de New York (équivalant à une séparation des biens), loi de leur résidence habituelle, et ce depuis leur mariage jusqu'à leur retour en France (lequel retour en France a provoqué la mutabilité de leur régime matrimonial en faveur du régime légal français ainsi qu'il sera étudié plus loin).
Pour déterminer cette résidence habituelle après le mariage, le notaire pourra utilement solliciter des époux divers documents administratifs tels que : taxe d'habitation ou équivalent, avis d'impôt sur le revenu, bulletins de salaire, abonnements divers ou encore enregistrement dans le cadre d'assurances sociales…
Dans certains cas toutefois, le critère de résidence principale s'effacera au profit de celui de la loi nationale commune des époux.

Exception : loi nationale commune des époux

– Notion de loi nationale commune. – L'article 15 de la Convention de La Haye du 14 mars 1978 définit ce qu'elle entend par la notion de nationalité commune des époux.
Elle vise trois hypothèses :
  • les époux avaient la même nationalité avant le mariage ;
  • un des époux a acquis volontairement la nationalité de l'autre au moment du mariage ou après le mariage ;
  • les deux époux ont acquis volontairement cette nationalité après le mariage.
La convention exclut le cas (qui devrait être rare) où les époux ont plus d'une nationalité commune : dans ce cas, l'article 15 de la convention ne s'applique pas.
La loi nationale commune peut trouver à s'appliquer dans deux situations différentes :
  • le premier cas est simple : les époux n'ont pas de première résidence habituelle commune (C) ;
  • le second est plus complexe : les époux ont une première résidence habituelle commune. Toutefois, ils sont tous deux :

Déclaration faite par l'État de la nationalité commune prévue à l'article 5 de la convention : cas des époux néerlandais

– Principe d'application de la loi nationale commune. – L'article 4, alinéa 2-1 1531039346179de la convention désigne la loi nationale commune des époux applicable lorsque l'État membre a effectué la déclaration prévue par l'article 5 1531573445150. Seuls les Pays-Bas ont effectué cette déclaration.
Ainsi, concernant des époux néerlandais mariés et résidant en France après leur mariage, le notaire français appliquera à leur régime matrimonial la loi néerlandaise, loi de leur nationalité commune et non la loi française, loi de leur première résidence après le mariage.
– Exception à l'application de la loi nationale commune : loi de la résidence habituelle. – L'article 5, alinéa 2 1531040017774de la convention limite les effets de cette déclaration. En effet, si les époux se sont installés de manière stable avant le mariage dans l'État de la résidence, c'est la loi de cet État qui s'appliquera.
Ainsi à des époux néerlandais qui résidaient en France depuis plus de cinq ans avant de s'y marier, le notaire français appliquera la loi française, loi de la résidence et non la loi néerlandaise, loi de la nationalité commune.
– Exception à l'exception : retour à l'application de la loi nationale commune. – L'article 5, alinéa 2 in fine 1531040580139vise le cas où la règle de conflit de l'État de la résidence de plus de cinq ans désigne la loi nationale commune des époux. Dans ce cas, pour permettre aux différents pays concernés de donner une solution identique, il est fait retour à la loi nationale commune.
Les États dont le droit international privé prescrit l'application de la loi nationale commune sont les suivants : Afghanistan, Albanie, Algérie, Allemagne, Angola, Autriche, Belgique (jusqu'au 1er octobre 2004), Bulgarie, Cap-Vert, Corée, Égypte, Émirats arabes unis, Espagne, Finlande, Grèce, Hongrie, Indonésie, Irak, Italie, Japon, Jordanie, Koweït, Liban, Liechtenstein, Maroc, Pologne, Portugal, Roumanie, Sénégal, Somalie, Suède, Syrie, Tchad, République tchèque, République slovaque, Thaïlande, Tunisie, Turquie, Vatican, Yougoslavie, Haïti, République dominicaine, Surinam.
Ainsi, à des époux néerlandais résidant habituellement en Allemagne après le mariage et qui y résidaient depuis plus de cinq ans avant de s'y marier, le notaire français appliquera la loi néerlandaise, loi de la nationalité commune.
Récapitulatif pour des époux tous deux de nationalité néerlandaise :
a) qui établissement leur première résidence habituelle en France :
  • après le mariage : loi néerlandaise,
  • après le mariage et avant le mariage depuis plus de cinq ans : loi française ;
b) qui établissent leur première résidence habituelle dans un pays dont le droit international privé prescrit l'application de la loi nationale commune : loi néerlandaise.
Il est rappelé que cette situation ne se présentera que pour des époux de nationalité néerlandaise, les Pays-Bas ayant seuls fait la déclaration de l'article 5 de la convention.

Convergence des systèmes de conflit de lois en faveur de la loi nationale

La convention, dans son article 4, alinéa 2-2° 1531573929842vise le cas où :
  • l'État de la nationalité commune des époux ;
  • et l'État de leur première résidence habituelle.
envisagent chacun l'application de la loi nationale commune des époux (V. liste des États ci-dessus).
Dans ce cas, la loi de la première résidence habituelle doit être écartée au profit de la loi nationale commune.
Ainsi, des époux tous deux de nationalité portugaise qui s'installent à Athènes juste après leur mariage seront soumis au régime légal portugais de la communauté : en effet, tant la Grèce que le Portugal prescrivent au titre de la détermination du régime matrimonial, la loi nationale commune des époux.
En pratique, le notaire devra :
  • détecter les époux de même nationalité ressortissant d'un État figurant sur la liste susvisée ;
  • puis vérifier s'ils se sont installés dans un État figurant sur cette même liste.
Et, dans l'affirmative, il devra leur appliquer la loi de leur nationalité commune à la place de la loi de leur résidence habituelle commune.

Absence de résidence habituelle commune après le mariage

L'article 4, alinéa 2-3° de la convention 1531575246233envisage le cas où les époux n'ont pas de résidence habituelle après le mariage dans le même État : dans ce cas, on leur applique la loi nationale commune.
L'absence de résidence habituelle commune est souvent limitée dans le temps ; la convention a prévu qu'à partir du moment où les époux adoptent une résidence habituelle commune, cette loi viendra s'appliquer automatiquement et remplacer la loi nationale commune jusque-là applicable.
L'article 7 de la convention de La Haye précise : « La loi compétente en vertu des dispositions de la Convention demeure applicable aussi longtemps que les époux n'en ont désigné aucune autre et même s'ils changent de nationalité ou de résidence habituelle. Toutefois, si les époux n'ont ni désigné la loi applicable, ni fait de contrat de mariage, la loi interne de l'État où ils ont tous deux leur résidence habituelle devient applicable, aux lieu et place de celle à laquelle leur régime matrimonial était antérieurement soumis : 1. à partir du moment où ils y fixent leur résidence habituelle, si la nationalité de cet État est leur nationalité commune, ou dès qu'ils acquièrent cette nationalité, ou 2. lorsque, après le mariage, cette résidence habituelle a duré plus de dix ans, ou 3. à partir du moment où ils y fixent leur résidence habituelle, si le régime matrimonial était soumis à la loi de l'État de la nationalité commune uniquement en vertu de l'article 4, alinéa 2, chiffre 3 ».

Rattachement subsidiaire en faveur de l'État qui présente les liens les plus étroits avec les époux

L'article 4, alinéa 3 de la convention vise des cas rares en pratique 1531575782218 : lorsque des époux :
  • n'ont pas de résidence habituelle commune dans le même État après le mariage ;
  • et n'ont pas de nationalité commune (ou ont plusieurs nationalités communes).
Leur régime matrimonial « est soumis à la loi interne de l'État avec lequel, compte tenu de toutes les circonstances, il présente les liens les plus étroits ».
Il faut donc rechercher l'État avec lequel les époux sont les plus proches. Il pourra être pris en compte le centre de leurs intérêts pécuniaires, le lieu de situation de leurs biens, le domicile ou la nationalité d'un époux.
Pour ces époux, le notaire conseillera utilement un changement volontaire de loi avec rétroactivité 1544345426531.

Mariage célébré à compter du 29 janvier 2019

Pour les époux dont le mariage est célébré à compter du 29 janvier 2019, il est fait application du règlement (UE) n° 2016/1103 du 24 juin 2016 qui a été présenté ci-dessus 1531579451590.
C'est l'article 26 du règlement qui traite de la détermination de la loi applicable à défaut de choix exprès par les époux. Cet article s'inspire fortement de l'article 4 de la Convention deLa Haye du 14 mars 1978 en dressant une liste des facteurs de rattachement objectifs qui s'appliquent de façon hiérarchisée.
Fort heureusement, les règles édictées par le règlement sont plus simples que celles de la convention.
L'article 26 est ainsi rédigé :
  • « À défaut de convention sur le choix de la loi applicable conformément à l'article 22, la loi applicable au régime matrimonial est la loi de l'État : a) de la première résidence habituelle commune des époux après la célébration du mariage; ou, à défaut, b) de la nationalité commune des époux au moment de la célébration du mariage; ou, à défaut, c) avec lequel les époux ont ensemble les liens les plus étroits au moment de la célébration du mariage, compte tenu de toutes les circonstances ;
  • Lorsque les époux ont plus d'une nationalité commune au moment de la célébration du mariage, seuls les points a) et c) du paragraphe 1 s'appliquent. »

Principe : loi de la première résidence habituelle commune des époux

Si les époux n'ont pas exprimé un choix de façon expresse, l'article 26-1 du règlement du 24 juin 2016 prévoit l'application de leur première résidence habituelle commune après leur mariage.
À l'instar de la convention de La Haye, le règlement vise la résidence, notion de fait et non le domicile, notion de droit.

À défaut en faveur de la loi nationale commune des époux

À défaut de première résidence habituelle commune après le mariage, c'est la loi de la nationalité commune qui s'appliquera.
Si les époux ont une double nationalité commune, le règlement (tout comme la convention de La Haye) exclut l'application de la loi nationale des époux.

À défaut en faveur de la loi de l'État avec lequel les époux ont ensemble les liens les plus étroits au moment de la célébration du mariage

L'article 26-1-c du règlement (UE) n° 2016/1103 du 24 juin 2016 vise le cas des époux qui n'ont :
  • pas de première résidence habituelle commune ;
  • et pas de nationalité commune (ou une double nationalité commune).
Leur régime matrimonial est alors soumis à la loi de l'État avec lequel il présente les liens les plus étroits.
Il faut donc rechercher (tout comme pour les époux soumis à la convention de La Haye) l'État avec lequel les époux sont le plus proches. Il pourra être tenu compte du centre de leurs intérêts pécuniaires, de la situation des biens, du domicile ou de la nationalité de l'un des époux…

Clause d'exception : loi de la dernière résidence habituelle commune des époux

À titre exceptionnel, la loi de la dernière résidence habituelle des époux peut trouver à s'appliquer. Il s'agit là d'une innovation du règlement du 24 juin 2016, contenue dans son article 26- 3 1531585530645.
Les conditions d'application sont toutefois rigoureusement encadrées et cumulatives.
Il faut :
  • que l'un des époux en fasse la demande auprès d'une autorité judiciaire ;
  • et qu'il apporte une double preuve, c'est-à-dire démontre que les époux :
Si cette double preuve est satisfaite, le juge peut alors appliquer la loi de la dernière résidence habituelle aux lieu et place de la loi de la première résidence habituelle.
Cette substitution s'opère de manière rétroactive à partir de la date de la célébration du mariage (à moins que l'un des époux ne s'y oppose), mais ne peut pas porter atteinte aux droits des tiers.
Cette exception vise le cas d'époux qui fixent leur première résidence habituelle dans un État avec lequel ils n'ont pas de lien particulier, puis s'installent par la suite durablement dans un autre État.
Bien entendu, si les époux sont tous deux d'accord pour modifier la loi applicable à leur régime matrimonial, ils utiliseront la procédure de l'article 22 du règlement sur le changement de loi applicable. Le recours à l'article 26-3 du règlement se fera lorsque les époux ne seront pas d'accord et n'auront pas conclu de convention matrimoniale avant la date d'établissement de leur dernière résidence habituelle commune dans cet autre État.
Les auteurs regrettent cette clause d'exception qui « remet en cause la prévisibilité et la sécurité juridique, même si une décision judiciaire intervient » 1531587436686.