Une vertu environnementale mal récompensée

Une vertu environnementale mal récompensée

Le notaire, témoin
– Une société ingouvernable. – Il est difficile d'imaginer une politique environnementale exigeante sans une forte demande de la population. Or, au sein de celle-ci, on constate les comportements les plus opposés. à un extrême, une « éco-anxiété » (pour adopter ce néologisme) dont l'intensité peut conduire aux actions les plus absurdes : comme recouvrir de sauce tomate « Les Tournesols » de van Gogh, dans la National Gallery de Londres – on cherche évidemment la logique, même si van Gogh fut un remarquable peintre du climat, et spécialement du mistral provençal. à l'autre extrême, des touristes hilares, se photographiant à côté de thermomètres témoignant du record de chaleur autour d'eux (notamment, à Furnace Creek, dans la « Vallée de...
Lire
– La réponse économico-juridique à la question environnementale. – Dans l'acception traditionnelle, la norme juridique est un acte de volonté, qui commande que quelque chose « doit avoir lieu » . Or, quand le droit met en place un système assimilable à celui de la consigne, nous sommes en présence d'un usage indirect de la norme. La norme n'exige plus directement, elle ne fait que prescrire le cadre économique ; c'est la poursuite de l'intérêt individuel qui permet, ensuite, d'obtenir le résultat désiré.
... Lire
– Les risques économiques du changement climatique. – Conséquence logique de cette approche économique de la situation environnementale, les banques centrales et, au-delà, l'ensemble du système financier en viennent à redouter le « cygne vert » . Cette jolie expression dérive lointainement d'une remarque de l'auteur latin Juvénal sur la rareté du « cygne noir » . En effet, dans la pensée courante, à force de n'observer que des cygnes blancs, il est naturellement induit que les cygnes sont nécessairement blancs. Et…
– Les risques économiques du changement climatique. – Conséquence logique de cette approche économique de la situation environnementale, les banques centrales et, au-delà, l'ensemble du système financier en viennent à redouter le « cygne vert » . Cette jolie expression dérive lointainement d'une remarque de l'auteur latin Juvénal sur la rareté du « cygne noir » . En effet, dans la pensée courante, à force de n'observer que des cygnes blancs, il est naturellement induit que les cygnes sont nécessairement blancs. Et le cygne noir peut sembler un animal aussi chimérique que la licorne. Néanmoins, au XVII e siècle, des explorateurs néerlandais ont découvert des cygnes noirs en Australie. L'opinion courante se voyait donc réfutée.
Dans le monde de la finance, le « cygne noir » est devenu une expression pour désigner des événements imprévisibles, aux conséquences considérables, mais avec une faible probabilité a priori de se produire ; et qui, en raison de cette trop faible probabilité, ne sont pas anticipés . Mutatis mutandis, le « cygne vert » désigne les conséquences potentielles du changement climatique sur le système financier : la Nature est trop complexe, les liens de causalité trop nombreux, pour qu'il soit possible d'anticiper exactement ce qu'il va se passer, quand et comment. Par contre, ce que redoutent les régulateurs et superviseurs financiers, c'est l'atteinte d'un point de bascule environnemental, dont les conséquences ne seraient pas une crise financière de plus, mais potentiellement le chaos .
Le premier grand jalon de la réflexion sur les aspects économiques du changement climatique est le rapport « Stern », commandé en 2005 par le Gouvernement britannique . Son fil directeur est un acte de contrition : le libre marché est censé produire la meilleure allocation possible de ressources ; or, le changement climatique témoigne d'une sévère faillite de cette conviction initiale. Surtout, le rapport essaye d'estimer les conséquences économiques du business as usual, c'est-à-dire l'hypothèse où rien de sérieux n'est entrepris. Celui-ci estime une baisse irréversible de 20 % du PIB mondial – soit l'équivalent de la baisse enregistrée lors de la Seconde Guerre mondiale. D'autres études ont eu lieu depuis. Des recherches publiées par la Banque de France arrivent à des conclusions similaires, en notant toutefois que certains pays (Russie, Canada) s'en tireraient mieux que d'autres . Au niveau du Fonds monétaire international (FMI), les estimations sont très proches également .
Continuer de lire
– Plan. – En conséquence de ce qui précède, la science économique, non sans désaccords, plaide pour une évolution du droit afin que celui-ci prenne mieux en compte les « externalités » (Section I). Ce premier aspect peut para ître un peu abstrait. Il est néanmoins essentiel. De notre point de vue notarial, on observe une corrélation empirique : lorsque le prix de l'essence augmente durablement, la demande de résidence dans des lieux éloignés des grands centres urbains chute fortement. Cela est à tel point que, avec la hausse des taux d'intérêts, la hausse du coût de la construction et la hausse du prix de l'essence, l'auteur de ces lignes constate que plus aucun terrain proposé par les lotisseurs de son secteur ne trouve acquéreur.
Dit autrement : les contraintes économiques peuvent être plus efficaces que la réglementation d'urbanisme lorsqu'il s'agit de lutter contre l'étalement urbain et de maintenir la ville en ses murs. Or, la prise en compte des « externalités », telle qu'elle est demandée par une cohorte d'économistes, conduirait à une hausse du coût de l'énergie bien plus spectaculaire que celle constatée ces derniers temps, avec des conséquences en cascade sur l'aménagement du territoire et sur l'urbanisme. Il est donc important d'en traiter rapidement.
Ceci fait, il conviendra de redescendre à un niveau d'analyse plus proche du quotidien opérationnel du notaire, afin d'envisager ce point essentiel, même s'il relève plus, pour l'instant, de la prospective juridique que du droit positif : par quels mécanismes économico-juridiques inciter aux comportements vertueux face au défi environnemental qui s'annonce ? (Section II).
Le problème des externalités
– Le frein politique. – Taxe carbone et quotas d'émission ont le même objectif : augmenter le prix des énergies fossiles, pour désinciter à leur utilisation. Qui a voyagé aux états-Unis a pu observer les différences évidentes d'aménagement du territoire, en comparaison de la France. Nombre de ces différences se ramènent à une explication simple : l'essence y est traditionnellement beaucoup moins chère. Ce constat fonctionne dans les deux sens.
Valoriser les immeubles à intérêt environnemental
– Plan. – La question des externalités positives et de la manière dont le droit peut les encourager est trop vaste pour l'examiner en son entier. Mais si l'on réduit l'interrogation sur le plan notarial de l'immobilier, cela amène surtout à constater que tous les biens n'ont pas une égale valeur environnementale. Parfois, bien sûr, la valeur environnementale d'un bien se traduit dans sa valeur vénale.