Adapter son logement aux nouveaux enjeux environnementaux
Adapter son logement aux nouveaux enjeux environnementaux
Adapter son logementBrève histoire juridique du développement durable
1. Au niveau international. Il y a trente ans, la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC) du 9 mai 1992 fixait un objectif général de stabilisation « des concentrations de gaz à effet de serre dans l'atmosphère à un niveau qui empêche toute perturbation anthropique dangereuse du système climatique ».
2. Au niveau européen. La convention des Nations unies a été approuvée par le Conseil de l'Union européenne par décision no 94/69/CE du 15 décembre 1993. Par la suite, l'Union a adopté un premier « Paquet Énergie-Climat 2020 » avec la décision no 406/2009/CE du 23 avril 2009 dont l'objectif était de réduire les émissions de gaz à effet de serre de 20 % d'ici 2020 par rapport à 1990. Pour la France, une réduction des émissions de gaz à effet de serre de 14 % par rapport aux niveaux d'émission de 2005 a été fixée.
3. L'accord de Paris sur le climat. Ce traité international, signé par 195 pays le 12 décembre 2015 lors de la COP21, constitue un accord historique de lutte contre le dérèglement climatique et une réponse mondiale à la menace du changement climatique. Cet accord a été ratifié par la France le 5 octobre 2016. Il fixe l'objectif précis d'atteindre la neutralité carbone d'ici 2050 pour l'Europe et les États-Unis et 2060 pour la Chine, et de diminuer les émissions de gaz à effet de serre de 40 à 55 % d'ici 2030 par rapport au niveau de 1990. L'Union européenne a adhéré à l'accord de Paris et s'est engagée, pour ses États membres, à réduire d'au moins 40 % les émissions de gaz à effet de serre en 2030 par rapport à leur niveau de 1990. Elle a alors adopté un second « Paquet Énergie-Climat ». Dans ce cadre, le règlement (UE) no 2018/842 du 30 mai 2018 fixe la contribution minimale de chaque État membre en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre qui est, pour la France, de -37 % en 2030 par rapport à leur niveau de 2005.
4. Au niveau national. La France, en signant la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC) et l'accord de Paris, s'est engagée à réduire ses émissions de gaz à effet de serre. Cet objectif figure à l'article L. 100-4 du Code de l'énergie. Depuis, les dispositions législatives et réglementaires se multiplient.
- La loi no 215-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte prévoit de réduire la consommation énergétique globale de 40 % en 2030.
- Le plan climat lancé le 6 juillet 2017 par Nicolas Hulot, alors ministre de la Transition écologique et solidaire, vise à mobiliser le gouvernement en vue de l'éradication, en dix ans, des passoires thermiques.
- La loi no 2019-1147 du 8 novembre 2019 relative à l'énergie et au climat, dite « loi énergie-climat », prévoit trois phases de travaux pour lutter contre les passoires thermiques : une phase d'incitation dès 2021, une phase de sanctions à partir de 2023 et une phase d'obligations d'ici 2028.
- Adoptées en avril 2020, les Programmations pluriannuelles de l'énergie (PPE) fixent la politique énergétique du gouvernement pour les dix années à venir. Elles visent à renforcer l'efficacité énergétique des bâtiments par la construction de bâtiments neufs performants, la rénovation de l'existant, ou encore l'intégration des énergies renouvelables. Elles fixent l'objectif de la réduction de la consommation d'énergie finale des bâtiments de 15 % en 2023.
- Le décret no 2020-457 du 21 avril 2020 fixe la trajectoire climatique française.
5. Le pouvoir judiciaire. Les juges veillent au respect des engagements de l'État français comme en témoignent les récentes décisions du Conseil constitutionnel qui a reconnu un intérêt collectif à agir contre l'État en matière climatique. Le tribunal administratif de Paris a, quant à lui, jugé que la responsabilité de l'État pour son inaction climatique devait être engagée et le préjudice indemnisé.
6. La protection de l'environnement, nouvel objectif à valeur constitutionnelle. En 2020, le Conseil constitutionnel a consacré un nouvel objectif à valeur constitutionnelle : la protection de l'environnement, patrimoine commun des êtres humains, aux côtés de la protection de la santé, attendu depuis la promulgation de la Charte constitutionnelle de l'environnement le 1er mars 2005. Pour autant, certains ont pu regretter que le Conseil constitutionnel n'ait pas proclamé la priorité climatique comme d'autres cours constitutionnelles l'ont fait. La Cour constitutionnelle allemande de Karlsruhe, notamment, dans sa décision du 24 mars 2021, a invalidé de nombreuses dispositions de la loi fédérale allemande relative au climat du 12 décembre 2019 au nom du devoir constitutionnel de protéger la vie et la santé humaines contre les dangers causés par le changement climatique, même envers les générations futures.
7. Une expérience démocratique inédite en France. Sur décision du président de la République, la Convention citoyenne pour le climat (CCC) a réuni cent cinquante personnes tirées au sort, représentant la diversité de la société française. Leur mission était la suivante : proposer des mesures concrètes, dans un esprit de justice sociale, pour lutter contre le dérèglement climatique et répondre à l'objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre assigné à la France. Le résultat de cette convention a été rendu public le 21 juin 2020. 149 propositions ont été formulées à l'attention du législateur. Les travaux de la convention citoyenne étaient axés autour des cinq grandes thématiques suivantes : consommer, produire et travailler, se déplacer, se loger et, enfin, se nourrir. Concernant le logement, la convention a fait le constat suivant : le parc immobilier, résidentiel et tertiaire, représente à lui seul 16 % des émissions de gaz à effet de serre en France. Il est nécessaire de diviser par deux ces émissions pour atteindre l'objectif de -40 %, et par dix pour atteindre l'objectif de neutralité carbone en 2050. Répondre à ces objectifs nécessite de massifier la réhabilitation thermique des bâtiments et de passer d'une rénovation par petits gestes à une rénovation globale. Aussi, la Convention citoyenne pour le climat a-t-elle proposé de contraindre les propriétaires, occupants et bailleurs, à rénover de manière globale.
8. Une loi à parfaire ? Les travaux de la Convention citoyenne pour le climat ont donné naissance à la loi du 22 août 2021, dite « loi Climat et Résilience »
. Hélas, le texte, pourtant qualifié de « complet et ambitieux » par la ministre de l'Écologie, ne permet pas d'atteindre les objectifs que la France s'est fixés en matière de réduction des gaz à effet de serre. Or ces objectifs sont déjà obsolètes au regard des nouveaux engagements fixés par le législateur européen, les précédents ayant été jugés insuffisants pour atteindre la neutralité carbone à l'horizon 2050. Le règlement (UE) no 2021/1119 du Parlement européen et du Conseil a en effet assigné pour objectif intermédiaire de réduire de 55 % les émissions de gaz à effet de serre d'ici 2030 par rapport au niveau de 1990. Et ce règlement est d'application immédiate. D'aucuns qualifient cette loi « d'occasion manquée ». Le législateur est resté sourd aux différents avis donnés sur le projet de loi, notamment par le Conseil d'État. Le Conseil économique, social et environnemental (CESE) a souligné que les mesures étaient soit limitées, soit différées, soit soumises à des conditions qui faisaient obstacle à leur mise en œuvre. L'avis du Haut Conseil pour le climat (HCC) n'a pas non plus été suivi alors qu'il indiquait, en juillet 2020, que le marché de la rénovation performante était quasi inexistant avec un taux de rénovation globale extrêmement bas : seules 0,2 % des rénovations sur le résidentiel et le tertiaire constituaient des rénovations globales satisfaisant aux critères BBC (Bâtiment Basse Consommation) sur la période 2012-2016. Pour autant, le recours porté devant le Conseil constitutionnel n'a pas eu l'effet escompté. C'est donc à la Cour européenne des droits de l'homme que reviendra la tâche de décider si la France, en ne prenant pas les mesures nécessaires pour atteindre son objectif en matière de lutte contre le dérèglement climatique, a failli à son devoir de vigilance environnementale.
– La diversité des mesures de la loi Climat et Résilience. – Dernière-née d'une déjà longue succession de textes en matière environnementale, la loi Climat et Résilience s'inscrit dans le prolongement des lois Grenelle 1 et 2 et ses dispositions, très diverses, reprennent les thématiques de la Convention citoyenne pour le climat. Le texte vise à renforcer l'information des consommateurs relative à la qualité environnementale des produits, notamment en termes d'émission de gaz à effet de serre, afin d'orienter leur comportement d'achat, et à interdire la publicité en faveur des énergies fossiles. D'autres mesures ont pour objectif de soutenir une alimentation saine et durable pour tous avec, notamment, le développement de l'agroécologie. En matière de transports, la loi interdit la commercialisation des véhicules polluants à partir de 2030. Elle intervient également dans le cadre de la lutte contre la déforestation avec la prévention des risques de déforestation importée. D'autres dispositions visent à lutter contre l'artificialisation des sols dont l'objectif est d'atteindre, d'ici 2050, l'absence d'artificialisation nette des sols. Enfin, plusieurs mesures visent à renforcer la protection judiciaire de l'environnement. Un délit de mise en danger de l'environnement dans les situations de non-respect des prescriptions des polices spéciales de l'environnement, ainsi qu'un délit général d'atteinte aux milieux physiques et un délit de mise en danger de l'environnement sont instaurés, qualifiés d'« écocides » lorsqu'ils ont été accomplis de manière intentionnelle. Pour autant, l'écocide comme infraction pour lutter contre la criminalité environnementale des entreprises multinationales n'est pas consacré.
Les articles 148 à 180 de la loi Climat et Résilience sont consacrés à la rénovation énergétique. Ces textes ont pour objectif d'inciter les propriétaires de logement à les rénover de façon globale afin d'éradiquer les « passoires énergétiques ». À cet effet, ils instaurent un véritable calendrier de mise en œuvre de l'obligation de rénovation énergétique (Chapitre I). Les textes successifs ont également créé des outils permettant la transition énergétique dans une optique de développement durable (Chapitre II).
Les obligations liées à la performance énergétique
– Au pays des passoires énergétiques. – La loi Climat et Résilience classe les bâtiments en sept catégories en fonction de leur consommation énergétique :
Les outils de la transition énergétique
– Les enjeux de la performance énergétique. – Lequel d'entre nous n'a pas, dans les derniers mois, protesté contre le renforcement des dispositions applicables à la performance énergétique des logements ? Encore une complication, un diagnostic dont on ne sait s'il est ou non encore valable, et bientôt un audit énergétique dont l'entrée en vigueur brutale a surpris tous les professionnels… avant d'être reportée à deux reprises !