La société, bien plus que le véhicule d'un projet professionnel ou patrimonial

La société, bien plus que le véhicule d'un projet professionnel ou patrimonial

De la consolidation à la pérennisation et à la diversification : la transformation de la société
– Le constat. – Il est aujourd'hui un constat qui peut être partagé par tout le monde : la place de l'entreprise au sein de la société se modifie en profondeur. Il n'y a pas un jour qui s'écoule sans que l'on évoque les nouveaux enjeux et les nouvelles attentes à son sujet, qu'il s'agisse des enjeux sociaux, sociétaux ou environnementaux, des nouvelles règles de gouvernance, ou bien encore de la place des « parties prenantes ». Ces nouveaux enjeux constituent maintenant une thématique à part entière pour le chef d'entreprise qui, demain, pour ne pas dire déjà aujourd'hui, ne pourra plus lever de financement s'il n'a pas mis en place une politique RSE, ne pourra plus candidater à des appels d'offres s'il n'a pas complètement sourcé sa chaîne d'approvisionnement, ne pourra plus attirer de collaborateurs s'il n'a pas défini la raison d'être de son entreprise. La société est en quête de sens dans toutes ses dimensions et l'entreprise, lieu majeur pour le développement d'une société harmonieuse, ne peut plus s'en affranchir.
– Les origines. – On pourrait penser que ce mouvement est relativement récent, mais il puise ses origines chez un économiste américain, Howard R. Bowen, qui publie en 1953 un ouvrage intitulé Social responsabilities of the businessman fondant le concept de responsabilité sociale de l'entreprise. Cet ouvrage pose les bases d'un capitalisme éthique au regard des valeurs du protestantisme.
En France, ce mouvement arrive à la fin du XX e siècle et connaît sa première consécration législative au travers de la loi no 2001-420 du 15 mai 2001, dite « loi NRE », sous la forme d'une obligation de reporting pour les grandes entreprises. Par suite de réformes successives, ces obligations seront codifiées à l'article L. 225-102-1 du Code de commerce pour donner naissance, au sein du rapport de gestion, à un paragraphe dédié aux performances extra-financières.
Plus tard, le rapport de Jean-Dominique Senard et Nicole Notat, remis le 9 mars 2018 et intitulé « Entreprise et intérêt général », inspirera de nombreuses dispositions contenues dans la loi no 2019-486 du 22 mai 2019, dite « loi Pacte », et notamment la modification des articles 1833, alinéa 2 et 1835, alinéa 2 du Code civil, mais aussi la création de la société à mission par l'article L. 210-10 du Code de commerce.
– Plan. – Ce titre, traitant des nouvelles dimensions de l'entreprise, comprendra donc quatre sous-titres consacrés respectivement à la raison d'être (Sous-titre I), à la société à mission (Sous-titre II), au fonds de pérennité (Sous-titre III) et enfin aux fondations et fonds de dotation (Sous-titre IV).
La raison d'être
– Son fondement légal. – L'article 1835 du Code civil, modifié par la loi Pacte, dispose désormais que les statuts « peuvent préciser une raison d'être, constituée des principes dont la société se dote et pour le respect desquels elle entend affecter des moyens dans la réalisation de son activité ».
La société à mission
– Fondement légal. – Autre dispositif destiné à accompagner la mutation de l'entreprise : la société à mission. L'article L. 210-10 du Code de commerce prévoit expressément qu'une société peut faire publiquement état de la qualité de société à mission si elle remplit un certain nombre de conditions.
Le fonds de pérennité
Après la raison d'être et la société à mission, et toujours dans l'idée qu'un projet d'entreprise doit pouvoir s'inscrire dans le temps long, la loi Pacte a créé un nouvel outil destiné à stabiliser le capital social des entreprises. Il s'agit du fonds de pérennité, structure juridique de droit privé ad hoc.
Les fondations reconnues d'utilité publique et les fonds de dotation
– Le contexte. – S'inscrivant dans la mouvance actuelle de « donner du sens à son action » et de s'inscrire dans la durée au-delà de soi, le concept de « fondation actionnaire » va permettre à la fois de stabiliser sur le très long terme le capitalsocial d'une entreprise et d'affecter la richesse générée par celle-ci à des causes philanthropiques.