Parmi les nombreuses actions entreprises, celle que le président Lambert a initiée en 1998 par la création en Chine d'un notariat de type latin a été décisive. Menée à partir de la signature d'une convention de coopération avec le Bureau de la Justice de Shanghai, elle débouchera sur la création, en 2001, d'un centre d'échanges notariaux et juridiques dans cette même ville, première réalisation concrète née d'un partenariat signé entre le Bureau de Justice de Shanghai, la Caisse des dépôts, l'Université Paris-II Panthéon-Assas, la Cour de cassation et le Conseil supérieur du notariat.
Ce fut ensuite la promulgation en 2002, à titre expérimental, d'une loi notariale directement inspirée de la loi française, puis celle en 2005 de la loi notariale, définitivement entrée en vigueur le 1er janvier 2006.
Le combat pour créer en Chine un notariat de type latin fut rude. Les juristes américains étaient très présents en Chine et souhaitaient imposer leur système juridique de common law. Deux éléments ont joué en faveur du modèle continental. D'une part, la volonté des pouvoirs publics chinois de créer un système de droit assurant la sécurité juridique pour attirer les investisseurs. D'autre part, le poids de la culture juridique chinoise, fondée sur la tradition confucéenne de rechercher à tout prix un accord pour éviter le procès, considéré comme un échec. Dans cette tradition, il est primordial d'être capable de s'entendre avec son prochain. Or le système juridique américain trouve précisément sa source dans la jurisprudence, c'est-à-dire à partir du procès. Ainsi a été créé le notaire, nommé par le ministre de la Justice, chargé d'authentifier les actes devant ou pouvant revêtir la forme notariée, tenu d'obéir à une déontologie spécifique et d'appliquer un tarif fixé par les pouvoirs publics.
La création d'un notariat de type latin en Chine a eu des conséquences profondes sur l'échiquier mondial des systèmes juridiques, dans le cadre de la lutte d'influence que se livrent Droit continental et common law, en faisant pencher la balance en faveur du premier. Ne dit-on pas d'ailleurs que ce choix de la Chine fut l'un des éléments déclencheurs des rapports Doing Business souvent suspectés d'avoir été conçus pour dénigrer l'efficacité économique des pays de droit continental ? Car installer un notariat de type latin en Chine, c'était ancrer ce pays qui représente le quart de l'humanité dans le camp du droit continental. Ce fut aussi un signal fort pour bien des pays de la zone asiatique pour comprendre la sécurité juridique qu'offre le droit continental (le notaire qui a pour fonction de l'appliquer). Il permet d'attirer les investisseurs et de favoriser le développement économique, à l'exemple de celui, prodigieux, qu'a connu la Chine dans les années 2005-2015.
Ainsi, à la suite de la Chine, le Vietnam, la Corée et la Mongolie notamment ont à leur tour créé ou recréé un notariat de type latin. Ce fut enfin l'occasion, dans le cadre de cette coopération notariale franco-chinoise, de participer à l'élaboration de la loi de 2011 sur les droits réels, loi créant les notions de servitude, de concession ou de copropriété, inconnues jusqu'alors en Chine, et même d'être auditionné par le Conseil des affaires d'État (l'équivalent du Secrétariat général du Gouvernement en France) sur le projet d'introduire dans la Constitution chinoise la notion de droit de propriété, projet désormais concrétisé dans son article 14, alinéa 2, qui dispose que « le droit de propriété doit être protégé s'il est conforme à la loi ».