Pour bénéficier de l'application d'une convention, le contribuable doit être résident au sens fiscal de l'un des États, ou résident des deux États à la fois. À défaut, la convention ne s'applique pas. Ce point paraît évident, on doit systématiquement commencer par cette vérification car il arrive que ce prérequis ne soit pas rempli. Posséder la nationalité de l'un des deux pays sera sans intérêt. L'article de la convention dénommé «Résidence»
1534365987705indique généralement qu'il faudra vérifier que le contribuable est un résident au sens du droit interne, c'est-à-dire au sens de l'article 4 B du Code général des impôts (V. infra, nos et s.). Vérifier que le contribuable est un résident français au sens du droit interne français semble relativement aisé. En cas de réponse négative, il faudra vérifier s'il est résident du pays cocontractant au sens du droit interne de cet autre État. Cette mission sera plus ténue et nécessite une excellente connaissance du droit interne de cet autre pays, ou à défaut il faudra consulter un fiscaliste de cet autre État. On conseille vivement d'obtenir un avis écrit d'un consultant étranger.
En cas de conflit de domicile dû à une double résidence, et si en application du droit interne de chaque État, la personne concernée peut être considérée comme résidente de chacun d'eux, alors la convention, en application des critères conventionnels, définira l'État de résidence.
Dans le cas desconventions qui n'exigent pas le passage par le droit interne et l'article 4 B du Code général des impôts
1534366152769(cas de la convention franco-belge ou de nombreuses conventions conclues avec les pays d'Afrique), il n'y a pas lieu d'en tirer de conséquences particulières du côté français. Ces conventions ne prennent pas appui sur le droit interne et indiquent des critères selon lesquels une personne doit être considérée comme résidente d'un État. Dans ce cas, peut-on réellement passer directement aux critères conventionnels sans avoir besoin de s'interroger sur le droit interne et les critères de l'article 4 B du Code général des impôts ?
Pour le Conseil d'État, il faut toujours en premier lieu se reporter au droit interne et n'appliquer les critères conventionnels que dans un second temps
1534366243935. Cette position est liée à l'idée que les conventions n'ont qu'un rôle «subsidiaire» et qu'il y a lieu de ne les faire jouer que s'il existe un problème de double imposition.
À la différence,la Cour de cassationconsidère qu'il n'y a pas lieu d'examiner le droit interne et applique directement les critères de la convention fiscale (elle n'applique pas le principe de subsidiarité).
En pratique, la divergence de position entre le Conseil d'État et la Cour de cassation n'est pas gênante. En effet, le Conseil d'État fait prévaloir in fine la convention en cas de contrariété par rapport au droit interne.
Lorsque le contribuable est considéré en droit interne résidant des deux États, l'application des critères conventionnels permet de résoudre le conflit de domicile et ainsi de connaître quel sera l'État de la résidence (V. infra, nos
et s.).
– Le principe de subsidiarité (priorité du droit interne par rapport au droit conventionnel). – Il a été posé par l'arrêtSchneider Electric
1534366431790. Ce dernier n'est pas sans effet en matière dequalificationdes revenus et de leurdéfinition. En effet, le Conseil d'État considère que les conventions ne donnent que des définitions incomplètes des revenus ou plutôt des énumérations et ainsi il s'autorise au passage au droit interne.
– Exemple du casAznavour
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. –Dans ce cas, l'artiste Charles Aznavour était résident de Suisse et avait réalisé des concerts en France. Il avait été rémunéré par des versements à une société britannique qu'il détenait. Il souhaitait ainsi échapper à l'impôt en France. Le Conseil d'État requalifie les rémunérations versées à la société britannique comme étant des revenus retirés par l'artiste en vertu du droit interne et plus spécialement de la présomption posée par l'article 155 A du Code général des impôts (le revenu versé à une personne interposée est un revenu retiré par l'artiste). Cette qualification émanant du droit interne français doit être retenue pour l'application de la convention franco-suisse. Par conséquent, la présomption posée par le droit interne français donne à la France le droit d'imposer dans le cadre de la convention franco-suisse et la convention franco-britannique n'est alors plus applicable. Ce principe de priorité retenu par le Conseil d'État est peu compatible avec celui de supériorité des conventions fiscales par rapport au droit interne. Certains auteurs considèrent que le recours aux qualifications de droit interne devrait permettre de déterminer comment la France doit imposer un revenu qu'elle a le droit d'imposer en vertu de la convention, mais non de dire si elle a le droit d'imposer au sens de la convention fiscale
1534366688691.
Attention
Ne sont pas considérées comme des résidents les personnes qui ne sont assujetties à l'impôt dans cet État que pour les revenus de sources situées dans cet État ou pour la fortune qui y est située.
Exemple :une personne qui paye des impôts en France au titre de revenus fonciers pour un appartement loué à Paris et qui paye des impôts en Allemagne au titre de revenus fonciers pour un appartement situé à Berlin, mais qui est résident fiscal en Autriche. Il ne sera ni résident fiscal français ni résident fiscal allemand. Par conséquent, il ne peut demander à bénéficier de la convention franco-allemande pour ses revenus fonciers encaissés en France. Par contre, il pourra bénéficier de la convention fiscale franco-autrichienne pour ses revenus fonciers français.