La détermination de la loi applicable aux effets patrimoniaux des partenariats enregistrés

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La détermination de la loi applicable aux effets patrimoniaux des partenariats enregistrés

Le considérant 48 du préambule du règlement n° 2016/1104 du 24 juin 2016 crée une hiérarchie entre le rattachement subjectif et le rattachement objectif dans la lignée des précédentes règles de droit international, faisant primer l'autonomie de la volonté. Ainsi les partenaires peuvent choisir – dans un cadre limité – la loi applicable aux effets patrimoniaux de leur partenariat enregistré.
C'est à défaut de choix par les partenaires que les règles de rattachement objectif s'appliqueront. L'analyse des rattachements suivra donc cette hiérarchie.
Ce considérant justifie cette hiérarchie par le but de « concilier la prévisibilité et l'impératif de sécurité juridique avec la nécessité de prendre en compte la vie menée par le couple ».
Les partenaires pourront donc avoir choisi la loi applicable aux effets patrimoniaux de leur partenariat enregistré : il s'agit d'un rattachement subjectif (Sous-section I). À défaut de choix, il y aura lieu de déterminer la loi applicable : il s'agit là d'un rattachement objectif (ou non choisi) (Sous-section II). Dans ces deux hypothèses, il faudra déterminer la portée de la loi applicable (Sous-section III) et préciser que le renvoi est exclu (Sous-section IV).

Le rattachement subjectif (loi choisie)

Le règlement « EPPE » du 24 juin 2016 autorise aux partenaires, à l'instar des autres règlements, un certain choix de loi en ce qui concerne les effets patrimoniaux de leur partenariat.

Option ouverte aux partenaires enregistrés

Les partenaires pourront désormais choisir la loi applicable à leur partenariat enregistré. Cependant, les partenaires ne bénéficient pas d'une autonomie totale.
En effet, l'article 22 du règlement n° 2016/1104 du 24 juin 2016 donne la possibilité aux partenaires ou futurs partenaires de désigner l'une des trois lois suivantes :
« a) la loi de l'État dans lequel au moins l'un des deux partenaires ou futurs partenaires à sa résidence habituelle au moment où la convention est conclue ;
b) la loi d'un État dont l'un des partenaires ou futurs partenaires à la nationalité au moment où la convention est conclue ; ou
c) la loi de l'État selon le droit duquel le partenariat enregistré a été créé ».
Concernant la désignation de la loi nationale, des difficultés peuvent se présenter en pratique, car le règlement ne donne pas la solution dans le cas où l'un des partenaires a plusieurs nationalités.
En effet, à la différence du règlement (UE) n° 650/2012 sur les successions internationales 1543072534080, l'hypothèse de la plurinationalité n'est pas évoquée, ce qui pose un problème d'interprétation.
Certains auteurs considèrent que lorsque les partenaires ont plusieurs nationalités, la loi de chacune d'elles peut être choisie 1543071876988. Ainsi Amélie Panet indique : « Même si le règlement est moins clair que l'article 22 du règlement succession sur la question, il évoque bien dans son considérant 49 "le plein respect des principes généraux du droit de l'Union". Ainsi, les solutions Garcia Avello (CJCE, 2 oct. 2003, aff. C-148/02) et Hadadi (CJCE, 16 juill. 2009, aff. C-168/08) semblent avoir vocation à jouer ici : plus les partenaires seront dotés de nationalités différentes, plus ils auront une palette de choix étendue » 1528639860367.
D'autres auteurs 1543073942632estiment qu'il faut consulter le préambule du règlement pour répondre à cette question. Le considérant 49 expose en effet que « (…) la question de savoir comment considérer une personne possédant plusieurs nationalités constitue une question préalable qui n'entre pas dans [le] champ d'application [du règlement] et devrait relever du droit national (…) ». Ce même considérant indique que : « Cette question ne devrait pas influencer la validité du choix de la loi applicable effectué conformément au présent règlement ».
Ainsi, on devrait pouvoir distinguer trois cas en droit français :
  • si le partenaire a la nationalité de deux États membres de l'Union européenne : il devrait pouvoir choisir l'une ou l'autre de ses nationalités 1543077184554 ;
  • si le partenaire a la nationalité d'un État membre de l'Union européenne et d'un État tiers : on devrait faire prévaloir la nationalité européenne 1543077910814 ;
  • si le partenaire a la nationalité de deux États tiers : il devrait être fait application de la nationalité la plus effective.
Si les partenaires choisissent une loi étrangère, il y aura lieu de bien vérifier au préalable que celle-ci confère des effets patrimoniaux au partenariat. Le notaire devra donc se pencher sur la loi matérielle de l'État retenu 1543079423222.

La forme de la désignation de la loi applicable

L'article 23 du règlement n° 2016/1104 du 24 juin 2016 portant sur la « validité quant à la forme de la convention sur le choix de la loi applicable » impose des règles formelles minimales : un écrit daté et signé par les deux partenaires.
Toute transmission par voie électronique qui permet de consigner durablement la convention est considérée comme revêtant une forme écrite.
Cet article impose en outre une exigence supplémentaire: il faut distinguer selon la résidence habituelle des partenaires dans un ou plusieurs États membres participants au moment de la conclusion de leur convention ainsi qu'il suit :
« 2. Si la loi de l'État membre dans lequel les deux partenaires ont leur résidence habituelle au moment de la conclusion de la convention prévoit des règles formelles supplémentaires pour les conventions partenariales, ces règles s'appliquent.
 3. Si, au moment de la conclusion de la convention, les partenaires ont leur résidence habituelle dans des États membres différents et si les lois de ces États prévoient des règles formelles différentes pour les conventions partenariales, la convention est valable quant à la forme si elle satisfait aux conditions fixées par l'une de ces lois.
 4. Si, au moment de la conclusion de la convention, seul l'un des partenaires a sa résidence habituelle dans un État membre et si cet État prévoit des règles formelles supplémentaires pour les conventions partenariales, ces règles s'appliquent ».
Ainsi, lorsqu'un pacs est enregistré en France entre deux partenaires résidant en Belgique au moment de la convention, la forme notariée sera requise pour de l'établissement de celle-ci 1533118422720.
L'article 11 de la convention énonce que : « La désignation de la loi applicable doit faire l'objet d'une stipulation expresse ou résulter indubitablement des dispositions d'un contrat de mariage ». Nul besoin d'homologation, d'établissement d'un état liquidatif, d'accord des enfants donc, et aucune exigence de délai n'était posée. Il s'agissait d'une opération peu coûteuse, en comparaison avec le changement de régime matrimonial qui parfois nécessitait l'homologation judiciaire.
Cette désignation était possible à tout moment, qu'il y ait eu ou non établissement d'un contrat de mariage et que les époux aient été mariés avant ou après le 1er septembre 1992.
Le notaire pouvait profiter d'une opération d'achat, de vente, de donation... pour conseiller l'établissement de cet acte à ses clients.
Toutefois, il était fortement conseillé d'établir le choix de loi dans un acte à part dans les formes d'un contrat de mariage.
L'article 23 du règlement du 24 juin 2016 reprend les mêmes termes que le règlement sur les partenariats enregistrés et exige que la convention désignant la loi applicable soit « formulée par écrit, datée et signée par les deux époux » et admet même « toute transmission par voie électronique qui permet de consigner durablement la convention ».
Cet article ajoute en son paragraphe 2 les règles formelles supplémentaires énoncées à l'article 23 du règlement n° 2016/1104 (« EPPE ») qu'il n'est donc pas pertinent de reprendre ici.
Il s'agit donc d'une convention matrimoniale, qui doit à la fois obéir aux exigences formelles imposées par la loi désignée et à celles imposées par la loi de l'État membre dans lequel se situe la résidence habituelle des époux.
Ce formalisme reprend les exigences rappelées dans l'arrêt rendu par la première chambre civile de la Cour de cassation le 13 décembre 2017 1528968013482.
La désignation de la loi applicable peut intervenir avant, pendant ou après la célébration du mariage des époux 1528968248797.
En effet, dans certains pays les époux optent au moment de la célébration de leur mariage pour un régime matrimonial et donc pour une loi applicable, comme par exemple en Italie, à Monaco, et dans certains pays d'Afrique.
À cet égard, il est rappelé que cette option devra être consignée dans un acte signé par les deux époux pour être reconnu valable en la forme au regard du règlement.

Le moment du choix

La loi applicable peut être désignée avant, pendant, ou après l'enregistrement du partenariat 1528640328324. Mais le règlement ne précise pas si la désignation ou le changement de loi applicable doit obligatoirement résulter des dispositions de la convention partenariale ou de la modification de cette convention, ou si même elle doit être expresse.
Par exemple, on ne sait pas si le fait qu'un partenaire déclare dans un acte de vente que les effets patrimoniaux de son partenariat enregistré sont soumis à une certaine loi est qualifié de désignation de loi applicable au sens du règlement. Par prudence, il convient de retenir la même règle qu'en matière de régimes matrimoniaux et de privilégier un acte établi spécifiquement à cet effet.
L'article 24, § 2 1533119228055du règlement n° 2016/1104 du 24 juin 2016 permet d'écarter la loi désignée si l'un des partenaires conteste son consentement à ce choix : il peut demander d'appliquer la loi de sa résidence habituelle « s'il ressort des circonstances qu'il ne serait pas raisonnable de déterminer l'effet du comportement de ce partenaire conformément » à la loi choisie.
Cependant, en pratique, le notaire instrumentaire d'une convention partenariale veillera à insérer une clause de désignation expresse de la loi applicable. À défaut d'acte notarié, si les partenaires souhaitent être liés par un pacs sous signature privée en France, ils pourront remplir le formulaire Cerfa n° 15726*02 au sein duquel ils doivent indiquer quel régime ils choisissent et sur lequel est fait mention expresse des articles 515-1 à 515-7-1 du Code civil, sauf ce qui a été dit précédemment 1533119329751.
L'article 3 du règlement Rome I prévoit dans son paragraphe 2 que : « Les parties peuvent convenir, à tout moment, de faire régir le contrat par une loi autre que celle qui le régissait auparavant soit en vertu d'un choix antérieur selon le présent article, soit en vertu d'autres dispositions du présent Règlement. Toute modification quant à la détermination de la loi applicable, intervenue postérieurement à la conclusion du contrat, n'affecte pas la validité formelle du contrat au sens de l'article 11 et ne porte pas atteinte aux droits des tiers ».
En conséquence, si le choix de la loi applicable se fait généralement dans le contrat, il peut aussi intervenir après la conclusion du contrat. Le texte permet aussi, alors même que les parties avaient au moment de la conclusion du contrat choisi la loi applicable, de modifier ultérieurement ce choix initial et de désigner une autre loi.
Quant à la forme de ce choix ultérieur, qu'il soit tardif ou modificatif, il est généralement admis qu'il obéit aux mêmes règles que le choix concomitant à la conclusion du contrat de base : il doit être exprès ou résulter de façon certaine des dispositions du contrat ou des circonstances de la cause 1545991446733.
S'il intervient en cours d'instance, ce choix ultérieur peut être compris comme la mise en œuvre de la règle de conflit de lois que constitue la loi d'autonomie ou se rattacher à un accord procédural 1545991538222. Dans le premier cas, ce choix ne sera pas limité au litige en cours, tandis qu'il le sera dans le second cas. S'il est compris comme un accord procédural, ce choix de loi sera en outre régi par la lex fori.
Le choix ultérieur de la loi applicable est assorti de deux limites : d'une part, si le contrat était valable quant à la forme selon l'une des lois désignées par l'article 11, le choix tardif d'une autre loi ne peut affecter sa validité formelle ; d'autre part, la modification de la loi applicable « ne porte pas atteinte aux droits des tiers ». Ainsi, le tiers qui aura cautionné l'une des parties au contrat ne verra pas son obligation aggravée par le changement de loi applicable au contrat même si la loi nouvellement applicable augmente l'obligation du débiteur 1545991611170.
En revanche, le règlement ne précise pas quelle est la portée de la loi ultérieurement choisie par les parties, mais l'on s'accorde à considérer qu'elle a en principe un effet rétroactif, sous réserve que les parties décident du contraire et qu'elles pratiquent ainsi un « dépeçage temporel » 1545991639071.

Les effets d'un changement de loi applicable

Si les partenaires désignent une loi applicable ou modifient la loi applicable après l'enregistrement de leur partenariat, le principe est celui de la non-rétroactivité de la désignation de la loi applicable, énoncé à l'article 22, § 2 du règlement n° 2016/1104 du 24 juin 2016.
Cependant, les partenaires enregistrés peuvent en convenir autrement et stipuler dans la déclaration de loi applicable que cette désignation aura un effet rétroactif à compter de l'enregistrement de leur partenariat 1528640922014, sans pour autant que cette rétroactivité puisse porter atteinte aux droits des tiers 1528640930313.
Le règlement ne précise pas si l'acte de désignation de la loi applicable doit comporter ou non une liquidation du régime patrimonial antérieur en l'absence de rétroactivité. Quand cela est nécessaire, il est conseillé de procéder à cette liquidation tant que cette question reste en suspens.
Pour éviter cette liquidation, et le cas échéant un partage des biens qui pourrait entraîner une taxation, le notaire pourra éventuellement conseiller aux partenaires de stipuler dans la désignation que cette dernière a un effet rétroactif.

L'opposabilité aux tiers

Selon l'article 28, 2 du règlement n° 2016/1104 du 24 juin 2016, le rattachement subjectif n'est opposable aux tiers dans le cadre d'un litige que s'ils ont eu connaissance ou auraient dû avoir connaissance de cette loi. Cet article vise l'ignorance excusable des tiers, et énonce les situations dans lesquelles le tiers est « réputé » avoir connaissance de la loi applicable aux effets patrimoniaux.
Le paragraphe 3 de cet article distingue l'objet du différend afin de déterminer la loi applicable à l'égard des tiers si la loi désignée n'est pas applicable :
« 3. Lorsque la loi applicable aux effets patrimoniaux d'un partenariat enregistré ne peut être opposée par un partenaire à un tiers en vertu du paragraphe 1, les effets patrimoniaux du partenariat enregistré à l'égard du tiers sont régis :
a) par la loi de l'État dont la loi est applicable à la convention conclue entre l'un des partenaires et le tiers ; ou
b) dans des dossiers portant sur des biens immeubles ou des biens ou des droits enregistrés, par la loi de l'État dans lequel le bien immeuble est situé ou dans lequel les biens ou les droits sont enregistrés ».
Le rôle du notaire prend donc ici toute son importance : il lui revient d'informer le tiers contractant de la désignation de la loi applicable aux effets patrimoniaux des partenaires avec qui il contracte, et d'informer les partenaires des conditions d'opposabilité aux tiers de la désignation de loi.
Ainsi, lors d'un acte de vente immobilière, le notaire devra mentionner la loi applicable aux effets patrimoniaux du partenariat enregistré afin que le cocontractant ne puisse pas invoquer la méconnaissance de cette loi.

Le rattachement objectif (en l'absence de choix de loi)

Comment procéder si les parties n'ont pas désigné de loi applicable aux effets patrimoniaux de leur partenariat enregistré ?
Cette situation peut se présenter dans certains pays – tels que la Belgique ou le Luxembourg – où la convention partenariale portant sur les effets n'est pas obligatoire.
Par ailleurs, les conventions partenariales qui ne sont pas passées par acte authentique sont soumises au risque de perte par les partenaires et, dans cette hypothèse, il sera difficile de prouver que ceux-ci avaient désigné une loi applicable.

Principe : application de la loi de l'État de l'autorité de l'enregistrement

En vertu de l'article 26 du règlement n° 2016/1104 du 24 juin 2016, la loi applicable aux effets patrimoniaux aux partenariats enregistrés est la loi « de l'État selon la loi duquel le partenariat enregistré a été créé », c'est-à-dire la loi de l'autorité de l'État qui enregistre le partenariat.
Il s'agit donc de prendre en compte l'autorité locale ou bien l'autorité diplomatique. Cette règle régissait déjà la plupart des États, dont la France en son article 515-7-1 du Code civil.
Ce critère de rattachement permet d'éviter qu'une loi qui ne donne aucun effet aux partenariats enregistrés ou les prohibe soit applicable.
Le notaire devra donc être vigilant lorsque ses clients lui présenteront un partenariat enregistré à l'étranger : s'il a été enregistré par le consulat français dans un pays étranger, c'est la loi française qui s'appliquera, le partenariat ayant été créé en application de cette loi.

Exception : application de la loi de la dernière résidence habituelle commune

Dans certains cas, ce rattachement de principe pourra être remplacé par un rattachement exceptionnel. En effet, l'article 26, 2 du règlement n° 2016/1104 du 24 juin 2016 dispose :
« 2. À titre exceptionnel et à la demande de l'un des partenaires, l'autorité judiciaire compétente pour statuer sur des questions relatives aux effets patrimoniaux d'un partenariat enregistré peut décider que la loi d'un État autre que l'État dont la loi est applicable en vertu du paragraphe 1 régit les effets patrimoniaux du partenariat enregistré si la loi de cet autre État attache des effets patrimoniaux à l'institution du partenariat enregistré et si le partenaire qui a fait la demande démontre que :
a) les partenaires avaient leur dernière résidence habituelle commune dans cet autre État pendant une période d'une durée significative ; et
b) les deux partenaires s'étaient fondés sur la loi de cet autre État pour organiser ou planifier leurs rapports patrimoniaux. La loi de cet autre État s'applique à partir de la date de création du partenariat enregistré, à moins que l'un des partenaires ne s'y oppose. Dans ce dernier cas, la loi de cet autre État produit ses effets à partir de la date de l'établissement de leur dernière résidence habituelle commune dans cet autre État.
L'application de la loi de l'autre État ne porte pas atteinte aux droits des tiers résultant de la loi applicable en vertu du paragraphe 1.
Le présent paragraphe ne s'applique pas lorsque les partenaires ont passé une convention partenariale avant la date de l'établissement de leur dernière résidence habituelle commune dans cet autre État ».
Si le juge saisi fait droit au demandeur, c'est la loi de la dernière résidence habituelle des partenaires qui s'applique. Ainsi, tant le juge que le notaire français peuvent être amenés à appliquer la loi d'un autre État régissant les effets patrimoniaux d'un partenariat enregistré. La décision judiciaire étrangère rendue en ce sens dans un autre État membre sera reconnue en France sans procédure particulière 1531646157101.
Cette substitution rétroagit à la date de « création du partenariat enregistré ». Cependant, si l'un des partenaires s'y oppose, la loi de la dernière résidence habituelle commune ne s'appliquera qu'à compter de la date de l'établissement de cette dernière résidence.
Le notaire devra donc informer les partenaires de cette disposition et leur conseiller de conclure une convention pour déterminer la loi applicable afin d'éviter la substitution. Toutefois, selon l'article 26 du règlement, il faut que cette convention soit conclue « avant la date d'établissement de leur dernière résidence habituelle commune ».

La portée de la loi applicable

Principe : unicité de la loi applicable

En vertu de l'article 27 du règlement n° 2016/1104 du 24 juin 2016, la loi applicable porte sur l'ensemble des biens des partenaires. Ce principe de permanence du rattachement était déjà consacré par l'article 515-7-1 du Code civil.

Limite tenant aux lois de police

Le règlement précise que la loi applicable ne doit pas porter « atteinte à l'application des lois de police du juge saisi » 1528906104427.
Ainsi, si un notaire est chargé de la liquidation des effets patrimoniaux de partenaires hors cadre judiciaire, les lois de police ne devraient pas s'appliquer. Par ailleurs, ce sont seulement les lois de police du juge saisi qui devront s'appliquer et non les lois de police étrangères.
Le considérant 52 du préambule du règlement n° 2016/1104 du 24 juin 2016 énonce à titre d'illustration que « la notion de "lois de police" devrait englober des règles à caractère impératif telles que celles relatives à la protection du logement familial ». La différence entre le règlement « Successions » et le règlement « EPPE » réside dans le fait que le premier permet d'appliquer les lois de polices étrangères et pas seulement celles de l'État du juge saisi, contrairement au second.

Limite tenant à l'ordre public

Le second obstacle au principe d'unicité de la loi applicable est l'ordre public international. En effet, l'article 31 du règlement n° 2016/1104 du 24 juin 2016 énonce que la désignation de la loi ne peut être opposable si elle est « manifestement incompatible avec l'ordre public du for ». Le considérant 53 précise que « dans des circonstances exceptionnelles, des considérations d'intérêt public devraient également donner aux juridictions et aux autres autorités compétentes des États membres chargées du règlement des effets patrimoniaux des partenariats enregistrés » la possibilité d'opposer l'ordre public pour écarter la loi par principe applicable.
Cependant, l'exception d'ordre public opposée dans le cadre de l'article 31 du règlement ne devra pas être contraire à la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne 1528905947990, et notamment au principe de non-discrimination énoncé à son article 21.

L'exclusion du renvoi

Comme pour les régimes matrimoniaux à compter du 29 janvier 2019, le renvoi est exclu par le règlement 1528905886730.
Il ne doit donc être fait application que des règles matérielles internes de la loi désignée à l'exclusion des règles de droit international privé.
Ainsi, deux partenaires de nationalité française ayant conclu un partenariat à l'étranger verront appliquer cette loi étrangère aux effets de leur partenariat, et ce même si cette loi étrangère renvoie à la loi nationale commune des partenaires.
Au vu de l'ensemble de ces règles, on s'aperçoit qu'il peut y avoir un éclatement du régime du partenariat enregistré entre différentes lois. Par exemple, pour une situation après le 29 janvier 2019, des Français ont enregistré leur partenariat au Portugal au moment où ils vivaient en Autriche. Ils ont désigné, lors de la signature de leur partenariat, la loi autrichienne comme loi applicable à leurs effets patrimoniaux, conformément à l'article 22 du règlement n° 2016/1104, 24 juin 2016. Ils déménagent ensuite en France, et le partenariat est rompu par le décès de l'un d'eux. Trois lois seraient donc applicables en l'espèce :
  • loi applicable aux effets personnels : conformément à l'article 515-7-1 du Code civil, c'est la loi du lieu d'enregistrement qui est applicable, soit la loi portugaise ;
  • loi applicable aux effets patrimoniaux : s'ils ont valablement désigné la loi applicable, c'est la loi autrichienne qui s'applique 1544156928421 ;
  • lois de police françaises : elles peuvent être applicables, notamment concernant la protection du logement du partenaire survivant.
Le renvoi est exclu par l'article 32 du règlement n° 2016/1103 en ces termes : « Lorsque le présent règlement prescrit l'application de la loi d'un État, il entend les règles de droit en vigueur dans cet État, à l'exclusion de ses règles de droit international privé ».
L'exclusion du renvoi semble pleinement logique compte tenu de l'objectif du règlement : en effet, si le renvoi avait été autorisé, cela aurait déjoué la prévisibilité et la sécurité que le règlement a voulu instaurer. Ce que les parties désignent en choisissant une loi, ce sont bien les règles matérielles qui organisent la répartition de leurs biens et leur gestion, et non une règle de conflit de lois.