Les incidences sur la gouvernance d'entreprise

Les incidences sur la gouvernance d'entreprise

Les levées de fonds numériques
– Confrontation entre gouvernance d'entreprise et technologie blockchain . – L'impact sur la gouvernance des sociétés des outils numériques subit un changement important par la mise en œuvre de la technologie blockchain.
Les applications concrètes de cet outil sont multiples en entreprise, si l'on décline les…
– Confrontation entre gouvernance d'entreprise et technologie blockchain . – L'impact sur la gouvernance des sociétés des outils numériques subit un changement important par la mise en œuvre de la technologie blockchain.
Les applications concrètes de cet outil sont multiples en entreprise, si l'on décline les trois fonctions principales reconnues à la blockchain : répertorier et stocker, organiser des données de toutes sortes, réaliser des transactions Rappelons que « les transactions sont émises et regroupées dans un bloc qui sera validé avec une clé cryptographique unique. Une fois le bloc validé, il est horodaté et ajouté à la chaîne de blocs. La transaction est alors visible pour le récepteur ainsi que pour l'ensemble du réseau. Les transactions ne sont pas anonymes mais pseudonymes. Chaque acteur, émetteur ou récepteur a un identifiant qui permet de le tracer tout en protégeant son identité. Ces identifiants sont les clés privées ou publiques. Chaque membre de la communauté possède une paire de clés électroniques : l'une publique contenant son adresse et l'autre privée qui permet de signer les transactions ». Cf. JCl. commercial, Fasc. 534, Blockchain, spéc. no 7, par D. Legeais. . Les usages innovants potentiels, en termes de sécurité, de qualité et de rapidité doivent aussi être appréhendés en termes de risques, c'est pourquoi le recours à cette technologie relève d'un vrai choix stratégique V. Magnier, La blockchain, un choix de gouvernance pertinent ?, in Blockchain et droit des sociétés, ss dir. V. Magnier et P. Barban, Dalloz, 2019, p. 169. .
La gestion harmonieuse de la société résulte d'une bonne gouvernance. La notion peut se définir comme « tout un ensemble de traits modernes de l'organisation des sociétés au sens général du terme » Dossier de M. Germain, Rapport sur la gouvernance des sociétés cotées, pour la Fondation du droit continental : JCP E 2013, 1637. .
En pratique, la gouvernance tient souvent au choix d'administrateurs indépendants ou référents : sur ce point, l'apport de la blockchain tiendrait seulement par exemple à la tenue sur un DEEP du registre des actionnaires afin de prévoir leur remplacement automatique dans des hypothèses simples.
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– Intérêt social et intérêt de la blockchain . – Plus globalement, tout ce qui touche à l'intérêt social de l'entreprise (dirigeants, actionnaires, mais aussi salariés, clients, fournisseurs…) participe de la gouvernance Les codes de gouvernance reprennent souvent la règle comply or explain. Selon cette règle, chaque société concernée doit préciser, parmi les recommandations d'un code de référence, celles qu'elle a choisi d'appliquer (comply) et celles qu'elle a pris l'initiative d'écarter, la mise à l'écart d'une règle contraignant néanmoins la société à s'en expliquer (explain). V. M. Germain, V. Magnier et M.-A. Noury, La gouvernance des sociétés cotées : JCP E 2013, 1638, spéc. no 18. , et concrètement concerne des décisions, des options économiques (outre le respect de la législation sur les conventions réglementées par exemple) qui dépassent l'outil technique de la blockchain. De surcroît, pour préserver la défense et la confidentialité de l'intérêt social, une blockchain privée est préférable à celle dite « publique » ; mais dans ce cas, la blockchain elle-même devrait être soumise aux règles de bonne gouvernance V. Magnier, La blockchain, un choix de gouvernance pertinent ?, préc., spéc. p. 174 et 175. , contrôlées par un expert, dont le statut reste à définir et dont la désignation reste là aussi un choix stratégique.
– Digitalisation du droit des affaires. – Concernant le droit des sociétés proprement dit, l'irruption du numérique dans l'entreprise se manifeste à plusieurs niveaux. Au-delà de l'usage d'un nouveau levier de fonds sur plateforme avec émission de titres numériques, c'est toute la vie « ordinaire » d'une société qui est touchée par les nouvelles compositions du capital social accueillant les actifs numériques. Depuis fin 2018 en effet, les parts de société, précisément les titres financiers de sociétés non cotées, peuvent être inscrites dans un dispositif d'enregistrement électronique partagé (DEEP) C. monét. fin., art. L. 211-3 et L. 211-4 ; Ord. no 2017-1674, 8 déc. 2017 et son décret d'application no 2018-1226 du 24 décembre 2018. Sur la question, V. not. M. Julienne, L'inscription des titres financiers en blockchain : Bull. Joly Bourse 2019, no 2, p. 58, nos 14 et s. – D. Legeais, L'utilisation de la blockchain pour les titres de sociétés non cotées, Dr. sociétés 2019, étude 2. , suivant un principe d'équivalence avec l'inscription en compte.
Les conséquences tiennent principalement aux clauses statutaires (Section I) ainsi qu'aux registres d'actionnaires (Section II) .
Avant d'aborder ces points, il convient d'identifier les sociétés concernées par l'entrée sur la scène du droit des sociétés des outils blockchain.
– Les entreprises concernées. – La plupart des sociétés peuvent tokeniser leur capital social par le truchement de l'inscription de leurs parts sociales dans un dispositif d'enregistrement électronique partagé, sauf celles dont la matérialisation de la propriété des parts est incompatible avec une blockchain. En clair, sont exclues du procédé les sociétés cotées, puisque précisément les mouvements de leurs actions s'effectuent sur un marché réglementé avec l'intervention, si ce n'est d'un organe central de contrôle, du moins d'un régulateur public (marché boursier).
Toutes les sociétés non cotées semblent donc a priori sujettes à tokenisation des propriétés et circulation de leur capital social.
Ce cadre général posé, il convient d'analyser les conséquences de la dématérialisation des parts sociales sur la rédaction des statuts de sociétés et la tenue des délibérations sociales.
L'adaptation des clauses statutaires
Le contrat de société peut envisager les incidences de la tokenisation des parts qui composent le capital social sous plusieurs angles : quant à leur mode de propriété (Sous-section I) , quant aux règles de variation du capital social (Sous-section II) , quant aux droits des associés titulaires de parts (Sous-section III) ; enfin, au-delà des statuts, la technologie blockchain doit être mise en rapport avec d'autres conventions sociales (Sous-section IV)
La dématérialisation des décisions sociales
Corollaire de la tokenisation des titres sociaux, la pratique des tenues de décisions collectives est aussi bouleversée par le numérique. Les délibérations s'adaptent (Sous-section I) , et leur mode de consignation également (Sous-section II) .