Qualification et place des chartes dans l'ordonnancement juridique

Qualification et place des chartes dans l'ordonnancement juridique

– La difficile qualification des chartes. – Au regard de la diversité des sujets traités (à chaque thématique, une charte…), il semble difficile de qualifier les chartes qui ont vu le jour, en marge du Code de l'urbanisme, en Île-de-France d'abord puis dans un nombre incalculable de villes sur l'ensemble du territoire.
Elles font généralement l'objet d'une délibération de la commune ou de l'intercommunalité qui en est à l'initiative, voire d'un arrêté de son organe exécutif. Certaines chartes sont adoptées à l'issue d'une phase de concertation avec le public et/ou d'un dialogue avec les instances professionnelles intéressées, qui en seront les signataires avec la collectivité.
Leur contenu relève de la libre volonté de la collectivité publique qui souhaite, par leur biais, imprimer ses valeurs en termes d'aménagement, d'urbanisme et de qualité architecturale et environnementale, et infuser la politique des élus via des objectifs de mixité sociale et fonctionnelle, de construction de logements sociaux, de surperformance énergétique, de démocratie participative, de maîtrise des prix du foncier voire des prix de sortie, etc. Quatre thématiques générales peuvent toutefois être dégagées : la qualité architecturale et l'insertion paysagère des projets ; le renforcement de leur qualité environnementale en termes de performance énergétique et de sobriété foncière ; la lutte contre la spéculation foncière ; l'information du public et la réduction des impacts du chantier sur les riverains.
– Une place particulière dans l'ordonnancement juridique. – Même si certaines chartes sont revêtues de la signature des professionnels intéressés, elles ne constituent pas, loin s'en faut, de véritables contrats créateurs de droits et d'obligations réciproques. Elles apparaissent plutôt comme des pactes d'adhésion à une politique de la ville.
Les élus les présentent généralement comme des feuilles de route, des guides de bonne pratique permettant d'éclairer les opérateurs sur les attentes de la collectivité. C'est reconnaître leur absence de normativité. Élaborées en dehors de tout cadre législatif ou réglementaire, les chartes ne peuvent être invoquées pour contester la légalité d'une autorisation d'urbanisme ni ne peuvent fonder un refus d'une telle autorisation par les services instructeurs. Elles ne sont cependant pas totalement extérieures à la sphère juridique tant elles correspondent à ce que l'on peut appeler, à la suite du Conseil d'État, le « droit souple » ou soft law .
Justifiées par des considérations d'intérêt général, le plus souvent élaborées de manière concertée, l'apport des chartes promoteurs à l'amélioration de la qualité des projets et de leur acceptabilité n'est guère contestable. Elles ne portent pas de nouvelles normes contraignantes pour les promoteurs immobiliers et incitent à l'innovation. Adaptées à chaque territoire, elles sont adoptées puis évoluent au plus près des besoins des habitants et des acteurs économiques. Mais alors, quel est le problème ?