Les sanctions pénales du non-respect des espèces protégées

Les sanctions pénales du non-respect des espèces protégées

– Les sanctions pénales encourues par les maîtres d'ouvrage. – Ces sanctions pénales sont lourdes pour les porteurs de projet qui portent également la responsabilité de la qualification des faits nécessitant ou pas d'effectuer une demande de dérogation.
Et ce d'autant que le juge civil français considère que le délit de destruction d'espèces protégées est caractérisé, d'une part, dans son élément matériel dès lors qu'un seul spécimen est détruit sans tenir compte notamment de l'impact de cette destruction sur l'état global de conservation de l'espèce en cause et, d'autre part, sur la seule faute d'imprudence.
Les sanctions pénales vont d'un à trois ans d'emprisonnement et de 15 000 à 150 000 € d'amende.
– Délivrance de la dérogation et responsabilité. – L'octroi de la dérogation « espèces protégées » est, d'après la Cour de cassation, « un fait justificatif exonératoire de responsabilité ». Outre le fait que la dérogation sécurise juridiquement l'autorisation environnementale, elle permet également de protéger le pétitionnaire qui ferait l'objet d'une demande de dommages-intérêts de la part d'associations de protection de l'environnement. Cette analyse de la cour est donc réellement sécurisante pour la poursuite d'un projet qui a fait l'objet de la délivrance d'une dérogation.
Quid de l'hypothèse où la demande de dérogation n'a pas été jugée nécessaire en l'absence de risque d'atteinte suffisamment caractérisé malgré la présence d'une espèce protégée ? – Si l'on peut considérer que l'absence d'obligation de demander une dérogation entraîne également l'absence de caractérisation d'un délit d'atteinte aux espèces protégées et sécurise ainsi l'autorisation environnementale délivrée, on ne peut préjuger de la décision que prendrait un juge en cas de découverte de la destruction d'une espèce sur l'aire géographique du projet à l'occasion d'un recours de la part d'une association environnementale. Le juge civil pourrait en effet considérer, comme il le fait en matière d'installations classées, que l'autorisation administrative obtenue n'exonère pas son bénéficiaire de la responsabilité civile qu'il encourt du fait de son activité vis-à-vis des tiers, en application du principe général en vertu duquel les autorisations administratives sont accordées sous réserve des droits des tiers.
– Une régularisation est-elle possible ? – Le principe est que la régularisation au titre de l'article L. 181-18 du Code de l'environnement est possible dès lors que la situation des espèces protégées le permet. En droit de l'environnement comme en droit de l'urbanisme, ce qui peut être sauvé doit l'être.
Plusieurs hypothèses doivent être envisagées :
  • l'exploitant n'a pas fait de demande de dérogation au stade de l'autorisation environnementale alors qu'elle était requise : l'autorisation environnementale est annulée partiellement, et la dérogation étant détachable du reste de l'autorisation, le vice tiré de l'absence de dérogation est régularisable ;
  • si l'autorisation environnementale qui aurait dû contenir la dérogation « espèces protégées » vaut également permis de construire, en vertu de l'article L. 600-5-1 du Code de l'urbanisme, le juge peut surseoir à statuer sur l'annulation, le temps de régulariser la situation et d'obtenir la dérogation, dans le délai qu'il fixe au pétitionnaire ;
  • si l'autorisation environnementale contient l'autorisation de dérogation qui s'avère illégale, une régularisation est également possible et le juge peut suspendre le procès le temps de celle-ci ;
  • si la demande de dérogation n'a pas été effectuée mais qu'elle n'aurait manifestement pas été obtenue en raison du « grave danger ou inconvénient pour l'environnement » que l'atteinte à l'espèce en question engendre, l'absence de dérogation n'est alors pas régularisable malgré son caractère divisible de l'autorisation environnementale ;
  • la régularisation peut aussi passer par une modification du projet qui permettrait de réduire les atteintes aux espèces, et qui se traduirait par une nouvelle demande de dérogation ou une demande modificative selon l'ampleur et le caractère substantiel des modifications apportées au projet.