– Plaidoyer pour une prise en compte de l'autorisation tacite. – L'autorisation d'urbanisme ou, pour être plus précis, le permis de construire tacite ne permet pas généralement aujourd'hui, à la lecture des clauses relatives à l'obtention de l'autorisation, de considérer la réalisation de la condition suspensive relative à l'obtention du permis de construire.
Nous pouvons y trouver une raison subjective de méconnaissance de son régime par la profession et parfois par les pétitionnaires.
Nous pouvons surtout y trouver une raison objective de refus des partenaires financiers de considérer cette autorisation comme un véritable acte créateur de droit en vertu duquel l'opération immobilière envisagée peut être réalisée.
Nous pensons qu'il faut en rechercher les causes profondes dans la façon dont le Code de l'urbanisme a pu, dans le passé, traiter cette autorisation.
Tout d'abord, dans sa version de 2007 issue de l'ordonnance de 2005, l'article R. 424-13 du Code de l'urbanisme précisait de façon laconique « En cas de permis tacite ou de non-opposition à un projet ayant fait l'objet d'une déclaration, l'autorité compétente en délivre certificat sur simple demande du demandeur, du déclarant ou de ses ayants droit ». Aucun élément du certificat ne permettait de s'assurer de la date du dépôt susceptible d'attester de la naissance de l'autorisation, ni encore de la transmission au préfet dans le cadre du contrôle de légalité. Cette lacune est aujourd'hui comblée. La délivrance du certificat (dont la non-délivrance fait grief et peut faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir) doit comporter l'ensemble des informations permettant la comptabilisation du délai de retrait. Bien entendu, et comme nous l'avons vu plus haut, le permis tacite porte en germe le risque d'un retrait dans l'hypothèse où ce permis aurait dû contenir des prescriptions, mais une fois écoulé le temps imparti au préfet et au maire dans le cadre d'une compétence liée pour prononcer le retrait, le permis a autant de force qu'un permis exprès.
Le second argument tenait à l'écriture incomplète de l'article L. 610-1 du Code de l'urbanisme, qui laissait planer un doute quant aux conséquences de la mise en œuvre d'un permis de construire illégal par le pétitionnaire. L'article 80 de la loi no 2018-1021 du 23 novembre 2018 est venu préciser que : « Sauf en cas de fraude, le présent article n'est pas applicable lorsque le bénéficiaire d'une autorisation définitive relative à l'occupation ou l'utilisation du sol, délivrée selon les règles du présent code, exécute des travaux conformément à cette autorisation ».
Ainsi un permis de construire devenu définitif confère un droit acquis à l'exécution des travaux qu'il autorise. Comme le précisent les Professeurs Étienne Fatôme et Jacques-Henri Robert, le permis de construire obtenu fait écran entre ces travaux et le plan local d'urbanisme (PLU). Le constructeur disposant d'un permis définitif, même illégal, en cours de validité ne peut pas faire l'objet de poursuites pénales pour infraction aux dispositions du PLU.
Il apparaît donc clairement que la situation actuelle, issue de la loi ELAN comme des recommandations du rapport Pelletier rendues quelques années plus tôt, permet aujourd'hui de plaider pour une véritable prise en compte de l'autorisation tacite en tirant les conséquences de la sécurisation des autorisations d'urbanisme.