– L'examen du juge constitutionnel pourrait-il évoluer à la faveur du changement climatique ? – La Cour de cassation a été saisie en 2015 d'une question prioritaire de constitutionnalité (QPC). Les demandeurs s'interrogeaient sur la conformité de l'article 673 du Code civil « aux droits et libertés garantis, d'une part, par le préambule, les articles 1 à 4 et 6 de la Charte de l'environnement et, d'autre part, par les articles 2 et 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ».
Elle a toutefois refusé de transmettre la QPC, en considérant notamment qu'elle ne constitue une question ni nouvelle ni sérieuse au regard des articles 2 et 17 de la Déclaration du 26 août 1789 « dès lors que les dispositions législatives en cause, qui n'ont ni pour objet ni pour effet de priver le propriétaire des arbres de son droit de propriété, mais seulement d'en restreindre l'exercice, tendent à assurer des relations de bon voisinage par l'édiction de règles relatives aux végétaux débordant les limites de propriété, proportionnées à cet objectif d'intérêt général ».
Elle a également jugé qu'elle n'avait pas de caractère sérieux au regard des articles 1 à 4 de la Charte de l'environnement au motif que l'article 673 du Code civil « qui édicte des règles relatives aux arbres, arbustes et arbrisseaux situés en limite de propriété et dont les branches surplombent le fonds voisin, a un caractère supplétif, n'autorise l'élagage des branches que sous réserve que ces plantations ne fassent pas l'objet de stipulations contractuelles ou d'une protection en application de règles particulières et qu'eu égard à l'objet et à la portée de la disposition contestée, l'élagage des branches qu'elle prévoit ne peut avoir de conséquences sur l'environnement ».
La Haute juridiction ne semble pas, du moins à ce stade, prendre en considération la protection des arbres, ni pour refuser une demande de réduction ou d'arrachage d'un arbre implanté en méconnaissance des règles de distance légales du Code civil, ni pour refuser une demande d'élagage. Elle paraît ainsi faire primer le « sacro-saint » droit de propriété sur la protection des arbres.
Mais il convient de constater que, face à l'accélération des conséquences liées au réchauffement climatique, les gouvernements prennent de plus en plus conscience de la nécessité de préserver l'environnement. La position de la jurisprudence pourrait-elle être amenée à évoluer, au regard de cette prise de conscience ?
Il est intéressant de noter qu'en matière d'empiètement par une construction, si la Cour de cassation a admis un contrôle de proportionnalité de la sanction de la démolition dans quelques décisions récentes concernant des empiètements sur l'assiette d'une servitude, atténuant la rigueur de la sanction de la démolition, elle n'a pas encore fait évoluer sa position en matière d'empiètement en pleine propriété aux termes de laquelle la démolition doit être ordonnée si elle est demandée, sans que la proportionnalité de la mesure soit contrôlée.
Néanmoins, l'on ne retrouve pas en matière de construction, du moins pas de la même manière, l'urgence climatique qui impacte les arbres. Pourrait-on aujourd'hui admettre qu'un chêne bicentenaire remarquable, dont la taille entraînerait un dommage à l'écosystème, soit élagué pour un simple dépassement minime de ses branches sur le fonds voisin ? C'est ce que paraît laisser présager la décision du tribunal judiciaire de Nantes précitée.