Cadre normatif national

Cadre normatif national

– Juillet 1976. – Conçue dans le sillage de la Conférence de Stockholm de 1972, la loi du 10 juillet 1976 relative à la protection de la nature, adoptée à l'unanimité au terme d'une gestation difficile de près de six années, constitue en France le texte fondateur du droit de l'environnement. Elle marque, en quelque sorte, « l'an I de la Révolution verte ».
L'article 2 de la loi de 1976 fait dès l'origine référence à la séquence ERC. Elle ne disparaîtra plus des textes.
Avec ce texte, la protection des espaces et des ressources naturels, ainsi que la préservation des espèces animales et végétales, deviennent d'intérêt général. Et il est du devoir de chacun de veiller à la sauvegarde du patrimoine naturel. La mise en place de l'étude d'impact y contribue : la réalisation de certains aménagements publics ou privés est désormais précédée d'une étude permettant d'en apprécier les conséquences sur l'environnement.
Un décret no 77-1241 du 12 octobre 1977 précise que cette étude d'impact doit notamment comporter « les mesures envisagées pour supprimer, réduire et, si possible, compenser les conséquences dommageables pour l'environnement ».
Le triptyque constitutif de la séquence ERC, désormais codifiée à l'article L. 110-1 du Code de l'environnement, en résulte. Si elle a été initialement pensée sous un angle procédural, lié aux dossiers d'étude d'impact devant être constitués par les porteurs de projet, une nouvelle impulsion lui a été donnée par la loi no 2016-1087 du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité.
– Août 2016. – La loi no 2016-1087 du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité élève la séquence ERC au rang de principe général du droit de l'environnement, introduit à l'article L. 110-1 du Code de l'environnement. Elle dépasse depuis lors sa vocation procédurale initiale ; elle devient une norme de fond, parmi les plus essentielles, de la protection de la biodiversité et de l'environnement dans toutes ses autres composantes que sont le sol, l'eau, l'air, le climat, les nuisances, le paysage, le cadre de vie, etc.
Rappelons que la biodiversité a été élevée au rang de patrimoine commun de la nation.
Mais la séquence ERC ne se limite pas à ne protéger que cette dernière. Elle englobe en réalité l'ensemble des champs de l'environnement définis dans le Code de l'environnement, à savoir également le sol, l'eau, l'air, le climat, les nuisances, le paysage, le cadre de vie, etc.
– Fondements issus du droit interne. – La séquence ERC trouve ses racines en droit interne dans deux sources principalement : la Charte de l'environnement et les principes fixés par le Code de l'environnement.
– La Charte de l'environnement. – Objet de nombreux débats, la Charte de l'environnement a été votée en 2004 et est entrée en vigueur le 1er mars 2005. Elle a cette particularité d'avoir valeur constitutionnelle puisqu'elle a été intégrée au « bloc de constitutionnalité » en étant introduite dans le Préambule de la Constitution lors de la révision constitutionnelle du 1er mars 2005.
Elle est le réceptacle des valeurs d'écologie humaniste.
Comme l'a souligné le sénateur Patrice Gélard dans son rapport de juin 2004, le texte traduit « un consensus des autorités scientifiques et des autres représentants de la société civile autour de trois idées-forces : l'interdépendance de l'homme et de la nature ; la prise de conscience des atteintes portées par certaines activités humaines à l'environnement et de leurs conséquences sur l'avenir de nos sociétés ; la nécessité, enfin, de promouvoir le développement durable ».
La séquence ERC prend place parmi au moins trois des principes énoncés dans la Charte :
  • le principe de prévention en vertu duquel : « Toute personne doit, dans les conditions définies par la loi, prévenir les atteintes qu'elle est susceptible de porter à l'environnement ou, à défaut, en limiter les conséquences » (Charte, art. 3) ;
  • le principe de pollueur/payeur en vertu duquel : « Toute personne doit contribuer à la réparation des dommages qu'elle cause à l'environnement, dans les conditions définies par la loi » (Charte, art. 4). Ce principe implique, selon l'article L. 110-1 du Code de l'environnement, que « les frais résultant des mesures de prévention, de réduction de la pollution et de lutte contre celle-ci doivent être supportés par le pollueur » ;
  • le principe de précaution en vertu duquel : « Lorsque la réalisation d'un dommage, bien qu'incertaine en l'état des connaissances scientifiques, pourrait affecter de manière grave et irréversible l'environnement, les autorités publiques veillent, par application du principe de précaution et dans leurs domaines d'attributions, à la mise en œuvre de procédures d'évaluation des risques et à l'adoption de mesures provisoires et proportionnées afin de parer à la réalisation du dommage » (Charte, art. 5). L'article L. 110-1 du Code de l'environnement précise à cet égard que « l'absence de certitudes, compte tenu des connaissances scientifiques et techniques du moment, ne doit pas retarder l'adoption de mesures effectives et proportionnées visant à prévenir un risque de dommages graves et irréversibles à l'environnement à un coût économiquement acceptable ».
La portée de la Charte doit cependant être nuancée car si elle a une valeur constitutionnelle, elle n'institue pas pour autant un droit ou une liberté que la Constitution garantit. La conséquence est que ces principes ne peuvent être invoqués à l'appui d'une question prioritaire de constitutionnalité.
Certains auteurs se sont d'ailleurs interrogés sur la portée réelle de la Charte, au-delà des principes généraux qu'elle pose. Ce rôle reviendra au juge.
– Les principes du Code de l'environnement. – La séquence ERC se fonde sur certains grands principes du droit de l'environnement, lesquels sont définis à l'article L. 110-1 du Code de l'environnement.
Outre les principes de pollueur/payeur et de précaution que l'on retrouve à la fois dans la Charte de l'environnement et à l'article L. 110-1, il convient également de citer les principes suivants :
  • le principe de solidarité écologique, qui « appelle à prendre en compte, dans toute prise de décision publique ayant une incidence notable sur l'environnement des territoires concernés, les interactions des écosystèmes, des êtres vivants et des milieux naturels ou aménagés » ;
  • le principe de l'utilisation durable en vertu duquel « la pratique des usages peut être un instrument qui contribue à la biodiversité ». Comme le soulignent des auteurs, « il s'agit en substance de la lutte contre le changement climatique, la préservation de la biodiversité, la cohésion sociale et la solidarité, l'épanouissement de tous les êtres humains et la transition vers une économie circulaire » ;
  • le principe de complémentarité entre l'environnement, l'agriculture, l'aquaculture et la gestion durable des forêts en vertu duquel « les surfaces agricoles, aquacoles et forestières sont porteuses d'une biodiversité spécifique et variée et les activités agricoles, aquacoles et forestières peuvent être vecteurs d'interactions écosystémiques garantissant, d'une part, la préservation des continuités écologiques et, d'autre part, des services environnementaux qui utilisent les fonctions écologiques d'un écosystème pour restaurer, maintenir ou créer de la biodiversité » ;
  • le principe de non-régression. Selon ce principe, qui trouve sa source dans le droit international, « la protection de l'environnement, assurée par les dispositions législatives et réglementaires relatives à l'environnement, ne peut faire l'objet que d'une amélioration constante, compte tenu des connaissances scientifiques et techniques du moment » ;
  • les principes d'action préventive et de correction des atteintes à l'environnement. Comme le souligne l'article L. 110-1 du Code de l'environnement : « Ce principe doit viser un objectif d'absence de perte nette de biodiversité, voire tendre vers un gain de biodiversité ». Il se conjugue avec celui du « zéro artificialisation nette » fixé par la loi Climat et Résilience de 2021.