– La métamorphose du juge de l'excès de pouvoir en droit de l'urbanisme. – Depuis l'instauration des articles L. 600-5 et L. 600-5-1 du Code de l'urbanisme, l'office du juge de l'excès de pouvoir en matière d'autorisation d'urbanisme est métamorphosé : désormais le juge initie la régularisation.
Dans ses conclusions rendues sur un arrêt du Conseil d'État du 17 mars 2021, Vincent Villette, rapporteur public, décrit avec poésie le nouvel office du juge :
« Dans la culture japonaise, le kintsugi désigne l'art ancestral consistant à recoller avec de l'or les morceaux d'une poterie cassée. Par extension, cette technique est devenue un symbole de résilience, en ce qu'elle montre que les fêlures, une fois résorbées, peuvent finir par rendre meilleur. La régularisation en urbanisme a ceci de commun avec le kintsugi qu'elle vise également à réparer, sans pour autant masquer les accidents passés. À cette aune, le rôle de restaurateur minutieux serait ici endossé par le juge qui, après avoir cassé l'autorisation de construire contre le principe de légalité, parviendrait ensuite, au fil de sa plume, à faire tenir ensemble des fragments épars pour recréer un objet juridique cohérent ».
Ainsi, en seulement trente ans, le juge est passé du rôle de censeur implacable à celui de juge kintsugi… au point d'être aujourd'hui le meilleur avocat du permis litigieux et rendant également de plus en plus perméable la frontière entre le contentieux de la légalité et le plein contentieux.