Réflexion autour de l'efficience de l'assurance privée du contentieux des permis de construire

Réflexion autour de l'efficience de l'assurance privée du contentieux des permis de construire

Les caractéristiques d'une GPC sécuritaire

– Les prérequis. – Une GPC sécuritaire se doit d'être souscrite auprès d'une compagnie agréée par la Banque de France. Préalablement à sa souscription, des audits par des juristes spécialisés (et assurés) devront avoir été réalisés, et leurs préconisations en matière de mesures préventives diligentées. Il serait également idéal que les termes de la police puissent être facilement appréhendés par tous les acteurs de l'environnement de l'opération de construction, potentiellement impactés par la remise en cause de la légalité du permis de construire.
Inspirée de la pratique anglo-saxonne de l'assurance titres, l'analyse d'une police nécessite concentration et disponibilité pour comprendre sa mécanique et ses subtilités.
– Pourquoi pas une assurance standardisée avec un risque mutualisé ? – L'un des reproches des promoteurs à l'encontre de la GPC est sa complexité : elle éveille la méfiance des banques, des notaires et des acquéreurs. Lever cette méfiance implique un temps de pédagogie auprès des acteurs de l'écosystème. Ce temps a un coût, notamment sur les honoraires des commercialisateurs qui estiment que la complexité du montage est de nature à constituer un frein à leur mission.
Pourrait-on imaginer une police standardisée et agréée par le notariat, permettant une visibilité et une appréhension rapide de la GPC ? Par ailleurs, il convient de s'interroger sur la mutualisation du risque qui permettrait de diminuer le coût de cette dernière.
En droit bancaire, l'introduction de la fiche d'information standardisée européenne (FISE) a pour objectif de permettre au candidat-emprunteur de réaliser une comparaison des offres de crédit immobilier. En droit des assurances, à l'instar de la FISE, il existe un document d'information sur le produit d'assurance remis au souscripteur, aux acquéreurs et à tous les intervenants à l'acte.
Dans le droit fil de cette idée, nous pourrions envisager une réflexion commune de l'ensemble des acteurs de l'écosystème d'une GPC (assureur, promoteur, banquier, fournisseur, association de consommateurs…) en vue d'élaborer des clauses harmonisées sur les points de sécurité essentiels : définition du sinistre, hauteur de la couverture assurantielle, délai d'indemnisation, mécanique de transfert de la propriété du lot par l'acquéreur assuré.

Une limite à surmonter

– La GPC : un produit assurantiel circonscrit à la garantie des risques de survenance d'une donnée aberrante. – En garantissant la légalité d'un permis de construire, l'assureur supporte le risque d'une erreur d'appréciation dans l'analyse juridique des experts auxquels il a recourt ou d’une interprétation différente entre ces experts et le juge. C'est de cette erreur d'appréciation que peut provenir le risque. Mais sa probabilité de survenance est infinitésimale et constitue une donnée aberrante dans la langue des statisticiens.
En outre, les compagnies d'assurance sont peu enclines à prêter leur concours lorsque la légalité d'une autorisation dépend de l'appréciation subjective du juge. Ce sera notamment le cas en présence d'atteintes portées aux paysages naturels ou urbains, de concurrence déloyale, de projets susceptibles d'avoir une incidence notable sur l'environnement ou la santé humaine ou encore de ceux qui suscitent une forte opposition de la ville et des riverains ;
La commercialisation de l'assurance est ainsi réservée aux opérations pour lesquelles le respect des règles relève d'analyses juridiques strictement objectives.
C'est la raison pour laquelle la grande majorité des GPC ont jusqu'à présent été souscrites dans le cadre de projets de constructions de logements. La GPC proposée par la SMABTP est même exclusivement réservée aux opérations de construction d'immeubles à usage d'habitation ou mixte.
De manière prospective, nous anticipons que les assureurs seront peu ou pas disposés à délivrer leur garantie pour des opérations susceptibles de faire l'objet de recours contentieux fondés sur l'article R. 122-2-1 du Code de l'environnement, modifié par le décret no 2022-422 du 25 mars 2022 instaurant la « clause filet ».
Outre les incertitudes de maîtrise du risque juridique, et donc économique, la compagnie d'assurance peut également craindre d'entacher son image en l'associant à un projet susceptible d'avoir des incidences notables sur l'environnement et la santé humaine.
– Voie alternative. – Une autre voie est possible : différer la souscription de la GPC ou sa prise d'effet au moment où le risque de subjectivité dans l'annulation du permis de construire est écartée. Ce sera le cas à la date de la cristallisation des moyens0, telle que prévue par l'article R. 600-5 du Code de l'urbanisme.
– Propositions. – Maîtriser les délais permet de façon indéniable de faire reculer les recours. Pour cette raison, la solution assurantielle est pertinente. Cependant, par sa complexité, son coût, son utilisation marginale et la réticence des notaires, elle n'apparaît pas comme la solution aux problèmes de l'augmentation des contentieux des autorisations d'urbanisme. Il est fondamental de procéder à une analyse globale des mécanismes actuels et de déterminer comment les améliorer dans le cadre d'un travail commun interprofessionnel (notaires, assureurs, pouvoirs publics, promoteurs, banque…) : mutualisation, standardisation, sécurisation du risque de démolition, traitement de la question environnementale. Autant de questions qu'il faut aborder.