Les procédures amont de participation du public

Les procédures amont de participation du public

– Droit à un environnement sain et devoir de contribuer à la protection de l'environnement. – L'article L. 110-2 du Code de l'environnement, après avoir énoncé le droit de chacun à un environnement sain, fait de la protection de l'environnement un devoir reposant sur chaque personne publique et privée : « Il est du devoir de chacun de veiller à la sauvegarde et de contribuer à la protection de l'environnement ».
Les régimes instituant des obligations d'information et organisant la participation du public aux décisions ayant une incidence sur l'environnement contribuent à rendre effectif ce devoir pesant sur tout un chacun, dans une logique ostensiblement inspirée de la place des citoyens en démocratie. Ce faisant, ce sont les conditions d'une « démocratie environnementale » qui visent à être instituées à travers les principes directeurs de la participation du public (A) et les modalités de son organisation en phase amont (B).

Les principes directeurs de la participation du public

– Grands principes transversaux. – Les principes directeurs et finalités de la participation du public à l'élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l'environnement sont définis à l'article L. 120-1 du Code de l'environnement.
De la longue énumération de ce texte, auquel il est renvoyé, se dégagent de manière plus synthétique les grands principes suivants :
  • la participation intervient à un stade approprié, suffisamment précoce pour que le public puisse exercer une influence sur un projet ;
  • la participation est effective, véritable, ce qui implique la mise en œuvre d'une procédure permettant au public d'être associé à la prise de décision, en lui laissant un délai raisonnable pour formuler des observations et propositions ;
  • la participation implique une information pertinente de nature environnementale mais aussi procédurale sur les modalités de son organisation, ainsi que sur la prise en considération des observations et propositions émises.
Les procédures de participation sont prévues par le Code de l'urbanisme et le Code de l'environnement. Quelle que soit leur source, elles sont liées par le respect de ces grands principes dont la portée, transversale, dépasse le périmètre du Code de l'environnement.

Les modalités de la participation du public en phase amont

– Débat public et concertation préalable. – La participation du public prend essentiellement la forme d'un débat public ou d'une concertation préalable dont les champs d'application respectifs sont ici précisés pour les seuls projets. Nous ne traiterons pas des modalités de la participation du public aux plans et programmes, qui relèvent de la planification urbaine, et dont les règles sont relativement similaires.
Les projets exceptionnels d'une certaine envergure relèvent de la Commission nationale du débat public (I), qui peut aussi décider de les soumettre à une concertation du Code de l'environnement, qui concerne plus généralement les projets soumis à évaluation environnementale (II).
Les projets de zone d'aménagement concerté (ZAC), les projets de renouvellement urbain ainsi que ceux qui modifient substantiellement le cadre de vie relèvent d'une autre concertation obligatoire régie par le Code de l'urbanisme (III). Quand une opération n'y est pas soumise, un opérateur peut également se lancer volontairement dans une concertation. On parle dans ce cas de concertation facultative du Code de l'urbanisme (IV).

Participation du public relevant de la Commission nationale du débat public

– Présentation institutionnelle. – Créée par la loi Barnier du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l'environnement, la Commission nationale du débat public (CNDP) est une autorité administrative indépendante. Elle est chargée de veiller au respect de la participation du public au processus d'élaboration des projets d'aménagement ou d'équipements qui présentent d'importants enjeux socio-économiques et ayant des impacts significatifs sur l'environnement et le territoire. Ces projets de grande envergure relèvent du Code de l'environnement.
– Caractère obligatoire ou facultatif de la saisine de la CNDP. – La CNDP est saisie de droit ou de manière facultative de projets d'aménagement ou d'équipements qui, par leur nature, leurs caractéristiques techniques ou leur coût prévisionnel répondent à des critères ou excèdent les seuils définis par décret en Conseil d'État.
Les catégories de projets concernées, les coûts prévisionnels, critères et seuils sont précisés dans un tableau figurant à l'article R. 121-2 du Code de l'environnement. Il distingue deux types de saisine : de droit ou facultative.
On peut par ailleurs noter que la loi relative à l'industrie verte du 23 octobre 2023 autorise la CNDP à intervenir de manière unique pour plusieurs projets faisant l'objet d'une saisine de droit, qui sont situés sur un même territoire délimité et homogène, et ce au cours des huit années à venir. Cela permet de dispenser de débat public propre ou de concertation préalable propre les projets qui sont mis en œuvre dans les huit années qui suivent, sauf exception.
Dans le champ de la saisine facultative, le Code de l'environnement impose au maître d'ouvrage de rendre publics les objectifs et caractéristiques essentielles de son projet. Il appartient également à ce dernier d'indiquer s'il entend ou non saisir la CNDP, et, le cas échéant, de préciser les modalités de la concertation qu'il s'engage à mener dans l'hypothèse où la commission ne serait pas saisie.
À défaut de saisine par le maître d'ouvrage, dans un délai de deux mois à compter du moment où il a rendu public le projet, la CNDP peut être saisie par 10 000 ressortissants de l'Union européenne résidant en France, par dix parlementaires, par une collectivité territoriale ou un établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d'aménagement et territorialement intéressé, ainsi que par une association agréée au niveau national.
– Procédures menées sous l'autorité de la CNDP. – Dès lors qu'elle a été saisie, de manière obligatoire ou facultative, la CDNP décide, dans le délai de deux mois, si le projet doit faire l'objet d'une procédure de concertation préalable, d'un débat public, ou s'il ne nécessite ni l'un ni l'autre.
En cas de débat public, la CNDP l'organise sur une durée de quatre mois maximum et en confie l'animation à une commission qu'elle constitue. En cas de concertation préalable, la CNDP en définit les modalités suivant les règles de la concertation du Code de l'environnement puis en confie l'organisation au maître d'ouvrage et désigne un garant.

La concertation « Code de l'environnement »

Champ d'application

– Un champ d'application défini par référence aux compétences de la CNDP. – Le champ d'application de la concertation du Code de l'environnement est défini à l'article L. 121-15-1 dudit code, qui fait référence aux dispositions relatives à la compétence de la CNDP. Les trois cas de figure suivants sont distingués :
  • il s'agit, en premier lieu, des projets soumis à évaluation environnementale mais ne relevant pas du champ de compétence de la Commission nationale du débat public. Le maître d'ouvrage peut dans ce cas prendre l'initiative d'organiser une concertation préalable et en fixer librement les modalités ou la mettre en œuvre sous l'égide d'un garant désigné par la CNDP. À défaut d'une telle initiative, l'autorité compétente pour autoriser le projet peut l'y contraindre. Un droit d'initiative est également ouvert au public pour lui permettre de demander le cas échéant au préfet d'organiser une telle concertation ;
  • sont concernés, en deuxième lieu, les projets relevant du champ de compétence de la CNDP, pour lesquels la CNDP a demandé que soit organisée une concertation préalable ;
  • en troisième lieu, sont visés les projets pour lesquels une concertation préalable doit être menée par le maître d'ouvrage, alors même que, soumis à saisine facultative de la CNDP, celle-ci n'a pas été saisie par le maître d'ouvrage ou un tiers.

Modalités

Objectifs de la concertation « Code de l'environnement »
– Débattre de l'opportunité, des objectifs et des caractéristiques principales du projet. – La concertation préalable doit permettre de débattre de l'opportunité, des objectifs et des caractéristiques principales du projet, ainsi que de ses enjeux socio-économiques et de ses impacts tant sur l'environnement que sur l'aménagement du territoire.
Elle doit également permettre de débattre de solutions alternatives, y compris de sa potentielle non-réalisation.
Cette phase amont porte également sur les modalités d'information et de participation du public qui seront ultérieurement mises en œuvre lors de la phase aval de l'enquête publique ou de la participation du public par voie électronique.
La définition des objectifs poursuivis par la concertation est une étape très importante dans la mesure où les modalités de la concertation vont en découler pour être adaptées à l'ampleur et aux caractéristiques du projet. Le Conseil d'État a toutefois infléchi sa position rigoriste sur l'impact d'une insuffisance de la définition de ces objectifs sur la légalité de la décision finale.
Procédure de la concertation « Code de l'environnement »
– Conditions générales de la concertation. – Les conditions générales de la concertation sont définies à l'article L. 121-16 du Code de l'environnement. Sa durée est comprise entre quinze jours et trois mois, et le public en est informé quinze jours à l'avance par voie dématérialisée et par voie d'affichage, voire de publication locale.
Le bilan de la concertation est ensuite rendu public et le maître d'ouvrage doit indiquer les mesures qu'il mettra en œuvre pour répondre aux enseignements qu'il en a tirés.
– Concertation organisée sous l'égide d'un garant. – Lorsque la concertation est organisée sous l'égide d'un garant, il est désigné par la CNDP sur une liste nationale. Il a pour mission de s'assurer de la qualité, de la sincérité et de l'intelligibilité des informations diffusées au public, du bon déroulement de la concertation préalable et de la possibilité pour le public de poser des questions et de formuler des observations ou des propositions. À l'instar d'un commissaire-enquêteur, le public peut lui adresser ses observations et propositions, et il établit, dans le mois de la clôture de la concertation, une synthèse de celles-ci ainsi qu'un bilan de la concertation. Mais à la différence du commissaire-enquêteur, le garant n'a pas à formuler d'avis personnel ; tout au contraire, il doit faire preuve de neutralité et d'impartialité.

Droit d'initiative

– Champ d'application. – Le droit d'initiative concerne les projets intermédiaires, c'est-à-dire ceux soumis à évaluation environnementale, qui ne relèvent pas du champ de compétence de la CNDP car leur coût est inférieur aux seuils de sa saisine, mais dont le coût prévisionnel est supérieur à 5 millions d'euros.
Le public peut alors solliciter du préfet l'organisation d'une concertation préalable sous l'égide d'un garant, toujours désigné par la CNDP, lorsque le maître d'ouvrage du projet en question a fait le choix initial de ne pas organiser de concertation ou d'en organiser une mais sans garant.
La concertation préalable doit dans ce cas être organisée avant toute mise en concurrence, alors que toutes les options sont encore ouvertes afin de permettre au public de prendre part à la réflexion.
– Modalités. – Si son projet entre dans le champ d'application du droit d'initiative, le maître d'ouvrage doit publier une « déclaration d'intention » qui comporte un certain nombre d'informations ainsi portées à la connaissance du public, tels les motivations du projet, son périmètre, un aperçu de ses incidences potentielles sur l'environnement.
Le support de cette déclaration d'intention pourra être un affichage et/ou une publication sur le site internet du maître d'ouvrage, la publication de la décision prescrivant une évaluation environnementale après un examen au cas par cas, ou encore l'acte même qui engage la réalisation du projet.
– Bénéficiaires du droit d'initiative. – Les bénéficiaires du droit d'initiative sont de trois ordres :
  • un nombre de ressortissants majeurs de l'Union européenne résidant dans le périmètre de la déclaration d'intention et représentant au moins 20 % de la population des communes concernées ou 10 % des départements ou régions concernés ;
  • un conseil municipal, départemental ou régional, ou l'organe délibérant d'un établissement public de coopération intercommunale dont le territoire est compris dans le périmètre de la déclaration d'intention ;
  • une association agréée au niveau national ou deux associations ou une fédération d'associations agréées dans le cadre de la région ou du département dont le territoire est compris dans le périmètre de la déclaration d'intention.
– Saisine du préfet. – Les groupes ci-dessus désignés disposent d'un délai de deux mois à compter de la déclaration d'intention pour saisir le préfet aux fins d'organiser une concertation préalable. Pendant ce délai, le responsable du projet peut lancer de lui-même une concertation qui devra toutefois être menée sous l'égide d'un garant.
Le préfet informe immédiatement le maître d'ouvrage de sa saisine et dispose d'un délai d'un mois pour étudier les principaux impacts du projet sur l'environnement ainsi que ses retombées économiques sur le territoire concerné, pour décider explicitement ou implicitement soit de l'organisation d'une concertation sous l'égide d'un garant et dont il aura fixé la durée et l'échelle territoriale, soit de l'absence de nécessité d'une concertation préalable.
– Sanction. – Le non-respect de ces modalités entraîne l'irrecevabilité de la demande d'autorisation du projet, notamment si les délais prévus pour l'exercice du droit d'initiative ou la réponse du préfet ne sont pas encore expirés ou si la déclaration d'intention ou l'acte en tenant lieu n'a pas été publié.

La concertation obligatoire du Code de l'urbanisme

Champ d'application

– Opérations d'aménagement ou de construction. – Le champ d'application de la concertation obligatoire du Code de l'urbanisme, souvent présentée comme la procédure « classique » ou de « droit commun », est défini à l'article L. 103-2 du Code de l'urbanisme.
Sont soumis à concertation obligatoire au titre de ce code :
  • les projets de création de ZAC ;
  • les projets de renouvellement urbain ;
  • les projets et opérations d'aménagement ou de construction ayant pour effet de modifier de façon substantielle le cadre de vie, notamment ceux susceptibles d'affecter l'environnement ou l'activité économique.
Si la notion de ZAC ne crée pas de difficulté, les autres opérations méritent d'être précisées.
Notion de projet de renouvellement urbain
– Loi de programmation pour la ville et la cohésion urbaine. – Les projets de renouvellement urbain sont soumis à concertation obligatoire depuis la loi de programmation pour la ville et la cohésion urbaine du 21 février 2014, sans que cette loi en définisse la notion. Pour reprendre les termes de Jean-François Joye : « Ce terme flou impose au sens étroit les projets menés dans le cadre de la politique de la ville (requalification ou développement des quartiers défavorisés) », mais « au sens large, concerne toute opération de reconstruction de la ville sur elle-même afin de limiter l'extension urbaine ».
Pour mieux comprendre les contours de cette notion, il convient de rappeler le contexte de l'adoption de la loi de 2014. L'extension du champ d'application aux projets de renouvellement urbain résulte d'un amendement qui avait pour objet « d'améliorer la concertation entre locataires et bailleurs dans le domaine du renouvellement urbain ». Cette loi avait pour objectif de réformer la politique de la ville pour les quartiers les plus en difficulté et comportait un volet important en matière de participation du public, mettant l'accent sur la co-construction des projets. Ainsi, dans le cadre du nouveau programme de renouvellement urbain (NPRU), une concertation entre les habitants, les associations et acteurs économiques était déjà organisée depuis la loi no 2003-710 du 1er août 2003 d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine, dans le cadre des contrats de ville.
Deux approches de la notion sont donc possibles : soit il s'agit d'une approche large qui vise tout projet de « reconstruction de la ville sur elle-même et de recyclage de ses ressources bâties et foncières », soit il s'agit d'une approche restrictive aux seuls projets coordonnés par l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) dans les quartiers prioritaires de la ville (QPV).
La jurisprudence récente a tendance à analyser la notion au sens restrictif de la loi du 1er août 2003. D’autres arrêts retiennent toutefois une définition plus large de la notion et s’attachent non pas aux critères législatifs, mais à l’ampleur du projet.
Notion de projet et opération ayant pour effet de modifier le cadre de vie
– Loi ALUR. – Avant la loi ALUR du 24 mars 2014, seuls étaient soumis à concertation obligatoire les projets de création de ZAC et les opérations d'aménagement initiées ou réalisées par des communes et ayant pour effet de modifier le cadre de vie. Supprimant la référence aux communes, la loi ALUR a élargi le champ de la concertation obligatoire aux « projets et opérations d'aménagement ou de construction ayant pour effet de modifier de façon substantielle le cadre de vie, notamment ceux susceptibles d'affecter l'environnement (…) ou l'activité économique ».
Si les notions de projets et opérations d'aménagement, qui se définissent par renvoi à l'article L. 300-1 du Code de l'urbanisme, et celle de construction ne posent pas de difficulté, il n'en va pas de même du concept de modification substantielle du cadre de vie.
Pour les modifications du cadre de vie susceptibles d'affecter l'environnement, le législateur renvoie à l'article L. 122-1 du Code de l'environnement qui fixe les critères des projets soumis à évaluation environnementale que nous étudierons ultérieurement. Il n'apporte en revanche aucune précision sur les modifications du cadre de vie susceptibles d'affecter l'activité économique.
L'article R. 103-1 du Code de l'urbanisme donne cependant la liste des opérations d'aménagement concernées, dont on peut constater qu'elle est plus restreinte que celle résultant de l'application de l'article L. 122-1 susvisé.
Sont concernées les opérations d'envergure, supérieures à un seuil de 1 900 000 € pour la plupart d'entre elles, dans les domaines de la voirie urbaine, la construction de grands bâtiments, la construction ou l'extension de ports, situés principalement dans les parties urbanisées des communes.
Ne figurent toutefois pas dans cette liste réglementaire des opérations qui sont traditionnellement qualifiées d'aménagement urbain, comme : « la création d'un quartier nouveau, la mise en place d'un système dit « tram-train », la construction d'une usine d'incinération des déchets ménagers ou d'un lycée, la réalisation d'un parc de stationnement public souterrain, l'aménagement d'un parc d'activités économiques, ou encore la création d'un stade multifonctionnel ». Ce type de projet pourra toutefois faire l'objet d'une concertation sur les recommandations de la CNDP et selon des modalités alors décidées par sa commission, ou d'une concertation du Code de l'environnement.
– Appréciation des critères de l'article R. 103-1. – Le pouvoir réglementaire cherche incontestablement à écarter certaines opérations des contraintes d'une concertation obligatoire du Code de l'urbanisme. Le champ d'application qu'il définit n'est toutefois pas aisé à identifier.
Prenons l'exemple de l'investissement routier. Trois conditions cumulatives doivent être satisfaites pour déclencher la procédure de concertation du Code de l'urbanisme :
  • le projet doit conduire à la création d'un nouvel ouvrage ou à la modification d'un ouvrage existant. Entrent ainsi dans cette catégorie un ouvrage de franchissement de la Garonne, les travaux de déviation d'une route départementale. En revanche, la construction d'un parc de stationnement souterrain ne constitue pas un investissement routier même s'il s'accompagne de travaux d'accès sur la voirie routière ;
  • il doit être situé en tout ou partie dans une partie déjà urbanisée d'une commune, afin de répondre à la condition exprimée à l'article L. 103-2 du Code de l'urbanisme selon laquelle le projet doit avoir « pour effet de modifier de façon substantielle le cadre de vie ». Ainsi n'entre pas dans le champ de la concertation obligatoire la construction d'une liaison routière qui « ne traverse pas une zone urbanisée » , ou encore une déviation qui a précisément pour objet de contourner la partie urbanisée de la commune ;
  • l'investissement routier doit dépasser un seuil de 1 900 000 €. Pour apprécier le seuil financier, il ne peut être tenu compte que de la portion de l'ouvrage située dans la partie urbanisée de la commune.
En cas de doute, le Conseil d'État interprète les dispositions de l'article R. 300-1 du Code de l'urbanisme à la lumière de la définition générale donnée à l'article L. 103-2 qui définit lesdits projets d'aménagement urbain comme ceux qui « ont pour effet de modifier de façon substantielle le cadre de vie, notamment ceux susceptibles d'affecter l'environnement au sens de l'article L. 122-1 du Code de l'environnement, ou l'activité économique ».
Enfin, lorsque l'opération est réalisée par tranches de travaux qui se déroulent sur une période de moins de cinq ans, il doit être tenu compte de l'opération dans son ensemble pour apprécier ces critères et seuil.
Opérations exclues de la concertation obligatoire du Code de l'urbanisme
– Champ des exemptions. – Trois catégories d'opérations sont traditionnellement exemptées de concertation préalable :
  • les travaux d'entretien et de grosses réparations, quels que soient les ouvrages ou aménagements auxquels ils se rapportent ;
  • les opérations soumises au secret de la défense nationale ;
  • les opérations qui font l'objet d'une autre procédure de participation du public. C'est le cas :

La procédure de concertation obligatoire du Code de l'urbanisme

Objectifs de la concertation obligatoire du Code de l'urbanisme
– Définition des objectifs et modalités de la concertation. – Les objectifs poursuivis par la concertation ainsi que les modalités de celle-ci doivent être précisés par l'autorité organisatrice. Cette exigence découle « des travaux parlementaires, qui indiquent que le législateur a entendu obliger les collectivités à la fois à mener une première réflexion d'ensemble sur les objectifs de l'opération et à engager sur cette base la concertation avec la population ».
Cette condition de validité de la concertation est essentielle car elle participe directement de son objet : donner à toute personne intéressée la possibilité d'agir sur les orientations de l'opération projetée, de participer à l'élaboration de la décision, ce qui suppose de connaître ses grandes lignes et ses objectifs, mais à un moment où il est encore possible d'agir sur la décision et de changer d'orientation.
Les objectifs de l'opération envisagée ne doivent pas, pour ce faire, être trop généraux et sans réelle consistance.
La définition de ces objectifs et l'indication des modalités de la concertation doivent avoir lieu simultanément, car la procédure de concertation n'a de sens que si le public a connaissance des objectifs poursuivis par la collectivité pour lancer une opération d'aménagement. Ce principe n'est toutefois pas absolu dès lors que les deux délibérations successives n'ont pas empêché la tenue d'une concertation effective.
– Portée de la décision définissant les objectifs et modalités. – Il ne s'agit pas d'une simple mesure préparatoire, mais d'une véritable décision de nature à « faire grief ». Elle peut donc faire l'objet directement d'un recours pour excès de pouvoir par lequel peut être soulevé le caractère insuffisant de la concertation au regard de l'article L. 103-2 du Code de l'urbanisme.
En revanche, comme nous le verrons plus loin (V. infra, nos et s.), l'irrégularité de la décision définissant les objectifs et les modalités de la concertation en raison de ses insuffisances ne contamine pas pour autant la décision prise à l'issue de la concertation. En effet, afin de limiter les risques contentieux, l'article L. 600-11 du Code de l'urbanisme prévoit que les documents d'urbanisme et les opérations soumis à cette concertation obligatoire « ne sont pas illégaux du seul fait des vices susceptibles d'entacher la concertation, dès lors que les modalités définies » par le Code de l'urbanisme et par la décision précisant les modalités de la concertation ont été respectées.
Modalités de la concertation obligatoire du Code de l'urbanisme
– Moment de la concertation obligatoire. – Ainsi que nous l'avons précisé, la détermination de ce moment est sensible : il doit correspondre à une phase où le projet doit tout à la fois être défini a minima, pour que le public puisse se prononcer utilement, et ne pas être figé, pour ne pas constituer un faux-semblant.
La concertation doit donc être organisée, en application de règles jurisprudentielles, « avant que le projet ne soit arrêté dans sa nature et ses options essentielles et que ne soient pris les actes conduisant à la réalisation effective de l'opération au nombre desquels figurent notamment les marchés de maîtrise d'œuvre de travaux, les déclarations d'utilité publique et les décisions arrêtant le dossier définitif du projet ».
Serait ainsi illégale la délibération confiant la maîtrise d'œuvre des travaux de construction d'un métro ou la délibération approuvant une ZAC, avant même la mise en œuvre de la concertation.
– Durée de la concertation obligatoire. – Conformément à l'article L. 103-2 du Code de l'urbanisme, la concertation se déroule « pendant toute la durée de l'élaboration du projet ». Elle doit être organisée sur une durée suffisante et avec des moyens adaptés à l'importance et aux caractéristiques du projet. Le juge administratif laisse à cet égard une certaine liberté à l'autorité organisatrice et sanctionne rarement les concertations trop brèves ou même ne coïncidant pas avec la durée d'élaboration du projet ; il vérifie simplement « que la concertation a duré pendant une période suffisante pour permettre à l'ensemble des personnes et groupements intéressés d'émettre leur avis ».
– Auteur de la concertation obligatoire. – L'autorité compétente pour organiser la concertation est l'organe délibérant de la collectivité ou de l'établissement public du territoire concerné.
– Mesures d'information sur la concertation. – En l'absence de règle particulière pour les projets, c'est le droit commun de l'information du public qui s'applique. En pratique, les autorités organisatrices optent souvent pour une combinaison d'éléments tels que : publicité par voie d'affichage et/ou dans la presse et/ou sur internet, établissement d'un dossier, exposition, site internet, registre, permanence d'élus, réunion publique, etc.
– Personnes visées. – L'article L. 103-2 du Code de l'urbanisme vise « les habitants, les associations locales et les autres personnes concernées ». La décision qui organise les modalités de la concertation ne peut donc pas établir une liste limitative de ces catégories de personnes, et la concertation doit être organisée sur l'ensemble des communes concernées par le projet.
– Concertation publique unique. – Dans un objectif de simplification, lorsqu'un projet de ZAC ou l'une des opérations visées à l'article R. 103-1 du Code de l'urbanisme nécessite une révision préalable du SCoT ou du PLU pour sa réalisation, la commune ou l'établissement compétent peut organiser une concertation unique qui portera à la fois sur la révision du document d'urbanisme et le projet, dont les objectifs et les modalités sont alors définis par l'organe délibérant de la collectivité ou de l'établissement concerné.
– Principes généraux relatifs à l'organisation d'une concertation obligatoire du Code de l'urbanisme. – Alors que le législateur a défini assez précisément le déroulement des enquêtes publiques, il laisse une certaine latitude à l'autorité compétente pour l'organisation de la phase amont de la concertation afin de l'adapter au plus près des caractéristiques et de l'importance du projet.
On peut toutefois dégager des dispositions législatives et réglementaires, ainsi que de la jurisprudence, les grands principes suivants :
  • l'information du public : les modalités de la concertation doivent tout d'abord permettre au public d'accéder « aux informations relatives au projet ». Aucun texte ne précise toutefois quelles sont ces informations et le support de celles-ci est très variable. Cela peut être un dossier, une maquette, des réunions d'information, un site internet, ou encore le compte-rendu de la délibération déterminant les objectifs et les enjeux de l'opération. Quant à l'étude d'impact ou l'étude des incidences sur l'environnement, si elles doivent obligatoirement être jointes à l'enquête publique, à ce stade amont de la concertation, aucun texte interne ni même communautaire ne contraint à les produire. Les modalités de la concertation doivent ensuite permettre au public d'accéder « aux avis requis par les dispositions législatives ou réglementaires applicables ». Le public doit en effet avoir accès aux différents avis des organismes ou personnes consultés dans le cadre de l'élaboration de la décision, afin de les éclairer ;
  • la possibilité de formuler des observations : là encore, alors que le droit des enquêtes publiques formalise le recueil des observations et des propositions du public, diverses modalités peuvent être mises en œuvre dans le cadre d'une concertation (réunions d'information et d'échange avec le public, rencontre avec les responsables du projet, registre, site internet…). Quel que soit le support, ces observations et propositions doivent toutefois être enregistrées et conservées par l'autorité compétente ;
  • le bilan de la concertation : l'autorité compétente qui a ouvert la concertation doit en établir un bilan et indiquer les mesures qu'elle juge nécessaire de mettre en place pour répondre aux enseignements tirés de cette concertation. Si ce bilan est obligatoire, son absence entachant d'illégalité la décision qui serait issue de la concertation, son contenu n'est pas précisé par les textes. Le juge administratif va donc vérifier que le bilan est suffisant, quand bien même il ne serait pas exhaustif. Lorsque le projet fait, par la suite, l'objet d'une enquête publique, le bilan de la concertation doit être joint au dossier de cette enquête. En dehors de cette hypothèse, il n'est plus exigé qu'une temporalité sépare le bilan de la concertation de la décision. Ainsi ce bilan peut être intégré dans la délibération qui approuve la création d'une ZAC.

Phasage concertation préalable/enquête publique

La procédure de concertation préalable doit être achevée dans tous ses aspects au moment de l'ouverture d'une enquête publique.
Décision prise à l'issue de la concertation obligatoire
– Adoption du projet. – À la suite de la concertation, le projet, le cas échéant modifié pour tenir compte des observations et/ou propositions ainsi formulées par le public, peut être adopté par l'autorité décisionnaire qui, compte tenu du champ d'application de la concertation obligatoire du Code de l'urbanisme, sera généralement une collectivité publique ou un de ses établissements.
Une certaine correspondance entre l'objet du projet soumis à concertation préalable et le contenu de la décision prise à son issue doit pouvoir se vérifier. À défaut, la procédure aboutissant à la prise de décision serait entachée d'irrégularité. L'autorité qui arrête le projet ne peut donc y apporter des modifications substantielles, sous peine de devoir lancer une nouvelle concertation. Il ne peut s'agir que de modifications mineures, d'ordre technique, qui « n'affectent ni la nature, ni les options essentielles de l'opération d'aménagement envisagée ».
En revanche, l'autorité décisionnaire est totalement libre de ne pas suivre les observations et propositions recueillies à l'occasion de la concertation.
Aucun délai, comme nous l'avons vu, n'étant imposé entre la clôture de la concertation et la prise de décision, il conviendra de se référer à la notion de changement notable dans les circonstances de droit ou de fait susceptible d'altérer la perception par les intéressés de la nature du projet pour déterminer si une nouvelle procédure de concertation doit être initiée.

Le contentieux de la concertation obligatoire du Code de l'urbanisme

– Mécanisme de l'exception d'illégalité. – La délibération par laquelle la collectivité ou l'établissement public approuve le bilan de la concertation étant un acte préparatoire à la décision qui sera prise dans la même délibération ou dans une délibération ultérieure, ce n'est qu'à l'occasion d'un recours dirigé contre la décision approuvant le projet ou l'opération que peut être soulevée, selon la théorie des opérations complexes, l'illégalité de la délibération tirant le bilan de la concertation. Le juge de l'excès de pouvoir peut alors être conduit à vérifier le respect des modalités de la concertation fixées par l'autorité compétente et leur caractère suffisant.
Les vices de forme et de procédure sont invocables, la jurisprudence CFDT Finances les rendant inopérants dans le mécanisme de l'exception d'illégalité des actes réglementaires. Cette jurisprudence n'a toutefois pas été étendue au contentieux des opérations complexes.
Mais le juge administratif peut ne pas annuler les décisions prises à l'issue d'une concertation entachée d'irrégularités dès lors que ces irrégularités n'ont pas été de nature à priver les intéressés d'une garantie ou qu'elles n'ont pas exercé une influence sur la décision prise, en application de la jurisprudence Danthony du 23 décembre 2011. Ce mouvement jurisprudentiel ne doit toutefois pas aller à rebours des objectifs de la Convention d'Aarhus selon lesquels doit être garantie la possibilité pour le public de former un recours « pour contester la légalité, quant au fond et à la procédure, de toute décision, tout acte ou toute omission tombant sous le coup des dispositions » qui réglementent la participation du public.

La concertation facultative du Code de l'urbanisme

Champ d'application

– Démarche volontaire. – Les décideurs privés ou publics peuvent volontairement soumettre leurs projets de travaux, ouvrages ou aménagements qui n'y sont pas soumis à une concertation préalable relevant du Code de l'urbanisme. Ils doivent dans ce cas respecter les grands principes de la concertation obligatoire susvisés.
Concernant plus particulièrement les projets dont la réalisation suppose la délivrance d'une autorisation d'urbanisme, peuvent faire l'objet d'une concertation facultative les projets de travaux ou d'aménagements soumis à permis de construire ou à permis d'aménager, autres que ceux déjà soumis à concertation obligatoire en vertu de l'article L. 103-2 du Code de l'urbanisme, lorsqu'ils sont situés sur un territoire couvert par un SCoT, par un PLU, par un document d'urbanisme en tenant lieu ou par une carte communale.

Articulation « concertation facultative du Code de l'urbanisme » et « concertation du Code de l'environnement »

Un même projet peut entrer à la fois dans le champ de la concertation du Code de l'environnement et dans celui du Code de l'urbanisme ; une articulation des différentes procédures est prévue pour éviter les doublons :

Modalités

– Description. – Les modalités de la concertation facultative sont fixées par l'article L. 300-2 du Code de l'urbanisme.
L'initiative de soumettre un projet à consultation facultative relève de l'autorité compétente pour délivrer l'autorisation d'urbanisme ou, avec l'accord de celle-ci, du maître d'ouvrage.
La concertation facultative doit être réalisée préalablement au dépôt de la demande de permis de construire ou d'aménager.
L'autorité compétente pour statuer sur l'autorisation d'urbanisme doit mettre à la disposition des personnes intéressées le dossier de présentation du projet qui lui a été transmis par le maître d'ouvrage. Ce dossier comporte « au moins une description de [la localisation du projet] dans l'environnement et sur le terrain concerné, sa destination, les caractéristiques des constructions ou aménagements envisagés, comprenant un avant-projet architectural dans le cas où le projet comporte des bâtiments, ainsi que la desserte du projet par les équipements publics et l'aménagement de ses abords ». Le texte indique ensuite que l'autorité compétente doit mettre le dossier à la disposition du public dans des conditions lui permettant « de formuler des observations ou propositions ». Celles-ci doivent être enregistrées et conservées par ses soins.
Le bilan de la concertation doit être établi par l'autorité compétente et transmis dans les vingt et un jours de la clôture de la concertation au maître d'ouvrage, lequel peut ainsi apporter des modifications non substantielles à son projet pour tenir compte des résultats de celle-ci. Dans tous les cas, le bilan de la concertation doit être établi avant la demande de permis de construire car il doit être joint à la demande d'autorisation.

Articulation des concertations facultative et obligatoire en ZAC

Lorsque le maître d'ouvrage d'un projet immobilier décide de lancer une concertation facultative et que son projet est situé dans le périmètre d'une ZAC qui, elle, est soumise à concertation obligatoire du Code de l'urbanisme, les deux concertations peuvent être menées simultanément, à condition toutefois que la détermination des caractéristiques du projet immobilier soit suffisamment avancée.
Si, par ailleurs le projet immobilier est soumis à évaluation environnementale, il n'y aura pas lieu d'organiser d'enquête publique mais une simple mise à disposition du public par voie électronique. La procédure de concertation facultative menée en amont du projet se substitue en quelque sorte à la procédure aval de l'enquête publique qui se résumera à une mise à disposition électronique.

Le contentieux de la concertation facultative

– Application de l'article L. 600-11. – L'article L. 600-11 du Code de l'urbanisme dispose que les projets soumis à cette concertation facultative ne sont pas illégaux du seul fait des vices susceptibles d'entacher la concertation, dès lors que les modalités définies par la décision ou la délibération ont été respectées.
Par ailleurs, les autorisations d'occuper ou d'utiliser le sol ne sont pas illégales du seul fait des vices susceptibles d'entacher cette délibération ou les modalités de son exécution.
Ce n'est donc que par le chemin étroit de l'action contre la délibération qui a précisé les objectifs et les modalités de la concertation, en invoquant son caractère insuffisant, que le justiciable pourra accéder au prétoire.
– Concept de – continuum de la participation. – Avant d'évoquer les procédures aval de la participation du public, arrêtons-nous un instant sur ce concept de continuité. Des délais importants peuvent s'écouler entre la phase amont et la phase aval d'un projet, de sorte qu'il convient de mettre en place une phase intermédiaire qui garantit la préservation de la mémoire de la participation préalable et favorise une meilleure participation du public en phase aval.
Ainsi, après tout débat public ou concertation préalable organisé dans le champ de la Commission nationale du débat public, celle-ci désigne un garant qui s'assure de la bonne information du public jusqu'à l'ouverture de l'enquête publique.
Toujours dans le sens d'une continuité, le garant qui a mené une concertation préalable pourra également être nommé en qualité de commissaire-enquêteur pour mener l'enquête publique.
Enfin, dans les hypothèses où un débat public ou une concertation préalable a été organisé en amont, le bilan de cette procédure devra figurer au dossier de participation aval.