Les critères de réalisation d'une évaluation environnementale

Les critères de réalisation d'une évaluation environnementale

– Des incidences notables sur l'environnement. – Le principe est le suivant : les projets qui sont susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement entrent dans le champ d'application de l'évaluation environnementale en fonction de critères précisés par les directives européennes selon leurs caractéristiques, leur localisation et leurs incidences, avec différents seuils de surface au sol, artificialisé ou non, de surface de plancher, de coût, de taille du projet.
– La réalisation d'une évaluation systématique ou au cas par cas. – Il existe deux modes d'entrée dans le champ d'application de cette évaluation environnementale.
La distinction entre projets soumis à évaluation environnementale systématique et ceux soumis à évaluation environnementale au cas par cas résulte de la nomenclature des projets que l'on trouve au tableau annexé à l'article R. 122-2 du Code de l'environnement, et qui les soumet à l'une ou l'autre de ces procédures selon leur localisation, notamment selon le caractère déjà artificialisé ou non du lieu en question et en fonction de seuils majoritairement d'emprise au sol ou de surface de plancher.
Ainsi le tableau annexé à l'article R. 122-2 comporte quarante-huit rubriques classées par thèmes ; on y trouve principalement les installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE), les installations nucléaires, les infrastructures ferroviaires, routières et aéroportuaires, les ouvrages et installations dans les milieux aquatiques, littoraux et maritimes, les forages et exploitations minières, les ouvrages de production et de transports d'énergie, ainsi que les travaux, ouvrages et opérations d'aménagements urbains et ruraux dont, outre les terrains de camping, pistes de ski, équipements sportifs et culturels ou opérations d'aménagements fonciers agricoles et forestiers, tous les travaux, constructions et opérations d'aménagements urbains qui relèvent de la rubrique 39, la plus fréquemment rencontrée dans nos dossiers.
Le champ d'application de l'étude d'impact a, dans un premier temps, reposé sur un système de liste, certes pratique et simple mais totalement arbitraire en termes d'impact notable sur l'environnement. Ainsi, certains travaux étaient dispensés d'étude d'impact en raison d'un seul critère financier, sans lien réel avec leurs incidences sur la santé et l'environnement. Sous la pression là encore du droit européen, la France s'est résignée à introduire l'examen au cas par cas avec la loi du 12 juillet 2010 et son décret d'application du 29 décembre 2010.

Évaluation environnementale systématique ou au cas par cas ?

L'entrée dans le champ d'application de l'évaluation environnementale (EE) des projets est :
– L'évaluation environnementale, un outil au service de la sobriété foncière. – Un décret du 24 septembre 2020 a modifié les hypothèses où les travaux, constructions et opérations d'aménagement sont soumis à évaluation environnementale systématique en intégrant un critère supplémentaire à celui des seuils de surface ou d'emprise au sol : le critère d'espace artificialisé ou non artificialisé.
Ainsi, depuis le 1er janvier 2021, seuls les projets qui excèdent certains seuils et qui sont réalisés dans un espace non artificialisé sont soumis à évaluation environnementale systématique. Quant aux espaces déjà artificialisés, ils font l'objet d'une évaluation environnementale au cas par cas (au-delà de certains seuils également).
L'évolution de la réglementation de l'évaluation environnementale va donc dans le sens de la sobriété foncière en faisant bénéficier potentiellement le porteur de projet d'un allègement des procédures et des délais s'il investit un site déjà urbanisé. En effet, s'il démontre l'absence d'incidences négatives notables sur l'environnement, il sera, après un examen au cas par cas, dispensé de réaliser une étude d'impact.
Dans le même sens, les projets de travaux ou d'aménagement réalisés dans un milieu déjà urbanisé donneront lieu à une simple participation du public par voie électronique dans le cadre du permis de construire ou d'aménager, plutôt qu'à une enquête publique qui nécessite la présence d'un commissaire-enquêteur. Les entrepôts également sont désormais soumis au régime allégé de l'enregistrement, dès lors qu'ils sont situés dans une zone déjà urbanisée et pour un volume dont le seuil a été relevé.
À l'inverse, les projets plus consommateurs d'espaces naturels, agricoles ou forestiers, donc non déjà artificialisés, doivent faire l'objet de la procédure plus lourde de l'évaluation environnementale systématique avec une autorisation environnementale qui sera délivrée après une étude d'impact et une enquête publique complètes. Sont ainsi visés les travaux de construction, par exemple d'entrepôts, de plus de 40 000 m² d'emprise au sol et quel que soit leur volume, situés en zone AU, A ou N.

Nomenclature EE systématique ou EE au cas par cas

Rubrique 39 du tableau annexé à l'article R. 122-2 du Code de l'environnement :

Le Commissariat général au développement durable édite, sous l'égide du ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires un précieux guide de lecture de la nomenclature, dont la dernière mise à jour date de mars 2023.

– Concernant les opérations d'aménagement. – L'article L. 300-1 du Code de l'urbanisme ne définit les opérations d'aménagement que par leur objet : mettre en œuvre un projet urbain, une politique locale de l'habitat, organiser l'accueil d'activités économiques, favoriser les loisirs et le tourisme, etc. L'arrêt Commune de Chamonix du 28 juillet 1993 a toutefois permis d'identifier trois critères cumulatifs : le projet doit répondre à l'un des objets de l'article L. 300-1 ; il doit présenter un impact significatif sur le site concerné et une certaine ampleur ; sa réalisation nécessite une combinaison d'interventions sur le tissu urbain.
Le juge administratif est venu préciser plus récemment la notion d'aménagement au sens de l'évaluation environnementale. Dans un arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 28 septembre 2022, la question était de savoir s'il fallait soumettre ou non à évaluation environnementale la création de deux lots à bâtir autorisés par une déclaration préalable, étant précisé que les lots avaient une dimension peu commune, à savoir 170 hectares pour l'un et plus de 45 hectares pour l'autre. Le juge a déclaré que, bien que constitutive d'un lotissement, l'opération ne portait que sur la division foncière d'une propriété sans conduire, par elle-même, à la création ou l'aménagement de voies, d'espaces ou d'équipements communs, et que par conséquent, elle ne constituait pas une opération d'aménagement au sens de l'article L. 300-1 du Code de l'urbanisme. En l'absence de véritable projet urbain, la déclaration préalable n'était donc pas soumise à évaluation environnementale. En effet, une telle déclaration préalable n'autorise que la division ; elle ne prévoit ni programme de constructions, ni même de travaux d'aménagement.
A fortiori, une ZAC constituera toujours une opération d'aménagement qui sera soumise, en fonction de sa surface, à examen au cas par cas ou à étude d'impact systématique.
On peut s'en remettre à la définition de l'opération d'aménagement des professeurs Fatôme et Richer : « Une finalité énoncée par l'article L. 300-1 du Code de l'urbanisme, une combinaison d'interventions sur le tissu urbain qui inclut des opérations à caractère foncier (acquisition et cession d'immeubles) et la réalisation d'équipements, ces interventions devant avoir une ampleur suffisante pour avoir un impact significatif sur le site concerné ». Le guide de lecture de la nomenclature précise que la notion d'opération d'aménagement doit s'entendre au sens des caractéristiques matérielles du chantier et non pas être comprise uniquement au sens de l'article L. 300-1 du Code de l'urbanisme qui prévoit un critère organique sans lien avec les incidences sur l'environnement.
Dans son arrêt du 28 septembre 2022, la cour administrative fait une analyse pragmatique du projet qu'il convient de soumettre à évaluation environnementale, plutôt que de s'attacher à la nomenclature qui raisonne principalement en termes de seuils et de rubriques.
Cette approche s'avère également importante au regard de la « clause filet » instaurée par un décret du 25 mars 2022. En effet la possibilité, pour l'autorité qui délivre l'autorisation, d'exiger une évaluation environnementale alors que le projet se situe en dessous des seuils même d'un examen au cas par cas, ne peut être utilisée qu'à l'occasion de la première demande d'autorisation au sens de l'évaluation environnementale. En reprenant l'exemple de l'arrêt susvisé, la « clause filet » ne pourrait donc pas être déclenchée à l'occasion de la simple déclaration préalable de division sans travaux, mais au stade de l'autorisation suivante.