Le droit de préemption pour l'adaptation des territoires au recul du trait de côte (DPRTC)
Le droit de préemption pour l'adaptation des territoires au recul du trait de côte (DPRTC)
Champ d'application
- que ce nouveau droit de préemption écarte le droit de préemption urbain, le droit de préemption en ZAD, et le droit de préemption défini à l'article L. 214-1 du Code de l'urbanisme, uniquement en cas d'aliénation à titre onéreux du terrain (ce qui signifie que reste ouverte la possibilité de préempter des fonds artisanaux, des fonds de commerce, des baux commerciaux et des terrains faisant l'objet de projets d'aménagement commercial, sauf en cas d'aliénation à titre onéreux de terrain) ;
- que ce nouveau droit de préemption ne prime pas le droit de préemption relatif aux espaces naturels sensibles.
- la cession de tout immeuble ou ensemble de droits sociaux donnant vocation à l'attribution en propriété ou en jouissance d'un immeuble ;
- les cessions de droits indivis, sauf lorsqu'elles sont consenties à l'un des coïndivisaires, et les cessions de tantièmes contre remise de locaux à construire ;
- les cessions de parts de SCI ou les cessions conduisant un acquéreur à détenir la majorité des parts de ladite société, lorsque le patrimoine de cette société est constitué par une unité foncière, bâtie ou non, dont la cession serait soumise au droit de préemption (hors les cessions de parts de SCI constituées exclusivement entre parents et alliés jusqu'au quatrième degré inclus) ;
- les immeubles construits ou acquis par les organismes mentionnés à l'article L. 411-2 du Code de la construction et de l'habitation et qui sont leur propriété, sous réserve des droits des locataires définis à l'article L. 443-11 du même code, à l'exception des immeubles ayant fait l'objet d'une décision d'agrément du représentant de l'état dans le département en vue de la construction ou de l'acquisition de logements neufs faisant l'objet d'un contrat de location-accession régi par la loi no 84-595 du 12 juillet 1984 définissant la location-accession à la propriété immobilière ;
- les adjudications.
Une liste d'exemptions réduite
Le praticien devra veiller à acquérir de nouveaux réflexes dans les zones concernées et ne pas
raisonner par analogie ou amalgame avec les exemptions habituelles au droit de préemption urbain
(DPU) : en effet, l'exception des ventes d'immeubles à construire ou les levées d'option dans le
cadre des crédits-bails ne sont pas reprises. La vigilance est de mise, et c'est là le risque
d'une rédaction d'article calquée sur celle du DPU.
La procédure
- à peine de nullité de l'aliénation , le dépôt, classique, de la déclaration en mairie comporte obligatoirement (sauf en cas de donation) l'indication du prix et des conditions de l'aliénation projetée (en cas d'adjudication l'estimation du bien ou sa mise à prix ; en cas de paiement en nature le prix d'estimation de cette contrepartie) ;
- le délai d'instruction est de deux mois, et le silence du titulaire vaut renonciation. Ce délai peut être suspendu par une demande de pièces complémentaires. Une visite peut également être demandée, mais contrairement au DPU, elle ne suspend pas le délai .
L'évaluation du bien objet de la préemption
à défaut d'accord amiable sur le prix, l'article L. 219-7 du Code de l'urbanisme fixe la
méthode à retenir. Dans sa rédaction issue de la loi Climat et Résilience, cet article indiquait
jadis que : « à défaut d'accord amiable, le prix d'acquisition est fixé par la juridiction
compétente en matière d'expropriation, en tenant compte de l'exposition du bien au recul du
trait de côte ; ce prix est exclusif de toute indemnité accessoire, notamment de l'indemnité de
réemploi. Le prix est fixé, payé ou, le cas échéant, consigné selon les règles prévues en
matière d'expropriation publique ».
L'ordonnance du 6 avril 2022 a largement modifié et complété le dispositif. Ainsi, le prix
d'un bien immobilier situé dans une zone exposée au recul du trait de côte délimitée à horizon
temporel de trente ans, est fixé en priorité par référence à des mutations et accords amiables
portant sur des biens de même qualification et avec un niveau d'exposition similaire situés dans
cette même zone. à défaut de références suffisantes, le prix est fixé en priorité, dans les
mêmes termes que ceux énoncés précédemment, mais par référence à des biens de même qualification
situés hors de la zone en question. Le texte précise ensuite que dans ce cas, et pour tenir
compte de la durée limitée restant à courir avant la disparition du bien, un abattement est
pratiqué sur la valeur de ces références. Cet abattement peut, notamment, être déterminé par
application d'une décote calculée en fonction du temps écoulé depuis la première délimitation de
ladite zone (en application de l'article L. 121-22-2), rapporté à la durée totale prévisionnelle
avant la disparition du bien à compter de cette première délimitation.
La date de référence, à laquelle est pris en considération l'usage effectif des immeubles en
vue de leur estimation, est la date à laquelle est devenu opposable aux tiers le plus récent des
actes rendant public, approuvant, révisant ou modifiant le plan local d'urbanisme ou la carte
communale et délimitant la zone exposée au recul du trait de côte dans laquelle il est situé
.
Comme le souligne un auteur, « avec un tel risque, l'on se demande si ces biens vaudront
encore quelque chose »
. Se pose donc la question de l'atteinte au droit de propriété, puisqu'en matière
d'expropriation « une juste » et préalable indemnité doit être versée au propriétaire. Or, en la
matière, il y a fort à parier que le bien aura été acquis à une valeur de marché très éloignée
de l'indemnité finalement déterminée. La tâche sera lourde pour les experts, qui devront fixer
une valeur sans avoir de réels précédents.