Un risque croissant de rareté ?
S'agissant de la ressource en eau, il convient de distinguer prélèvement et consommation.
Les prélèvements correspondent à l'eau douce extraite de sources souterraines ou de surface, pour
les besoins des activités humaines, mais ensuite restituée au milieu naturel. En France, les
prélèvements annuels sont de 33 milliards de mètres cubes, dont 80 % dans les eaux de surface : 51 %
pour le refroidissement des centrales électriques, 16 % pour les canaux de navigation, 16 % pour la
production d'eau potable, 9 % pour l'agriculture, 8 % pour l'industrie et les autres activités.
La consommation se distingue du prélèvement par le fait que l'eau n'est pas restituée : elle est
évaporée ou incorporée dans le sol. Pour la France, cela représente 4,1 milliards de mètres cubes
annuels : 58 % pour l'agriculture, 26 % pour l'approvisionnement en eau potable, 12 % pour le
refroidissement des centrales, 4 % pour les usages industriels.
Les chiffres précédents sont à mettre en lien avec le renouvellement de l'eau sur le territoire
métropolitain, par les précipitations et par les fleuves et rivières des territoires voisins : 210
milliards de mètres cubes par an
! Il ne faut toutefois pas s'abuser à partir de ces chiffres globaux. La ressource en eau est
l'objet de tensions dans l'espace et dans le temps. Dans le temps, 88 % de l'eau douce renouvelable
est apportée à l'automne et en hiver, alors que 60 % des consommations d'eau ont lieu en été. Dans
l'espace, le risque de sécheresse est plus élevé dans la région méditerranéenne ainsi que dans
l'Ouest. Mais le plus difficile à appréhender est l'effet du réchauffement climatique sur l'avenir
.
L'écosystème peut être résilient après une année catastrophique : par exemple la grave sécheresse
de 1976, causée par un événement climatique dit « El Niñ;o », qui avait provoqué une crise agricole
avec un déficit de pluie de 46 % au printemps
. La situation devient plus grave quand la sécheresse perdure ou se renouvelle. Les services
météorologiques emploient différents termes techniques pour désigner les records de chaleur, chacun
avec sa propre définition : canicule, vague de chaleur, dôme de chaleur, plume de chaleur, <em>
etc</em>. Une vague de chaleur, par exemple, signifie que l'indicateur thermique national est
supérieur pendant plus d'un jour à 25,3 °C, ou supérieur à 23,4 °C pendant au moins trois jours.
Selon Météo-France, avant 1989, il y avait en moyenne une vague de chaleur tous les cinq ans ;
depuis l'an 2000, il y en a une tous les ans. Cette récurrence d'épisodes chauds a ensuite des
conséquences sur la « sécheresse », même s'il faut bien distinguer sécheresse météorologique (manque
de pluie), sécheresse agricole (manque d'eau dans les sols) et sécheresse hydrologique (lacs,
rivières et nappes affectés). En tout cas, signe d'une évolution défavorable : 75 % des nappes
phréatiques françaises étaient en dessous de la normale en mars 2023, contre seulement 56 % en mars
2022
.
Finalement, le plus intéressant à observer, car le plus immédiat et le plus concret, est le sort
de l'Espagne, en voie d'aridification, voire de désertification pour l'essentiel de son territoire,
à force d'accumuler records de températures et de sécheresse
. Son sort est d'autant plus scruté par les observateurs que parmi les autres pays du pourtour
méditerranéen, l'Espagne a acquis la réputation de « potager de l'Europe ». Dans tous les cas, sa
capacité d'adaptation – ou bien son échec – sera riche d'enseignements.