– Plan. – Nous verrons successivement quels sont les critères qui permettent d'identifier une construction nouvelle (A), et ceux qui sont indifférents à cette qualification (B).
La notion de construction nouvelle
La notion de construction nouvelle
Les critères de qualification d'une construction nouvelle
– À la recherche d'une définition de la « construction nouvelle ». – Les articles L. 421-1 et R. 421-1 du Code de l'urbanisme posent le principe selon lequel toute construction nouvelle nécessite une demande de permis de construire. Ce principe connaît cependant de nombreuses exceptions, soit parce que l'autorisation requise ne sera pas un permis de construire, soit parce qu'aucune autorisation ne sera nécessaire.
L'autorisation de construire est donc déterminée en fonction de la nature du projet du maître d'ouvrage. Nous pouvons d'emblée relever que la notion de « construction » n'est toujours pas définie par les textes en dépit des réformes intervenues au fil du temps. Il revient donc aux juges administratif et judiciaire d'en déterminer les critères d'identification.
– Les critères jurisprudentiels connus. – Dans la plupart des cas, il ne fait aucun doute qu'un projet donné conduit à la réalisation d'une « construction ». Mais certaines situations sont sujettes à discussion.
Une jurisprudence abondante précise la notion de construction. Si les décisions sont dans leur grande majorité antérieures à la réforme de 2005, il convient toujours de s'y référer en l'absence d'une définition textuelle ou d'une remise en cause jurisprudentielle.
D'après les éléments cardinaux de cette jurisprudence, pour être qualifiable de construction, il faut :
- être en présence d'un bâtiment ou d'un ouvrage, serait-ce un ouvrage technique ;
- que cet ouvrage soit de nature immobilière, ce qui exclut tout ce qui peut être qualifié de mobilier (sauf texte contraire) ;
- lequel ouvrage doit être fixe. Cette notion de fixité doit néanmoins être nuancée. D'une part, parce qu'elle ne doit pas être confondue avec l'ancrage dans le sol d'un ouvrage qui n'est pas un élément de qualification d'une construction comme il sera vu juste après. D'autre part, parce que certains ouvrages peuvent, uniquement en raison de l'étendue de leur surface, être soumis à permis de construire ou à déclaration préalable alors même qu'ils sont simplement « posés » sur le sol : c'est le cas des abris de jardin ou encore des habitations légères de loisirs (même si de plus en plus d'entre elles sont telles qu'il s'agit de véritables petites constructions avec une implantation dans le sol).
Ces critères sont cumulatifs. De sorte que si l'un d'entre eux seulement vient à manquer, on peut penser que le juge acceptera plus difficilement l'existence d'une construction.
– Construction nouvelle / construction existante. – La question se pose de savoir si une construction peut être qualifiée de « nouvelle » en présence d'une construction existante. De la réponse à cette question dépend la nature de l'autorisation de construire à obtenir.
La présence d'une construction n'exclut pas la qualification de construction nouvelle. Il en va ainsi d'une démolition suivie d'une reconstruction, qu'elle soit à l'identique ou non.
Par ailleurs, si une construction existante n'est pas démolie mais que des travaux sont entrepris dessus, l'importance de ces derniers peut conduire à retenir la qualification de construction nouvelle. Le juge administratif a ainsi pu considérer que des travaux n'affectant pas la structure d'un ouvrage existant ne peuvent être considérés comme une reconstruction, a fortiori comme une construction nouvelle.
En définitive, dans tous les cas où un ouvrage est déjà présent, le caractère nouveau de la construction projetée se détermine par rapport à la construction préexistante : la construction nouvelle est donc définie « en creux » si elle se surajoute à l'existant.
– Les cas particuliers. – Le contentieux des autorisations d'urbanisme réserve parfois des surprises. La qualification de construction nouvelle ou de simple extension de l'existant ne déroge pas à la règle. Deux cas méritent d'être évoqués, même s'il en existe bien d'autres.
Le cas, en premier lieu, de la construction des piscines. Suivant une lecture littérale des textes, il s'agit en principe de constructions nouvelles. Mais une piscine a pu exceptionnellement être qualifiée par le Conseil d'État d'extension d'une construction existante au motif qu'elle était rattachée à la maison existante par un dallage, formant avec elle un même ensemble architectural.
Le Conseil d'État avait déjà eu l'occasion de se prononcer sur ce point en 2005. La piscine n'étant pas attenante au bâtiment existant, il avait considéré qu'elle ne pouvait être regardée comme une extension de celui-ci.
Le cas, en second lieu, des clôtures. Là encore, il s'agit normalement de constructions nouvelles. Le principe veut que la réalisation d'une clôture échappe à toute formalité préalable. Par exception, si la clôture se trouve comprise dans l'un des périmètres mentionnés à l'article R. 421-12 du Code de l'urbanisme ou s'il s'agit d'un mur dépassant deux mètres de hauteur, une déclaration préalable est nécessaire. En ce qui concerne les règles de fond, le Conseil d'État opère une distinction différente : par principe, les règles applicables sont celles qui régissent les clôtures. Par exception, si la clôture est incorporée à une construction principale, il convient de mettre en œuvre l'ensemble des dispositions du PLU applicables aux constructions et non uniquement celles qui sont propres aux clôtures. Toute la question est de savoir ce qu'il convient d'entendre par « incorporé »…
Les critères indifférents à la qualification d'une construction
– Les critères indifférents. – Selon les textes et la jurisprudence, ne sont donc pas déterminants de la qualification d'une construction :
- l'usage ou la destination d'un ouvrage ;
- la présence ou non de fondations ;
- les procédés et les matériaux utilisés ;
- la situation de l'ouvrage. Elle peut tout aussi bien être sur le sol, dans le sous-sol ou encore dans un volume d'air.
En ce qui concerne plus particulièrement la question des fondations, outre le cas des abris de jardin et des habitations légères de loisirs déjà évoqué, il est intéressant de rappeler le cas particulier des bateaux-logements.
Le juge administratif a en effet considéré que dans le cas où l'embarcation est assimilable à un établissement implanté à demeure, la qualification de bateau flottant s'efface au profit de celle de construction, relevant ainsi du champ du permis de construire, et ce même si le bateau conserve une certaine mobilité.
En l'espèce, non seulement l'embarcation avait vocation à être mise en place sur un plan d'eau privé dépourvu de toute communication avec un fleuve navigable ou un canal, mais il était aussi prévu d'aménager un système fixe d'assainissement et d'évacuation des eaux usées.
Il en va donc autrement pour les bateaux-logements qui occupent le domaine public maritime ou fluvial (nous pensons en particulier aux nombreuses péniches qui sont amarrées le long des quais du Rhône, de la Saône ou de la Seine). En ce qui les concerne, comme le rappelle une réponse ministérielle de 2017, aucune autorisation d'urbanisme n'est nécessaire.