La démolition à l'épreuve des enjeux environnementaux : les apports de la loi Climat et Résilience

La démolition à l'épreuve des enjeux environnementaux : les apports de la loi Climat et Résilience

– Enjeux climatiques et opérations d'urbanisme. – Si la question environnementale des projets a été traitée par les différentes lois dites « Grenelle », c'est indiscutablement la loi no 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dite « loi Climat et Résilience », qui a pris en compte les enjeux climatiques dans les opérations d'urbanisme et singulièrement dans les opérations de démolition. Ainsi au titre des mesures relatives à la démolition la loi envisage, d'une part, l'obligation de démolir dans certaines situations (A) et subordonne à titre expérimental, d'autre part, la démolition à une étude préalable (B).

L'obligation de démolir instituée par l'article 242 de la loi Climat et Résilience

– Les effets de l'érosion côtière et du recul du trait de côte. – Le phénomène d'érosion côtière a fait l'objet d'une attention spécifique du législateur qui s'est traduite dans la loi Climat et Résilience. Si elle définit un panel de mesures médiates conçues pour répondre aux enjeux de l'érosion côtière et du recul du trait de côte sur un horizon temporel de trente à cent ans, elle institue également des mesures immédiates valables dans les zones identifiées par les PLU comme exposées au recul du trait de côte, où la sécurité n'est plus assurée au-delà de trois ans.
Dans cette situation, le maire doit ordonner la démolition des constructions et des extensions de constructions existantes postérieures à la création de la zone, ainsi que la remise en état du terrain, sauf si les constructions et extensions sont réalisées dans le cadre spécifique du bail réel d'adaptation à l'érosion côtière (BRAEC). Les travaux consécutifs à l'arrêté de démolition sont dispensés de toute formalité au titre du Code de l'urbanisme en application de son article L. 421-5-1. Selon toute vraisemblance, ce régime exorbitant du droit commun aura un réel impact sur les propriétés et leur valeur.

L'étude préalable à la démolition instituée par l'article 224 de la loi Climat et Résilience

– Vers un contrôle des démolitions pour motif environnemental ? – De nombreuses métropoles, à l'instar de la Ville de Paris dont le PLU bioclimatique en cours d'élaboration prend une valeur emblématique, envisagent d'effectuer un contrôle plus resserré des démolitions, en exprimant la volonté de les soumettre à une évaluation environnementale lorsqu'elles accompagnent une opération de requalification urbaine. Si ce vœu apparaît répondre aux enjeux environnementaux, il n'en demeure pas moins que les démolitions ne figurent pas au tableau annexé à l'article R. 122-2 du Code de l'environnement. D'autres pistes méritent toutefois d'être explorées.
L'article L. 421-3 du Code de l'urbanisme par exemple autorise les communes ou les EPCI à rendre obligatoire le dépôt d'un permis de démolir sur la totalité ou une partie du territoire communal sur délibération du conseil municipal. Mais on peut s'interroger sur les finalités poursuivies. La protection de l'environnement et de la biodiversité peut-elle justifier un tel contrôle des démolitions ? La lutte contre l'artificialisation des sols et les îlots de chaleur en tissu urbain a-t-elle vocation à redonner à l'administration un pouvoir de contrôle des démolitions allant à contre-courant de la réforme issue de l'ordonnance de 2005 ?
La loi Climat et Résilience est à cet égard intéressante. Elle a introduit dans le Code de la construction et de l'habitation de nouveaux articles L. 122-1-1 et L. 126-35-1 organisant la réalisation d'une étude du potentiel de changement de destination et d'évolution préalablement à des travaux de construction et de démolition d'un bâtiment. L'analyse des orientations assignées au décret témoigne que cette mesure, dont l'application est différée au 1er juillet 2024, se veut expérimentale et souple.
Cet apport limité et expérimental de la loi Climat et Résilience souligne aussi bien le coût environnemental d'une démolition que l'utilité d'une réflexion sur le champ d'application du permis de démolir. On se demande s'il ne conviendrait pas de le rendre par principe obligatoire. L'étude susvisée de la loi Climat et Résilience pourrait alors constituer une pièce du dossier d'instruction.