Le prêt
Le prêt
– Intérêt de l’écrit. – Les proches se contentent trop souvent d’un engagement moral d’avoir à rembourser le prêt qu’ils ont consenti. Le manque de preuve insécurise l’opération tant du point de vue civil (une requalification du prêt en donation permettrait à un cohéritier de revaloriser le don en fonction du profit généré par l’investissement) que fiscal (une requalification en donation permettrait au fisc d’imposer la somme reçue aux droits de mutation par décès alors que le prêt familial n’est soumis à aucune imposition particulière).
À défaut de législation précise sur la question, la jurisprudence tente de s’adapter aux situations, au risque de fluctuer. Dans un arrêt du 10 février 2021, la Cour de cassation juge, au sujet d’un prêt familial non remboursé au décès du prêteur, qu’il ne peut y avoir de libéralité sans intention libérale. Alors qu’un mois plus tôt, la même formation de la Haute juridiction judiciaire avait approuvé la requalification en donation rapportable à la succession d’un prêt familial non remboursé, en dépit des termes d’une reconnaissance de dette.
– Contrat et taux d’intérêt. – À la différence d’un prêt souscrit auprès d’un professionnel, le contrat est ici réel, ce qui veut dire que sa validité est conditionnée à la remise des fonds. Lorsqu’il est réalisé entre particuliers, il obéit aux articles 1892 à 1904 du Code civil, auxquels s’ajoutent les articles 1905 à 1908 lorsqu’il est prévu un taux d’intérêt. Le taux d’intérêt ne se présume pas et doit être expressément prévu au contrat, ce qui ressort implicitement de l’article 1905 du Code civil. La loi exige même que le taux soit fixé par écrit s’agissant d’un taux conventionnel ; à défaut, le prêt ne pourra être rémunéré qu’au taux légal. Le taux est soumis à l’interdiction de l’usure, comme tout prêt bancaire. Notons que l’exigence d’une mention manuscrite a disparu.
– Forme. – Faute de conseil adéquat, un écrit sous signature privée est souvent retenu pour de mauvaises raisons tenant à son absence de coût et à sa prétendue simplicité. La dette peut aussi être reconnue par testament olographe, remis au notaire pour être conservé en son étude et inscrit au Fichier central des dispositions de dernières volontés ; le notaire rappellera à cette occasion le caractère toujours révocable du testament. Assurément, la forme la plus opportune demeure l’acte authentique, seul propre à conférer la force exécutoire, en particulier lorsqu’un enfant emprunte avec son conjoint, qui est un tiers.
– Garanties. – Comme pour le prêt bancaire, le prêt familial pourra s’accompagner de la constitution de garanties destinées à sécuriser le remboursement du prêt, à ceci près que le cautionnement sera ici personnel et mutuel. La forme notariée sera obligatoire s’il s’agit d’inscrire une hypothèque sur un bien de l’emprunteur.
– Prêts soumis à un régime spécifique. – Certains prêts dérogent au droit commun, car ils méritent de tenir compte des rapports particuliers qu’entretiennent les parties. Ces dérogations ne concernent que les modalités de remboursement du prêt, non celles de sa formation. Il s’agit des prêts entre époux, qui vont faire appel aux règles techniques des récompenses et/ou créances entre époux selon la réalité des mouvements intervenus entre des patrimoines, et des prêts entre partenaires de Pacs.
– Déclaration au fisc. – Tout prêt d’un montant supérieur à 5 000 € sur l’année doit être déclaré par l’emprunteur (ou à défaut par le prêteur) et adressé au service des impôts compétents. Les prêts d’un montant inférieur à 5 000 € sur l’année ne sont pas concernés par cette déclaration.