Les conditions financières du bail dans le secteur privé nous amèneront à étudier successivement la fixation et les évolutions du loyer (Sous-section I), les charges locatives (Sous-section II), les garanties proposées par le locataire (Sous-section III) ainsi que les relations financières dans le bail mobilité (Sous-section IV).
Dans le secteur privé
Dans le secteur privé
Fixation et évolutions du loyer
Fixation du loyer initial
– Notion de « zone tendue ». – Avant l’entrée en vigueur de la loi Alur du 24 mars 2014, régnait le principe de la libre fixation du loyer initial du bail, à l’exception des logements vacants situés dans une zone tendue. La loi Alur a souhaité encadrer la fixation initiale du loyer dans les zones où les tensions sur le marché locatif sont les plus fortes (« zones tendues »). Les zones tendues sont définies par l’article 17, I de la loi de 1989 et sont listées en annexe du décret no 2013-392 du 10 mai 2013, que l’on peut consulter ci-après :
https://www.legifrance.gouv.fr/loda/id/JORFTEXT000027399823">Lien
Au principe de liberté qui est de règle hors zone tendue, s’oppose donc l’encadrement des loyers dans les zones tendues, pouvant résulter d’un décret parfois doublé d’un arrêté préfectoral.
Hors zone tendue
Principe de liberté
L’article 17, II de la loi de 1989 énonce que la fixation du loyer des logements est libre. La loi « Climat et Résilience » du 22 août 2021 a complété ces dispositions relativement aux logements énergivores. Ainsi, les loyers des logements classés F et G ne peuvent plus être augmentés lors du renouvellement du bail ou de la remise en location, ni faire l’objet d’une révision en cours de bail. Ces dispositions sont entrées en vigueur depuis le 25 août 2022 en métropole et seront applicables à partir du 1er juillet 2024 en Guadeloupe, en Martinique, en Guyane, à La Réunion et à Mayotte.
Incidence des travaux
La prise en charge de travaux par l’une des parties peut avoir une incidence sur la fixation du loyer, selon que ces travaux sont réalisés soit par le locataire, soit par le bailleur. L’article 6, a de la loi de 1989 autorise la prise en charge de travaux d’amélioration par le locataire en contrepartie d’une baisse temporaire du loyer. Le bail doit également prévoir l’indemnisation du locataire en cas de départ anticipé. L’article 17-1, II de la loi de 1989 permet une augmentation du loyer consécutive à des travaux d’amélioration réalisés d’un commun accord par le bailleur, sous réserve de permettre au logement d’atteindre au moins la classe E. Cette condition supplémentaire résulte de la loi « Climat et Résilience ».
En zone tendue
Depuis la loi Alur, la fixation du loyer en zone tendue peut être soumise à un double encadrement résultant d’un décret (I) et parfois, en sus, d’un arrêté préfectoral (II).
Encadrement par décret
Champ d’application de l’encadrement
L’article 18 de la loi de 1989 prévoit que dans les zones tendues, « un décret en Conseil d’État, pris après avis de la Commission nationale de concertation, fixe annuellement le montant maximum des loyers des logements vacants et des contrats renouvelés ». Le dispositif actuel résulte du décret no 2017-1198 du 27 juillet 2017, dont les effets sont prorogés annuellement par décret. Le dernier en date est celui du 29 juin 2021, qui proroge le dispositif aux relocations et renouvellements de baux entre le 1er
août 2021 et le 31 juillet 2022. Il concerne les contrats de location de logements (nus, meublés, bail de mobilité) à usage de résidence principale ou professionnel et d’habitation principale, relevant de la loi de 1989. A contrario, il ne s’applique pas aux logements appartenant à des organismes HLM, aux logements conventionnés APL, aux logements relevant de la loi de 1948 et aux locations saisonnières.
Sont hors champ d’application du dispositif d’encadrement :
- les logements faisant l’objet d’une première location ;
- la relocation d’un logement vacant depuis plus de dix-huit mois ;
- la relocation d’un logement vacant ayant fait l’objet de travaux d’amélioration de moins de six mois d’un montant au moins égal à la dernière année de loyer.
Dispositif d’encadrement
– Un plafonnement… – Lors de la mise en location d’un logement vacant (« logement inoccupé proposé à la location »), l’article 3 du décret de 2017 plafonne le nouveau loyer au dernier loyer appliqué au précédent locataire. Celui-ci est toutefois révisé en fonction de la variation de l’indice de référence des loyers (IRL) dans le cas où aucune révision n’est intervenue au cours des douze mois précédant la conclusion du nouveau contrat de location.
– … susceptible de dérogations. – L’article 4 du décret de 2017 prévoit des dérogations à la limitation de l’évolution du loyer d’un logement vacant :
- en cas de travaux d’amélioration ou de mise en conformité réalisés par le bailleur pour un montant au moins égal à la moitié de la dernière année de loyer, la hausse du loyer annuel ne pourra excéder 15 % du coût réel des travaux TTC ;
- en cas de sous-évaluation manifeste du dernier loyer appliqué au précédent locataire, la hausse ne pourra excéder la moitié de la différence entre le loyer habituellement constaté dans le voisinage pour des logements comparables et le dernier loyer appliqué au précédent locataire.
Encadrement par arrêté préfectoral
Zones tendues concernées
La loi du 23 novembre 2018, dite « loi Elan », en son article 140, I, a mis en place un dispositif d’encadrement des loyers par arrêté préfectoral, à titre expérimental et pour une durée de cinq années à compter du 24 novembre 2018. Dans les zones tendues, les établissements publics de coopération intercommunale compétents en matière d’habitat, les établissements publics territoriaux de la Métropole du Grand Paris, la Métropole de Lyon et la Métropole d’Aix-Marseille-Provence pouvaient demander, avant le 24 novembre 2020, qu’un dispositif d’encadrement des loyers soit mis en place par arrêté préfectoral. Sur ce fondement, l’encadrement des loyers a été mis en place à Paris, à Lille, sur le territoire des établissements publics territoriaux de Plaine Commune et d’Est Ensemble, en Métropole de Lyon, à Montpellier et à Bordeaux.
Modalités d’encadrement
Dans chaque zone délimitée par décret, le préfet fixe chaque année un loyer de référence, un loyer de référence majoré (de 20 %) et un loyer de référence minoré (de 30 %). Ils sont exprimés au mètre carré de surface habitable, par catégorie de logements et par secteur géographique. Le loyer de base fixé librement entre les parties pour les nouvelles locations ou relocations ne peut excéder le loyer de référence majoré selon les caractéristiques du bien loué. Le dépassement du loyer de référence majoré est pénalement sanctionné par une amende de 5 000 € pour une personne physique ou de 15 000 € pour une personne morale. Elle est prononcée par le préfet à l’encontre du bailleur qui, malgré une mise en demeure, ne mettrait pas en conformité son bail et qui ne restituerait pas le trop-perçu de loyer (L. 23 nov. 2018, art. 140, VII). L’article 140, III B de la loi de 2018 permet toutefois d’appliquer un complément au loyer de base pour les logements présentant des « caractéristiques de location ou de confort par comparaison avec les logements de la même catégorie situés dans le même secteur géographique ».
Modifications du loyer
Le loyer peut être modifié en cours de bail par le jeu d’une clause d’indexation (A) ou lors de son renouvellement (B).
Révision annuelle du loyer
– Révision selon l’IRL. – Selon l’article 17-1 de la loi de 1989, lorsque le bail prévoit la révision du loyer, celle-ci intervient chaque année à la date convenue entre les parties ou, à défaut, au terme de chaque année du contrat. La révision annuelle ne peut excéder, à la hausse, la variation de l’indice de référence des loyers (IRL) publié par l’Insee chaque trimestre. La clause de révision ne joue que si le bailleur manifeste expressément son souhait de l’appliquer. À défaut, il est réputé avoir renoncé au bénéfice de la clause pour l’année concernée. Avant la loi Alur, la révision des loyers n’avait pas à être systématiquement réclamée par le bailleur, qui pouvait la revendiquer dans la limite de la prescription triennale. Depuis la loi Alur, le bailleur doit réclamer le bénéfice de la révision dans l’année suivant sa prise d’effet, faute de quoi il est censé y avoir renoncé (L. n° 89-462, art. 17-1). Il est désormais privé du bénéfice de la rétroactivité, car la révision ne prendra effet qu’à compter de sa demande.
– Révision pour travaux d’amélioration. – L’article 17-1, II de la loi de 1989 permet de réviser le loyer en cours de bail suite à des travaux d’amélioration réalisés par le bailleur sous réserve de respecter certaines conditions. D’une part, une clause expresse du bail doit avoir prévu cette possibilité et doit définir les travaux que le bailleur accepte de réaliser. D’autre part, la révision du loyer ne prendra effet qu’à la fin d’exécution des travaux d’amélioration.
– Révision interdite. – En outre, la loi « Climat et Résilience » du 22 août 2021 a complété l’article 17-1 en interdisant la révision (qu’il s’agisse de celle effectuée selon l’IRL ou de celle prévue pour travaux d’amélioration) dans les logements particulièrement énergivores, ceux relevant de la classe F ou de la classe G. Ces dispositions, relatives aux contrats de location conclus, renouvelés ou tacitement reconduits, sont entrées en vigueur depuis le 25 août 2022 en métropole, et seront applicables à partir du 1er juillet 2024 en Guadeloupe, en Martinique, en Guyane, à La Réunion et à Mayotte.
Révision au renouvellement du bail
La loi Alur du 24 mars 2014 et la loi Elan du 23 novembre 2018 ont encadré la fixation du loyer renouvelé dans les zones tendues (II). En dehors des zones tendues, le principe reste la fixité du loyer du bail renouvelé sauf lorsque le loyer est manifestement sous-évalué (I).
Hors zone tendue : en cas de sous-évaluation manifeste
En principe, à son expiration, le bail se renouvelle par tacite reconduction aux conditions du loyer du bail antérieur, sauf revalorisation selon la variation de l’indice de référence des loyers. L’article 17-2 de la loi de 1989 permet toutefois au bailleur de proposer au locataire une réévaluation du loyer lorsque celui-ci est manifestement sous-évalué.
La demande de révision du loyer à l’échéance d’un bail consenti hors zone tendue
1. Lors du renouvellement du bail d’un logement, le bailleur peut demander la réévaluation du loyer si celui-ci est manifestement sous-évalué. Cette demande est encadrée par une procédure précise.
2. Six mois avant le terme du bail, le bailleur doit proposer au locataire « un nouveau loyer fixé par référence aux loyers habituellement constatés dans le voisinage pour des logements comparables ». La notification intervient par lettre recommandée avec accusé de réception, par acte de commissaire de justice ou par remise en main propre. Elle doit reproduire l’intégralité de l’article 17-2 de la loi de 1989 et mentionner le montant du loyer ainsi que la liste des références ayant servi à le déterminer.
3. En cas de désaccord ou à défaut de réponse du locataire quatre mois avant le terme du bail, l’une ou l’autre des parties peut saisir la commission départementale de conciliation.
4. À défaut d’accord constaté par la commission, le juge doit être saisi avant le terme du contrat. À défaut de saisine du juge, le bail sera reconduit de plein droit aux conditions du bail antérieur.
La hausse convenue entre les parties ou judiciairement fixée s’applique par tiers ou par sixième selon que le bail est de trois ou six ans. Une hausse supérieure à 10 % s’appliquera par sixième annuel, quelle que soit la durée du bail renouvelé.
Comme précédemment, la loi « Climat et Résilience » du 22 août 2021 a complété l’article 17-2 de la loi de 1989 en excluant de la révision du loyer renouvelé les logements particulièrement énergivores.
En zone tendue
Comme pour la fixation initiale du loyer en zone tendue, la détermination du loyer renouvelé en zone tendue fait l’objet d’un encadrement par la loi (a) et par décret (b).
Encadrement par la loi du loyer renouvelé
Lorsqu’il existe un observatoire local des loyers agréé et que la commune a opté pour l’application de la procédure de fixation des loyers prévue par l’article 140 de la loi Elan, le loyer du bail renouvelé est limité par arrêté préfectoral et pourra être réajusté à la hausse ou à la baisse. L’article 140, VI de la loi du 23 novembre 2018 prévoit deux types d’actions, à la diligence du bailleur ou du locataire :
- une demande de diminution du loyer par le locataire si le montant du loyer est supérieur au loyer de référence majoré ;
- une demande de réévaluation du loyer par le bailleur si le montant du loyer est inférieur au loyer de référence minoré.
La révision a lieu selon une procédure analogue à celle décrite hors zone tendue.
La demande de révision du loyer à l’échéance d’un bail consenti en zone tendue : encadrement par la loi
1. La demande doit être faite par le locataire au moins cinq mois avant le terme du loyer. Si elle émane du bailleur, elle doit être faite six mois avant le terme. Elle doit reproduire, à peine de nullité, l’intégralité de l’article 140, VI de la loi de 2018 et mentionner le montant du loyer demandé, le loyer de référence minoré ou majoré selon que la demande est effectuée par le bailleur ou le locataire.
2. En cas de désaccord des parties ou à défaut de réponse quatre mois avant le terme, l’une des parties peut saisir la commission départementale de conciliation. Si la commission constate le désaccord des parties, le juge peut être saisi avant le terme du bail. Si le loyer renouvelé est fixé judiciairement, il sera applicable à compter de la date d’expiration du contrat, pour une durée de trois ou six ans selon que le bailleur est une personne physique ou une personne morale.
3. La hausse de loyer se fera selon les mêmes modalités qu’en cas de sous-évaluation manifeste hors zone tendue (V. supra, I). Cette action ne pourra être engagée pour les logements énergivores au sens de l’article L. 173-1-1 du Code de la construction et de l’habitation.
Encadrement par décret du loyer renouvelé
L’article 18 de la loi de 1989 permet au gouvernement de limiter chaque année par décret l’évolution des loyers renouvelés de logements situés en zone tendue. Le décret n° 2017-1198 du 27 juillet 2017 a fait l’objet de prorogations successives, la dernière étant celle du décret n° 2021-852 du 29 juin 2021. Le décret n’est pas applicable s’il a été pris un arrêté préfectoral sur le fondement de l’article 140, VI de la loi de 2018. Selon l’article 5 du décret du 27 juillet 2017, la hausse du loyer renouvelé en cas de sous-évaluation manifeste ne peut pas excéder la plus élevée des deux limites suivantes :
- la moitié de la différence entre le loyer au prix du marché et le loyer appliqué avant renouvellement, révisé en tenant compte de la variation de l’IRL ;
- une majoration du loyer annuel égale à 15 % du coût réel des travaux d’amélioration ou de mise en conformité du logement avec les normes de décence réalisés par le bailleur depuis la conclusion du bail initial avec le précédent locataire ou depuis le dernier renouvellement.
Les charges locatives
M. Sauvage définit les charges d’habitation comme « l’ensemble des dépenses de fonctionnement d’un immeuble avant ventilation entre propriétaire et locataires ». Il les qualifie de charges locatives lorsqu’elles sont supportées par le locataire et de charges récupérables lorsqu’elles sont acquittées par le bailleur, qui est autorisé à en exiger le remboursement par le locataire. Toutefois, la pratique regroupe ces deux types de charges sous l’appellation générique « charges locatives ». Nous étudierons successivement la détermination des charges incombant au locataire (§ I) et leur régime (§ II).
La détermination des charges locatives
La notion de charges locatives ou « charges récupérables » est la même dans le secteur privé et dans le secteur HLM. Ce sont des sommes accessoires au loyer principal, exigibles sur justification en contrepartie :
- des services rendus liés à l’usage des différents éléments de la chose louée ;
- des dépenses d’entretien courant et des menues réparations sur les éléments d’usage commun de la chose louée ;
- des impositions correspondant à des services dont le locataire profite directement.
La liste des charges récupérables est fixée par deux décrets en Conseil d’État : le premier du 26 août 1987 pour le secteur libre, et le second du 9 novembre 1982 pour les logements appartenant à des organismes HLM. Cette liste présente un caractère impératif : en effet, le décret se réfère aux dispositions d’ordre public de la loi de 1989 (L. no 89-462, art. 2, al. 1er). Les parties ne peuvent donc pas déroger aux dispositions de ce texte.
La liste est également limitative : si la dépense n’est pas mentionnée dans le décret, le bailleur ne peut pas en demander le remboursement au locataire. Il existe cependant des exceptions au caractère exhaustif de la liste. D’une part, un texte spécifique peut mettre à la charge du locataire une charge non énumérée par le décret (charges de télévision ou participation aux travaux d’économie d’énergie réalisés par le bailleur …). D’autre part, les parties peuvent qualifier de charges récupérables des charges non visées par le décret (rétribution d’un jardinier missionné par le bailleur). Enfin, il est possible de déroger à cette liste par des accords collectifs locaux, comme prévu par l’article 23 de la loi de 1989, modifié par la loi du 13 juillet 2006 portant engagement national pour le logement.
Le régime des charges locatives
– Principe d’interdiction du forfait pour charges. – L’article 23 de la loi no 89-462 du 6 juillet 1989 précise que les charges récupérables sont dues par le locataire sur « justification ». Ce principe prohibe donc les forfaits de charges. Cependant, la loi de 1989 y déroge dans trois domaines :
- primo, selon l’article 8-1 de la loi de 1989, les charges locatives d’un contrat de bail en colocation peuvent être récupérées par le bailleur au choix des parties soit dans les conditions de l’article 23, soit sous forme d’un forfait qui ne peut donner lieu à complément ou à régularisation ultérieure ;
- secundo, une exception similaire est prévue pour les locations meublées ;
- tertio, une dernière exception est prévue pour le bail mobilité : selon l’article 25-18 de la loi de 1989, les charges locatives sont récupérées par le bailleur sous forme d’un forfait versé simultanément au loyer, dont le montant et la périodicité de versement sont définis dans le contrat et qui ne peut donner lieu à complément ou à régularisation ultérieure.
– Réglementation de la provision pour charges. – Lorsque les charges sont provisionnées, elles font l’objet d’une régularisation au moins annuelle (L. n° 89-462, art. 23, al. 3). Elle s’effectuera au regard des charges effectivement payées par le bailleur. Un mois avant la régularisation, le bailleur adresse à chaque locataire un décompte par nature de charge. Il met à la disposition de ses locataires les pièces justificatives pendant une période de six mois à compter de l’envoi du décompte (L. n° 89-462, art. 23, al. 7).
Les garanties du bailleur
Il existe différents moyens pour un bailleur de se garantir de l’exécution par le locataire de ses obligations financières. Il s’agit principalement du dépôt de garantie (§ I) et du cautionnement (§ II), mais accessoirement d’autres garanties sont issues de la loi ou de la pratique (§ III).
Le dépôt de garantie
La fixation d’un dépôt de garantie
Le bail peut prévoir le versement d’un dépôt de garantie qui assurera « l’exécution de ses obligations locatives par le locataire ». En location nue, le dépôt de garantie ne peut être supérieur à un mois de loyer en principal. Ce plafond résulte de la loi du 8 février 2008 pour le pouvoir d’achat. En location meublée, le dépôt de garantie peut égaler deux mois de loyer hors charges (L. 6 juill. 1989, art. 25-6). Toutefois, aucun dépôt de garantie ne peut être stipulé lorsque le loyer est payable d’avance pour une période supérieure à deux mois. Le dépôt de garantie n’est pas révisable au profit du bailleur, sauf dans les logements conventionnés. Il n’est pas non plus productif d’intérêts au profit du locataire.
La restitution du dépôt de garantie
Depuis la loi Alur du 24 mars 2014, le dépôt de garantie doit être restitué « dans un délai maximal de deux mois à compter de la restitution des clés par le locataire ». Le délai de restitution est abaissé à un mois lorsque l’état des lieux de sortie est conforme à l’état des lieux d’entrée. Avant cette loi, le non-respect du délai de deux mois faisait produire intérêt au taux légal au profit du locataire (L. 6 juill. 1989, art. 22, al. 5). Depuis la loi Alur, la sanction consiste en une majoration du dépôt de garantie d’une somme égale à 10 % du loyer mensuel en principal, pour chaque période mensuelle commencée en retard. Cette majoration n’est pas due lorsque le locataire n’a pas communiqué sa nouvelle adresse lors de la remise des clés (L. 6 juill. 1989, art. 22, al. 7).
Le cautionnement
Un recours limité
Les alinéas 1 et 2 de l’article 22-1 de la loi du 6 juillet 1989 interdisent le recours au cautionnement du bail d’habitation dans un certain nombre d’hypothèses. L’alinéa 1er précise que « le cautionnement ne peut pas être demandé (…) par un bailleur qui a souscrit une assurance [ assurances loyers impayés ], ou toute autre forme de garantie [ à l’exception du dépôt de garantie ], garantissant les obligations locatives du locataire, sauf en cas de logement loué à un étudiant ou un apprenti ». L’alinéa 2 interdit le cautionnement pour des bailleurs personnes morales autres qu’une société civile constituée exclusivement entre parents et alliés jusqu’au quatrième degré inclus sauf s’il est demandé par un des organismes dont la liste est fixée par décret ou lorsque le logement est loué à un étudiant ne bénéficiant pas d’une bourse de l’enseignement supérieur.
La durée du cautionnement
– Stipulation du cautionnement. – L’engagement de la caution peut être stipulé pour une durée déterminée : pour la durée du bail et éventuellement de ses reconductions. La Cour de cassation a jugé qu’il était limité à la durée du contrat initial sauf clause expresse l’étendant à la période de tacite reconduction. Contrairement à la caution engagée à durée indéterminée, la caution à durée déterminée ne peut résilier unilatéralement son engagement. Elle sera tenue jusqu’au terme du bail ou de la tacite reconduction. En cas de colocation, l’engagement de la caution prend fin à la date d’effet du congé et lorsqu’un nouveau colocataire figure au bail. À défaut, la caution est encore tenue pour une durée expirant six mois après la date d’effet du congé.
– Résiliation du cautionnement. – L’article 22-1, alinéa 4, de la loi de 1989 accorde une faculté de résiliation à la caution dans deux hypothèses : soit le contrat ne comporte aucune indication de durée, soit la durée est stipulée indéterminée. La résiliation prend alors effet au terme du bail, de la tacite reconduction ou de son renouvellement au cours duquel le bailleur a reçu la notification de la résiliation. En cas de vente du bien loué, le cautionnement garantissant les obligations financières du locataire, sauf stipulation contraire, est transmis de plein droit à l’acquéreur, en tant qu’accessoire de la créance de loyer cédée.
Le formalisme du cautionnement
Les mentions obligatoires de l’acte de cautionnement
L’article 22-1 de la loi de 1989, modifié par l’ordonnance du 15 septembre 2021 portant réforme du droit des sûretés, impose que les engagements de caution signés à compter du 1er janvier 2022 fassent apparaître :
- le montant du loyer et les conditions de sa révision figurant au contrat de bail ;
- la reproduction de l’avant-dernier alinéa de l’article 22-1 ;
- la mention prévue par l’article 2297 du Code civil qui, depuis la loi Elan, ne doit pas être nécessairement manuscrite.
L’information de la caution
L’article 22-1 de la loi de 1989 impose, à peine de nullité, que le bailleur remette à la caution un exemplaire du contrat de location. Le bailleur doit également signifier à la caution le commandement de payer dans un délai de quinze jours à compter de sa signification au locataire. À défaut, la caution ne sera pas tenue de payer les pénalités ni les intérêts de retard.
Lorsque le créancier est un professionnel et la caution une personne physique, les articles L. 333-1 et L. 343-5 du Code de la consommation imposent que la caution soit informée dès le premier incident de paiement du locataire cautionné non régularisé dans le mois de l’exigibilité du paiement. À défaut, la caution ne sera pas tenue de payer les pénalités ou intérêts de retard échus entre la date du premier incident de paiement et celle de son information.
Les autres garanties
En dehors des assurances loyers impayés, le bailleur peut préférer une garantie autonome (A) ou adhérer au dispositif Visale (B).
La garantie autonome
– Une garantie limitée. – L’article 22-1-1 de la loi de 1989 permet au bailleur d’exiger, aux lieu et place de la caution, une garantie autonome au sens de l’article 2321 du Code civil, en garantie des sommes dues par le locataire. Elle ne peut que se substituer au dépôt de garantie dans la limite de son montant maximal autorisé. Le rédacteur de la garantie autonome devra stipuler expressément son maintien en cas de transmission du bien loué. À défaut, il y aura lieu d’appliquer le principe posé par l’article 2331 du Code civil, selon lequel, sauf convention contraire, cette sûreté ne suit pas l’obligation garantie.
La « garantie Visale »
– Une garantie encadrée. – Acronyme de « Visa pour le logement et l’emploi », la garantie Visale est un dispositif facultatif de caution locative à destination des bailleurs privés. Elle a été mise en place par la convention signée le 24 décembre 2015 entre l’État et Action Logement. Elle se substitue à la garantie des risques locatifs (GRL) et remplace également la garantie universelle des loyers (GUL). Elle s’applique aux baux conclus depuis le 1er février 2016. Il conviendra d’étudier successivement son champ d’application (I) et sa mise en œuvre (II).
Son champ d’application
Les bénéficiaires
Le dispositif Visale s’applique tout d’abord aux personnes qui ont entre dix-huit et trente ans, quelle que soit leur situation professionnelle. Il est également ouvert aux salariés de plus de trente ans commençant un nouvel emploi, depuis moins de six mois ou gagnant jusqu’à 1 500 € nets, en mobilité professionnelle ou titulaires d’une promesse d’embauche de moins de trois mois. Les locataires également éligibles au bail mobilité peuvent en bénéficier ainsi que les locataires, salariés ou non, logés par un organisme d’intermédiation locative. Toutefois, la garantie Visale est réservée aux candidats locataires dont le taux d’effort est inférieur ou égal à 50 %. Pour les salariés de moins de trente ans en contrat à durée indéterminée confirmé, le taux d’effort est ramené entre 30 et 50 %.
Les bailleurs éligibles
Le bailleur privé peut être une personne physique ou une personne morale à l’exception des organismes HLM et des SEM de construction ou de gestion de logements sociaux. Il ne doit pas appartenir à la même famille que le locataire. Il ne doit pas être couvert par d’autres garanties ayant le même objet que la garantie Visale (cautionnement ou assurance contre les risques locatifs). Le dispositif peut se cumuler avec l’avance « Loca-Pass » qui permet au locataire, sous conditions, de bénéficier d’un prêt sans intérêts pour financer le dépôt de garantie.
Action Logement propose un article très complet relatif au dispositif « Loca-Pass » :
https://www.actionlogement.fr/l-avance-loca-pass">Lien
Les logements concernés
Le logement ouvre droit à la garantie Visale s’il constitue la résidence principale du locataire (sauf bail mobilité). Il peut être loué vide ou meublé. Le logement doit être décent et respecter le règlement sanitaire départemental (RSD). Sont donc exclus les logements impropres à l’habitation, les logements insalubres ou sous arrêté de péril.
Les conditions du bail
Le bail devra être établi conformément aux dispositions du titre 1er de la loi de 1989 si le logement est loué nu, du titre 1er bis si le logement est loué meublé. Le bail comportera une clause prévoyant la résiliation de plein droit en cas de non-paiement des loyers et charges locatives aux termes convenus. Le loyer mensuel (charges locatives comprises) ne dépassera pas 1 500 € en Île-de-France et 1 300 € sur le reste du territoire.
La mise en œuvre du dispositif
L’adhésion au dispositif
Avant la signature du bail, le locataire et le bailleur ont des démarches à accomplir sur une plateforme unique, le site internet de Visale. Le locataire doit tout d’abord obtenir un visa certifiant son exigibilité à Visale, et l’engagement d’un comité interprofessionnel du logement (CIL) de se porter caution. Ensuite, le bailleur doit accepter les conditions de cautionnement Visale avant d’obtenir le contrat de cautionnement.
Pour un panorama du dispositif Visale :
http://www.visale.fr">Lien
La mise en jeu de la garantie
Visale couvre le paiement de loyers et de charges locatives survenus pendant les trois premières années du bail, soit au maximum trente-six mensualités. Les dégradations locatives sont désormais couvertes dans la limite de deux mois de loyers et charges. En cas de mise en jeu de la garantie, le locataire devra rembourser le comité interprofessionnel du logement qui sera subrogé dans les droits du bailleur en application de l’article 2308 du Code civil.
Les relations financières dans le bail mobilité
Le loyer
Hors zones tendues le loyer est libre, fixe, et payable mensuellement (A). En revanche, son montant est limité en zones tendues (B).
Un loyer libre hors zones tendues, fixe, et payable mensuellement
La loi Elan a posé comme principe que le loyer « est librement fixé et ne peut être révisé en cours de bail ». Par un jeu de renvoi de texte, les limites que connaissent les baux d’habitation de la loi de 1989 au sujet du paiement du loyer s’appliquent également au bail mobilité. Ainsi, par exemple, le loyer est payable mensuellement lorsque le locataire en fait la demande. Si le caractère fixe du loyer ne souffre d’aucune exception (il faut ainsi bannir les clauses de révision du loyer), la liberté connaît quant à elle des limites, étant donné qu’il s’agit dans les deux cas de protéger le locataire.
Les limites à la liberté en zones tendues
En zone tendue, l’article 140 de la loi Elan, applicable au bail mobilité, permet au préfet de fixer chaque année, par arrêté, des plafonds de loyers. En outre, les loyers y sont également encadrés entre deux mises en location sur le marché : l’augmentation ne peut être supérieure à la valeur de l’indice IRL. Toutefois, pour que cette limitation s’applique, le bien immobilier doit être proposé à la location moins de dix-huit mois avant le départ du dernier locataire ; à défaut, le loyer pourra à nouveau être fixé librement, comme lors de la première mise sur le marché locatif.
Les charges locatives
– Un forfait… – En vertu de l’article 25-18 de la loi du 6 juillet 1989, les charges locatives d’une location-mobilité sont payées au propriétaire sous la forme d’un forfait versé simultanément au loyer. Elles ne donnent donc pas lieu à régularisation, les différences faisant le profit ou la perte des parties. Ce système, qui est une faculté pour les locations meublées en résidence principale, est la règle pour le bail mobilité, et apporte une souplesse bienvenue pour ce type de location de courte durée.
– … raisonnablement encadré. – Trois garde-fous sont prévus par le texte :
- le montant du forfait et la périodicité de versement sont inscrits dans le bail ;
- le montant du forfait de charges est fixé en fonction des montants exigibles par le bailleur en application de l’article 23 de la loi du 6 juillet 1989 ;
- ce montant ne peut pas être manifestement disproportionné par rapport au dernier décompte par nature de charges rapporté à la périodicité de versement du forfait.
Les garanties financières
Après avoir souligné la prohibition du dépôt de garantie, une des spécificités du bail mobilité (A), nous examinerons deux garanties permises par la loi (B
et C).
La prohibition du dépôt de garantie
Encore une fois, les termes de la loi sont clairs : « Aucun dépôt de garantie ne peut être exigé par le bailleur ». L’absence de dépôt de garantie est d’ailleurs à mentionner obligatoirement dans le contrat de bail.
La garantie Visale et le cautionnement « classique »
Sans être directement prévue par le titre I ter de la loi du 6 juillet 1989, la garantie Visale, « étroitement liée au bail mobilité dans l’esprit de ses promoteurs », induit la prise en charge gratuite des impayés de loyers et des dégradations locatives du locataire.
On peut lire ci-dessous l’article d’Action Logement intitulé « Bail mobilité : les choses à savoir » :
https://www.actionlogement.fr/offre-de-location/dossiers/bail-mobilite">Lien
À défaut d’opter pour la garantie Visale, qui a priori sera la solution de principe au regard du parallélisme entre les publics éligibles au bail mobilité et les bénéficiaires de cette garantie, les parties au bail peuvent opter pour un cautionnement « classique ».
L’absence de solidarité entre les colocataires et/ou leurs cautions
« Toute clause prévoyant une solidarité entre les colocataires ou leurs cautions est réputée non écrite ». La loi Alur avait déjà limité dans le temps la solidarité entre locataires ainsi que celle entre colocataires et cautions. Même si le risque de défaillance est plus faible pour le bailleur, en présence ici d’un bail de courte durée, le législateur a choisi d’avantager les locataires, comme s’il voulait mettre un terme à cette pratique de solidarité.