Les procédures aval de participation du public

Les procédures aval de participation du public

– Respect du principe du droit à l'information. – La procédure d'enquête publique constitue la forme la plus élaborée et la plus ancienne de la participation des citoyens à l'action de l'administration. Son originalité tient au fait qu'elle a pour objet non seulement d'informer le public et de le faire participer à la décision par le biais de ses observations ou propositions, mais aussi de générer un avis que le commissaire-enquêteur devra formuler au moyen de ses conclusions.
L'enquête publique fait partie intégrante du processus d'évaluation environnementale que nous étudierons plus loin, pour lequel elle constitue une modalité de participation du public.
– Bref historique et évolution de la réglementation. – Les premières enquêtes publiques remontent au XIX e siècle. Elles visaient à assurer la protection du droit de propriété dans le cadre de la déclaration d'utilité publique de projets emportant expropriation. À partir des années 1970, une fonction supplémentaire a été donnée à l'enquête publique. Dans le sillage du développement de la démocratie administrative et de la démocratie environnementale, la loi no 83-630 du 12 juillet 1983, dite « loi Bouchardeau », en a fait un instrument de protection de l'environnement, s'ajoutant à celle de la propriété privée.
La loi no 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement, dite « loi Grenelle 2 », a apporté des modifications de forme et de procédure significatives, en vue de rationaliser et de simplifier le déroulement des enquêtes publiques. Elle regroupe notamment les nombreuses procédures d'enquête publique existantes en deux grandes catégories dotées d'un régime juridique propre : l'enquête publique à finalité principalement environnementale et l'enquête publique non environnementale. La première relève du Code de l'environnement, la seconde du Code de l'expropriation pour cause d'utilité publique.
Toujours en vue d'une simplification, une troisième catégorie a été instituée par la loi no 2015-1341 du 23 octobre 2015 créant le Code des relations entre le public et l'administration : l'enquête publique de droit commun, dite « innomée », qui n'est ni une enquête publique environnementale, ni une enquête publique d'utilité publique. Elle est régie par les articles L. 134-1 à L. 134-35 de ce code.
La procédure des enquêtes publiques environnementales a été de nouveau réformée par l'ordonnance no 2016-1060 du 3 août 2016, qui en a sensiblement réduit le champ d'application en faisant passer un grand nombre de projets de la rubrique « Étude d'impact systématique » à la rubrique « Étude d'impact après examen au cas par cas ». En matière d'installations classées également, la soumission de différents projets au régime – simplifié – de l'enregistrement en lieu et place de l'autorisation, a contribué à soustraire un certain nombre de projets de l'obligation de réaliser une enquête publique. La diminution du nombre d'enquêtes publiques résulte également de plusieurs textes qui lui substituent le régime simplifié de la participation du public par voie électronique.
– Plan. – Avant d'étudier la procédure de l'enquête publique environnementale (B) et ses suites (C), nous devons déterminer son champ d'application (A). Ce sera l'occasion d'évoquer succinctement les autres enquêtes publiques, dont celle préalable à une déclaration d'utilité publique que nous pouvons rencontrer dans nos dossiers. Afin d'éviter des doublons, certaines situations donnent lieu à une enquête unique, ou à plusieurs enquêtes communes et coordonnées (D). Le numérique s'est déployé progressivement dans ces procédures (E) jusqu'à donner lieu à une nouvelle procédure hybride de consultation (F).

Le champ d'application des enquêtes publiques

– Distinctions. – L'étude du champ d'application des procédures d'enquête publique nous amène à différencier les enquêtes environnementales issues de la loi précitée du 12 juillet 2010 et les enquêtes relevant d'autres procédures dont la plus emblématique est liée aux déclarations d'utilité publique.

Les enquêtes publiques environnementales

– Article L. 123-2 du Code de l'environnement. – L'enquête publique environnementale vise à répondre à certains des grands principes énoncés à l'article L. 120-1 du Code de l'environnement sur la participation du public à l'élaboration des projets d'aménagement ou d'équipement ayant une incidence importante sur l'environnement ou l'aménagement du territoire.
Son champ d'application est défini à l'article L. 123-2 du même code qui soumet à enquête publique les projets de travaux, d'ouvrages ou d'aménagements astreints à évaluation environnementale. Il convient de se référer à la nomenclature du tableau annexé à l'article R. 122-2 dudit code.
Il est cependant fait exception à ce principe d'enquête publique environnementale pour :
  • les projets de ZAC ;
  • les projets auxquels s'applique, au titre de la première autorisation mentionnée au III de l'article L. 122-1-1, la consultation du public prévue à l'article L. 181-10-1 ; il s'agit de la nouvelle consultation du public créée par la loi Industrie verte du 23 octobre 2023 que nous étudierons plus loin ;
  • les projets temporaires ou réputés de faible importance listés à l'article R. 123-1 du Code de l'environnement ;
  • les demandes de permis de construire, d'aménager ou de démolir et les déclarations préalables pour des projets de travaux, de construction ou d'aménagement soumis à évaluation environnementale suite à un examen au cas par cas, lesquels font alors l'objet d'une participation du public par voie électronique que nous étudierons ultérieurement.
L'article L. 123-2 du Code de l'environnement soumet par ailleurs à enquête publique certains documents de planification urbaine que nous ne détaillerons pas dans nos propos.
– Cas de dispense. – Sont dispensés d'enquête publique environnementale les travaux, installations et aménagements liés aux opérations de la Défense nationale, ainsi que les travaux ou ouvrages exécutés en vue de prévenir un danger grave et immédiat et les travaux d'entretien, de maintenance ou de grosses réparations, sauf exception.

Les autres enquêtes publiques

– Recensement. – Les projets qui ne relèvent pas du champ défini à l'article L. 123-2 du Code de l'environnement, qui doivent faire l'objet d'une enquête publique, sont soumis aux dispositions particulières auxquelles ils sont assujettis. Parmi celles-ci, les enquêtes préalables à une déclaration d'utilité publique font l'objet d'un régime spécifique.

Enquêtes publiques préalables à une déclaration d'utilité publique

– Dualisme procédural. – La spécificité des enquêtes publiques préalables à une déclaration d'utilité publique résulte de leur dualisme procédural :
  • si l'opération est susceptible d'affecter l'environnement, la procédure d'enquête publique est régie exclusivement par les articles L. 123-1 à L. 123-19 du Code de l'environnement ;
  • si, au contraire, l'opération n'est pas susceptible d'affecter l'environnement, la procédure d'enquête publique préalable à la déclaration d'utilité publique relève des articles L. 110-1 et suivants du Code de l'expropriation pour cause d'utilité publique.
Il convient cependant de ne pas exagérer la portée de ce dualisme, dans la mesure où l'enquête publique du Code de l'expropriation pour cause d'utilité publique présente désormais beaucoup de similitudes avec celle du Code de l'environnement.
– Déclaration de projet consécutive à une enquête publique environnementale. – Lorsqu'un projet public de travaux, d'aménagement ou d'ouvrages, en raison de sa nature, de sa consistance ou de sa localisation est susceptible d'affecter l'environnement, cette opération doit donner lieu à une enquête publique régie par le Code de l'environnement.
À l'issue de cette enquête environnementale, la personne publique bénéficiaire de l'opération projetée doit se prononcer sur l'intérêt général de celle-ci, au moyen d'une déclaration de projet, en vue notamment de parvenir à sa déclaration d'utilité publique.
Issue de la loi no 2002-276 du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité, la déclaration de projet (souvent nommée « DP Code de l'environnement ») permet d'affirmer l'intérêt général des projets publics soumis à enquête publique environnementale. Elle constitue une obligation renforcée de motivation de la part des maîtres d'ouvrage public qui doivent, dans un souci de démocratie et de transparence, prendre publiquement leurs responsabilités sur la base de décisions claires sur les projets de travaux, d'ouvrages ou d'aménagement qu'ils souhaitent réaliser. Elle est régie à la fois par le Code de l'environnement (art. L. 126-1) et par le Code de l'expropriation pour cause d'utilité publique (art. L. 122-1).
En l'absence de déclaration de projet, alors qu'elle était requise, aucune autorisation de travaux ne peut être délivrée. Il convient donc d'être rigoureux dans la vérification de la procédure pour analyser correctement la régularité de l'autorisation finale.
La déclaration de projet est suivie d'une déclaration d'utilité publique lorsque le projet en cause nécessite le recours à une expropriation. Si l'opération, outre une expropriation, nécessite de mettre en compatibilité le PLU, cette mise en compatibilité résultera non pas de la déclaration de projet, mais de la déclaration d'utilité publique.
La déclaration de projet ci-dessus exposée ne doit toutefois pas être confondue avec la déclaration de projet du Code de l'urbanisme (art. L. 300-6), qui est une procédure de mise en compatibilité simple et accélérée d'un SCoT ou d'un PLU afin de permettre la réalisation de toute action ou opération d'aménagement ainsi que des programmes de construction, qu'ils soient publics ou privés. À la différence de la déclaration de projet du Code de l'environnement, celle-ci est facultative et ne peut pas être utilisée pour les projets qui nécessitent de réaliser des expropriations. En revanche, elle suppose que le projet présente un intérêt général ; c'est d'ailleurs ce qui justifie la mise en compatibilité des règles d'urbanisme qui doivent être « sur-mesure » et qui peuvent faire l'objet d'allègements procéduraux importants.

Processus d'enquête publique environnementale et de déclaration de projet

Enquêtes publiques ne relevant ni du Code de l'environnement ni du Code de l'expropriation pour cause d'utilité publique

– Les enquêtes soumises à un régime spécifique. – Il en va ainsi de l'enquête publique préalable à l'aliénation des chemins ruraux, au déclassement des voies communales « lorsque l'opération envisagée a pour conséquence de porter atteinte aux fonctions de desserte ou de circulation assurées par la voie », ou au transfert de propriété des voies privées ouvertes à la circulation publique.
– L'enquête publique innomée. – Depuis son entrée en vigueur le 1er janvier 2016, le Code des relations entre le public et l'administration régit, aux articles L. 134-1 à L. 134-35, les enquêtes publiques dites « innomées », qui ne relèvent ni du Code de l'environnement, ni du Code de l'expropriation, ni d'un régime spécifique.

La procédure d'enquête publique environnementale

– Matrice de référence. – L'enquête publique environnementale, née de la loi dite « Bouchardeau » de 1983, dans le sillage du mouvement de démocratisation de l'administration propre aux années 1970, est progressivement devenue la matrice de référence des procédures d'enquête publique.

Organisation générale de l'enquête publique

– Autorité compétente. – « L'enquête publique est ouverte et organisée par l'autorité compétente pour prendre la décision en vue de laquelle l'enquête est requise. » L'article L. 123-3 du Code de l'environnement pose un principe d'autorité unifiée. En pratique, il s'agira généralement du président de l'organe délibérant de la collectivité ou de l'établissement public concerné par le projet.
Il s'agira toutefois du préfet en matière d'installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE), d'installations, ouvrages, travaux et activités (IOTA), et pour toutes les décisions relevant d'une autorité nationale de l'État, ainsi que dans des cas particuliers listés à l'article R. 123-3 du Code de l'environnement (pluralité de territoires concernés par le projet notamment).
– Moment de l'enquête publique. – L'enquête publique doit permettre au public de disposer d'une information fiable et, le cas échéant, de formuler des observations et de faire des propositions. Elle intervient donc après la phase d'instruction de la demande d'autorisation environnementale, pendant laquelle l'administration examine la demande, recueille les avis des personnes publiques consultées, notamment celui de l'autorité environnementale, ainsi que la réponse du pétitionnaire.
L'enquête publique vise par ailleurs à éclairer l'autorité publique dans sa prise de décision en lui permettant de prendre en compte les intérêts des tiers et les observations du public ; elle doit donc intervenir préalablement à la décision requise pour la mise en œuvre d'un projet ou, en l'absence de décision spécifique, avant le commencement de sa réalisation, les textes n'exigeant toutefois aucun délai minimum.
– Prise en charge financière. – Le responsable du projet doit supporter l'intégralité des frais liés à l'enquête publique, qu'il s'agisse de l'indemnisation du commissaire-enquêteur, de l'organisation de la réunion publique éventuelle ou de l'expert dont aurait besoin l'autorité compétente.

Ouverture de l'enquête publique

Désignation du commissaire-enquêteur

– Désignation par le président du tribunal administratif. – Selon la nature et l'ampleur de l'opération concernée par l'enquête publique, celle-ci va être menée par un commissaire-enquêteur ou une commission d'enquête, désigné par le président du tribunal administratif territorialement compétent, dans les quinze jours de la demande. L'absence de respect de ce délai ne dessaisit pas pour autant le président du tribunal administratif et n'entache pas la procédure d'irrégularité. Quant à la nomination du commissaire-enquêteur par le président du tribunal administratif, elle ne présente pas les caractères d'un acte juridictionnel mais d'un acte administratif préparatoire insusceptible, en tant que tel, de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir.
Le président du tribunal administratif n'est libre de son choix qu'au sein de la liste publique d'aptitude qu'une commission départementale placée sous sa présidence, et révisée chaque année, établit selon des critères de compétence et d'expérience.
– Commissaire-enquêteur ou commission d'enquête ? – Quant au choix de la formule entre commissaire-enquêteur ou commission d'enquête qui doit comporter un nombre impair de membres et un président, il relève du pouvoir discrétionnaire du président du tribunal. Il est recommandé d'opter pour la formation collégiale lorsqu'il s'agit de mener une enquête sur des « opérationsimportantes de dimension régionale ou nationale ainsi que pour les opérations complexes ou qui posent des problèmes délicats ».
– Cas particulier du garant au sens du Code de l'environnement. – Ainsi que nous l'avons vu dans le cadre de la notion de continuum de la participation, le garant qui a mené une concertation préalable peut être désigné par le président du tribunal en qualité également de commissaire-enquêteur s'il est inscrit sur la liste d'aptitude.

La question de la responsabilité pour manquements du commissaire-enquêteur

Au-delà de la qualité de l'enquête menée et du rapport produit à son issue, l'inaptitude d'un commissaire-enquêteur peut poser un réel problème de responsabilité à l'autorité compétente pour prendre la décision.

La responsabilité de l'État, qui a désigné le commissaire-enquêteur par décision du président d'un tribunal administratif, pourrait-elle être engagée en cas de faute dudit commissaire-enquêteur ? Par exemple, s'il n'a pas suffisamment motivé ses conclusions et a entraîné par ses manquements l'annulation de l'acte ayant donné lieu à l'enquête ?

La jurisprudence administrative exclut une telle responsabilité. Alors même que l'État détermine et garantit ses conditions d'exercice, la mission des commissaires-enquêteurs est menée pour l'autorité responsable du projet sous sa responsabilité. Comme le juge le Conseil d'État, il appartient, le cas échéant, à un maire de ne pas donner suite à une procédure entachée d'irrégularité.

Le maître d'ouvrage d'un projet doit donc non seulement le qualifier pour savoir s'il entre dans le champ d'application de l'enquête publique, mais aussi, dans l'affirmative, se faire juge de la régularité de la procédure d'enquête. Il doit donc se montrer vigilant tant sur le choix du commissaire-enquêteur que sur la régularité de la procédure d'enquête menée.

Arrêté d'ouverture de l'enquête publique

– Adoption et publicité. – Quinze jours au moins avant l'ouverture de l'enquête, et après concertation avec le commissaire-enquêteur (ou le président de la commission d'enquête), l'autorité compétente donne par arrêté toutes les informations utiles relatives à l'enquête publique environnementale, notamment l'objet et les caractéristiques du projet, l'identité de ses responsables et du commissaire-enquêteur, la décision pouvant être prise à l'issue du processus, la date d'ouverture, la durée et toutes les modalités de l'enquête.
Cet arrêté fait l'objet, dans le même délai, de mesures de publicité sur le site internet de l'autorité compétente, dans des journaux locaux, d'un affichage sur le site concerné par le projet et d'un envoi du dossier complet au maire de la ou des communes concernées.
L'arrêté d'ouverture de l'enquête publique est un acte administratif préparatoire qui ne peut donc faire, en tant que tel, l'objet d'un recours pour excès de pouvoir. Ses irrégularités éventuelles ne peuvent être soulevées que par voie d'exception, à l'occasion d'un recours engagé contre la décision qui sera prise à l'issue de l'enquête. En revanche, le refus d'ouvrir une enquête peut être déféré devant le juge administratif qui exercera un contrôle restreint.

Composition du dossier

– Contenu variable. – Cette composition résulte, pour l'enquête publique environnementale, de l'article R. 123-8 du Code de l'environnement. Si le dossier doit comporter certaines pièces obligatoires, son contenu varie en fonction du projet concerné.
En premier lieu, le dossier doit comprendre les pièces et avis exigés par les législations et réglementations applicables au projet. Ainsi par exemple, pour un permis de construire, le dossier d'enquête devra comprendre le dossier de demande du permis (notice et plans du projet architectural, etc.).
En second lieu, le dossier sera a minima composé :
  • si le projet est soumis à évaluation environnementale, de l'étude d'impact du projet et de l'avis de l'autorité environnementale ;
  • si le projet n'est pas soumis à évaluation environnementale, de la décision de non-soumission après examen au cas par cas, de l'étude d'incidences et de son résumé non technique, ainsi que d'une note de présentation du projet.
La complétude du dossier est importante : l'omission d'une des pièces requises est susceptible d'affecter la légalité de l'enquête et, incidemment, de la décision objet de ladite enquête.

Durée de l'enquête

– Durée minimale. – La durée de l'enquête publique est fixée par l'autorité compétente pour l'ouvrir et l'organiser. Elle doit être d'une durée minimum de quinze jours, et de trente jours pour les projets soumis à évaluation environnementale. Cette durée peut être prolongée de quinze jours maximum si le commissaire-enquêteur décide d'organiser une réunion d'information et d'échange avec le public.
L'enquête doit être organisée de manière à permettre une prise de connaissance effective de la plus grande partie de la population. Une enquête pendant les vacances scolaires n'est pas forcément irrégulière, mais la fermeture d'une mairie pendant dix jours à l'intérieur du délai de l'enquête d'un mois la rendrait irrégulière.
Enfin, si un registre dématérialisé est mis en place pour recueillir les observations et propositions du public, il doit être maintenu en ligne pendant toute la durée de l'enquête.

Déroulement de l'enquête

– Mission et pouvoirs du commissaire-enquêteur. – Le rôle du commissaire-enquêteur commence avant même l'adoption de l'arrêté d'ouverture de l'enquête. L'article R. 123-9 du Code de l'environnement prévoit en effet une concertation préalable entre l'autorité compétente pour ouvrir et organiser l'enquête et le commissaire-enquêteur. Dans les faits, ce moment de concertation est malheureusement souvent négligé alors qu'il donne l'occasion d'améliorer le déroulement de l'enquête et d'éviter une éventuelle irrégularité.
La mission première du commissaire-enquêteur est de permettre au public de disposer d'une information la plus fiable et complète possible sur le projet afin de le faire participer effectivement au processus de décision.
Pour mener à bien cette mission, il dispose de pouvoirs spécifiques pour recevoir toute information et demander au maître d'ouvrage de communiquer au public des documents complémentaires ; visiter les lieux sauf d'habitation ; entendre toute personne concernée par le projet qui en fait la demande et auditionner toute personne qu'il jugerait utile ; organiser, sous sa présidence, toute réunion d'information et d'échange avec le public, en présence du maître d'ouvrage ; demander la désignation d'un expert au président du tribunal administratif.
– Observations du public. – Pour atteindre une population la plus large possible, plusieurs modes de publicité et de communication sont possibles : mise en ligne du dossier d'enquête publique sur le site internet de l'autorité compétente, consultation sur support-papier en plusieurs lieux, sur des postes informatiques dans des lieux publics, etc.
Les observations et propositions du public sont également recueillies par le biais de plusieurs supports : consignation sur un registre d'enquête papier et le cas échéant sur un registre dématérialisé, observations écrites et orales aux jours et heures de consultation, courrier, mail, etc. Ces observations et propositions du public sont consultables.
– Suspension éventuelle. – Le Code de l'environnement, en son article L. 123-14, prévoit une possibilité de suspension de l'enquête pour une durée maximale de six mois. Cette possibilité ne peut être utilisée qu'une seule fois, et surtout elle suppose que des « modifications substantielles » soient nécessairement apportées à l'enquête publique elle-même, à l'étude d'impact ou à l'étude des incidences environnementales. Ces modifications doivent être entendues au sens de changements modifiant l'économie générale du projet.
Ce critère qui, nous le verrons, est aussi celui de l'enquête complémentaire éventuelle, est toutefois difficile à appréhender compte tenu de la part de subjectivité qu'il comporte. Vont se mêler des considérations d'espèces qui peuvent être la prise en compte de propositions ou d'observations formulées pendant l'enquête, d'autres plus objectives comme l'importance des modifications apportées au projet initial et leur impact sur l'environnement. Sera également prise en compte l'incidence de ces modifications sur l'appréciation objective que le public peut en faire.

Fin de l'enquête publique

– Clôture de l'enquête. – À l'expiration de sa durée initiale ou prolongée, le registre de l'enquête est mis à la disposition du commissaire-enquêteur et clos par lui.
Il dispose d'un délai de huit jours pour rencontrer le porteur de projet et lui communiquer les observations orales et écrites du public consignées dans un procès-verbal de synthèse.
Le responsable du projet a, quant à lui, quinze jours pour émettre ses observations éventuelles.
– Rapport et conclusions. – La clôture de l'enquête constitue le point de départ d'un délai de trente jours pendant lequel le commissaire-enquêteur doit rencontrer le porteur de projet, recueillir ses observations éventuelles, rédiger et rendre son rapport et ses conclusions motivées.
Ce temps restreint peut ne pas être suffisant et le commissaire-enquêteur a la possibilité de solliciter un délai supplémentaire à l'autorité compétente et sur avis du maître d'ouvrage.
Si toutefois il ne respecte pas le délai initial ou prorogé pour remettre son rapport et ses conclusions motivées, le commissaire-enquêteur défaillant peut être dessaisi et remplacé par un nouveau commissaire-enquêteur (ou commission d'enquête selon la formule) qui reprend le dossier d'enquête et dispose lui-même d'un délai de trente jours à compter de sa nomination pour produire son rapport et ses propres conclusions.
– Contenu du rapport. – Le commissaire-enquêteur fait dans son rapport la synthèse des observations du public durant l'enquête, ainsi que des réponses éventuelles du maître d'ouvrage.
Le commissaire-enquêteur doit analyser de manière suffisamment détaillée les observations du public et y apporter une réponse circonstanciée, sans se contenter de reprendre les réponses apportées par le maître d'ouvrage. Il n'est toutefois pas tenu de répondre à toutes les observations présentées.
– Sens des conclusions. – Les conclusions du commissaire-enquêteur sont consignées dans un document séparé précisant son avis sur le projet.
C'est un avis personnel qu'il lui est demandé de donner, quels que soient le nombre et l'orientation favorable ou défavorable des observations émises au cours de l'enquête. Il ne peut s'abriter sur l'absence d'observation du public pour conclure qu'il n'a pas d'avis à émettre.
Ses conclusions doivent être définitives et non provisoires. Elles ne doivent s'appuyer que sur les seuls éléments du dossier portés à la connaissance du public.
Elles peuvent être favorables, favorables avec recommandations, favorables sous réserves ou défavorables au projet.
Des conclusions données sous réserve sont réputées être favorables sous condition. Elles seront dès lors assimilées à des conclusions défavorables, avec les conséquences qui en résultent si la ou les réserves ne sont pas levées au moment de la décision sur le projet.
– Contrôle du caractère suffisant de la motivation. – Le caractère suffisant de la motivation des conclusions du commissaire-enquêteur fait l'objet d'une attention particulière de la part des juridictions administratives. La formule retenue est souvent la suivante : « Si ces dispositions n'imposent pas au commissaire-enquêteur de répondre à chacune des observations présentées lors de l'enquête publique, elles l'obligent, d'une part à présenter avec précision les avantages et inconvénients du projet mentionnés par les observations recueillies au cours de l'enquête publique, d'autre part à détailler, au regard du déroulement de l'enquête et des caractéristiques du projet, les raisons déterminant le sens de son avis ». Les conclusions doivent permettre de comprendre les raisons de l'avis formulé.
Appliquant la jurisprudence Danthony, le juge administratif vérifie si l'irrégularité affectant la motivation des conclusions du commissaire-enquêteur a été susceptible d'avoir une influence sur le sens de la décision prise ou a privé les intéressés d'une garantie, en l'occurrence de la garantie de pouvoir accéder aux informations environnementales d'un projet et de pouvoir participer à son élaboration. Nous le verrons, le premier critère de cette jurisprudence pose difficulté dans la mesure où l'autorité compétente n'est aucunement liée par l'avis du commissaire-enquêteur.
Le législateur a d'ailleurs anticipé l'hypothèse d'une insuffisance de motivation des conclusions du commissaire-enquêteur ; pour éviter ce type d'illégalité, il a prévu que l'autorité compétente puisse faire remonter ce risque auprès du président du tribunal administratif. Si l'insuffisance ou le défaut de motivation est avéré, ce dernier demande alors au commissaire-enquêteur de compléter ses conclusions. Le président du tribunal peut par ailleurs constater lui-même l'insuffisance ou le défaut de motivation et demander directement la complétude de ses conclusions. Chaque demande et réponse est encadrée dans un délai de quinze jours.
– Publicité. – L'autorité compétente adresse, dès leur réception, copie du rapport et des conclusions du commissaire-enquêteur au maître d'ouvrage, à la mairie du lieu de l'enquête et à la préfecture du ou des départements concernés par le projet.
Le rapport et les conclusions sont également publiés sur son site internet.
L'obligation d'information immédiate du public sur les résultats de l'enquête est un élément substantiel dont l'absence peut constituer une irrégularité. Ces informations doivent être maintenues à disposition du public pendant un an à compter de la clôture de l'enquête.
S'y ajoutent les mesures de publicité requises en matière d'évaluation environnementale pour les projets qui y sont soumis.

Portée des conclusions du commissaire-enquêteur et suites de l'enquête

L'enquête complémentaire éventuelle

– Modifications substantielles du projet soumis à enquête publique. – Après la clôture de l'enquête, mais avant que la décision ne soit prise par l'autorité compétente pour autoriser l'opération, le responsable du projet peut souhaiter y apporter des modifications. Cela reste possible dès lors qu'il ne s'agit pas de modifications substantielles et que ces modifications procèdent de l'enquête, c'est-à-dire qu'elles résultent de la prise en compte des réserves et recommandations émises par le commissaire-enquêteur, des observations du public et des avis des collectivités consultées.
En revanche, si les changements en question remettent en cause l'économie générale de l'opération, une enquête complémentaire doit être organisée. Au demeurant, le fait que des modifications substantielles soient apportées au projet pour tenir compte de dispositions législatives obligatoires, comme la loi Montagne ou la loi Littoral, ne dispense pas de l'organisation d'une telle enquête complémentaire.
Cette enquête complémentaire est soumise aux mêmes modalités que l'enquête publique initiale, mais sur une durée raccourcie à quinze jours. Le dossier comporte, pour l'essentiel, les éléments qui permettent d'expliquer les modifications substantielles apportées au projet ainsi que leurs avantages et inconvénients.
Le délai laissé au commissaire-enquêteur pour remettre son rapport et ses conclusions motivées au titre de cette enquête complémentaire est également raccourci à quinze jours.
En revanche, le point de départ du délai pour prendre la décision est reporté de la clôture de l'enquête initiale à celle de la seconde enquête.

La prise en compte de l'enquête

– Réunion publique éventuelle. – Pour l'aider à prendre sa décision, l'ordonnance du 3 août 2016 donne la possibilité à l'autorité compétente d'organiser une réunion publique dans les deux mois de la clôture de l'enquête, en présence du maître d'ouvrage, afin de répondre aux éventuelles réserves, recommandations ou conclusions défavorables du commissaire-enquêteur. Ce dernier, sans y être convié, en est tenu informé.
– Caractère consultatif de l'enquête publique. – Quel qu'en soit le sens, favorable ou défavorable, les conclusions du commissaire-enquêteur ne lient pas l'autorité chargée d'autoriser le projet, qui est généralement celle qui a ouvert et organisé l'enquête publique. Elle est libre de se conformer ou non aux conclusions rendues.
– Incidences d'un avis défavorable. – Un avis défavorable n'est toutefois pas dépourvu d'incidence juridique tant sur la décision à prendre que sur le plan contentieux.
Sur la décision à prendre, tout projet d'une collectivité territoriale ou d'un établissement public relevant du champ de l'enquête publique environnementale, ayant donné lieu à des conclusions défavorables doit faire l'objet d'une délibération motivée réitérant la demande d'autorisation ou de déclaration d'utilité publique (DUP).
Sur le plan contentieux, les conclusions défavorables du commissaire-enquêteur sont de nature à faciliter un référé-suspension. Le juge administratif, saisi en référé d'une demande de suspension d'une décision prise après enquête publique, est tenu d'y faire droit, sans condition urgence, si le requérant invoque un moyen propre à créer un doute sérieux sur sa légalité.
– Prise en compte des résultats de l'enquête. – « Les observations et propositions parvenues pendant le délai de l'enquête sont prises en considération par le maître d'ouvrage et par l'autorité compétente pour prendre la décision » ; ce principe inscrit à l'article L. 123-1 du Code de l'environnement infléchit quelque peu la liberté de décision de l'autorité compétente. Elle n'est certes pas liée par les conclusions du commissaire-enquêteur mais elle doit tenir compte des observations et propositions émises par le public, et ce afin de permettre à ce dernier de participer à l'élaboration des décisions relatives notamment à l'environnement.

La durée de validité de l'enquête

– Cinq ans prorogeables une fois. – La durée de validité de l'enquête est de cinq ans, prorogeable une fois. Par conséquent, si le projet objet de l'enquête n'a pas été entrepris dans ce délai de cinq ans, éventuellement prorogé, à compter de l'adoption de la décision, une nouvelle enquête doit être ouverte.
Une nouvelle enquête doit également être organisée, nous l'avons vu, en cas de modifications substantielles apportées par le maître d'ouvrage au projet.
Précisons en outre que la validité de l'enquête sera remise en cause si, entre sa clôture et la décision finale, des changements notables dans les circonstances de fait ou de droit sont intervenus et sont de nature à altérer la perception du public, à remettre en question les conclusions du commissaire-enquêteur ou les conclusions que l'administration en a tirées.

Sur quel site internet consulter les projets ?

Outre le site internet de l'entité organisatrice de l'enquête ou de la participation du public, différents sites permettent à l'opérateur de déposer ses pièces et au public de consulter le dossier et de faire ses observations.

www.projets-environnement.gouv.fr">Lien</a&gt; : le ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires a mis en ligne cette plateforme depuis le 29 mars 2018 pour tous les projets soumis à étude d'impact permettant, d'une part, aux opérateurs de consulter des projets similaires créant ainsi un retour d'expérience favorable à l'amélioration des études et, d'autre part, au public d'y accéder plus aisément.

Sont consultables la fiche descriptive de chaque projet, l'étude d'impact ainsi que les pièces du dossier de la consultation du public et pièces administratives d'autorisation du projet.

Par ailleurs, et de manière obligatoire, cette plateforme sert de dépôt des données de biodiversité issues des études d'impacts, et du dossier de consultation du public pour les projets soumis à participation du public et dont l'autorité compétente est le préfet.

www.registre-dematerialise.fr">Lien</a&gt; : il s'agit d'un site en ligne d'édition et de gestion de registres dématérialisés qui peut être utilisé par les porteurs de projet, publics ou privés, pour organiser la communication numérique des pièces de leur enquête publique ou pour réaliser leur participation du public par voie électronique, ou encore pour faciliter la concertation du public sur certaines opérations.

Les registres des différents projets sont librement consultables.

Les hypothèses d'enquête unique et d'enquêtes communes et coordonnées

– Des opérations complexes soumises à plusieurs enquêtes. – La complexité de certaines opérations, soumises à plusieurs types d'autorisations, voire en amont à la modification ou à la révision des documents d'urbanisme, peut obliger l'opérateur à mettre en œuvre différentes enquêtes publiques.
Le législateur est donc intervenu pour coordonner, rationaliser ces différentes enquêtes, voire pour les fusionner dans une certaine mesure.
Les enquêtes conjointes ont été instaurées par le décret no 85-453 du 23 avril 1985 d'application de la loi dite « Bouchardeau », pour les opérations faisant l'objet de plusieurs enquêtes publiques dont l'une au moins relevait de champ de cette loi. L'enquête conjointe permettait de regrouper plusieurs enquêtes publiques sous l'autorité d'une seule entité organisatrice et sous l'égide d'un seul et même commissaire-enquêteur. Mais la fusion des procédures s'arrêtait là car chaque enquête conservait son régime propre, le commissaire-enquêteur devant rendre un avis sur l'objet de chacune.
La loi du 12 juillet 2010, dite « Grenelle 2 », est allée plus loin en substituant à l'enquête conjointe un régime d'enquête unique pour des projets impliquant plusieurs enquêtes dont l'une au moins relève du Code de l'environnement.
Enfin, la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques a insisté sur la nécessité d'une meilleure articulation des procédures et a donné lieu aux procédures communes et coordonnées.

Régime et déroulement de l'enquête unique

– Champ d'application. – L'article L. 123-6 du Code de l'environnement définit le champ d'application de cette enquête publique :
  • lorsque la réalisation d'un projet (plan ou programme) est soumise à l'organisation de plusieurs consultations du public dont l'une au moins relève du Code de l'environnement ;
  • lorsque les consultations du public de plusieurs projets peuvent être organisées simultanément et que cela contribue à améliorer l'information et la participation du public.
Les différentes autorités compétentes pour ouvrir et organiser leur propre enquête doivent alors désigner d'un commun accord celle qui le sera pour l'enquête unique. Depuis le 1er janvier 2017 le préfet peut, à défaut de cet accord, ouvrir puis organiser une enquête unique, dès lors qu'il est compétent pour l'une des enquêtes fusionnées.
Dans le cadre de projets urbains d'ampleur, il est effectivement plus efficient d'avoir une vue globale des différentes opérations qui seront nécessaires à leur réalisation (modification/révision du PLU, évaluation environnementale, IOTA, permis d'aménager…). D'ailleurs, les juges appliquent en la matière la théorie de l'accessoire pour déterminer le périmètre de l'enquête.
Une enquête unique peut également être organisée lorsqu'une évaluation environnementale commune à plusieurs projets faisant l'objet d'une procédure d'autorisation concomitante est mise en œuvre à l'initiative de différents maîtres d'ouvrage, dès lors que l'étude d'impact porte sur l'ensemble de ces projets et qu'au moins l'un d'eux est soumis à enquête publique.
À noter toutefois : lorsque, parmi les autorisations nécessaires à la réalisation du projet figure une autorisation environnementale, l'organisation d'une enquête unique n'est pas une simple faculté mais une obligation. Toutefois, par exception et sur demande du pétitionnaire, l'autorité compétente pour délivrer l'autorisation environnementale peut déroger à cette obligation et permettre la réalisation de plusieurs enquêtes si cela est de nature à favoriser la bonne réalisation du projet.
– Délai. – L'intérêt majeur pour les opérateurs est bien entendu de réduire la durée cumulée des procédures. L'enquête unique ne pourra néanmoins pas être d'une durée inférieure à la durée de l'enquête la plus longue parmi les réglementations concernées par le projet.
– Procédure. – L'arrêté d'ouverture de l'enquête précise les coordonnées de chaque maître d'ouvrage responsable des différents éléments du projet soumis à enquête, et le dossier est établi sous la responsabilité de chacun d'entre eux. Le recours à l'enquête unique ne permet donc pas un désengagement des différents responsables au profit d'un seul d'entre eux.
L'enquête fait l'objet d'un registre unique, puis d'un rapport unique ; en revanche, le commissaire-enquêteur doit émettre des conclusions motivées au titre de chacune des consultations du public initialement requises. De même, le dossier doit compiler l'ensemble des éléments requis par chacune de ces consultations.
– Contentieux. – Afin d'éviter une confusion des responsabilités entre les différents maîtres d'ouvrage, le législateur prévoit que si une décision est contestée, sa régularité est appréciée au regard des règles qui lui sont propres.

Enquêtes communes et coordonnées

Les procédures communes et coordonnées concernent les dossiers qui nécessitent à la fois une évaluation environnementale du plan ou programme, et une évaluation environnementale du projet en question.

La procédure d'évaluation environnementale unique (C. env., art. L. 122-13)

– Champ d'application de l'évaluation environnementale unique. – Les procédures communes et coordonnées concernent les opérations soumises à une évaluation environnementale unique, valant à la fois évaluation environnementale du plan ou du programme et évaluation environnementale du projet, lancée à l'initiative conjointe de l'autorité responsable du plan ou programme et du maître d'ouvrage du projet.
Pour cela, le rapport sur les incidences environnementales du plan ou programme doit contenir les éléments exigés au titre de l'étude d'impact du projet, et les différentes consultations requises au titre de ces évaluations doivent être déjà réalisées.
– Procédure d'évaluation environnementale commune. – Dans cette hypothèse, des procédures uniques de consultation et de participation du public portent à la fois sur le plan ou programme et sur le projet. Cette procédure s'applique lorsque le projet est soumis à enquête publique.
– La procédure d'évaluation environnementale coordonnée. – Dans cette seconde hypothèse, le maître d'ouvrage d'un projet prévu par un plan ou programme, au titre duquel la procédure de participation du public et la consultation des autorités susmentionnées ont été réalisées, est dispensé de demander un nouvel avis de l'autorité environnementale et de conduire une nouvelle procédure de participation du public.

L'hypothèse du projet nécessitant la mise en compatibilité ou la modification des règles d'urbanisme (C. env., art. L. 122-14)

– Le champ d'application de l'évaluation environnementale unique du plan/programme et du projet. – Lorsque la réalisation d'un projet soumis à évaluation environnementale et subordonné à déclaration d'utilité publique ou déclaration de projet implique soit la mise en compatibilité d'un document d'urbanisme également soumis à évaluation environnementale, soit la modification d'un plan ou d'un programme, l'évaluation environnementale (lorsqu'elle est requise) de la mise en compatibilité de ce document d'urbanisme ou de la modification de ce plan ou programme et l'étude d'impact du projet peuvent donner lieu à une procédure commune.
– La procédure de l'évaluation environnementale unique du plan/programme et du projet. – Dans cette hypothèse, une procédure commune de participation du public est organisée et si une enquête publique est requise pour le projet ou la modification du plan ou du programme ou la mise en compatibilité du document d'urbanisme, c'est alors la procédure d'enquête publique qui s'applique.
Ainsi, peuvent être organisées conjointement l'enquête publique préalable à une DUP et l'enquête parcellaire préalable à la procédure d'expropriation, dès lors que « l'expropriant est en mesure, avant la déclaration d'utilité publique, de déterminer les parcelles à exproprier et de dresser le plan parcellaire ainsi que la liste des propriétaires ».
Le Code de l'urbanisme organise par ailleurs lui-même la procédure à suivre lorsqu'une opération soumise à déclaration d'utilité publique nécessite une mise en compatibilité avec le PLU ou avec le SCoT. L'enquête publique réalisée conformément aux dispositions du Code de l'environnement doit, dans ce cas, porter non seulement sur le projet objet de la déclaration d'utilité publique mais aussi sur les modifications des règles d'urbanisme nécessaires.

L'enquête publique transfrontalière

Le déploiement du numérique dans les enquêtes publiques

L'entrée progressive du numérique dans le droit des enquêtes publiques

– La numérisation partielle des enquêtes publiques. – Les débuts du numérique dans le droit des enquêtes publiques remontent seulement à la loi no 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement, dite aussi « loi Grenelle 2 », et aux deux décrets du 29 décembre 2011 pris pour son application.
L'entrée du numérique dans le droit des enquêtes publiques est toutefois restée très mesurée, le registre papier, coté et paraphé, étant demeuré la modalité majoritaire et traditionnelle du recueil des retours du public sur un projet.
Pour les enquêtes publiques du Code de l'environnement, l'accélération du recours à la dématérialisation a été lancée par l'ordonnance no 2016-1060 du 3 août 2016 portant réforme des procédures destinées à assurer l'information et la participation du public à l'élaboration de certaines décisions susceptibles d'avoir une incidence sur l'environnement. La loi d'habilitation no 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques en faisait un objectif prioritaire pour « faire en sorte que le processus d'élaboration des projets soit plus transparent et l'effectivité de la participation du public à cette élaboration, mieux assurée », tout en tenant compte toutefois de la « fracture numérique » et tout en réaffirmant « l'importance de la présence du commissaire-enquêteur ».
Conformément à ces objectifs, la dématérialisation s'est généralisée sans évincer de la procédure le papier et les réunions en présentiel. Le dossier est en effet mis en ligne pendant toute la durée de l'enquête, mais il demeure consultable sur support-papier, avec en outre un accès gratuit sur un ou des postes informatiques mis à disposition du public. Quant aux permanences assurées par le commissaire-enquêteur, elles sont présentées comme incontournables pour la bonne conduite des enquêtes.

La consécration du numérique avec la participation du public par voie électronique

– Consécration législative. – Il s'agit ici d'un tout autre mode de consultation du public qui, après une période d'expérimentation, a été consacré par la loi dite « ASAP » en permettant aux préfets de choisir entre les deux formules (enquête publique ou participation du public par voie électronique) en fonction des « impacts » du projet « sur l'environnement ainsi que des enjeux socio-économiques qui s'y attachent ou de ses impacts sur le territoire » lorsque celui-ci est soumis à évaluation environnementale mais dispensé d'une enquête publique.
Si la loi ASAP du 7 décembre 2020 a élargi le champ d'application de la participation du public par voie électronique, faisant dire à certains que ce mode de participation était devenu le principe et l'enquête publique l'exception, la loi Industrie verte du 23 octobre 2023 a réduit au contraire son périmètre en créant un nouveau mode de consultation du public, tout en s'en inspirant néanmoins.
– Champ d'application. – Le champ d'application de la participation du public par voie électronique est défini à l'article L. 123-19 du Code de l'environnement :
  • projets faisant l'objet d'une évaluation environnementale mais qui sont exemptés d'enquête publique en application de l'article L. 123-2, I, 1° du Code de l'environnement ; nous renvoyons à ce sujet au champ d'application de l'enquête publique évoqué plus haut.
  • Également, si un projet a déjà fait l'objet d'une enquête publique lors de son autorisation ou lors de sa première autorisation, et qu'il nécessite l'actualisation de l'étude d'impact suite à des évolutions, le Code de l'environnement (art. L. 122-1-1, III) n'oblige pas le maître d'ouvrage à organiser une nouvelle enquête publique, mais une simple mise à disposition par voie électronique ;
  • la participation du public par voie électronique s'applique en outre aux plans et programmes qui font l'objet d'une évaluation environnementale mais qui ne sont pas soumis à enquête publique, tels que les projets de création d'unités touristiques nouvelles soumises à autorisation ;
  • l'article L. 103-1 du Code de l'urbanisme renvoie encore à cette procédure organisée par le Code de l'environnement pour les décisions des autorités publiques en matière d'urbanisme ayant une incidence sur l'environnement mais qui échappent, de par la réglementation qui leur est propre, à toute participation du public. Ce domaine résiduel, bien difficile à cerner, n'échappe donc pas à l'information du public par la voie du numérique.
– Procédure. – Le public est informé quinze jours à l'avance de l'ouverture d'une participation électronique du public sur un projet. Le contenu du dossier est identique à celui d'une enquête traditionnelle.
Mais l'information et la participation du public par cette voie sont loin d'être totalement dématérialisées. En effet, par souci légitime de la fracture numérique, l'information de l'ouverture de la procédure sur internet est doublée d'un affichage, et un exemplaire papier du dossier est mis à disposition du public.
La durée de la procédure est au minimum de trente jours.
– Prise en compte de la consultation. – L'autorité compétente pour ouvrir la procédure doit, à l'issue de la consultation, rédiger une synthèse des observations et propositions qui auront été émises par le public.
Une fois la décision prise, l'autorité compétente la rend publique dès sa publication et pendant une durée de trois mois, accompagnée de la synthèse des observations et propositions du public, de l'indication de celles dont il a été tenu compte et des motifs de sa décision.
– Analyse critique. – La différence majeure avec la procédure classique d'enquête publique, outre la réduction des lourdeurs administratives et des délais, réside dans l'absence de commissaire-enquêteur, induisant l'absence de consultations, de réunion publique et surtout de rapport et d'un avis personnel dans le cadre de conclusions motivées, ce qui peut être vu comme une régression du droit de la participation du public au détriment de la protection de l'environnement.
Le porteur de projet ne bénéficie plus de l'avis motivé d'une tierce personne et de ses éventuelles réserves pouvant être un facteur d'amélioration du projet. Il doit faire lui-même la synthèse des observations recueillies auprès du public, dont la prise en compte dans sa décision finale n'est pas garantie. Or la prise en compte des observations et avis du public dans l'adoption de la décision est substantielle de la démocratie participative.
Si cette réforme a été saluée par les opérateurs, elle a été au contraire décriée par les associations de protection de l'environnement comme marquant un recul de la démocratie environnementale.
La participation du public par voie électronique concerne principalement les projets relevant de la législation sur les ICPE, dans l'objectif de faciliter les implantations industrielles et d'accélérer les énergies renouvelables. Elle résulte du phénomène d'accélération des procédures qui a suivi celui de la simplification des normes. Présentée comme ne devant concerner que deux cent cinquante projets par an, cette procédure simplifiée concerne en réalité 80 % des projets industriels du droit de l'environnement.
Mais, à peine trois ans après la loi ASAP, la loi Industrie verte du 23 octobre 2023 est venue à nouveau modifier le paysage de la participation du public en créant une procédure hybride : la consultation du public. Face aux enjeux d'accélération des énergies renouvelables et surtout de souveraineté nationale en matière d'industrie décarbonée, il s'agit d'accélérer la réalisation des projets, et la phase de participation du public apparaît comme souvent une variable d'ajustement…

Une procédure hybride : la consultation du public

Cette nouvelle procédure de consultation du public ressemble à l'enquête publique environnementale, tout en étant organisée de manière anticipée et partiellement dématérialisée.
– Champ d'application de la consultation du public. – Elle concerne les projets qui nécessitent une autorisation environnementale avec enquête publique, laquelle prend alors la forme de cette nouvelle consultation.
Si par ailleurs l'instruction d'une demande d'autorisation d'urbanisme nécessite la mise en œuvre d'une enquête publique, d'une participation du public par voie électronique ou d'une participation du public hors procédure particulière, et qu'elle n'a pas encore été réalisée, la consultation de l'article L. 181-10-1 du Code de l'environnement en tient lieu. Si toutefois une autre décision relative à ce projet nécessite une enquête publique, dans ce cas une enquête publique unique sera réalisée.
– Procédure de la consultation du public. – Elle résulte de l'article L. 181-10-1 du Code de l'environnement.
Comme pour une enquête publique, la consultation se déroule sous l'égide d'un commissaire-enquêteur ou d'une commission d'enquête désigné par le tribunal administratif selon l'importance du projet, et qui devra rédiger un rapport et des conclusions motivées.
Comme pour la participation du public par voie électronique, le dossier est consultable en ligne et le public fait ses observations et émet ses propositions sur internet.
L'innovation majeure de la nouvelle formule réside dans sa temporalité. Au lieu des trois phases habituelles de l'enquête publique (instruction, consultation, décision), nous n'avons ici que deux phases (instruction et consultation, décision). Le commissaire-enquêteur est nommé dès le dépôt de la demande d'autorisation environnementale et doit ouvrir la consultation du public qui sera menée en même temps que l'instruction du dossier. L'étude d'impact, lorsqu'elle est requise, doit être produite dès l'ouverture de la consultation ; en revanche, les avis des services et des personnes publiques consultés, et notamment celui de l'autorité environnementale, seront mis à disposition au fil de l'eau. Pour pouvoir mener ces deux phases conjointement, le délai a été porté à trois mois (au lieu des trente jours habituels de l'enquête publique), majoré d'un mois lorsque l'avis de l'autorité environnementale est requis. À l'inverse, le délai dont dispose le commissaire-enquêteur pour rédiger son rapport et ses conclusions motivées est plus court et passe de trois semaines à trente jours.
L'autre innovation réside dans la tenue obligatoire de deux réunions : une dans les quinze jours de l'ouverture de la consultation, puis une autre quinze jours avant sa clôture. Alors que pour les enquêtes publiques, la tenue de réunion(s) n'a pas de caractère obligatoire et relève de l'appréciation du commissaire-enquêteur.
Enfin, et alors qu'habituellement, le porteur de projet n'est amené à répondre aux observations du public qu'à la clôture de l'enquête, au moment où le commissaire-enquêteur prépare son rapport et ses conclusions, les réponses du porteur de projet alimentent le dossier au fur et à mesure de la consultation. Il est ainsi amené à répondre, au fil de l'eau, aux différents éléments qui sont portés à sa connaissance : avis des personnes publiques consultées, avis des services instructeurs, avis de l'autorité environnementale, observations du public…
– Analyse critique de la consultation du public. – En réduisant le périmètre de la participation du public par voie électronique, la loi Industrie verte a permis de mettre un terme au risque de voir se développer un contentieux autour de l'appréciation par le préfet de l'impact environnemental d'un projet et de ses enjeux socio-économiques, en vertu de laquelle il choisissait de mettre en œuvre soit une enquête publique classique, soit une participation du public par voie électronique. En effet, l'article 44 de la loi ASAP avait concentré entre les mains du préfet ce pouvoir et celui de déroger à l'application uniforme de normes réglementaires afin « d'alléger les démarches administratives, de réduire les délais de procédure ou de favoriser l'accès aux aides publiques ». Ainsi deux procédés étaient réunis entre les mains d'une même autorité, constituant un « cocktail explosif ».
La nouvelle consultation du public répond également à la critique, fréquemment formulée à l'encontre des enquêtes, d'intervenir à un moment tardif où « tout est joué ». Le public doit en effet être mis en mesure de participer au processus décisionnel en matière d'environnement dès le début de la procédure, c'est-à-dire lorsque toutes les options et solutions sont encore possibles. En cela, la consultation issue de la loi Industrie verte semble répondre aux exigences de la Convention d'Aarhus et des directives européennes, et se rapproche d'une concertation qui intervient en phase amont.
Si le public peut faire valoir son avis à un stade plus précoce de la procédure et, partant, influer sur la décision, on peut toutefois s'interroger sur le caractère réellement éclairé de son appréciation à un stade où il sera privé, en tout cas au début de la consultation et lors la première réunion, de l'avis de l'autorité environnementale qui s'avère être un avis extérieur précieux pour comprendre les incidences sur l'environnement et les enjeux d'un projet.

Propos conclusifs sur la participation du public

Une enquête publique incite les maîtres d'ouvrage à rendre les impacts négatifs de leurs projets plus acceptables tant juridiquement que socialement. Elle permet également d'éclairer l'autorité compétente dans sa décision.

La procédure des enquêtes publiques gagnerait en lisibilité par la fusion des différents régimes et notamment en soumettant l'enquête publique préalable à déclaration d'utilité publique au régime de l'enquête dite « Bouchardeau ». On peut en effet relever que le législateur tend à rapprocher les deux procédures par petites touches, sans aller jusqu'au bout de la démarche.

On peut également s'interroger sur l'intérêt, pour le législateur, d'avoir créé une nouvelle procédure (la consultation du public de l'article L. 181-10-1 issu de la loi Industrie verte) plutôt que de faire évoluer l'enquête publique environnementale dont elle se rapproche et qui, elle, est connue tant des opérateurs que des services instructeurs. À chaque problème ou objectif politique, une loi… le droit de la participation du public n'échappe pas à la règle.

Les porteurs de projet sont aujourd'hui confrontés à un maquis de textes et de procédures qui ne fait que favoriser l'appréhension de cette phase comme une contrainte, alors qu'elle devrait être intégrée à la construction du projet. Une fusion des différents régimes leur permettrait de gagner en lisibilité et, partant, en sécurité juridique.

La matière gagnerait également en simplification si le droit des enquêtes publiques passait du « mode procédures » au « mode projet », à l'instar de l'évaluation environnementale que nous étudierons ultérieurement.

Sa sécurisation juridique nécessiterait par ailleurs de faire peser la responsabilité de déterminer le type de participation applicable non pas sur le porteur de projet, mais sur l'autorité environnementale.

À l'instar de la loi Industrie verte du 23 octobre 2023, qui instaure une consultation du public à une phase précoce du projet, ne pourrait-on pas imaginer de fusionner les phases amont et aval de la participation du public ?

Elle ne doit plus apparaître, aux yeux des maîtres d'ouvrage, comme une lourdeur administrative inutile et, pour le public, comme un temps vide qui permet de cacher sous les habits de la démocratie participative un projet déjà ficelé. La difficulté à mobiliser le public sur la durée est souvent mise en avant pour justifier le recours à des formes allégées de participation.

Les difficultés essentielles de la participation du public résident dans la temporalité : faire rapide pour répondre aux vœux des porteurs de projet tout en tenant compte des nécessités du changement climatique et même des souhaits du public, permettre à ce dernier d'intervenir à un moment où il est encore possible de peser sur le projet, tout en permettant au public et à l'autorité décisionnaire de bénéficier d'une information éclairée et d'émettre des observations.

Mais, au-delà du problème du temps, se pose la question des moyens. Le Conseil d'État, dans son avis sur le projet de loi Industrie verte, l'a bien mis en exergue dans les termes suivants : « le séquençage actuel des phases d'examen, de consultation puis de décision pour l'instruction des demandes d'autorisation environnementale n'est que partiellement et indirectement à l'origine des délais excessifs de traitement de ces demandes et que, par suite, des réformes de procédure ne suffiront pas à accélérer la délivrance des autorisations environnementales si des mesures d'accompagnement ne sont pas prévues, tant pour parvenir à une amélioration de la qualité des dossiers de demande d'autorisation que pour assurer la mise à disposition des services instructeurs de moyens adaptés ».