Utilisation du bail à construction pour favoriser l’accession au logement

Utilisation du bail à construction pour favoriser l’accession au logement

– Un outil utile à l’accession locative au logement, mais pas à l’accession en propriété… – Comme le bail emphytéotique, le bail à construction est un outil utilisé par les bailleurs sociaux, preneurs à bail, pour réaliser des logements locatifs sociaux à un prix de revient allégé de la valeur foncière lissée sur la durée du bail à construction. La réglementation est d’ailleurs protectrice des baux d’habitation conclus par le preneur qui se maintiennent malgré l’extinction du bail à construction.
– Immeuble collectif. – Au sein d’un immeuble collectif, le bail à construction est difficilement utilisable dans une logique d’accession individuelle à la propriété, logement par logement. L’obligation de construire est impossible à réaliser pour les preneurs individuels à bail. C’est ce point qui rend illusoire l’hypothèse de la levée d’option prévue à l’article L. 251-1 du Code de la construction et de l’habitation, et c’est bien toute l’idée du bail réel solidaire notamment de permettre la constitution d’un droit réel logement par logement, en organisant la période de construction par un tiers opérateur sur l’ensemble de l’immeuble.
– Maison individuelle. – La technique a été utilisée avec le Pass-Foncier, adossée à un contrat permettant la réalisation de la construction dans des conditions protégeant l’accédant (donc soit un contrat de construction de maison individuelle, soit une Vefa avec la nécessité dans ce cas de conclure le bail à construction avec le promoteur qui cède ensuite le droit réel en EFA). Pour régler le problème lié à l’extinction du droit réel, et donc à la perte de son logement par l’accédant, peu compatible avec le désir d’accéder, il a pu être imaginé de mettre en place un bail à construction « à l’envers ».
– Le bail à construction à l’envers. – Le bail à construction à l’envers est un bail à construction aux termes duquel il est stipulé qu’en fin de bail, ce ne sont pas les constructions qui deviennent la propriété du bailleur, mais c’est le terrain qui deviendra la propriété du preneur. Comme le rappelle un auteur, le principe retenu par la réglementation du bail à construction (comme, d’ailleurs, pour le bail emphytéotique) est celui prévu à l’article 555 du Code civil : le bailleur, propriétaire du sol, a vocation à devenir propriétaire des constructions édifiées par le preneur. C’est le jeu naturel de l’accession. Mais l’article L. 251-2 du Code de la construction et de l’habitation laisse aux parties le soin de décider du sort des constructions en disposant que : « Les parties conviennent de leurs droits respectifs de propriété sur les constructions existantes et sur les constructions édifiées. À défaut d’une telle convention, le bailleur en devient propriétaire en fin de bail et profite des améliorations ». Il est donc possible d’utiliser le bail à construction comme un outil d’accession progressive à la propriété : celle des constructions dans un premier temps pendant la durée du bail, puis celle du terrain pour reconstituer la pleine propriété sur la tête du preneur en fin de bail. C’est d’ailleurs ce que prévoit expressément l’article L. 251-1, alinéa 4 du même code en ouvrant la possibilité de stipuler une levée d’option d’achat du terrain, ce qui a permis la mise en place d’un dispositif innovant, quoique déjà disparu : le Pass-Foncier.
Limite. Quoiqu’il n’existe pas d’exclusion de principe, une telle technique d’accession progressive à la propriété ne se conçoit pas pour la construction de logements dépendant d’un immeuble collectif. On ne voit pas comment, dans ce cadre, gérer la maîtrise d’ouvrage de la construction qui, pratiquement, ne peut se partager en autant de maîtres d’ouvrages qu’il existe de logements !

Étendre la possibilité de conclure un bail à construction à l’envers sur un logement d’un immeuble collectif

Permettre la conclusion d’un bail à construction à l’envers, sur le modèle du Pass-Foncier, non pas sur un terrain en vue de construire une maison individuelle, mais sur un logement d’un immeuble collectif, nous semble une piste intéressante pour compléter la panoplie des modes d’accession progressive à la propriété, en complément de la location-accession (qui ressemble fortement à ce bail à construction à l’envers, mais sans constitution de droit réel) et du BRS (qui ne permet pas l’accès à la pleine propriété).

Le Pass-Foncier, un mécanisme fondé sur le bail à construction à l’envers

Supprimé à compter de 2011, le Pass-Foncier avait été mis en place en septembre 2006 sous deux formes :
  • Un mode d’acquisition progressif permettant d’acquérir une maison individuelle en deux temps : signature d’un bail à construction autorisant la construction d’une maison neuve, puis option possible pour l’acquisition du terrain.
  • Un prêt à remboursement différé utilisable tant pour l’acquisition d’une maison individuelle que pour celle d’un appartement (à partir de mars 2009).
Le prêt Pass-Foncier a été remplacé par d’autres prêts aidés (PTZ+ notamment), et le Pass-Foncier proprement dit a été supprimé fin 2010. Son mécanisme était le suivant :
  • une structure porteuse (filiale d’un comité interprofessionnel du logement [ CIL ou collecteur 1 % logement ] ou d’une chambre de commerce et d’industrie [ CCI ]) acquiert le terrain ;
  • puis, elle consent un bail à construction, soit directement au ménage accédant à la propriété, qui est alors maître d’ouvrage de la future maison (et met en place un contrat de construction de maison individuelle), soit à un promoteur-constructeur qui, dans un second temps, cède au ménage accédant son droit au bail et les constructions envisagées en leur état futur d’achèvement, avec toutes les garanties attachées à ce régime en secteur protégé.
Le bail à construction devait être consenti à titre gratuit au profit de l’accédant à la propriété, pour dix-huit ans minimum et vingt-cinq ans maximum, selon la durée de remboursement du prêt nécessaire au financement de la construction. Il contenait une promesse de cession du terrain au terme du bail, avec une option d’achat.
En cas d’exercice de l’option, le ménage accédant devait payer le prix fixé à l’origine du contrat, auquel s’ajoutaient des intérêts (pour les salariés du secteur assujetti à la PEEC, au taux de 1,5 %, pour les autres ménages, au taux d’inflation, dans une double limite inférieure de 2 % et supérieure de 4,5 %). S’il n’exerçait pas l’option, le bail à construction était prorogé et le ménage versait un loyer foncier d’un montant égal à la mensualité d’un prêt aux « meilleures conditions de marché » sur quinze ans. À l’issue des quinze ans, le ménage devenait pleinement propriétaire du terrain.
L’accédant avait toutefois la faculté d’acheter le terrain à toute date à sa convenance avant l’expiration de la période de portage foncier (d’où la nécessité de modifier l’article L. 251-1 du Code de la construction et de l’habitation) et aux mêmes conditions qu’à l’issue de la période de portage, le bail à construction restant valable malgré sa durée abrégée et finalement inférieure à dix-huit ans.
Pour favoriser la mise en œuvre de ce dispositif, un taux de TVA à 5,5 % et un mécanisme de sécurisation de l’accédant (garantie de rachat et garantie de relogement) avaient en outre été mis en place.
Une intéressante question ministérielle fait le bilan du Pass-Foncier et indique que « c’est de surcroît ce dispositif et sa logique de prêt à remboursement différé qui constituent un des fondements du prêt à taux zéro plus (PTZ+), le nouveau dispositif d’aide à l’accession qui a été mis en place à compter du 1er janvier 2011. Ce nouvel outil, qui répond à des objectifs de simplification du nombre d’aides existantes, de renforcement de l’efficacité des aides et d’une meilleure intégration des aides à la politique du logement, contribuera à la poursuite et à la relance de la politique de l’accession à la propriété, soutenue par la mobilisation des professionnels, des collectivités et des ménages ».