Un logement accessible

Un logement accessible

– Un enjeu important. – Cet autre enjeu de l'adaptation matérielle de nos logements fait quant à lui écho aux besoins particuliers des personnes handicapées, et à la volonté affirmée par la société de les inclure autant que possible dans sa marche collective, notamment à travers l'accès facilité aux lieux de vie. La publication de textes en la matière s'est accélérée au cours des dernières années.

Le handicap en France – Aspects statistiques et juridiques

1. Le nombre de personnes handicapées dans notre pays représenterait environ 10 % de la population, même s'il est en réalité fort délicat de poser un chiffre précis sur une réalité aussi multiplexe et équivoque. Les fameuses enquêtes pluridisciplinaires dénommées « HID » (Handicap Incapacité Dépendance) menées par l'Insee depuis le début de ce siècle insistent sur cette difficulté : « Combien y a-t-il de personnes handicapées en France ?. La question du dénombrement des personnes handicapées ou dépendantes en France est posée de façon récurrente dans tous les rapports officiels sur le handicap et elle traduit bien une demande sociale non satisfaite (Triomphe, 1995). Mais cette question ne peut recevoir de réponse sous cette forme, car elle fait référence à des situations socio-démographiques trop complexes pour que l'on se contente d'une définition simple et unique de la population concernée ». Car les critères de qualification peuvent être nombreux, depuis ce que l'on appelle l'auto-attribution jusqu'à la reconnaissance sociale et administrative, en passant par la perception d'indemnités.
2. Selon l'enquête Insee datée de 2007, environ 9,6 millions de personnes âgées de quinze à soixante-quatre ans vivant à domicile sont considérées comme handicapées, représentant 24 % de la population active. Parmi celles-ci, 89 % résident en logement ordinaire, qui doit donc pouvoir être adapté pour les accueillir. Toujours selon les mêmes études de l'Insee, et cela est mécaniquement induit, plus de 60 % de la population est indirectement concernée par le handicap, à travers un proche ou un membre de la famille. Ce qui signifie que presque les deux tiers des ménages sont amenés à accueillir chez eux, régulièrement ou occasionnellement, une personne handicapée.
3. La publication de textes en la matière s'est accélérée au cours des cinquante dernières années. En premier lieu sans doute avec la loi no 75-534 du 30 juin 1975 d'orientation en faveur des personnes handicapées. Fixant le cadre juridique de l'action des pouvoirs publics, elle dessine notamment, comme trajectoire à atteindre, l'accès des personnes handicapées aux institutions ouvertes à l'ensemble de la population, et leur maintien chaque fois que possible dans un cadre ordinaire de travail et de vie. Quinze ans plus tard, mais dans le droit fil de cette orientation, la loi no 91-663 du 13 juillet 1991, prolongeant les principes posés par la loi d'orientation du 30 juin 1975 porte diverses mesures destinées à favoriser pour les personnes handicapées l'accessibilité des locaux d'habitation, des lieux de travail et des installations recevant du public.
4. Au niveau européen, la Charte communautaire des droits sociaux fondamentaux des travailleurs est adoptée le 9 décembre 1989 : elle engage les États membres à prendre les mesures nécessaires en vue de garantir aux personnes handicapées l'exercice du droit à l'autonomie, à l'intégration sociale et à la participation à la vie de la communauté. On retrouvera d'ailleurs une parenté lointaine mais visible entre le caractère universel des premiers mots de son article 26, jusqu'à ceux de l'actuel article L. 111-1 de notre Code de la construction et de l'habitation, que nous allons parcourir d'ici peu, puisqu'il constitue aujourd'hui l'épicentre de notre réglementation de l'accessibilité.

Le handicap et l'Union européenne – Aspects juridiques

Rapide historiographie des textes communautaires ayant marqué la progression des normes européennes en matière de handicap et d'accessibilité, et principaux textes fondateurs en faveur des droits des personnes handicapées :
  • En 1993, la Commission européenne publie un rapport sur les mesures à prendre dans la Communauté européenne en matière d'accessibilité des moyens de transport aux personnes à mobilité réduite.
  • En 1994, un Livre blanc intitulé « Action pour l'avenir » est publié par la même Commission, traitant essentiellement de l'intégration sociale et de l'autonomie des personnes handicapées.
  • Le traité d'Amsterdam de 1997 contient, en son article 13, une clause explicite de non-discrimination en raison des handicaps, qui contribue à la promotion de l'égalité des droits. Elle ouvre également la porte à l'émergence d'une véritable politique européenne du handicap.
  • La Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, adoptée à Nice le 7 décembre 2000, proclame à son article 1er que « la dignité humaine est inviolable ». Elle doit être « respectée et protégée » et interdit toute discrimination fondée sur un handicap (art. 21, § 1). De même, elle « reconnaît et respecte le droit des personnes handicapées à bénéficier de mesures visant à assurer leur autonomie, leur intégration sociale et professionnelle et leur participation à la vie de la communauté » (art. 26). Les mesures mises en place dans les États membres pour respecter cette charte doivent être guidées par la nécessité de permettre aux personnes handicapées de mener une vie normale et d'être socialement intégrées, au même titre que les autres citoyens.
  • Le traité de Lisbonne, entré en vigueur le 1er décembre 2009, attribue la même valeur juridique à la Charte qu'aux traités (Traité UE, art. 6).
  • Le Traité relatif au fonctionnement de l'Union européenne (TFUE) exige de l'Union qu'elle combatte toute discrimination fondée sur un handicap dans la définition et la mise en œuvre de ses politiques et actions (art. 10) et lui confère le pouvoir de légiférer en ce sens (art. 19).
  • L'année 2003 a été proclamée « Année européenne des personnes handicapées » (AEPH), ce qui a permis de mettre en avant les discriminations dont font l'objet les personnes handicapées.
  • Cette approche se trouve également au cœur de la Convention des Nations unies relative aux droits des personnes handicapées (CNUDPH) – et de son protocole facultatif – adoptée par l'Assemblée générale des Nations unies le 13 décembre 2006 et entrée en vigueur le 3 mai 2008, qui érige l'accessibilité aux personnes handicapées comme principe général.
  • Union européenne et Stratégie en faveur des droits des personnes handicapées 2021-2030.
– Une évolution contemporaine. – Un pas décisif a tout d'abord été franchi avec la loi du 11 février 2005 sur le handicap qui pose le principe « d'accessibilité de tout à tous » (Sous-section I). Mais, face aux obstacles matériels et financiers, la loi Elan du 23 novembre 2018 opère un retour vers un certain pragmatisme (Sous-section II).

La loi Handicap de 2005, un pas vers l'accessibilité universelle des bâtiments

La loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, opère une refondation globale de la politique du handicap, sous l'influence notamment d'instruments internationaux. Elle en contient non seulement les grands principes (§ I), mais également les mesures financières concrètes propres à financer leur mise en application (§ II). Nous consacrerons une large étude à la distinction qu'il est nécessaire d'apporter entre normes d'accessibilité et normes d'adaptation (§ III).

Les grands principes

– Une définition du handicap. – La loi de 2005 introduit pour la première fois, dans le Code de l'action sociale et des familles, une définition du handicap qui trouve ses sources à l'international. Elle consiste à prendre désormais en compte les quatre familles de handicap actuellement retenues : moteur, sensoriel, cognitif, psychique. Ce qui concerne également les personnes à mobilité réduite, y compris de manière temporaire. Selon ses termes, « constitue un handicap toute limitation d'activité ou restriction de participation à la vie en société subie dans son environnement par une personne en raison d'une altération substantielle, durable ou définitive d'une ou plusieurs fonctions physiques, sensorielles, mentales, cognitives ou psychiques, d'un polyhandicap ou d'un trouble de santé invalidant ». Elle pose le principe selon lequel : « Toute personne handicapée a droit à la solidarité de l'ensemble de la collectivité nationale, qui lui garantit, en vertu de cette obligation, l'accès aux droits fondamentaux reconnus de tous les citoyens ainsi que le plein exercice de sa citoyenneté ». Pour y parvenir, la politique du handicap instaure notamment deux dogmes fondamentaux et complémentaires : compensation (A) et accessibilité (B).

Le droit à compensation

– Un droit universel. – Pour la première fois, est admis et codifié en 2005 un droit universel des personnes handicapées, celui d'une compensation. La loi handicap le met en œuvre en établissement comme à domicile. Il se matérialise par une prestation de compensation du handicap (PCH) qui doit permettre, sur la base du projet de vie formulé par le prestataire, de prendre en compte l'ensemble des surcoûts induits par le handicap. La prestation de compensation doit couvrir les besoins en aide humaine, technique ou animalière, aménagement du logement ou du véhicule, en fonction de ce projet de vie.

L'accessibilité universelle

– Une obligation générale. – La loi Handicap crée aussi une obligation générale d'accessibilité. L'obligation s'impose à tous les locaux, recevant du public ou non, neufs et existants, à usage professionnel comme de logement (à l'exception de ceux réalisés par les propriétaires pour leur propre usage), et encore aux transports publics (bus, métro, tramway, train, avion, bateau), à la voirie et à l'espace public (jardins, parkings, trottoirs, mobilier urbain…), aux moyens de communication publique en ligne (internet, téléphone, TV…), à l'exercice de la citoyenneté (accès au processus électoral) et à tous les services publics (appels d'urgence, accès au droit…). Une « marche forcée » est imposée à l'horizon de dix ans, terme jugé raisonnable pour mener à bien cet effort collectif. L'obligation d'accessibilité est ainsi fixée au 1er janvier 2015 pour les établissements recevant du public (ERP) et au 13 février 2015 pour les transports publics.

La mise en œuvre concrète du droit à compensation

Loin de se contenter de schémas abstraits, le législateur de 2005 se donne les moyens concrets de ses ambitions.
Le droit à compensation se concrétise par une prestation financière, attribuée au niveau départemental sans condition de ressources.
– Une prestation financière. – À la consécration du droit à compensation désormais mise en place par la loi Handicap doit répondre une prestation financière destinée à apporter cette compensation et à couvrir les besoins en aide ou en aménagement du logement ou du véhicule, en fonction du projet de vie dont aura témoigné la personne handicapée.
– Attribuée au niveau départemental. – À l'effet de créer des lieux propres à permettre les échanges nécessaires dans ce domaine, la loi Handicap crée les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH). Celles-ci ont pour mission d'exercer, dans chaque département, une mission d'accueil, d'information, d'accompagnement et de conseil des personnes handicapées et de leurs proches, d'attribution des droits, ainsi que de sensibilisation de tous les citoyens au handicap et à ses conséquences. Au sein de chaque MDPH, les anciennes commissions techniques d'orientation et de reclassement professionnel (Cotorep) sont remplacées par des commissions des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH). Elles ont, entre autres, pour fonction d'attribuer les droits à prestation de compensation du handicap (PCH), les sommes correspondantes étant ensuite versées par le conseil départemental.
– Sans condition de ressources. – Contrairement à l'allocation compensatrice pour tierce personne (ACTP), qu'elle remplace, l'attribution de la PCH n'est pas conditionnée à un plafond de ressources. Toutefois, elle est modulée (80 ou 100 %) selon le montant des ressources de la personne handicapée (de nombreuses catégories d'aides financières, comme l'allocation aux adultes handicapés [AAH] ou l'aide personnalisée au logement [APL], étant exclues du calcul). Cette volonté de ne pas conditionner l'attribution de l'aide – mais seulement son taux – à un plafond de ressources découle du postulat qu'elle doit permettre de prendre en compte, au-delà du coût des aides humaines, l'ensemble des besoins de la personne handicapée, dont, évidemment, son logement.

La PCH en 2022 en matière d'aide au logement

Montant de la PCH 2022 en matière d'aide pour le logement :
« S'il s'agit d'un aménagement, l'aide est plafonnée à 10 000 € pour une période de dix ans si le montant des travaux est inférieur à 1 500 €.
Si les frais sont supérieurs, les bénéficiaires ne se feront prendre en charge que 50 % (quelles que soient les ressources).
Si la personne se trouve dans l'obligation de déménager, une aide de 3 000 € peut être accordée sur une période de dix ans. »
(Source : Aide-sociale.fr)

Accessibilité et adaptation : une distinction nécessaire

Avertissement au lecteur. Recodification du livre premier du Code de la construction et de l'habitation

Désirant susciter un « choc de simplification de la réglementation en matière de construction », l'ordonnance no 2020-71 du 29 janvier 2020, ratifiée par la loi Climat et Résilience, a recodifié tout le livre Ier du Code de la construction et de l'habitation. Entreprise ambitieuse compte tenu du nombre de dispositions renumérotées. Trop ambitieuse sans doute, car plus d'un an après l'entrée en vigueur, au 1er juillet 2021, de cette ordonnance, de nombreuses sources, y compris officielles, continuaient à informer le lecteur ou l'usager des règles applicables en employant l'ancienne numérotation. On trouve heureusement sur le site internet du ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, une table très complète des correspondances, indiquant également les articles purement abrogés, et les articles totalement nouveaux. Cette table est fort utile pour établir tous les liens nécessaires entre les publications antérieures et postérieures à 2021.
Nous emploierons ici, à titre principal, la codification historique, c'est-à-dire celle antérieure au 1 er juillet 2021, pour citer les articles de code (essentiellement le Code de la construction et de l'habitation).
Les tables de concordance proposées par le ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires peuvent être consultées ici :
– L'art de la distinction. – À ce stade, et avant de poursuivre notre exploration par les détails des normes d'accessibilité des logements, érigées en principe par les textes de 2005, il importe de bien faire le départ entre les notions d'accessibilité et d'adaptation. Un logement accessible respecte les obligations du Code de la construction et de l'habitation. Un logement adapté répond aux capacités et aux besoins précis de son occupant, sans forcément respecter les obligations réglementaires. Disposer d'un logement accessible ne garantit pas systématiquement une adéquation de celui-ci aux besoins de son occupant, qui peut avoir besoin d'adapter ce logement à son cas particulier. Il importe donc à présent de définir précisément le périmètre juridique de l'accessibilité. À cet effet, nous examinerons, en premier lieu, la définition réglementaire de l'accessibilité (A) ; en deuxième lieu, les conditions de sa mise en œuvre concrète (B) ; en dernier lieu, les locaux concernés (C).

La définition réglementaire de l'accessibilité

L'accessibilité fait l'objet d'une définition que le pouvoir réglementaire enrichit de moult précisions.
– Un texte fondateur… – Codifié en 1980, modifié en 2006, puis en 2015 et en 2019, l'article R. 111-18-1 du Code de la construction et de l'habitation dispose qu'« est considéré comme accessible aux personnes handicapées tout bâtiment d'habitation collectif ou tout aménagement lié à un bâtiment permettant à un habitant ou à un visiteur handicapé, avec la plus grande autonomie possible, de circuler, d'accéder aux locaux et équipements, d'utiliser les équipements, de se repérer et de communiquer. Les conditions d'accès des personnes handicapées doivent être les mêmes que celles des autres publics ou, à défaut, présenter une qualité d'usage équivalente ».
– … enrichi de multiples précisions. – Cette ligne conductrice a été par la suite assortie d'un cahier des charges détaillé par arrêté du ministre du Logement en date du 24 décembre 2015, publié au Journal officiel le 27 décembre 2015. Il indique, poste par poste, sur des dizaines de pages, à travers vingt articles et à l'appui de plusieurs annexes, l'ensemble des caractéristiques techniques et matérielles à observer pour atteindre la norme d'accessibilité :

La mise en œuvre concrète de l'accessibilité universelle

– Pas de changement sans argent. – La loi du 11 février 2005 met en place un crédit d'impôt dédié aux dépenses d'équipements de l'habitation principale en faveur de l'aide aux personnes qui, quoique conçu comme temporaire, a été reconduit depuis de sorte qu'il demeure toujours applicable à l'heure où ces lignes sont écrites. Ne mériterait-il pas, d'ailleurs, d'être pérennisé ? Cela pourrait favoriser l'adaptation au handicap du parc immobilier français, assez mal pourvu en ce domaine (I). Aux côtés de ce vecteur central, on trouve différentes subventions et primes (II).
Le crédit d'impôt pour dépenses d'équipements de l'habitation principale en faveur de l'aide aux personnes (CGI, art. 200 quater A)
Il est actuellement prévu à l'article 200 quater A du Code général des impôts, instituant notamment un crédit d'impôt pour dépenses d'équipement de l'habitation principale en faveur de l'aide aux personnes, et qui seul nous concerne ici. Ce crédit d'impôt concerne trois types de dépenses dont seules nous intéressent celles relatives aux équipements spécialement conçus pour les personnes âgées ou handicapées, quelle que soit la date d'achèvement de l'immeuble.
Le crédit d'impôt pour équipement de l'habitation principale en faveur de l'aide aux personnes
Les dispositions de l'article 200 quater A du Code général des impôts devaient initialement s'appliquer aux dépenses acquittées entre le 1er janvier 2005 et le 31 décembre 2009. Elles ont fait l'objet de prorogations successives, à l'identique, dont la dernière doit expirer le 31 décembre 2023. On peut déduire de cette « survie » que le système a fait la preuve de son efficacité.
Les personnes pouvant bénéficier de la mesure
Il peut s'agir tant du propriétaire du logement que de son locataire, ou d'un occupant à titre gratuit, dès lors qu'ils s'acquittent de dépenses d'équipement au titre de leur habitation principale. Le titre d'occupation importe peu ; ainsi il est applicable à celui qui, ayant décidé de vendre son logement moyennant rente viagère, se sera réservé le droit de l'occuper sa vie durant ; ou bien encore, celui qui en aura cédé la nue-propriété.
La circonstance que le logement appartienne à une société de personnes non soumise à l'impôt sur les sociétés ne fait pas obstacle à ce que l'un ou plusieurs de ses associés, dès lors qu'ils sont physiquement occupants du logement à titre d'habitation principale, et qu'ils paient effectivement de telles dépenses, viennent au bénéfice du crédit d'impôt pour l'associé. L'esprit du texte suggère deux extensions, qui, à la lettre, n'y figurent cependant pas. D'une part, au profit des sociétés de personnes locataires, pourvu qu'elles ne soient pas assujetties à l'impôt sur les sociétés, et que l'un de ses associés occupe les lieux ; d'autre part aux sociétés en nom collectif (SNC).
Dans le cas d'un immeuble collectif, les dépenses éligibles peuvent porter aussi bien sur le logement lui-même que sur les parties communes de l'immeuble. Elles sont alors prises en compte pour la quote-part correspondant au logement que le contribuable occupe à titre d'habitation principale, qu'il loue ou qu'il destine à la location, pour les dépenses éligibles qu'il a effectivement payées.
Aucune condition n'est imposée tenant à la présence d'une personne âgée ou handicapée dans le logement où s'intègrent ces équipements. Et a fortiori, aucun justificatif tenant à la qualité du contribuable en tant que personne âgée ou handicapée n'est non plus exigé (comme par exemple être titulaire d'une carte d'invalidité) n'est exigé. Ce sont seulement les caractéristiques de l'équipement lui-même qui importent.
Ce qui en réalité est aussi logique que vertueux : le but du dispositif fiscal, et donc l'intention du législateur, consiste à inciter les propriétaires ou occupants de logements à réaliser les installations qui feront tendre leur bien vers l'accessibilité : que cette accessibilité ne soit pas dans l'immédiat leur nécessité propre, mais que la poursuite de celle-ci soit la saine marque d'une judicieuse prévoyance, ne doit en rien évincer le bénéfice de la mesure. Peu importe finalement les besoins personnels, avérés ou non, de celui qui réalise la dépense : ce qui compte c'est que le parc français de logements s'oriente vers toujours plus d'accessibilité.
C'est sans doute d'ailleurs le motif qui pourrait justifier, comme nous le suggérons, que le dispositif soit pérennisé et non plus placé périodiquement à la merci d'une prorogation. En tous cas c'est à peu près en ces termes que, d'une certaine façon, l'appelait de ses vœux le secrétariat d'État chargé des personnes handicapées, dans son communiqué de presse publié le 26 janvier 2021, dans lequel il saluait la prorogation qui venait d'être actée dans le vote de la dernière loi de finances jusqu'à la fin 2023, en expliquant ce vote par « l'utilité sociale » du dispositif.
Les logements auxquels la mesure est applicable
Le logement concerné doit être situé en France (territoire de la France métropolitaine, ou départements d'outre-mer) ; il doit être affecté à la résidence principale du contribuable, auteur des dépenses engagées pour les travaux d'accessibilité ou l'installation d'équipements spécialement conçus pour les personnes âgées ou handicapées.
Le logement s'entend des pièces d'habitation proprement dites et des dépendances immédiates et nécessaires, telles que les garages. Tel n'est pas le cas des piscines, courts de tennis et autres éléments d'agrément qui ne peuvent être considérés comme des dépendances nécessaires du local d'habitation. Le crédit d'impôt s'applique également à l'aménagement des accès à l'habitation principale ou à ses dépendances immédiates et nécessaires. En pratique, il s'agira de dépenses relatives aux systèmes de motorisation de portails, ou aux revêtements de sol antidérapants.
Par habitation principale, la doctrine fiscale entend le logement où résident habituellement et effectivement les membres du foyer fiscal, et où se situe le centre de leurs intérêts. Il peut s'agir de maisons individuelles ou de logements situés dans un immeuble collectif. Mais aussi de toute autre forme de logement (yourte, bateau, roulotte, péniche aménagés en local d'habitation) dès lors que celui-ci est utilisé en un point fixe et, dans cette hypothèse, soumis à la taxe d'habitation ou au dispositif de compensation « à l'euro près » qui s'y substitue depuis le 1er janvier 2023 pour les résidences principales.
Pour les logements compris dans des immeubles collectifs, et lorsque les équipements s'intègrent aux parties communes, chacun des propriétaires ou occupants de l'immeuble peut faire état de la quote-part correspondant au logement qu'il occupe à titre d'habitation principale, qu'il loue ou qu'il destine à la location, pour les dépenses éligibles qu'il a effectivement payées.
Pour les locaux à usage mixte professionnel et d'habitation, sauf à démontrer que l'équipement a été installé ou que les travaux ont été réalisés exclusivement dans l'une des deux parties (soit celle à usage d'habitation principale du contribuable, soit celle à usage professionnel), les dépenses seront prises en compte en faisant application d'un prorata au mètre carré : elles seront éligibles pour leur seule fraction se rapportant à la superficie de la partie du local affectée à usage d'habitation. Sans que d'autres options de prorata soient ouvertes, cette répartition doit être opérée forfaitairement, au seul regard des superficies affectées à chacun de ces usages.
Aucune condition d'ancienneté du logement, ou d'ancienneté dans son usage effectif de résidence principale, n'est exigée. Ainsi, les dépenses d'installation des équipements sont éligibles au crédit d'impôt :
  • lorsque ces équipements s'intègrent à un logement que le contribuable acquiert neuf ou en l'état futur d'achèvement ;
  • lorsqu'ils s'intègrent à un logement que le contribuable fait construire et qui a fait l'objet de la déclaration d'ouverture de chantier prévue à l'article R. 424-16 du Code de l'urbanisme ;
  • lorsqu'ils sont acquis dans le cadre de travaux d'installation ou de remplacement réalisés à l'initiative du contribuable dans un logement déjà achevé.
Il est seulement demandé que le contribuable affecte le logement à son habitation principale dès son achèvement, ou dès son acquisition si elle est postérieure.
Lorsque les travaux d'installation ou de remplacement des équipements sont effectués dans un logement déjà achevé, ce local doit constituer l'habitation principale du contribuable à la date du paiement de la dépense à l'entreprise qui réalise les travaux. Si toutefois certaines dépenses sont réalisées et payées avant l'installation définitive du contribuable dans le logement, le crédit d'impôt peut être appliqué sous réserve que l'affectation à l'habitation principale intervienne dans un délai raisonnable à compter de la date du paiement de la facture (un délai de six mois étant considéré comme raisonnable).
Toujours dans le souci de faciliter la mise en accessibilité des logements, la doctrine fiscale réserve encore une approche favorable à deux cas particuliers : celui des contribuables destinataires d'un logement de fonction et vivant pourtant ailleurs que dans celui-ci, et celui des contribuables en poste à l'étranger dans le cadre de leur exercice professionnel.

Mesure de tolérance lorsque les travaux sont réalisés avant l'installation du contribuable dans sa résidence principale, ou avant l'acquisition

Pour pouvoir bénéficier de cette mesure de tolérance, il sera naturellement nécessaire que :
• le contribuable soit propriétaire ou locataire de l'immeuble sur lequel sont réalisés les travaux au jour du paiement de la dépense ;
• le contribuable ait effectivement supporté la dépense ouvrant droit au bénéfice de cet avantage fiscal et soit en mesure de présenter, à la demande de l'administration, la facture établie à son nom par l'entreprise qui a réalisé les travaux ;
• le logement n'ait fait l'objet d'aucune autre affectation entre le paiement de la dépense et son occupation à titre d'habitation principale par le contribuable.
La souplesse de la doctrine fiscale sur ce point, commandée on le voit par la volonté de ne pas dresser d'obstacles inutiles sur la marche vers l'accessibilité des logements, va plus loin encore : car elle admet aussi que la circonstance dans laquelle le contribuable demanderait également le bénéfice de cet avantage fiscal pour des travaux de même nature, réalisés au cours de la même année, dans sa précédente habitation principale, ne ferait pas obstacle à l'application de cette mesure.
Le bénéfice de cette mesure d'assouplissement n'est soumis à aucune formalité spécifique. En particulier, il n'est subordonné à aucun engagement écrit de transférer l'habitation principale dans l'immeuble pour lequel l'avantage fiscal est demandé.

Deux cas particuliers de logements susceptibles d'être concernés, pris en compte par le

1. Contribuables ayant droit à un logement de fonction
Lorsque l'un des membres du foyer fiscal est titulaire d'un logement de fonction, ce logement constitue, en principe, la résidence du foyer fiscal. Toutefois, lorsque le conjoint et les autres membres du foyer fiscal du titulaire du logement de fonction résident effectivement et en permanence dans une autre habitation, cette dernière peut être considérée comme constituant l'habitation principale de ce foyer. Dans ce cas, le crédit d'impôt pourra être accordé au titre de cette habitation, et alors seulement celle-ci : de fait, si des dépenses éligibles devaient être réalisées dans le logement de fonction occupé par ailleurs, ces dépenses ne pourraient donc plus ouvrir droit à l'avantage fiscal.
2. Salariés ou fonctionnaires en poste à l'étranger
Le crédit d'impôt est accordé aux salariés ou fonctionnaires en poste à l'étranger, pour un logement situé en France, lorsque celui-ci est occupé de manière permanente ou quasi permanente par leur conjoint, seul ou avec les autres personnes vivant habituellement au sein du foyer familial.
Notons qu'ici, la mansuétude fiscale s'arrête à ceux dont l'exercice professionnel est subordonné à une autorité, censée donc lui avoir imposé au moins un temps ce mode de vie, d'exercice professionnel, et de logement. Car celui qui, professionnel indépendant ou dirigeant d'entreprise, résiderait à l'étranger même pour les besoins de son exploitation, ne pourra pas faire profiter son foyer fiscal de cette mesure. Il est vrai que bien souvent dans une telle configuration, les critères de l'article 4B du Code général des impôts ne seront plus remplis pour faire de lui un résident fiscal français.
Les dépenses concernées
Le crédit d'impôt concerne trois catégories de dépenses payées, du 1er janvier 2005 au 31 décembre 2023. Quoique l'administration ne les ait pas identifiées de la sorte, nous proposons de les distinguer par un numéro :
  • CATÉGORIE 1 : dépenses au titre de l'installation ou du remplacement d'équipements limitativement énumérés conçus pour les personnes âgées ou handicapées ;
  • CATÉGORIE 2 : dépenses au titre de travaux d'adaptation du logement à la perte d'autonomie ou au handicap, par suite de l'extension du crédit d'impôt aux dépenses liées à ce type de travaux permettant l'adaptation des logements à la perte d'autonomie ou au handicap, aux termes de l'article 81 de la loi de finances pour 2018 ;
  • CATÉGORIE 3 : dépenses correspondant aux travaux de prévention des risques technologiques prescrits aux propriétaires d'habitation au titre de l'article L. 515-16-2 du Code de l'environnement, notion qui excède les limites de notre sujet.
Quelle que soit leur nature, les dépenses d'acquisition des équipements ne peuvent ouvrir droit au crédit d'impôt prévu à l'article 200 quater A du Code général des impôts que si ces équipements sont fournis et installés par une même entreprise, et donnent lieu à l'établissement d'une facture. Sont au contraire exclus les équipements ou matériaux acquis directement par le contribuable, même si leur pose ou leur installation est effectuée par une entreprise.

Communiqué de presse publié le 26 janvier 2021 par le secrétariat d'État chargé des personnes handicapées

Compte tenu de l'utilité sociale du crédit d'impôt accordé pour les dépenses d'équipement qui permettent l'accessibilité des habitations principales et leur adaptation au handicap et à la perte d'autonomie, la loi de finances pour 2021 a prorogé le dispositif jusqu'au 31 décembre 2023.
Les propriétaires, locataires ou occupants à titre gratuit et bailleurs vont donc pouvoir bénéficier de ce dispositif (qui arrivait à échéance le 31 décembre 2020) jusqu'à trois ans de plus.
Cette mesure participe au maintien à leur domicile des personnes en situation de handicap et des personnes âgées en soutenant les contribuables qui financent des dépenses :
  • d'installation ou de remplacement d'équipements spécialement conçus pour l'accessibilité des logements aux personnes handicapées ou âgées ;
  • d'adaptation du logement au handicap ou à la perte d'autonomie.
Les modalités du crédit d'impôt sont reconduites à l'identique, soit un montant de crédit d'impôt de 25 % du montant des dépenses, dans la limite d'un plafond de dépenses de 5 000 € pour une personne seule et 10 000 € pour un couple, majoré de 400 € par personne à charge.
Selon Sophie Cluzel, « permettre aux personnes en situation de handicap de faire des dépenses d'équipement et d'adaptation nécessaires, c'est améliorer leur vie quotidienne et celle de leurs aidants. L'inscription de cette mesure dans la durée participe pleinement de notre construction d'une société toujours plus inclusive ».
Une liste limitative des équipements spécialement conçus pour les personnes âgées ou handicapées éligibles au crédit d'impôt (que nous nommons « dépenses de CATÉGORIE 2 ») figure à l'article 18 ter de l'annexe IV au Code général des impôts. Cette liste comprend :
  • d'une part, des équipements sanitaires attachés à perpétuelle demeure ;
  • d'autre part, des équipements de sécurité et d'accessibilité attachés à perpétuelle demeure.
Seuls les équipements figurant sur cette liste et présentant les caractéristiques techniques requises ouvrent droit au bénéfice de l'avantage fiscal, mais une actualisation est en préparation afin de réserver l'application dans le temps du crédit d'impôt aux équipements les plus performants en fonction de l'évolution technique.

Les installations et équipements permettant l'adaptation des logements à la perte d'autonomie ou au handicap

La dernière adaptation de la liste des équipements éligibles s'est appliquée à compter de l'imposition des revenus de 2018.
  • Équipements sanitaires attachés à perpétuelle demeure : éviers et lavabos fixes utilisables par les personnes à mobilité réduite ; cabines de douche intégrales pour personnes à mobilité réduite ; bacs à douche extra-plats et portes de douche ; receveurs de douche à carreler ; pompes de relevage ou pompes d'aspiration des eaux pour receveur extra-plat ; W.-C. suspendus avec bâti support ; W.-C. équipés d'un système lavant et séchant ; robinetteries pour personnes à mobilité réduite ; mitigeurs thermostatiques ; miroirs inclinables pour personnes à mobilité réduite.
  • Équipements de sécurité et d'accessibilité attachés à perpétuelle demeure : systèmes de commande comprenant un détecteur de mouvements, de signalisation ou d'alerte ; dispositifs de fermeture, d'ouverture ou systèmes de commande des installations électriques, d'eau, de gaz et de chauffage ; éclairages temporisés couplés à un détecteur de mouvements ; systèmes de motorisation de volets, de portes d'entrée et de garage, de portails ; volets roulants électriques ; revêtements de sol antidérapant ; protections d'angles ; boucles magnétiques ; systèmes de transfert à demeure ou potences au plafond ; garde-corps ; portes ou fenêtres adaptées, inversion ou élargissement de portes ; portes coulissantes.
S'agissant des équipements sanitaires, ils doivent être spécialement conçus pour les personnes âgées ou handicapées et attachés à perpétuelle demeure pour ouvrir droit au crédit d'impôt. Ainsi, s'agissant des douches dites « à l'italienne », il a été rappelé qu'elles doivent être spécialement conçues pour répondre aux besoins des personnes âgées ou handicapées pour ouvrir droit à l'avantage fiscal, c'est-à-dire comporter des éléments spécifiques et indispensables à l'accessibilité et l'utilisation par ces personnes. Si cet aménagement n'a que des vertus décoratives, son installation n'est pas en soi éligible au crédit d'impôt.
Le législateur fiscal a cependant profité de l'occasion que lui donnait la dernière révision à laquelle il a procédé non seulement pour élargir le champ des dépenses éligibles au bénéfice du crédit d'impôt pour adaptation du logement à la perte d'autonomie ou au handicap (CATÉGORIE 2), mais encore pour assortir le crédit d'impôt lié à ces dépenses (et à elles seules) de nouvelles conditions.
Seuls peuvent désormais en bénéficier les contribuables qui remplissent, au titre d'une invalidité, des conditions particulières (pension militaire, ou pension pour accident du travail), ou les contribuables titulaires de la carte « mobilité inclusion » (avec de nombreuses précisions impératives), ou encore ceux qui souffrent d'une perte d'autonomie entraînant le classement dans l'un des groupes 1 à 4 de la grille nationale évaluant la perte d'autonomie pour disposer de l'allocation personnalisée d'autonomie. Cette condition doit être remplie par le contribuable ou une personne rattachée à son foyer fiscal, et doit être appréciée au 31 décembre de l'année du paiement de la dépense (pour les dépenses réalisées dans le cadre de travaux effectués dans un logement achevé), ou à la date d'acquisition du logement pour celles intégrées à un logement acquis neuf, ou bien encore à la date d'achèvement du logement, pour celles intégrées à un logement acquis en l'état futur d'achèvement ou que le contribuable fait construire.
En revanche, ces conditions ne sont pas exigées pour les dépenses relevant de la CATÉGORIE 1. On peut regretter cette complexité, qui oblige à un audit tout différent des conditions à réunir, en fonction de la nature des dépenses qui, pourtant, tendent toutes vers le même objectif général : favoriser l'accroissement du nombre de logements accessibles en France.
Montant du crédit d'impôt
Le montant du crédit d'impôt est déterminé par l'application d'un taux à une base de dépenses, et ce dans la limite d'un plafond pluriannuel. Muni impérativement de sa calculette, le lecteur pourra découvrir les détails du calcul sur l'extension web.

À vos calculettes ! La détermination du montant du crédit d'impôt pour dépenses d'adaptation du logement au handicap ou à la perte d'autonomie

  • Base de calcul du crédit d'impôt : Pour les travaux réalisés au sein d'un logement déjà achevé, le crédit d'impôt s'applique au coût des équipements (spécialement conçus pour les personnes âgées ou handicapées) et à la main-d'œuvre, tels qu'ils résultent nécessairement de la facture délivrée par l'entreprise ayant réalisé les travaux à la demande du contribuable.Lorsque l'équipement s'intègre à un logement acquis en Vefa ou à un logement neuf livré équipé, le coût de cet équipement s'entend de son prix de revient pour le constructeur ou pour le vendeur, majoré de la marge bénéficiaire qu'il s'accorde sur le montant de l'équipement. Bon à savoir ! Le prix des travaux s'entend du montant toutes taxes comprises. Ceci sauf pour les dépenses payées par les propriétaires-bailleurs, lorsque le logement bénéficiaire des travaux fait l'objet d'une location meublée soumise à la TVA : la base du crédit d'impôt s'entendra alors du montant hors taxes. Mais attention ! Lorsque le crédit doit concerner le locataire ou l'occupant gratuit, la base ne peut être constituée que de montants strictement et personnellement acquittés pour la réalisation des dépenses, donc des sommes versées aux entreprises réalisant les travaux. Ainsi, les sommes qui correspondraient à une augmentation de loyer, du fait de la réalisation des travaux par le propriétaire, ne seraient aucunement éligibles. Sont exclus, pour les mêmes raisons, les frais de dossier ou les frais financiers (intérêts bancaires).En toute hypothèse et d'une manière générale, seules ouvrent droit au crédit d'impôt les dépenses effectivement supportées par le contribuable. De ce fait, si ce contribuable a profité de primes ou aides accordées pour la réalisation de ce type de travaux, en toute logique le montant de ces aides et primes sera déduit de la base de calcul du crédit d'impôt.De la même façon, si le bénéficiaire du crédit d'impôt vient à être remboursé (dans les cinq ans) de tout ou partie du montant des dépenses qui y ont ouvert droit, il fera l'objet d'une reprise égale au montant de l'avantage fiscal accordé à raison de la somme qui a été remboursée. Hypothèse qui pourra se vérifier par exemple si le remplacement d'un équipement ou la réalisation de travaux sont effectués à la suite d'un sinistre ayant donné lieu à une indemnisation d'assurance.
  • Taux du crédit d'impôt : Le taux applicable est égal à 25 % de la dépense éligible (25 % du coût d'installation de l'équipement spécialement conçu pour les personnes âgées ou handicapées, ou du prix d'acquisition de ce même équipement).
  • Plafond des dépenses éligibles : Le taux ci-dessus s'applique toutefois dans la limite d'un plafond, qu'il ne peut dépasser quelle que soit l'importance des dépenses. Ce plafond des dépenses éligibles se conçoit pour une même résidence principale : il est déterminé en tenant compte de la situation de famille du contribuable et des personnes fiscalement à sa charge au titre de la période d'imposition au cours de laquelle la dépense a été réalisée.Ainsi, pour un même contribuable et une même habitation, le montant des dépenses ouvrant droit au crédit d'impôt est plafonné à 5 000 € pour une personne célibataire, veuve ou divorcée, et à 10 000 € pour un couple marié ou pacsé soumis à imposition commune.Ces deux plafonds (de 5 000 € et de 10 000 €) sont majorés de 400 € par personne à charge au sens des articles 196, 196 A bis et 196 B du Code général des impôts. Étant précisé que lorsque la charge correspond à un enfant confié à la garde alternée de ses parents séparés, la majoration de 400 € est divisée par deux.Ils s'apprécient sur une période de cinq années consécutives comprises entre le 1er janvier 2005 et le 31 décembre 2023, c'est-à-dire sur une « période glissante » de cinq années comprises entre ces deux dates. Ainsi, toute la fraction du plafond déjà utilisée au cours des années précédentes sur la période ne pourra plus être utilisée ensuite, jusqu'à atteindre et entamer une nouvelle période de cinq ans. Mais qu'arrive-t-il si au cours de cette période, le contribuable déménage et change de résidence principale ? Dans ce cas, compte tenu du fait que le crédit d'impôt se conçoit pour chaque habitation principale, un déménagement intervenant au cours de la période d'application du crédit d'impôt permet au contribuable de bénéficier d'un nouveau plafond spécifique pour chaque nature de dépenses réalisées, toutes autres conditions remplies par ailleurs. Il en est de même dans l'hypothèse d'un changement de situation matrimoniale du contribuable au cours de la période, même si ce mouvement ne s'accompagne d'aucun déménagement physique. En effet, le mariage, le divorce ou le décès de l'un des époux entraîne création d'un nouveau foyer fiscal.
Imputation du crédit d'impôt
Le crédit d'impôt s'impute sur le montant de l'impôt sur le revenu dû au titre de l'année au cours de laquelle le fait générateur du crédit d'impôt est intervenu. Si le crédit d'impôt excède l'impôt dû, l'excédent est restitué au contribuable. Si le contribuable n'est pas imposable, c'est la totalité du crédit d'impôt qui lui sera restituée. N'étant pas considéré comme une « niche fiscale », notre crédit d'impôt est exclu du champ d'application du plafonnement global des avantages fiscaux prévu à l'article 200-0 A du Code général des impôts. En revanche, il n'est pas cumulable avec d'autres avantages voisins.

. Le principe de non-cumul des crédits d'impôt appliqué aux dépenses d'adaptation du logement au handicap ou à la perte d'autonomie

Une dépense bénéficiant du crédit d'impôt de l'article 200 quater A ne peut ouvrir droit, même si par ailleurs elle en remplit aussi les conditions, au bénéfice du crédit « cousin » mis en place à l'article 200 quater du Code général des impôts, c'est-à-dire le dispositif gouvernant le bénéfice d'un crédit d'impôt pour la transition énergétique, vu par ailleurs dans les pages qui précèdent. Le cumul des deux crédits d'impôt n'est possible que si le contribuable est en mesure d'apporter la preuve de dépenses distinctes.
Par ailleurs et enfin, le crédit d'impôt de l'article 200 quater A n'est pas cumulable avec la déduction des dépenses pour la détermination des revenus catégoriels : les dépenses bénéficiant du crédit d'impôt ne peuvent donc ouvrir droit, même si elles en remplissent aussi les conditions, au bénéfice d'une déduction sur le revenu catégoriel (revenus fonciers, bénéfices industriels et commerciaux, bénéfices agricoles, etc.).
Le contribuable choisit librement le champ de l'imputation.
Les aides financières
Dans la même démarche que celle qui a présidé à l'instauration du crédit d'impôt, on a vu se multiplier les aides et subventions variées, ainsi que les financements dédiés à la mutation des logements vers l'accessibilité. Compte tenu de leur caractère multiple et de leurs régimes hétérogènes, le propriétaire ou l'occupant désireux de toutes les connaître et les apprivoiser aura sans doute avantage à se rapprocher de la maison départementale des personnes handicapées (MDPH, V. supra, no ) dont dépend son logement, afin de solliciter un accompagnement. Le dénominateur commun à toutes ces aides financières est qu'elles sont disponibles tant pour le propriétaire que pour le locataire du logement concerné. Elles sont, pour la plupart, allouées sous condition de ressources.
Panorama rapide des aides à l'adaptation du logement à la vieillesse ou au handicap
La PCH
Nous retrouvons ici tout d'abord la prestation de compensation du handicap (PCH), rencontrée plus haut lorsque nous avons observé les outils de mise en œuvre du droit à compensation du handicap proclamé par la loi de 2005.
La PCH est versée par les collectivités territoriales et permet de financer des travaux d'adaptation du logement à la perte d'autonomie. Elle est personnalisée selon les besoins des demandeurs, qui peuvent être des personnes vivant chez elles, ou chez d'autres personnes qui les hébergent (ascendant, descendant).
Pour rappel, cette participation au budget des travaux, en cas de prise en charge à taux plein, sera de 100 % dans la limite de 10 000 € par période de dix ans pour des travaux jusqu'à 1 500 €. Au-delà, la prise en charge sera de 50 % dans la limite de 10 000 € par période de dix ans pour les travaux supérieurs à 1 500 €.
Si la prise en charge est à taux partiel, le taux de participation passe à 80 et 50 %, avec les mêmes plafonds.
Pour bénéficier de la PCH, il faut être âgé de moins de soixante ans, résider en France (depuis au moins trois mois pour les étrangers), et remplir l'une des deux situations suivantes :
  • rencontrer une difficulté absolue pour la réalisation d'une activité importante du quotidien ;
  • rencontrer une difficulté grave pour la réalisation d'au moins deux activités importantes du quotidien.
Mais aucune condition de ressources n'est imposée pour obtenir la prestation. Toutefois, cet aspect n'est malgré tout pas sans impact, puisque comme vu précédemment, le fait de dépasser ou non un seuil annuel de revenus entraînera une prise en charge à taux plein ou au contraire partiel.
L'AAH
L'allocation aux adultes handicapés (AAH) est une aide accordée par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH). Elle permet d'obtenir un complément de ressources sous réserve de respecter des critères d'éligibilité. Son montant varie selon la situation de l'allocataire, et ne peut dépasser 956,65 € mensuels.
Tout ou partie de cette somme peut être librement affecté par l'allocataire au budget des aménagements ou des adaptations de son logement aux normes d'accessibilité : elle a donc toute sa place dans l'économie générale des moyens financiers de l'accessibilisation des logements français.
Ses conditions d'attribution s'organisent autour du respect de certains critères. Le premier réside dans le taux d'incapacité de la personne, qui en principe doit être au minimum de 80 % (sauf cas particulier de restrictions graves, qui permettent de considérer comme éligible un taux d'incapacité à partir de 50 %).
Il faut par ailleurs résider en France depuis au moins trois mois, et être âgé d'au moins vingt ans.
D'autre part et enfin, les ressources de la personne ou de son foyer fiscal sont soumises à des conditions de plafond, lesquelles sont réactualisées chaque année.
Le complément de ressources
D'un montant de 179,31 € mensuels, cette prime était, jusqu'au 1er décembre 2019, ajoutée à l'AAH pour constituer ce que l'on nommait la « garantie de ressources ». Supprimée par l'article 83 de la loi de finances pour 2019, elle a cessé d'être disponible depuis cette date. Cependant, elle n'a pas été abrogée, ce qui signifie que l'allocataire qui en profitait auparavant pourra continuer à la percevoir pendant dix ans, sous réserve bien sûr de continuer à en remplir les conditions d'éligibilité. Et à l'instar de l'AAH, l'allocataire dispose de la possibilité d'utiliser tout ou partie de cette aide pour financer des travaux d'adaptation de son logement au handicap.
Nous n'examinerons pas en détail ce qui constituait les conditions d'attribution du complément de ressources, puisqu'il n'est plus octroyé aujourd'hui et disparaîtra totalement au plus tard après 2029.
La MVA
La majoration pour la vie autonome (MVA) est également une allocation vouée à permettre de subvenir aux besoins d'une personne handicapée, notamment de contribuer au financement de l'adaptation d'un logement au handicap. Elle est octroyée directement par la caisse d'allocations familiales (CAF) ou la Mutualité sociale agricole (MSA). En 2023, son montant est de 104,77 € par mois, et intervient également comme complément de l'AAH.
Pour être éligible à la MVA, il faut remplir les conditions suivantes :
  • être bénéficiaire de l'AAH dans sa totalité ou en complément d'une retraite, d'une pension d'invalidité ou d'une rente d'accident du travail, ou être bénéficiaire de l'allocation supplémentaire d'invalidité (ASI) ;
  • souffrir d'un taux d'incapacité d'au moins 80 % ;
  • vivre dans un logement indépendant ou être hébergé par un particulier ;
  • être bénéficiaire d'une aide au logement ;
  • ne pas percevoir de revenus professionnels.
Les aides « Habiter facile » de l'Anah
– 1. – L'Agence nationale pour l'habitat (Anah) propose une aide financière dans le cadre de son programme « Habiter facile » dans le but de mener les travaux d'adaptation d'un logement au handicap. Dans une certaine limite, cette aide peut financer jusqu'à la moitié des travaux et proposer un accompagnement.
Ainsi, son montant varie et peut prendre en charge :
  • 50 % du montant total des travaux hors taxes, dans la limite de 10 000 €, pour les ménages relevant de la catégorie « ressources très modestes » ;
  • 35 % du montant total des travaux hors taxes, dans la limite de 7 000 €, pour les ménages relevant de la catégorie « ressources modestes ».
Ces deux catégories sont composées de divers plafonds, échelonnés selon le nombre de personnes composant le ménage, le tout réparti dans deux tableaux, l'un défini pour l'Île-de-France et l'autre pour le reste du territoire national (www.anah.fr/proprietaires/proprietaires-occupants/les-conditions-de-ressources">Lien).
2. Une prime supplémentaire peut être accordée si la consommation énergétique du logement après travaux baisse d'au moins 25 %.
Pour être éligible à l'aide de l'Anah, les conditions suivantes doivent être remplies :
  • ne pas dépasser les conditions de ressources ;
  • détenir ou occuper le logement de plus de quinze ans à la date de la demande ;
  • ne pas avoir bénéficié d'un prêt à taux zéro au cours des cinq dernières années ;
  • faire réaliser les travaux par des professionnels du bâtiment ;
  • les travaux ne doivent pas concerner la simple décoration du logement, et doivent atteindre un montant minimum de 1 500 €.
Le prêt Action Logement
Le dispositif Action Logement Services (organisé sous forme de société par actions simplifiée, formant l'une des trois entités du groupe qui, depuis 2017, remplace ce que l'on nommait auparavant le « 1 % Logement », ou « 1 % patronal ») propose un « prêt travaux » à faible taux d'intérêt, remboursable sur dix ans maximum, pour l'accessibilité et l'adaptation du logement au handicap. Il est notamment possible, au moyen de ce type de financement, de couvrir des dépenses comme l'élargissement de la porte d'entrée, l'installation d'une rampe d'accès, la suppression de marches, la modification et l'aménagement d'une salle de bain…
Afin de pouvoir prétendre au prêt travaux Action Logement, il y a lieu :
  • d'être une personne en situation de handicap, propriétaire occupante d'un logement du parc privé, à titre de résidence principale ;
  • d'être salarié d'une entreprise du secteur privé non agricole d'au moins dix salariés ;
  • de produire un justificatif de handicap ou de perte d'autonomie : décision de la Commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH) ou évaluation de la perte d'autonomie en Groupe iso-ressources (GIR).
Les aides locales
De multiples aides existent au niveau local pour aider à financer les travaux d'un logement. Il est utile de se renseigner sur la plateforme « Simul'Aides », qui est censée regrouper toutes les informations disponibles et aider l'impétrant à s'orienter et prendre conscience de ce qui peut exister comme réponse à son besoin, dans le maquis des différentes sources de financement. Cela étant, la diversité observée territoire par territoire est telle que le site lui-même précise : « L'information délivrée par Simul'Aides englobe a minima les aides nationales, mais pas nécessairement les aides locales qui peuvent varier d'un territoire à l'autre. Il vous faudra donc bien penser à faire les demandes nécessaires auprès de vos administrations locales ».
Connaître et compiler tous les dispositifs mis en place dans chaque région, chaque département, voire chaque commune excède donc aussi les limites des présents travaux. Honneur soit rendu aux hôtes de ce congrès, prenons deux exemples normands :
  • le département de la Seine-Maritime apporte une aide financière dénommée aide « Habitat autonomie », attribuable aux propriétaires occupants, souhaitant faire réaliser des travaux permettant le maintien à domicile des personnes en perte d'autonomie et qui bénéficient de l'allocation personnalisée d'autonomie. Les subventions portent sur des travaux ou des équipements immeubles par destination (création de sanitaires au rez-de-chaussée, d'une rampe d'accès, suppression de marches…). Les travaux doivent être réalisés par des professionnels. Le taux d'aide est de 25 % du montant des travaux, lequel n'est retenu qu'à hauteur d'un maximum de 10 000 €, soit une subvention maximum de 2 500 € ;
  • le département du Calvados apporte une aide aux propriétaires occupants pour l'amélioration de leur résidence principale dans le cadre de travaux de rénovation et équipements énergétiques ou d'adaptation du logement pour les personnes âgées ou handicapées, sous forme d'un prêt remboursable à 0 % jusqu'à 6 000 € maximum ; le tout sous condition d'usage du logement (résidence principale du propriétaire occupant, conditions de ressources), et accompagné dans certains cas de subventions complémentaires.

Sourcer les ressources

Le moteur de recherche sur le site de l'Agence nationale pour l'information sur le logement (Anil) est efficace pour identifier ces différentes ressources, France entière, commune par commune, sous le prisme d'options de clé de tri (propriétaire, bailleur ou occupant, locataire, résidence principale ou non, <em>etc.</em>) :

L'aide des caisses de retraite
Les caisses de retraite peuvent accorder une aide financière pour réaliser des travaux dans un logement. Ces travaux doivent servir à améliorer ce logement ou l'adapter à une perte d'autonomie (par ex., remplacement d'une baignoire par une douche). Cette aide est attribuée aux personnes retraitées du régime général ou retraitées de l'État.
Le montant de cette subvention est fixé selon le montant des travaux entrepris, les ressources du ménage dans la limite d'un plafond fixé par les caisses de retraite. Il peut atteindre 3 500 €.
L'occupant du logement peut être propriétaire ou locataire de celui-ci. Mais pour percevoir l'aide, il doit être retraité et dépendre du régime général de la sécurité sociale comme régime principal, ou du régime de la fonction publique. Et le logement doit être utilisé à titre de résidence principale.
Cette aide est incompatible avec la perception de l'APA, l'ACTP ou la PCH vues plus haut, ou même avec le simple fait de remplir les conditions pour les percevoir.
Les prêts bancaires conventionnés
Un prêt conventionné est destiné au propriétaire qui souhaite faire des travaux dans sa résidence principale ou à toute personne qui veut devenir propriétaire de sa résidence principale (en l'achetant ou en la faisant construire). Il est accordé sans conditions de ressources. Le taux d'intérêt du prêt est plafonné. Il est possible d'obtenir ce prêt auprès des organismes financiers ayant passé une convention avec l'État.
Les travaux d'adaptation d'un logement au handicap sont éligibles à un prêt conventionné, à condition que ce logement soit occupé à titre de résidence principale au plus tard un an après la fin des travaux (sauf certaines hypothèses où ce délai peut être poussé jusqu'à six ans, notamment quand l'emprunteur prévoit d'occuper le logement à partir de son départ à la retraite).
Aucune condition de ressources n'est requise et la durée de remboursement peut s'échelonner sur cinq à trente-cinq ans.

Les locaux concernés

– Un principe assorti d'importantes exceptions. – Le champ d'application de l'obligation d'accessibilité est délimité par trois textes piliers : les articles L. 111-7, L. 111-7-1 et R. 111-18-4 du Code de la construction et de l'habitation. Même si elle concerne aussi d'autres types de locaux, elle s'applique au premier chef aux logements neufs autres que les maisons individuelles construites ou réhabilitées par leur propriétaire à son usage personnel (I). Cependant, le logement ancien peut, dans certains cas, être concerné s'il fait l'objet d'une rénovation (II).
Le principe d'application aux logements neufs
– Une règle logique. – Seuls sont tenus à l'obligation d'accessibilité « les bâtiments ou parties de bâtiments nouveaux ». La règle est logique. C'est dès la construction que doivent et peuvent être pensés et prévus les aménagements et les prescriptions techniques propres à l'accessibilité, dans les parties communes comme dans les logements, tels que les largeurs des circulations et des portes, l'organisation des espaces, les équipements. Il en résulte qu'au sein d'un bâtiment d'habitation collectif existant, les logements ne sont soumis à aucune obligation, même lorsqu'ils font l'objet de travaux.
– Peu importe le mode de gestion de l'immeuble. – L'obligation d'accessibilité s'impose à tous les logements collectifs neufs indépendamment de leur gestion future. Elle concerne donc notamment ceux voués à la location, fût-elle temporaire et saisonnière. C'est le cas dès lors que les locaux concernés ont vocation à être gérés et entretenus de façon permanente. Dans un tel cas, l'ancien article R. 111-18-2 du Code de la construction et de l'habitation impose que les dispositions architecturales et les aménagements propres à assurer l'accessibilité de ces logements garantissent :
  • pour tous les logements de l'immeuble, la possibilité d'être visités et occupés par une personne handicapée ;
  • pour un certain pourcentage d'entre eux, la possibilité pour une personne handicapée d'accéder, sans travaux préalables, aux pièces de l'unité de vie et à faire usage de leurs fonctions.
Les aménagements au principe
Le principe d'accessibilité comporte cependant d'importants aménagements.
La maison individuelle à usage personnel
– Une tolérance critiquée. – Les maisons individuelles construites ou réhabilitées pour l'usage personnel de leur propriétaire sont dispensées de satisfaire à l'obligation d'accessibilité. Cette mesure a parfois été critiquée.
En Vefa, les travaux modificatifs réversibles
Lorsqu'un appartement est vendu en état futur d'achèvement à des acquéreurs non encore concernés par les contraintes de l'âge ou du handicap, ces derniers peuvent demander la réalisation de travaux modificatifs, notamment afin de redimensionner les pièces pour les besoins d'un occupant valide. Néanmoins, les travaux modificatifs doivent être aisément réversibles et l'acte doit comporter en annexe le plan de l'état initial, afin d'y revenir un jour si la nécessité s'en fait sentir.

Travaux modificatifs d'accessibilité (TMA) : une obligation de plus pour les notaires

Le 2o du III de l'article R. 162-4 du Code de la construction et de l'habitation prévoit que : « Si le contrat de travaux modificatifs de l'acquéreur est conclu avant la signature de l'acte authentique de vente, les deux plans sont en outre annexés à l'acte authentique de vente ». Il est donc essentiel que le notaire sollicite précisément les parties (promoteur et acquéreur) sur l'existence ou non d'un tel contrat de TMA qui aurait été conclu avant la signature de la Vefa (entre le contrat de réservation et celle-ci). Ceci, aux fins de se préserver contre tout engagement de sa responsabilité civile professionnelle, dans l'hypothèse où lesdites parties omettraient de lui faire part de l'existence de ce contrat et qu'un préjudice en découlerait plus tard. Il respectera ainsi son obligation de conseil à l'égard des parties ou des futurs ayants cause ou ayants droit qui peut-être établiront ces travaux de réversibilité bien des années plus tard, comme son obligation d'assurer la conformité de l'acte qu'il reçoit aux dispositions légales et réglementaires.

Les travaux modificatifs de l'accessibilité dans les ventes en état futur d'achèvement

Les appartements vendus en état futur d'achèvement, qui doivent respecter les règles d'accessibilité, peuvent voir leurs plans modifiés dans un but d'adaptation aux besoins et attentes précises d'un acquéreur donné. La loi a voulu admettre une certaine flexibilité, l'acquéreur étant autorisé par l'alinéa III de l'article R. 162-4 du Code de la construction et de l'habitation à demander la réalisation de modifications au sein du logement qu'il acquiert, avant la construction, pour se détacher plus ou moins des normes d'accès aux personnes à mobilité réduite (PMR) auquel le promoteur était légalement astreint dans la proposition de ses plans initiaux. Ces modifications sont licites, sous réserve de respecter les conditions suivantes :
  • la demande doit émaner de l'acquéreur ;
  • un contrat de travaux modificatifs doit être établi entre l'acquéreur et le promoteur de l'opération ;
  • le logement doit toujours pouvoir être visité par une personne handicapée quel que soit son handicap, c'est-à-dire qu'elle doit pouvoir entrer, se rendre dans le séjour, y circuler et en ressortir ;
  • les travaux modificatifs réalisés à la demande de l'acquéreur doivent permettre une réversibilité des aménagements par des travaux simples, dans les conditions définies par arrêté du ministre chargé de la construction (le plus souvent, il s'agira de déplacements de cloisons internes, de canalisations ou de branchements électriques) ;
  • à des fins de conservation, fort utile en cas de réalisation de travaux réversifs, le plan du logement avant et après travaux modificatifs doit être annexé au contrat de travaux modificatifs de l'acquéreur, voire à l'acte authentique de vente si ce contrat est conclu avant qu'intervienne la signature de l'acte authentique.

Exemple d'optimisation des surfaces d'un logement neuf acquis en Vefa au moyen de travaux modificatifs

Cet exemple est extrait du site « Achat Vefa » (www.achatvefa.com">Lien), créé par un couple ayant voulu décrire en ligne les différentes étapes d'un achat sur plan, à partir de sa propre expérience. On y trouve l'illustration suivante, à la rubrique traitant des travaux modificatifs d'accessibilité (TMA) :
« Voici le plan d'origine (niveau bas et niveau haut) :
On peut remarquer plusieurs choses :
  • l'appartement fait 74 m2 avec trois chambres, ce qui n'est pas beaucoup : il faut donc que le plan soit très optimisé pour être agréable au quotidien ;
  • la pièce à vivre ne fait que 21 m2 (en excluant la cuisine) ;
  • la salle d'eau du niveau bas fait 5 m2 (car aux normes PMR puisque le niveau haut n'est accessible que par un escalier) ;
  • l'entrée fait 3 m2 et n'est pas vraiment exploitable ;
  • le W.-C. du niveau haut est inutilement profond ;
  • il n'y a pas de double vasque dans les pièces d'eau.
Si un acquéreur sans handicap le souhaite, il peut donc faire une demande de TMA au promoteur, tout en respectant le principe de réversibilité. Voici donc une nouvelle proposition que nous avons faite et qui paraît beaucoup plus optimisée (après TMA) :
Suite à nos recommandations, l'acquéreur a décidé d'effectuer les modifications suivantes :
  • transformer la salle d'eau du niveau bas en simple W.-C. ;
  • profiter de la place pour créer un petit placard au niveau bas ;
  • permettre à une partie de l'entrée de faire partie intégrante de la pièce à vivre (qui fait donc désormais 26 m2 (vs 21 m2 avant TMA) ;
  • transformer le profond W.-C. du niveau haut en une petite salle d'eau (douche) ;
  • intégrer le W.-C. du niveau haut dans la salle de bain, mettre une double vasque et un espace lave-linge.
Selon nous, l'acquéreur a réellement optimisé son plan en créant une pièce à vivre plus grande (+ un placard), tout en conservant au total deux pièces d'eau et deux W.-C.
Si cela est possible, et en particulier pour les “petites” surfaces, il faut donc systématiquement envisager des TMA afin d'essayer de :
  • réduire les espaces généralement non “utiles” comme l'entrée ou les dégagements ;
  • augmenter la taille de la pièce à vivre (et/ou des chambres, au moins la chambre parentale) ;
  • réduire les pièces d'eau à leur aspect fonctionnel.
Il est à noter que le promoteur ne vous parlera pas forcément spontanément des TMA. C'est en effet assez contraignant pour lui car cette démarche de TMA nécessitera plusieurs allers-retours entre l'acquéreur, lui et l'architecte (ou le maître d'œuvre) afin de confirmer (ou non) la faisabilité technique des changements demandés. Il ne faut donc pas hésiter à lui en parler si ce point n'est pas évoqué naturellement dans la discussion, en sachant que les TMA peuvent engendrer des coûts supplémentaires. (…) ».
L'accessibilité en cas de rénovation
L'obligation d'accessibilité peut être étendue à la rénovation des logements anciens (i), ici encore moyennant exceptions (ii).
Principe d'application à la rénovation lourde
– Deux conditions. – L'obligation d'accessibilité est étendue aux logements anciens faisant l'objet d'une rénovation lourde. L'hypothèse est celle réservée par l'article R. 111-18-9 du Code de la construction et de l'habitation. Elle correspond à la réalisation de travaux :
  • recouvrant la modification, l'extension, ou la création d'un bâtiment ou d'une partie de bâtiment ;
  • dont le montant est supérieur ou égal à 80 % de la valeur du bâtiment.
Lorsque ces deux conditions sont réunies, et bien que l'on soit en présence d'un bâtiment existant, doivent être accessibles :
  • les parties communes, extérieures et intérieures, même si elles ne font pas l'objet de travaux ;
  • les places de stationnement, les caves, les celliers privatifs où sont réalisés les travaux ;
  • les logements où sont réalisés les travaux, s'ils sont situés en rez-de-chaussée, ou desservis par un ascenseur, ou susceptibles de l'être.
Dérogations à l'application à la rénovation lourde
– Dérogations communes. – D'une manière générale, ne sont soumises à aucune obligation :
  • la maison individuelle existante ;
  • la création d'un seul logement, par changement de destination, dans un bâtiment existant, même s'il se classe en bâtiment collectif d'habitation ;
  • la création de plusieurs logements par changement de destination dans un bâtiment existant, qui sera in fine classé en maison individuelle.
– Dérogations particulières. – Dès l'origine plusieurs motifs de dérogation ont été admis en cas de création de logements par rénovation et/ou changement de destination. Témoins d'un certain réalisme, elles sont liées :
  • à l'impossibilité technique, due :
  • à la disproportion avérée entre les bénéfices et les inconvénients, dans les projets de travaux de modification ou d'extension ;
  • à la préservation du patrimoine architectural, dès lors que les travaux prévus touchent :

La loi Elan de 2018 : le retour à un certain pragmatisme

Chacun convient que la loi Handicap de 2005 brille par son ambition. Mais dès l'origine, nombreux furent ceux qui rappelèrent, à son propos, le dicton bien connu : « qui trop embrasse, mal étreint ». Devant l'impossibilité de respecter l'échéance du 1er janvier 2015, la loi Elan de 2018 apporte une modération que d'aucuns considèrent comme un recul coupable, tandis que d'autres y voient un retour bienvenu au réalisme.

De la loi Handicap à la loi Elan, histoire contemporaine de l'accessibilité

  • Si la première Conférence nationale sur le handicap, organisée le 10 juin 2008, fut l'occasion pour le chef de l'État de l'époque (Nicolas Sarkozy) de réaffirmer la volonté de tenir les objectifs de la loi votée trois ans plus tôt, et d'annoncer un ensemble de mesures tenant compte des conclusions du comité de suivi de la loi du 11 février 2005, les commentaires du monde associatif pointèrent rapidement l'insuffisance des progressions, et le firent savoir, entre autres à l'occasion de la deuxième Conférence tenue le 8 juin 2011.
  • Face aux nombreuses difficultés de mise en œuvre, et pour répondre au besoin de données statistiques, un Observatoire interministériel de l'accessibilité et de la conception universelle (Obiacu) est créé par décret no 2010-124 du 9 février 2010, et placé auprès du Premier ministre. Il est chargé d'évaluer l'accessibilité et la convenance d'usage des bâtiments d'habitation, des ERP, des lieux de travail, de la voirie, des espaces publics, des moyens de transport et des nouvelles technologies. Il doit étudier les conditions d'accès aux services publics et au logement, et recenser les progrès réalisés en la matière. Il doit également identifier et signaler les obstacles à la mise en œuvre des dispositions de la loi du 11 février 2005. À ces fins, l'Obiacu doit élaborer chaque année un rapport dressant le bilan de l'évolution de l'accessibilité en France, analysant l'état d'avancement de la mise en œuvre de la loi, et formulant les préconisations qui lui paraissent nécessaires.
  • Par ailleurs, des journées territoriales de l'accessibilité sont organisées dans tous les départements afin de dresser un état de l'accessibilité du territoire. Le bilan de ces journées met en évidence des disparités territoriales dans la réalisation des plans de mise en accessibilité de la voirie et des aménagements des espaces publics (Pave). Un des constats partagés est la méconnaissance alarmante dont la loi de 2005 fait encore l'objet, notamment auprès des petites collectivités locales, et ce à mi-parcours de la trajectoire fixée pour atteindre la date butoir.
  • Saisi fin 2009 par quatre associations de personnes handicapées, le Conseil d'État annule dans sa décision du 1er juin 2011 les possibilités de dérogation qu'avait instaurées l'article 1er du décret no 2009-127 du 21 octobre 2009 relatif à l'accessibilité dans un bâtiment neuf ou dans la partie neuve d'un bâtiment existant « en cas d'impossibilité technique résultant de l'environnement du bâtiment ». La Haute Cour note en particulier que « le législateur n'a pas entendu permettre au pouvoir réglementaire d'ouvrir des possibilités de dérogations aux règles relatives à l'accessibilité en ce qui concerne un bâtiment neuf ou la partie neuve d'un bâtiment ».
  • La pression monte en septembre 2012, lorsqu'une mission conjointe menée par le Conseil général de l'environnement et du développement durable, l'Inspection générale des affaires sociales et le Contrôle général économique et financier, conclut que l'échéance du 1er janvier 2015 pour la mise en conformité des établissements recevant du public aux normes d'accessibilité ne sera pas tenue.
  • Le temps de commander encore, non sans une légère once de panique face à l'inflexibilité des rouages du temps, deux rapports sur la situation à l'occasion du Comité interministériel du handicap (CIH) du 25 septembre 2013, et le législateur, confronté à la cruauté de l'aveu, se souvient du message jurisprudentiel de 2011. Voulant se donner les moyens d'agir dans les meilleurs délais, la loi du 10 juillet 2014 habilite le gouvernement à rapidement adopter des mesures législatives pour la mise en accessibilité.
  • Prise en application de cette loi d'habilitation, l'ordonnance du 26 septembre 2014 ne peut que prendre acte de l'impossibilité de respecter l'échéance du 1er janvier 2015. Elle simplifie et explicite les normes d'accessibilité, et prévoit la mise en place d'un dispositif d'échéanciers pour les ERP : les Agendas d'accessibilité programmée (Ad'AP). Documents de programmation financière des travaux d'accessibilité, ils constituent un engagement des acteurs publics et privés qui ne sont pas en conformité avec la loi, à réaliser les travaux requis dans un calendrier précis. Cependant, le dispositif législatif issu de la loi du 11 février 2005 demeure, en sorte que le non-respect de l'échéance du 1er janvier 2015, sauf dérogation validée, reste passible de sanctions pénales, les Ad'Ap étant en principe un dispositif d'exception.
  • Seule peut remédier à cette anomalie une intervention législative ; elle attendra trois ans, prenant finalement corps dans la loi no 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (dite « loi Elan »).

Principes nouveaux mais maintien d'une trajectoire

Requiem pour un objectif. – L'article 64 de la loi no 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (dite « loi Elan »), abandonne le fameux objectif de 100 % de logements collectifs neufs conformes aux normes d'accessibilité. Elle limite désormais l'obligation d'accessibilité à 20 % de ces mêmes logements (ceux situés en rez-de-chaussée ou desservis par un ascenseur) et impose qu'en toute hypothèse au moins un logement réponde à la norme, a minima. Le reste de ces logements doit seulement être évolutif.
– Naissance du logement évolutif. – Cette notion de logement évolutif est au cœur du nouveau dispositif. La définition d'un logement évolutif figure à l'article L. 111-7-1 du Code de la construction et de l'habitation : « La conception des logements évolutifs doit permettre la redistribution des volumes pour garantir l'accessibilité ultérieure de l'unité de vie, à l'issue de travaux simples ». Le décret du 11 avril 2019 précise le concept en modifiant l'article R. 111-19-2 du même code. Un logement est qualifié d'évolutif lorsqu'il répond à deux paramètres cumulatifs :
  • une personne en fauteuil roulant peut y accéder, circuler dans le séjour et utiliser le cabinet d'aisances ;
  • il peut atteindre les normes d'accessibilité réglementaires par la réalisation de travaux simples, c'est-à-dire sans incidence sur les éléments de structure et certains réseaux encastrés en cloisons.

La notion de travaux « simples » permettant à un logement de satisfaire aux normes d'accessibilité

Ces travaux simples doivent :
  • être sans incidence sur les éléments de structure ;
  • ne pas nécessiter une intervention sur les alimentations en fluide et sur les réseaux aérauliques situés à l'intérieur des gaines techniques appartenant aux parties communes du bâtiment ;
  • ne pas intégrer de modifications sur les canalisations d'alimentation en eau, d'évacuation d'eau et d'alimentation de gaz nécessitant une intervention sur les éléments de structure ;
  • ne pas porter sur les entrées d'air ;
  • ne pas conduire au déplacement du tableau électrique du logement.
– Une inflexion critiquée… – Cette inflexion du principe d'universalité initial, troqué contre ce qui est parfois vécu comme une politique de quotas, a été et demeure critiquée de manière virulente par de nombreux acteurs du domaine du handicap. On lui a reproché, notamment, d'user de notions trop générales, floues, ambiguës ou invérifiables. Et, de fait, où commencent et où s'arrêtent les « travaux simples » ? Un autre point de crispation concerne la charge de ces travaux, faisant passer le logement d'« évolutif » à « accessible ». Cela pose plusieurs problèmes. D'abord, un grand risque de discrimination à la location. En effet, un propriétaire privé acceptera-t-il de louer son logement à une personne en situation de handicap ou à une personne âgée si cela implique que son appartement soit transformé ? Et si un citoyen en situation de handicap sollicite la MDPH ou l'Anah, il lui faut en moyenne attendre six à dix-huit mois pour obtenir une réponse. Il sera donc privé d'un logement correspondant à ses besoins, au moins pour quelques mois supplémentaires.
– … mais constitutionnellement validée. – C'est notamment sur ce fondement, suspect d'inconstitutionnalité, que la loi Elan fut déférée au Conseil constitutionnel. Les requérants considéraient en effet que du fait de la nouvelle réglementation, les normes d'accessibilité ne concerneraient plus, en pratique, que 8 % au mieux des logements neufs ; régression non compensée selon eux par la création d'une nouvelle typologie de logements dits « évolutifs ». D'une part, le nouveau dispositif risquait donc de conduire à des discriminations par les bailleurs dans le choix des locataires, au détriment des personnes pour lesquelles des travaux seraient rendus nécessaires. Et, d'autre part, la loi serait entachée d'un manque de lisibilité et de prévisibilité, en raison de l'absence de toute définition de ces « travaux simples » : l'interprétation d'une notion trop floue pouvant varier et conduire à une accessibilité des bâtiments à géométrie variable, contraire au principe d'égalité. Par décision du 15 novembre 2018 le Conseil constitutionnel écarta ces griefs, précisant notamment que « le législateur, qui a entendu maintenir l'accessibilité des personnes handicapées aux logements situés dans les bâtiments neufs tout en assurant l'adaptation de ces logements pour prendre en compte la diversité et l'évolution des besoins des individus et des familles, a retenu des critères qui ne sont pas manifestement inappropriés au but poursuivi ». Pourtant, les réprobations continuent, pour des motifs constants.

La loi Elan du 23 novembre 2018 : Noël avant l'heure pour le du bâtiment ?

Beaview, un magazine en ligne consacré aux thèmes du handicap et se réclamant d'une « ligne éditoriale non-validiste », publiait en janvier 2020 un article fort hostile considérant que les pouvoirs publics avaient, avec la loi Elan, cédé aux « exigences des lobbies du bâtiment ».
Morceaux choisis :
« (...) L'autre grande nouveauté de cette loi Elan concerne les 80 % de logements (au rez-de-chaussée ou desservis par un ascenseur) restants. Désormais, ces logements devront être “évolutifs”, c'est-à-dire un logement dans lequel une personne en situation de handicap peut circuler dans le séjour et les toilettes.
Par ailleurs, la loi Elan prévoit “la mise en accessibilité des pièces composant l'unité de vie du logement est réalisable ultérieurement par des travaux simples”. Le logement “évolutif” pourrait donc devenir “accessible” par des “travaux simples”. Les textes réglementaires (décrets et arrêtés), rendus au cours de l'année 2019, ont précisé ce qu'étaient des travaux simples, en érigeant quelques critères, comme ne pas toucher aux éléments de structure, aux alimentations en fluide ou aux canalisations.
Ce sont des critères évidents mais ils ne garantissent pas que les travaux seront simples. Si, pour agrandir une salle de bain, il faut abattre une cloison, détruire le placard qui se trouvait derrière, remettre à niveau… Les critères seront respectés mais cela ne se réglera pas en 48 heures et coûtera cher”, assure Christian François, ancien membre du Conseil national consultatif des personnes handicapées, contacté par Beaview. Pour lui, il aurait même été préférable de revenir à la loi de 1975, qui prévoyait que tous les logements soient “adaptables”, avec des travaux simples, décrits de manière beaucoup plus précise par un arrêté de 1980.
Cette notion de “travaux simples” pose problème. Comme expliqué plus haut, un logement “accessible” n'est pas un logement adapté mais adaptable… Et ce par la tenue de travaux simples. Or, la loi Elan nous dit qu'un logement évolutif peut devenir accessible, également par des travaux simples. Si tel était vraiment le cas, alors pourquoi ne pas être resté sur le principe de l'accessibilité ?
(...)
“Pour résumer, la loi Elan entraînera des difficultés de logement pour les personnes handicapées et les personnes âgées, alors que la pénurie de logements accessibles est déjà criante, et d'importants risques de discriminations sont à prévoir. De plus, la loi Elan va engendrer de fortes dépenses du contribuable. D'abord via le financement de travaux pour les logements évolutifs mais aussi en finançant ou en subventionnant des structures d'hébergement, comme celles citées plus haut, ou encore les habitats inclusifs, nouveau concept d'hébergements collectifs à destination des personnes âgées ou handicapées, que le gouvernement et certaines associations souhaitent développer.” (certaines associations prônant une position “anti-validiste” comme le CLHEE semblent en effet opposées au placement de personnes handicapées dans des établissements ou des habitats partagés) ».

Situation antérieure et nouveaux apports

La loi Elan mérite-t-elle tant de blâmes ? Le texte de 2018 remédie à certaines difficultés constatées par le passé (A) ; il apporte dès à présent des compléments bienvenus (B), et, à certains égards, il pourrait préparer un avenir moins sombre que celui qui, parfois, a été annoncé (C).

Le passé : points faibles du dispositif antérieur

Deux principaux points faibles ont été identifiés par le passé.
– L'accessibilité universelle, un mythe. – Le nouveau « prisme » issu de la loi Elan mérite-t-il, à ce point, le blâme ? Pour répondre à cette question, il nous paraît nécessaire de rappeler, comme l'ont admis les détracteurs de la réforme eux-mêmes, que « le 100 % accessible n'a, en fait, jamais existé ». L'obligation d'accessibilité ne concernait que les logements situés en rez-de-chaussée ou desservis par un ascenseur. D'après les associations œuvrant dans le secteur du handicap, cela ne recouvrait en pratique que 40 % de l'ensemble des logements construits depuis 2005. D'où l'hostilité redoublée à l'encontre d'un quota passant de 100 à 20 % des logements concernés, ceux-ci n'étant donc eux-mêmes constitutifs que d'une minorité de 40 % de l'ensemble des logements neufs. Partant de ce constat, sur quels paramètres la loi Elan a-t-elle voulu agir ?
– La copropriété, un obstacle. – En effet, en vue d'effectuer des travaux ou des aménagements sur les parties communes, il est impératif d'avoir l'autorisation de l'assemblée des copropriétaires. Celle-ci est accordée à la majorité des voix exprimées des copropriétaires présents ou représentés, à l'occasion d'une assemblée générale (L. no 65-557, 10 juill. 1965, art. 24). Si l'assemblée refuse à un copropriétaire d'effectuer des travaux d'amélioration touchant aux parties communes, seul le juge (tribunal judiciaire), saisi dans les deux mois de la notification du procès-verbal de l'assemblée, pourra trancher (L. 10 juill. 1965, art. 30). Malgré la facilitation des travaux d'accessibilité instaurée par la loi no 2003-590 du 2 juillet 2003, soumettant ces travaux à la majorité de l'article 24, la difficulté restait prégnante. Les demandes formulées en ce sens se heurtaient trop fréquemment à un refus de l'assemblée générale, pour des motifs aux fondements variables.

Le présent : apports de la loi nouvelle

La généralisation des ascenseurs
Premier levier de la réforme, généraliser la desserte des appartements en étage par un ascenseur. En vertu du décret du 11 avril 2019, la présence d'un ascenseur devient obligatoire dans les bâtiments d'habitation collectifs neufs dès qu'il y a plus de deux étages comportant des logements au-dessus ou au-dessous du rez-de-chaussée. Mathématiquement, si le nombre de logements desservis par un ascenseur augmente, le nombre d'appartements concernés par la norme d'accessibilité suivra la même progression. On peut y voir une forme de compensation de l'abaissement à 20 % du seuil de l'obligation d'accessibilité.
La simplification des règles applicables en copropriété
– Une inversion du principe traditionnel. – Second levier de la réforme, la loi, non sans une certaine audace, inverse le principe ordinairement applicable en copropriété. Depuis le 31 décembre 2020, tout copropriétaire peut envisager de faire réaliser, à ses frais exclusifs, des travaux d'accessibilité des logements aux personnes handicapées, qui affectent les parties communes ou l'aspect extérieur de l'immeuble (rampe d'accès, monte-escalier, ascenseur, garde-corps…), sans avoir à y être autorisé préalablement par l'assemblée générale des copropriétaires. Il lui suffit, à cet effet, de notifier au syndic une demande d'inscription de cette information à l'ordre du jour de la prochaine assemblée générale, accompagnée d'un descriptif détaillé des travaux envisagés. Ainsi informée, l'assemblée générale ne peut s'opposer à la réalisation des travaux que par une décision motivée, prise à la majorité des voix de l'ensemble des copropriétaires, en alléguant une atteinte à la structure de l'immeuble, à ses éléments d'équipements essentiels, ou à sa destination .

Travaux d'accessibilité sur parties communes : une information précisément définie

Le contenu du descriptif des travaux d'accessibilité affectant les parties communes d'un immeuble en copropriété est précisément défini : il doit comprendre tous les éléments nécessaires à la compréhension des travaux, par exemple des plans, graphiques ou photographies. Devront y être détaillés la nature, l'implantation, la durée et les conditions d'exécution des travaux envisagés, ainsi que les éléments essentiels de l'équipement ou de l'ouvrage, tels que les marques, modèles, notices, garanties et documents relatifs à l'utilisation et à l'entretien. Le document est assorti d'un plan technique d'intervention, et, le cas échéant, d'un schéma de raccordement électrique. À défaut de fournir ces données au syndic, le point d'information notifié par le copropriétaire n'est pas inscrit à l'ordre du jour, et le droit d'opposition de l'assemblée générale s'en trouvera non purgé.
– Un rempart contre l'immobilisme. – Pour pallier l'immobilisme parfois rencontré chez certains syndics, une disposition particulière vient compléter les précédentes. Si la requête présentée par le copropriétaire qui projette des travaux d'accessibilité n'a pas été inscrite par le syndic à l'ordre du jour, aucune opposition aux travaux n'est plus recevable, et le demandeur peut y procéder.

Point d'attention : rappel du droit commun de la copropriété

Même lorsque l'assemblée générale décide de ne pas s'y opposer, il est prudent pour le copropriétaire demandeur ne pas commencer les travaux d'accessibilité souhaités avant l'expiration du délai ordinaire de contestation, ouvert pendant les deux mois suivant la notification de son procès-verbal aux copropriétaires absents ou opposants.
Un volet financier complémentaire
– Rappels. – Côté financement, rappelons ici que la prestation de compensation du handicap (PCH) ne peut pas être attribuée pour d'autres travaux que ceux portant sur la résidence principale de l'allocataire : elle ne pourra donc pas être sollicitée pour contribuer au budget de travaux affectant les parties communes d'une copropriété, même si elles sont liées au handicap d'un des occupants. En revanche, le crédit d'impôt organisé à l'article 200 quater A du Code général des impôts que nous avons examiné précédemment (V. supra, nos et s.) est ici éligible, toutes conditions remplies par ailleurs.
– Nouveautés. – Sur ce plan des aides financières, la loi Elan aménage certaines ressources nouvelles, même si ce n'est certes pas comparable aux importants volets financiers ayant essaimé dans le sillage de la loi Handicap, et du droit à compensation qu'elle avait institutionnalisé. À titre d'exemple, citons la création d'un forfait pour le financement du projet de vie sociale et partagée, mis en œuvre dans le cadre de projets d'habitat inclusif. Remplaçant l'aide spécifique forfaitaire qui finançait des projets expérimentaux d'habitat inclusif en 2017 et 2018, ce nouveau dispositif, dit « Forfait habitat inclusif » (FHI), a vu sa cible élargie aux personnes âgées en perte d'autonomie et aux personnes en situation de handicap.

L'avenir : un élan vers l'habitat de demain

Un élan vers l'habitat inclusif
L'article 129 de la loi Elan donne une impulsion à l'habitat inclusif, non seulement en lui procurant une existence légale, mais aussi en promouvant son développement grâce à la création du « Forfait habitat inclusif », financé par la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA). Cette notion a été abordée plus haut.
Le logement évolutif : une notion ancienne à l'intérêt renouvelé
– Un concept théorique aux applications ténues. – Organiser juridiquement n'est pas créer. Le concept de logement évolutif (ou modulaire) n'est pas une invention du législateur de 2018, loin s'en faut. Il était connu, quoique faiblement expérimenté, depuis le début du XX e siècle, fruit des avancées technologiques des procédés de construction, de l'apparition d'une construction de masse et de la standardisation des logements. Le concept est sous-tendu par l'idée que le logement peut et doit évoluer pour s'adapter aux besoins de ses occupants.

Le logement évolutif, un élan vers l'Habitat

Les travaux éclairants du Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Cerema) sur le logement évolutif méritent d'être cités ici.
L'idée générale qui sous-tend la notion de logement évolutif est que le logement peut et doit évoluer pour s'adapter aux besoins de ses occupants. Cette évolution peut se manifester de deux manières :
  • modifications de l'aménagement interne du logement. La modularité désigne alors l'aménagement temporaire, et la flexibilité parle des changements plus durables ;
  • évolutions liées à la surface du logement, répondant à la sous-notion d'élasticité, par l'addition ou la soustraction d'espaces de réserve, d'annexes ou encore de pièces d'un appartement à un autre.
Le tout vise, au-delà des aspects techniques, les moyens de placer l'occupant au centre de la question du logement, ou encore de faire en sorte que l'habitant soit acteur de son logement, par une participation dès la phase de conception et en lui offrant la possibilité de l'adapter et de le personnaliser en fonction de ses besoins pendant toute la phase d'occupation, qui pourra durer des décennies, et parfois toute une vie.
– Un intérêt renouvelé. – Nous rejoignons le thème principal de notre réflexion : la pérennité du logement. L'exploration de cette thématique de l'évolutivité du logement ouvre de nouvelles et vastes perspectives face aux transformations observables et prévisibles des modes de vie. Sur ce point, la réflexion dépasse le seul domaine juridique ; elle suppose l'appropriation du concept par les acteurs de la construction : architectes, urbanistes, promoteurs, entreprises du BTP.
Pour une approche plus détaillée des études et perspectives du Cerema sur le logement évolutif :
– Un enjeu sociétal… parmi d'autres. – Même s'il n'est encore qu'à l'état d'intuition, le logement évolutif peut, par essence, répondre à de multiples besoins. Et pas seulement à ceux de l'adaptabilité du logement au handicap ou aux exigences de l'âge de son occupant. Il pourrait également être utile en d'autres circonstances produisant des conséquences majeures dans nos façons de nous loger : recomposition familiale, décohabitation tardive des jeunes générations, simili-exode urbain, télétravail, etc. Nous voici parvenus au stade où les enjeux sociétaux du logement ne sont plus seulement ceux inhérents à sa structure matérielle objective, mais ceux découlant du comportement social nouveau des sujets qui l'occupent.

Les solutions d'effet équivalent

Les articles 3 et 4 du décret no 2015-1770 du 24 décembre 2015 indiquent que des solutions d'effet équivalent aux dispositions techniques réglementaires sont admises dès lors qu'elles satisfont aux mêmes objectifs. Il s'agit là d'une souplesse accordée aux modalités de mise en œuvre des dispositions techniques d'accessibilité telles que précisées par l'arrêté du 24 décembre 2015, afin de laisser une porte ouverte à l'innovation technique, sans soumettre la quête de l'accessibilité optimale au péril mortel de l'immobilisme. Cependant l'objectif et la qualité d'usage recherchés restent identiques. Il ne s'agit donc en aucun cas d'une dérogation.
L'introduction des solutions d'effet équivalent a pour but de permettre au maître d'œuvre de proposer d'autres moyens (techniques ou technologiques) pour répondre à l'objectif d'accessibilité, et ainsi de laisser une féconde souplesse se déployer autour des modalités de mise en œuvre des dispositions techniques d'accessibilité, telles que précisées à l'origine par l'arrêté. Mais à condition que le résultat soit équivalent.
Les objectifs de résultat et de moyens demeurent, afin d'éviter toute dérive, et précisément de garantir le principe d'équivalence.
À cette fin, une ordonnance publiée le 31 octobre 2018 – la première prise sur le fondement de l'article 49 de la loi Essoc –, permet la mise en œuvre de solutions techniques présentant des résultats équivalents aux règles de construction prévues par le Code de la construction de l'habitation (CCH) dans certains domaines. Pour prouver cette équivalence, le maître d'ouvrage doit recourir aux services d'un organisme compétent, indépendant et agissant avec impartialité.
Le décret d'application de cette première ordonnance a été publié le 12 mars 2019.