L'application du texte dans toute sa rigueur (Sous-section I) incite parfois les parties à emprunter la voie, inadaptée, de l'adoption (Sous-section II).
L'exigence d'un nombre minimum d'enfants communs
L'exigence d'un nombre minimum d'enfants communs
Corollaire de la notion de partage conjonctif
– Pour que le partage soit conjonctif, il lui faut plusieurs parties prenantes. – Pour qu'il y ait partage conjonctif, il faut nécessairement qu'il y ait pluralité de donataires recueillant leurs droits dans la libéralité conjonctive. En pratique, les donateurs doivent donc avoir au moins deux enfants issus de leur union commune, puisque ce n'est qu'à leur égard qu'il est possible de parler de partage conjonctif. Ce n'était pas une évidence découlant du libellé de l'article 1076-1 du Code civil, mais une réponse ministérielle a confirmé cette solution quelques mois après l'entrée en vigueur du dispositif. Nul ne peut savoir si tel était, effectivement, le vœu du législateur ; il demeure que la doctrine paraît unanimement partager ce point de vue.
– Étroitesse du chas de l'aiguille. – Autant dire qu'en définitive, compte tenu des conditions à réunir, rares seront les familles admises à recourir au schéma novateur que la réforme de 2006 vantait pourtant comme étant l'une de ses grandes évolutions. En sont de facto exclus les couples ayant refait leur vie tardivement et qui pourtant, de par leur âge, auraient peut-être trouvé intérêt à pareille transmission, que ce soit pour assurer celle de leur logement, ou pour permettre à leurs descendants de financer l'accès au leur. Ce qui explique l'observation, dans la pratique notariale, d'un autre phénomène…
« Rendre des enfants communs »
– La tentation de l'adoption. – Grande est la tentation, dans certaines familles recomposées, de s'orienter vers une adoption (simple, le plus souvent) du ou des enfants du conjoint, parfois de manière croisée et réciproque. Le succès n'est pas toujours au rendez-vous, soit en amont (défaut de consentement d'un adopté, opposition témoignée par l'autre parent naturel, refus d'homologation judiciaire…), soit, plus décevant encore, en aval (tensions familiales et querelles causées par le nouveau statut). Car c'est un euphémisme de dire que la consécration officielle de nouveaux liens de famille n'est pas un changement anodin : les droits et les obligations qu'elle crée, notamment en termes d'obligation alimentaire, vont bien au-delà d'une simple transmission patrimoniale.
– Une récente ouverture. – Cette disproportion risque d'ailleurs d'être aggravée par la réforme récente du droit de l'adoption. La loi du 21 février 2022 ouvre l'accès à l'adoption à tous les couples non mariés. Seule est requise désormais la preuve d'une communauté de vie d'au moins un an, condition bien maigre pour confirmer la maturité d'un tel engagement, d'autant que si elle est remplie elle chasse les conditions d'âge minimum.
Fiscalité des transmissions à titre gratuit entre adoptants et adoptés : élargissement civil, mais pas d'évasion fiscale !
La réforme de février 2022 n'a pas abordé la dimension fiscale des conséquences patrimoniales de l'adoption, à savoir la nature des taux applicables aux mutations à titre gratuit entre adoptants et adoptés. Tous n'en sont pas forcément conscients, mais l'article 786 du Code général des impôts qui régule la question n'a pas été retouché. Il s'ensuit que l'enfant adopté simplement par le concubin ou le partenaire de son parent demeure fiscalisé au taux entre étrangers s'il recueille à titre gratuit des biens de ce dernier. En revanche, celui adopté par le conjoint marié de son parent profitera du taux applicable en ligne directe. Il est curieux de constater qu'aucune discrimination n'a été décelée ici.