La mise en valeur de la surélévation au sein de la copropriété

La mise en valeur de la surélévation au sein de la copropriété

La surélévation fait partie des procédés « gagnant-gagnant » pour une copropriété. Comme déjà évoqué, elle permet de répondre au besoin de création de logements sans consommer de foncier et le gain retiré par la copropriété pourra être affecté à sa rénovation, son embellissement ou son amélioration. Enfin, la création de nouveaux lots permettra une dilution de la répartition des charges.
Pour autant, c’est bien au sein du régime de la copropriété que les possibilités de surélévation se sont heurtées aux plus farouches oppositions. Bien souvent un tel projet était balayé d’un revers de la main en assemblée générale du fait de la peur panique suscitée par le simple prononcé du mot « surélévation ». Souvent irrationnelles puisque provenant d’une mauvaise présentation du projet, les craintes étaient le plus souvent exprimées par les copropriétaires du dernier étage au titre des nuisances apportées (bruit, solidité de l’ouvrage…).
Or la loi du 10 juillet 1965, dans sa rédaction originelle, ne voyait pas d’un bon œil les possibilités de surélévation. En effet, soit la copropriété décidait de procéder elle-même à la surélévation : dans ce cas l’unanimité était de rigueur ; soit la copropriété décidait de céder son droit de surélever : dans cette hypothèse, tout copropriétaire de l’étage supérieur pouvait exercer un droit de veto. La messe était donc bien souvent dite avant de n’avoir commencé.
La surélévation en copropriété était donc née sous de mauvais auspices. Il aura fallu attendre les lois Alur (2014), Elan (2018), puis l’ordonnance du 30 octobre 2019 pour que de telles opérations aient de sérieuses chances d’aboutir.
Depuis la loi Elan, la faculté de surélévation peut faire l’objet de la distinction initiale suivante :
  • soit le droit de surélévation aura été isolé et privatisé dès la création de la copropriété (le plus souvent au profit du promoteur ou du propriétaire du dernier étage et constituera alors dans le premier cas un lot transitoire et dans le second un élément attaché à un lot privatif) ;
  • soit le droit de surélévation constituera un accessoire des parties communes « dans le silence ou la contradiction des titres ».
Nous nous attacherons dans les présents développements à cette seconde hypothèse puisque c’est celle-ci qui nécessite le plus d’attention de la part du praticien.
Partant donc du postulat que la faculté de surélévation est restée la propriété « collective » de la copropriété, c’est le syndicat des copropriétaires qui sera maître de son sort. Soit la surélévation sera opérée par le syndicat lui-même (Sous-section I), soit son droit sera aliéné ; la réalisation étant confiée à un tiers (Sous-section II) .

L’exercice du droit de surélévation par le syndicat des copropriétaires

L’intérêt majeur de l’exercice du droit de surélévation par le syndicat des copropriétaires est que la copropriété restera maître du processus depuis son initiative jusqu’à la cession des lots nouvellement créés et n’aura à subir, ni les interférences, ni les aléas liés à l’intervention d’un tiers réalisateur. Ce n’est toutefois pas pour autant que la copropriété peut s’affranchir de toutes règles à respecter (§ I). Par ailleurs, cette apparente sécurité peut finalement s’avérer source d’incertitude ou d’insécurité pour la copropriété (§ II).

Surélévation par le syndicat et règles de copropriété

Ces règles sont de trois ordres : la mise au vote de la décision et de ses conséquences (A), la purge du droit de priorité de certains copropriétaires (B), la nécessité de modifier les documents de la copropriété (C).

Les règles de vote relatives à l’exercice du droit de surélévation

Dans le cas où le projet de surélévation initié par le syndicat serait en contradiction avec la destination de l’immeuble, son adoption devrait nécessairement se faire par un vote à l’unanimité. Fort heureusement, rare sera l’hypothèse où la copropriété décidera de s’engager dans un tel processus sans avoir pris les précautions nécessaires au préalable (c’est-à-dire un vote préalable autorisant le changement de destination de l’immeuble en vue dudit projet).
Dans le cas, plus courant, où le projet de surélévation respectera la destination de l’immeuble, depuis la loi Alur de 2014, l’article 35 de la loi de 1965 n’impose « plus » qu’un vote à la double majorité prévue à l’article 26 de la même loi, aux lieu et place de l’unanimité.
Par ailleurs, en application de l’ordonnance de 2019, la passerelle avec l’article 26-1 est possible en cas de défaillance du premier vote.
Afin que les copropriétaires puissent émettre un vote éclairé, il sera nécessaire, au-delà même du vote sur le principe de la surélévation, que tous ses aspects soient abordés et notamment l’ampleur des travaux et leurs conditions de réalisation, leur coût, les risques d’indemnisation pouvant survenir en cas de préjudice, la modification des documents de copropriété…tout ceci pouvant nécessiter plusieurs votes en assemblées successives.

Le respect du droit de priorité de certains copropriétaires

En contrepartie de la perte de la règle de l’unanimité, la loi Alur a consenti un droit de priorité à certains des copropriétaires de la résidence. Depuis l’entrée en vigueur de l’ordonnance de 2019, seuls « les copropriétaires de locaux situés, en tout ou partie, sous la surélévation projetée » bénéficient de ce droit.
Ce texte vient ainsi réparer une faiblesse rédactionnelle de la loi Alur qui avait alors institué ledit droit de priorité au profit de « tous les copropriétaires de l’étage supérieur du bâtiment à surélever ». Cette rédaction avait alors suscité beaucoup d’interrogations en doctrine quant à sa mise en œuvre.
Bien que cette correction rédactionnelle soit la bienvenue, elle ne résout toutefois pas la problématique qui peut se présenter dans l’hypothèse qui nous intéresse de la surélévation par étage entier. Dans cette situation, en effet, il sera probable que certains copropriétaires puissent entrer en concurrence. Dès lors, doit-on donner la priorité au premier copropriétaire se manifestant, doit-on procéder par tirage au sort, doit-on donner priorité à celui qui réaliserait l’acquisition sans emprunt et peut-on accepter une surenchère ? La doctrine est partagée sur ce point et aucune jurisprudence n’a été rendue en la matière. Aussi, à titre de règle pratique, l’on ne peut que conseiller, dès le vote adoptant la décision de procéder à la surélévation, de fixer les règles d’attribution en cas de concurrence.
Il appartiendra au syndic de procéder à ladite notification au profit des copropriétaires concernés, préalablement à la conclusion de toute vente d’un ou plusieurs lots, en indiquant le prix et les conditions de la vente. Cette notification vaut alors offre de vente pour une durée de deux mois. Le praticien devra veiller attentivement, préalablement à la conclusion de l’acte authentique de vente, que la purge du droit de priorité a bien été réalisée dans le respect des règles de fond et de forme.

La nécessité de modifier les documents de copropriété

Parce que génératrice de nouveaux lots privatifs, la surélévation nécessitera de modifier le règlement de copropriété et son état descriptif de division.
Il devra tout d’abord être procédé à une modification de la répartition des charges. Pour cela, l’article 11, alinéa 1er de la loi de 1965 prévoit que cette modification est adoptée à la même majorité que celle de la décision la rendant nécessaire.
S’agissant de la répartition des tantièmes, le principe est que celle-ci est intangible sauf recours à l’unanimité, du fait de son caractère contractuel. Face au silence des textes relativement à la surélévation, la doctrine considère unanimement que cette modification doit pouvoir l’être également à la double majorité de l’article 26 ; la solution inverse étant contraire à la volonté de promotion des opérations de surélévation.

La surélévation à l’initiative du syndicat des copropriétaires : source d’incertitude et d’inquiétude

La décision par le syndicat des copropriétaires d’opérer par lui-même l’opération de surélévation doit être prise avec beaucoup de circonspection tant au regard des conséquences sur son financement (A), qu’au titre des responsabilités qu’elle peut lui faire endosser (B).

Le financement de l’opération de surélévation

Dans l’hypothèse où le syndicat des copropriétaires se déciderait à engager par lui-même l’opération de surélévation, il devra bien évidemment en assumer la charge financière jusqu’à l’achèvement des travaux. Pour ce faire, il est probable que la copropriété doive alors recourir à l’emprunt.
Si tel est le cas, cet emprunt entrera-t-il dans le champ d’application de l’article 26-4 de la loi de 1965 issu de la loi no 2012-387 du 22 mars 2012 (dite loi Warsmann) ?
La doctrine est incertaine sur ce sujet. Toutefois pour le professeur émérite Daniel Tomasin, le fait que cet article soit d’ordre public nécessite une appréciation stricte de son champ d’application. La surélévation n’étant pas évoquée par cet article, elle ne devrait pas y être soumis.
Rappelons que cet article en son alinéa premier pose le principe de la nécessité de recourir à un vote à l’unanimité en cas de prêt souscrit au nom du syndicat des copropriétaires pour le financement notamment de travaux concernant les parties communes. Son troisième alinéa tempère cette règle en retournant à la majorité qui aura été requise pour le vote de la décision ayant nécessité l’emprunt dès lors que l’emprunt souscrit au nom du syndicat ne profitera qu’aux seuls copropriétaires décidant d’y participer.

Le syndicat des copropriétaires : maître de l’ouvrage

La réalisation de l’opération de surélévation par le syndicat des copropriétaires lui confère nécessairement la qualité de maître de l’ouvrage jusqu’à la vente des lots créés avec les conséquences s’y rapportant.
Lors de la réalisation des travaux
Devant la complexité pluridisciplinaire d’une surélévation, il sera recommandé au syndicat de recourir à un contrat de promotion immobilière ou de délégation de maîtrise d’ouvrage, plutôt qu’à des contrats d’entreprise avec les différents intervenants.
Cela permettra au syndicat de déléguer la charge de la régularisation des différents contrats, formalités et assurances nécessaires à la bonne réalisation des travaux.
Lors de la vente des lots
Du fait de sa qualité de constructeur-vendeur, le syndicat devra garantir les acquéreurs des nouveaux lots notamment au titre des articles 1792 et suivants du Code civil. Il devra donc être en possession d’une assurance tant décennale que dommages-ouvrage.
Notons que pour Vivien Zalewski-Sicard, le syndicat pourrait recourir à la vente des lots créés avant leur achèvement, au moyen de Vefa relevant donc du secteur protégé. Le syndicat devrait alors répondre aux obligations pesant sur les vendeurs d’immeuble à construire ; ce qui pourra être lourd de conséquences pour lui.
Dans la théorie, la surélévation par le syndicat des copropriétaires est tout à fait réalisable. Toutefois, en pratique, les copropriétaires préféreront certainement s’abstenir de réaliser par eux-mêmes l’opération devant la complexité et les risques encourus.
Dès lors, la seconde option qui s’ouvre à une copropriété pour opérer sa valorisation au travers d’une opération de surélévation en est la cession dudit droit à un tiers opérateur.

La cession du droit de surélévation et sa réalisation par un tiers

En pratique, le plus souvent la réalisation des opérations de surélévation en copropriété est effectuée par un tiers à qui le syndicat a cédé le droit correspondant. L’initiative de la recherche d’un cessionnaire peut parfois émaner de la copropriété elle-même lorsque celle-ci est en recherche d’une source de financement en vue de réaliser des travaux importants dans le bâtiment (rénovation énergétique, réfection des communs…) et que les copropriétaires n’ont pas les ressources suffisantes pour y faire face. Cependant la plupart du temps, c’est la copropriété elle-même qui sera approchée par un opérateur tiers qui aura identifié le potentiel de l’immeuble en vue de réaliser une telle opération (construction en dent creuse ou en décrochement, immeuble d’angle…).
La faculté de cession du droit de surélévation, lorsque celui-ci n’a pas déjà au préalable été privatisé ou réservé, est reconnue par l’article 35, alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1965.
Rappelons que jusqu’à l’entrée en vigueur de la loi Alur (27 mars 2014), la cession du droit de surélévation nécessitait d’une part la double majorité de l’article 26 mais surtout « l’accord des copropriétaires de l’étage supérieur ». Ces derniers bénéficiaient donc de facto d’un droit de veto ; lequel était identifié comme le principal frein à la réalisation d’une telle cession. Ceux-ci étant les plus exposés aux désagréments d’une surélévation, ils étaient en effet peu enclins à accepter une telle cession, malgré leur droit à indemnisation reconnu par l’article 36 de la loi de 1965.
Désormais, à l’instar de la réalisation de la surélévation par le syndicat des copropriétaires, l’assemblée devant statuer sur l’aliénation dudit droit continue à devoir se prononcer à la double majorité de l’article 26 mais avec le recours possible à la passerelle de l’article 26-1.
En outre, les copropriétaires des locaux situés, en tout ou partie, sous la surélévation projetée bénéficieront du même droit de priorité. La suppression du droit de veto des copropriétaires de l’étage supérieur marque un tournant majeur dans l’efficience du recours à la surélévation en copropriété.
Malgré tout, l’aliénation du droit de surélévation n’est pas identique en tous points à l’hypothèse de sa réalisation par le syndicat. Cette cession comporte des éléments spécifiques au titre des règles de vote pour son adoption (§ I), de l’outil juridique support à cette aliénation (§ II) et de la contrepartie à cette aliénation (§ III).

Les règles de vote spécifiques à l’aliénation du droit de surélévation

Deux règles spécifiques sont prévues pour des cas particuliers. L’une prévoyant un allègement de la majorité requise (A), l’autre édictant une nécessaire confirmation de la décision de cession (B).

L’allègement de la majorité requise

Comme indiqué, le principe est que l’assemblée devant statuer sur la cession du droit de surélévation doit se prononcer à la double majorité de l’article 26 et à défaut celle de l’article 26-1.
Cependant le troisième alinéa de l’article 35 de la loi de 1965 allège cette majorité « lorsque le bâtiment est situé dans le périmètre sur lequel est institué un droit de préemption urbain en application de l’article L. 211-1 du Code de l’urbanisme ». Dans ce cas, le vote relatif à l’aliénation ne nécessitera « plus » que « la majorité des voix de tous les copropriétaires ».
On notera que le texte exige donc la majorité équivalente à celle prévue par l’article 25 de loi de 1965 mais sans y faire référence, ni renvoi. Dès lors, on peut légitiment s’interroger sur le fait de savoir si le recours à la passerelle de l’article 25-1 est autorisé depuis l’ordonnance du 30 octobre 2019 ?
La doctrine semble partagée sur ce point. Pour notre part, nous nous rallierons à la doctrine favorable au recours à ladite passerelle sur la base de trois arguments :
En premier lieu, on peut relever que le rapport fait au président de la République sur l’ordonnance du 30 octobre 2019 cite expressément la surélévation comme devant profiter de la passerelle : « Pour favoriser la prise de décision et lutter contre les effets néfastes de l’abstentionnisme au sein des copropriétés, cette procédure de la passerelle est désormais étendue à toutes les décisions relevant de la majorité absolue de l’article 25. Elle sera ainsi applicable (…) à la décision d’aliéner le droit de surélever un bâtiment se situant dans le périmètre d’un droit de préemption urbain (art. 35) ».
En deuxième lieu, la décision de céder le droit de surélévation étant justement une décision importante, les copropriétaires non présents à cette assemblée et n’ayant pas donné pouvoir ou voté par correspondance ne doivent pas pouvoir, du seul fait de leur absence, faire échec à une telle décision. Leur absence pouvant justement être un marqueur de leur désintérêt pour la vie de la copropriété.
En dernier lieu, dans la lignée d’Agnès Lebatteux, on peut relever que l’article 25-1 est désormais rédigé comme suit : « Lorsque l’assemblée générale des copropriétaires n’a pas décidé à la majorité des voix de tous les copropriétaires, en application de l’article 25 ou d’une autre disposition (…) ». Cet ajout rédactionnel par l’ordonnance du 30 octobre 2019 a justement pour objet de permettre de recourir à la passerelle de l’article 25-1 pour les votes d’une décision qui ne figure pas à l’article 25 ou qui n’y renvoi pas expressément ; à l’instar de la cession du droit de surélévation.

La nécessité d’un vote confirmatif en cas de pluralité de bâtiments

Lorsque la copropriété comporte plusieurs bâtiments, un vote de confirmation de la décision d’aliéner le droit de surélévation est requis par une assemblée spéciale des copropriétaires des lots composant le bâtiment à surélever.
Ce vote est effectué par principe à la double majorité de l’article 26, réduite à celle de la majorité des voix des copropriétaires concernés dans le cas prévu au I/.
Il pourra également être fait usage de la passerelle de l’article 26-1 et, par parallélisme, le cas échéant de celle de l’article 25-1.
Une fois la décision de céder le droit de surélévation adoptée, il conviendra alors de matérialiser son effectivité.

La matérialisation juridique de la cession du droit de surélever : le lot transitoire

De création prétorienne, le lot transitoire a depuis fait l’objet d’une reconnaissance législative au travers de la loi Elan de 2018 par l’insertion à l’article 1 de la loi de 1965 de nouveaux alinéas 3 et 4 : « Ce lot peut être un lot transitoire. Il est alors formé d’une partie privative constituée d’un droit de construire précisément défini quant aux constructions qu’il permet de réaliser et d’une quote-part de parties communes », puis « la création et la consistance du lot transitoire sont stipulées dans le règlement de copropriété ».
La création du lot transitoire constitue la traduction juridique de la cession du droit de surélévation. En effet, ce nouveau lot privatif qui sera créé comportera l’identification des éléments de la surélévation à réaliser, auxquels sera rattachée une quote-part de parties communes.
Des débats doctrinaux sont apparus sur le degré de précision du lot privatif rendu nécessaire par le texte de l’alinéa 3. Il semble que ledit lot doit au moins préciser : l’enveloppe et le périmètre dans lequel doit s’inscrire la construction ; le nombre de bâtiment s’il y a lieu et la surface de plancher maximale. Dans notre cas d’espèce, le lot transitoire à créer pour la surélévation ne présentera pas les mêmes contraintes qu’un lot transitoire créé lors de la construction de la résidence. En effet, la description du lot transitoire s’appuiera sur le projet tel qu’il aura été réalisé par son opérateur et qui aura été validé par l’assemblée générale.
Le praticien fera attention, lors de la modification des documents de copropriété, de ne pas s’arrêter à la seule modification de l’état descriptif de division mais s’assurera que le lot transitoire est également inséré au règlement de copropriété, en application de l’alinéa 4 de l’article 1 de la loi de 1965.
Une fois ce lot transitoire créé et inséré dans les documents de copropriété, son titulaire pourra alors réaliser les travaux de surélévation correspondants sans avoir à recourir à une nouvelle autorisation de la copropriété.

La contrepartie à la cession du droit de surélévation

Il est bien évident que la cession du droit de surélévation ne sera pas consentie sans contrepartie.
Le plus souvent, la contrepartie sera constituée du versement d’une somme par le cessionnaire ; ladite somme revenant alors aux copropriétaires et distribuée entre eux proportionnellement à leurs tantièmes, le cas échéant après déduction des sommes exigibles par le syndicat à l’encontre de chaque copropriétaire.
Toutefois, comme évoqué, la cession du droit de surélévation sera le plus souvent réalisée pour permettre de financer des travaux de rénovation et/ou d’amélioration du bâtiment. Dans ce cas, il est tout à fait possible que l’assemblée générale décide d’affecter tout ou partie du prix perçu à la réalisation desdits travaux. Cependant, la copropriété pourrait aussi préférer demander à l’opérateur de convertir son obligation de paiement du prix en la réalisation de travaux (ajout d’un ascenseur, rénovation de la chaudière, des menuiseries, isolation, embellissement des communs…) voire en la livraison de nouveaux locaux communs.
Pour la plupart de la doctrine cette possibilité est tout à fait envisageable. Nous pouvons d’ailleurs relever que la Cour de cassation est allée en ce sens aux termes d’un arrêt du 28 mai 2020.
Un auteur prend cependant le parti inverse. Il considère qu’il est impossible d’opérer tant une dation qu’une novation de l’obligation de paiement de l’acquéreur et que la contrepartie de la cession consiste nécessairement en une somme d’argent. Il appuie son analyse sur la rédaction de l’article 16-1, alinéa 2 de la loi de 1965 issue de l’ordonnance du 30 octobre 2019, à savoir : « La part du prix revenant à chaque copropriétaire lui est remise directement par le syndic, après déduction des sommes exigibles par le syndicat des copropriétaires ». Cet ajout rédactionnel serait pour lui un obstacle à ce que le paiement du prix fasse l’objet d’une dation ou d’une novation.
Que ce soit sous la forme d’une réalisation aux mains du syndicat des copropriétaires ou par un tiers, la surélévation reste une opération complexe qui peut se heurter à certains écueils, parfois insurmontables

Les conventions de réservation du droit de surélever : pour qui sonne le glas !

Jusqu’à l’entrée en vigueur de la loi Elan le 25 novembre 2018, l’article 37 de la loi du 10 juillet 1965 prévoyait la possibilité de réserver le droit de surélever au profit d’un copropriétaire ou d’un tiers. Cette convention devait être insérée au règlement de copropriété et devait préciser, à peine de nullité, l’importance et la consistance des locaux à construire et les modifications que leur exécution entraînerait dans les droits et charges des copropriétaires.
Son bénéficiaire disposait alors d’un délai de dix ans pour réaliser les travaux mais le syndicat pouvait s’opposer à l’exercice de droit par vote à la majorité de l’article 25, le cas échéant moyennant indemnisation.
La loi Elan est venue interdire le recours à ces conventions par l’insertion du nouvel article 37-1 : « Par dérogation à l’article 37, les droits de construire, d’affouiller et de surélever ne peuvent faire l’objet d’une convention par laquelle un propriétaire ou un tiers se les réserverait. Ces droits peuvent toutefois constituer la partie privative d’un lot transitoire ».
Cependant, la loi Elan n’ayant pas prévu que cet article est d’ordre public (et donc les conventions déjà insérées dans un règlement de copropriété ne sont pas réputées non écrites) ni de rétroactivité, les conventions existantes à la date de son entrée en vigueur restent valables, dans la limite des dix ans de leur conclusion.
Le praticien pourra donc, jusqu’au 25 novembre 2028 au plus tard, être confronté à une telle situation.
Pour une étude détaillée de ces conventions, le lecteur peut se reporter aux travaux du 112e Congrès des notaires de France, 2016, no 3232 à 3236.
Depuis la loi Elan, si le droit de surélévation doit être « privatisé » ab initio (le plus souvent au profit du promoteur), cela le sera au travers d’un lot transitoire. Il permettra à son détenteur de pouvoir exercer son droit sans être limité par le délai décennal de l’article 37, sans devoir solliciter une autorisation de la copropriété pour sa mise en œuvre dès lors que la consistance des droits accordés sera suffisamment précise, ni risquer un droit d’opposition du syndicat. Toutefois, puisqu’au lot transitoire doivent être attachés des tantièmes correspondant à la valeur de la future « construction », son titulaire doit contribuer, dès l’origine, aux charges relatives à la conservation, à l’entretien et à l’administration des parties communes (art. 10, al. 2) et le cas échéant à celles relatives aux services collectifs ou aux éléments d’équipements communs (article 10 alinéa 1) s’ils représentent une utilité pour ledit lot transitoire tant qu’il n’a pas été réalisé (gardiennage par exemple) et ce, même si ultérieurement la réalisation de la « construction » s’avère impossible.