Engager une opération de construction réversible correspond à concevoir un bâtiment sur le temps long. L’immeuble réversible doit être compatible avec son environnement et des aménagements urbains qui ne sont peut-être pas encore définis lors de sa conception. Mais avant tout, il doit être évolutif. Cette caractéristique première doit être prise en compte dans sa conception afin de pouvoir basculer d’une destination à l’autre à moindres frais (§ I). Par ailleurs, il doit pouvoir répondre aux normes de construction exigées par la législation (§ II).
La conception et la construction de l’immeuble réversible
La conception et la construction de l’immeuble réversible
Concevoir un bâtiment réversible
« Bien souvent les constructions sont inutilement bavardes au regard de ce que l’on attend d’elles ». Cette phrase, très poétique, d’Anne Démians résume à elle seule comment aborder la conception d’un immeuble réversible.
L’idée maîtresse de cette conception est de créer un bâtiment qui devra être le réceptacle tour à tour, d’activités (hôtels), de bureaux, de logements, de résidences services (séniors ou étudiantes) sans nécessairement connaître l’ordre ni la temporalité de ces changements d’utilisation mais avec la double nécessité que :
- d’une part, un des usages ne doit pas être prédominant sur l’autre et ne doit pas affecter le confort d’utilisation dans l’une ou l’autre des configurations (ensoleillement, acoustique, accès…) ;
- d’autre part, la bascule de l’un à l’autre doit se faire avec le minimum de travaux et à moindres coût.
Les conditions techniques d’une vraie réversibilité
- L’atelier Canal architecture propose, pour la conception et la construction d’immeubles réversibles, sept principes constructifs dits de « compromis gratifiant », à savoir :1) une épaisseur du bâti de 13 mètres ;2) une hauteur d’étage de 2, 70 mètres ;3) placer les circulations verticales à l’extérieur ;4) un procédé constructif de poteaux-dalles ;5) une distribution des réseaux « universelle », sans reprise structurelle ;6) moins de 30 % des composants de l’enveloppe à modifier (façade) ;7) associer en double niveaux les rez-de-chaussée, avec le R+1 et dernier étage avec le toit.
- Ces principes constructifs se retrouvent d’ailleurs dans la solution CONJUGO présentée dès 2015 par Vinci Construction, se voulant comme une « solution pour construire un bâtiment de bureau réversible en logement ».
- De son côté, Bouygues Immobilier a développé « Office Switch Home », « concept de bâtiment de bureaux intégrant dès sa conception une possible transformation en logements (habitat, résidence pour étudiants, résidence hôtelière…) en un temps réduit et à moindre coût ».
- Anne Démians a, en lien avec ICADE, créé le label « IDI » pour « Immeuble à Destination Indéterminée ». Son programme emblématique se situe sur la presqu’île Malraux à Strasbourg connu sous le nom de « Black Swans » avec une surface de 40 000 m² entièrement réversibles. Selon ses principes constructifs, la bascule d’un usage à l’autre coûterait entre 700 et 800 € / m² HT-HC.
On peut mesurer au travers de ces développements que les opérateurs de la construction sont très avancés sur le concept de la construction réversible. Cependant au-delà de sa simple conception, le bâtiment devra répondre aux exigences des normes de construction en vigueur.
Construire un immeuble réversible
Construire réversible nécessite de prendre en considération des normes constructives multiples et variables en fonction des destinations anticipées. La refonte du Code de la construction et de l’habitation, en vigueur depuis le 1er juillet 2021 a été pensée pour lever les principaux obstacles rencontrés, à cet égard, par le passé. Une nouvelle catégorie d’immeuble y a été introduite : l’immeuble de moyenne hauteur (IMH), réceptacle idéal de la construction réversible.