Le retrait-gonflement des argiles (RGA)

Le retrait-gonflement des argiles (RGA)

– Introduction. – Les risques naturels ne condamnent pas un territoire. Ils nécessitent une adaptation, une formation à la question du risque et le développement de mécanismes de prévention. Le phénomène de retrait-gonflement des sols argileux, dit « RGA », consiste en une succession de mouvements du fait de variations de la teneur des sols en eau. Ses conséquences sur l'habitat sont connues et documentées, en France, depuis plus d'une trentaine d'années.
Il suscite cependant une attention récente de la part des pouvoirs publics, compte tenu des enjeux économiques liés à ce risque. Le député Vincent Leroux a rendu un rapport au gouvernement le 9 octobre 2023, à ce propos. Il constate que le risque RGA concerne plus de 10 millions de maisons en France et près de la moitié du territoire métropolitain . Le coût cumulé du risque RGA sur la période 2020-2050 est redouté autour de 43 milliards d'euros, soit un triplement par rapport à la période 1989-2019. Déjà, en 2019, le rapport au Sénat de M. Bonnefoy préconisait un « sursaut collectif de prévention » indispensable en ce domaine. Pour ce qui est de la carte des zones exposées au phénomène en France, nous renvoyons aux propos en introduction du présent chapitre.
Dès 2009, il avait été envisagé d'établir la liste des informations qu'il pourrait être nécessaire de faire figurer dans une carte d'identité du terrain. La loi dite « ELAN » du 23 novembre 2018 a introduit de nouvelles dispositions dans le Code de la construction et de l'habitation. Depuis le 1er octobre 2020, la loi dispose que, pour prévenir les risques de mouvement de terrain différentiel consécutif à la sécheresse et à la réhydratation des sols argileux dans les zones à risques, des études de sol (dites « études géotechniques préalables ») doivent être réalisées en cas de vente d'un terrain non bâti situé dans une zone où les dispositions d'urbanisme permettent la réalisation de maisons individuelles . Ces études suivent ensuite le bien immobilier à l'occasion de ses mutations successives. Ce dispositif en vigueur vient d'être renforcé. Depuis le 1er janvier 2024, il s'organise autour de mesures de prévention et de suivi que nous allons détailler .
– Champ d'application géographique. – Il est créé depuis 2020 une obligation d'étude géotechnique préalable à la promesse, puis à la vente d'un terrain constructible situé dans une zone exposée au mouvement de terrain différentiel consécutif à la sécheresse et à la réhydratation des sols . Les zones considérées comme exposées sont les zones dont l'exposition à ce phénomène est identifiée de moyenne à forte . Ces zones ont été définies par arrêté du 22 juillet 2020 et sont consultables sur Géorisques. L'examen de la carte peut être utilement complété par la consultation du site « ERRIAL ».
– Champ d'application matériel. – La législation concerne l'hypothèse d'un terrain non bâti, constructible, destiné à la construction d'une maison individuelle. Toutes les ventes sont concernées par cette obligation, qu'elles soient judiciaires ou amiables. L'échange n'est pas strictement visé, mais il semble conseillé de lui étendre cette obligation lorsque l'échange porte sur un terrain situé dans une zone exposée à un aléa moyen ou fort. Sont donc exclus les actes non translatifs de propriété, ainsi que les mutations à titre gratuit. L'obligation concerne les ventes de terrains non bâtis et constructibles.
Un terrain non bâti est un terrain sur lequel aucun bâtiment n'est présent au moment de la vente. En cas de difficultés (présence d'une ruine, terrain bâti destiné à la démolition, vente de deux parcelles, l'une bâtie et l'autre non bâtie), il est utile de conseiller, au titre de l'obligation générale d'information, de réaliser une étude géotechnique ou de rappeler à l'acquéreur qu'il sera tenu de transmettre au constructeur une étude géotechnique avant la conclusion d'un contrat de construction de maison individuelle.
Un terrain constructible se définit par rapport aux règles d'urbanisme applicables audit terrain. Le projet de l'acquéreur est indifférent. Ainsi, si l'acquéreur n'a pas de projets de construction, le simple fait que le terrain soit situé dans une zone d'aléa moyen à fort entra îne la nécessité de joindre à la promesse une étude géotechnique. Pour que l'obligation de fournir une étude géotechnique s'impose, il faut toutefois que la vente porte sur un terrain non bâti constructible destiné à la construction d'une maison individuelle.
– L'étude géotechnique préalable. – La loi impose au vendeur de fournir une étude géotechnique préalable, annexée à la promesse de vente ou au cahier des charges de vente lors d'une vente publique . Cette étude suit le terrain lors des mutations successives. Il n'est pas prévu de sanction en l'absence de fourniture de l'étude géotechnique préalable, mais l'on peut en imaginer déjà deux. D'une part, le refus d'instrumenter du notaire, qui ne doit pas prêter son concours à une convention dont il conna ît l'illicéité. D'autre part, la mise en œuvre des dispositions relatives aux vices du consentement, à la garantie des vices cachés et à l'obligation de délivrance du vendeur.
L'étude géotechnique a une durée de validité de trente ans, sauf remaniement du sol depuis sa réalisation. Le contenu de l'étude géotechnique a été précisé par un arrêté du 22 juillet 2020. L'étude doit fournir un modèle géologique préliminaire et les principales caractéristiques géotechniques du site, ainsi que les principes généraux de construction envisagés pour se prémunir du risque de mouvement de terrain différentiel consécutif à la sécheresse et à la réhydratation des sols. L'arrêté précise qu'une étude géotechnique préalable de type G1 (phase étude de site et phase principes généraux de construction), réalisée conformément aux exigences de la norme NF P 94-500 de novembre 2013, est présumée conforme aux exigences légales.
– Les études géotechniques de conception. – Avant la conclusion de tout contrat ayant pour objet des travaux de construction ou la ma îtrise d'œuvre d'un ou de plusieurs immeubles à usage d'habitation ou à usage professionnel et d'habitation ne comportant pas plus de deux logements, le ma ître d'ouvrage transmet l'étude de conception aux personnes réputées constructeurs de l'ouvrage, au sens de l'article 1792-1 du Code civil.
L'étude géotechnique de conception a pour objet de fixer les prescriptions de construction adaptées à la nature du sol et au projet de construction, en tenant compte des recommandations énoncées lors de l'étude géotechnique préalable. Une étude géotechnique de conception de type G2 (phase avant-projet et phase projet) réalisée conformément aux exigences de la norme NF P 94-500 de novembre 2013 est présumée conforme. Cette étude n'est valable que pour le projet en vue duquel elle a été réalisée.
Lorsque cette étude n'est pas annexée au titre de propriété du terrain, il appartient au ma ître d'ouvrage de fournir lui-même une étude géotechnique préalable équivalente ou une étude géotechnique prenant en compte l'implantation et les caractéristiques du bâtiment. Les contrats relatifs à la construction précisent que les constructeurs ont reçu un exemplaire de l'étude géotechnique fournie par le ma ître d'ouvrage et, le cas échéant, que les travaux qu'ils s'engagent à réaliser ou pour lesquels ils s'engagent à assurer la ma îtrise d'œuvre intègrent les mesures rendues nécessaires par le risque de mouvement de terrain différentiel consécutif à la sécheresse et à la réhydratation des sols.
– Attestation du respect des règles de prévention des risques liés aux terrains argileux. – Un nouveau dispositif, mis en place par une ordonnance no 2023-78 du 8 février 2023, est venu compléter celui développé ci-dessus. Il s'applique à compter du 1er janvier 2024. Le champ d'application géographique est identique à ce qui a été dit précédemment : les zones exposées au phénomène de mouvement de terrain différentiel consécutif à la sécheresse et à la réhydratation des sols, avec un risque moyen ou fort. Le champ d'application matériel est toutefois moins étendu . Il ne porte que sur la vente d'un immeuble bâti (maison individuelle ou immeuble à usage professionnel et d'habitation ne comportant pas plus de deux logements), dont le permis de construire a été délivré après le 31 décembre 2023.
Ce dispositif dispose qu'un document attestant du respect des règles de prévention des risques est transmis, par le ma ître d'ouvrage, à l'autorité ayant délivré l'autorisation d'urbanisme après achèvement des travaux . Cette attestation pourra être établie soit par un contrôleur technique, soit par un bureau d'études, lesquels devront être agréés et assurés pour ces missions. Cette nouvelle obligation ne fait pas l'objet de sanction spécifique. L'absence d'établissement de l'attestation peut toutefois conduire à une exclusion de garantie prévue au titre du Code des assurances. Cette exclusion concerne aussi les dommages ayant pour cause prédominante les mouvements de terrain différentiels consécutifs à la sécheresse et à la réhydratation des sols pour les bâtiments construits sans permis.
Ce renforcement des mesures de prévention devrait permettre d'endiguer la sinistralité relative aux mouvements différentiels de terrain consécutifs à la sécheresse et à la réhydratation des sols à l'avenir et pour les constructions futures. En revanche, la question du bâti existant demeure un véritable angle mort de la politique de prévention et d'indemnisation du risque RGA .