L'analyse comparative des risques

L'analyse comparative des risques

L'identification comparative de la nature des risques

– Temps du risque et risque du temps. – Différer le projet au jour du permis de construire définitif comporte plusieurs dangers :
  • mettre en péril l'équilibre économique du constructeur par suite de la paralysie de l'opération ;
  • aboutir à l'abandon du projet freinant la construction des immeubles, notamment ceux à usage d'habitation, et la création des emplois liés à l'ouverture du chantier ;
  • ouvrir la porte aux pratiques dilatoires destinées uniquement à retarder le projet de construction et aux situations de chantage en vue de monnayer un désistement ;
  • contraindre les acquéreurs individuels dans leurs projets résidentiels.
Nous renvoyons ici au chapitre I de la présente partie, qui rappelle les raisons pour lesquelles les délais des procédures contentieuses ont été réduits au fil du temps par le droit de l'urbanisme. Recourir à la GPC n'anéantit pas le risque d'abandon du projet, mais pourrait constituer un facteur de réduction de sa probabilité de survenance
– Risque-danger ou risque-profit. – En l'absence de GPC : le temps long constitue un risque d'abandon du projet. Sa gravité ne fait pas débat. Les conséquences sont lourdes et impactantes à plusieurs titres : impact sur les constructeurs, sur le marché du logement et des emplois. En présence d'une GPC : la situation économique du constructeur bénéficiaire d'une GPC est améliorée grâce à l'indemnisation d'assurance. Lorsque la commercialisation a eu lieu, une partie du risque sera supportée par l'acquéreur. Privé des droits en nature que la justice préventive aurait été en mesure de lui offrir, sa couverture assurantielle pourrait ne pas s'avérer satisfaisante. Ce risque peut être réduit par la souscription d'une assurance sécuritaire et adoubée par le notariat, mais comme toute mécanique assurantielle, il n'est théoriquement pas possible de l'anéantir. Force est de constater que c'est la triste réalité dans tout système juridique protecteur.

L'évaluation comparative de la probabilité de survenance des risques

– Taux d'annulation des permis de construire suite à des recours contentieux. – Selon des données recueillies sur la période antérieure à 2018, 1,2 % à 1,6 % des permis de construire font l'objet de recours contentieux en annulation (déféré préfectoral et recours des tiers). Au final, moins de 1 % des permis de construire délivrés seront annulés.
Malheureusement, nous ne disposons pas de statistiques nationales recensant le nombre de recours contentieux introduits par les tiers. Or, pour une analyse précise, il conviendrait de comparer ces derniers avec ceux du ratio de sinistres des GPC, puisqu'elles excluent de leur couverture les hypothèses de déférés préfectoraux.
Nous choisissons donc en connaissance de cause de retenir le ratio de risque effectif d'annulation d'un permis de construire faisant suite à un recours des tiers, à 1 %, en sachant que le ratio réel est moindre.
– Taux de sinistralité de la GPC proposée par XL Insurance. – Sur un total de cent trois souscriptions à la GPC dénombrées depuis 2015 auprès de la compagnie XL Insurance, un seul sinistre est survenu, ce qui correspond à un ratio de sinistralité de 0,12 % par an.
En matière de modèle statistique, un ratio de probabilité de survenance d'un événement inférieur à 3 % est qualifié de « donnée aberrante ». Une donnée aberrante est une observation qui semble s'écarter sensiblement des autres membres de l'échantillon dans lequel elle se produit, c'est-à-dire qu'elle contraste grandement avec les valeurs « normalement » mesurées. Au cas présent, la donnée aberrante est due à une variabilité inhérente au phénomène observé. En présence d'un ratio inférieur à 3 %, les statisticiens, après avoir écarté l'erreur expérimentale, considèrent souvent que l'hypothèse est si marginale que sa prise en compte n'a pas lieu d'être. Alors que penser d'un ratio de 0,12 % ?
Le recours à la GPC serait ainsi de nature à diminuer le risque d'annulation d'un permis de construire de près de 90 %.
À noter tout de même qu'il convient de mesurer, toutes choses égales par ailleurs, que cette comparaison présente divers biais, compte tenu :
  • de l'absence de statistiques nationales recensant le nombre de recours contentieux introduits par les tiers, que nous avons précédemment soulignée ;
  • du coût de souscription de la GPC, dissuasif pour beaucoup de constructeurs, de sorte que les données étudiées ne portent que sur des projets d'une certaine envergure ;
  • et du fait nous n'avons pas évalué le ratio de projets de construire abandonnés avant que le juge se soit prononcé sur la validité du permis, le porteur de projet étant las d'attendre une issue trop incertaine.
Néanmoins, malgré la présence certaine de biais, nous ne pouvons que constater une différence significative du ratio d'annulation effective de permis de construire selon que l'opération ait ou non été accompagnée d'une GPC.
Cet écart prégnant s'explique, d'une part, par les critères d'éligibilité à l'assurance écartant les opérations pour lesquelles a été identifiée une probabilité d'illégalité du permis de construire de la sphère de la GPC et, d'autre part, la réalisation des mesures préventives consistant à déposer un permis de construire modificatif de précaution imposé par l'assureur pour donner suite aux conclusions des audits.

Résumé.

Si la vente en l'état futur d'achèvement est différée au jour de l'obtention du caractère définitif de l'autorisation de construire, le risque pour l'acquéreur d'être victime de l'annulation du permis de construire est nul. Si elle a lieu une fois le permis définitif, et qu'elle est accompagnée d'une GPC, le ratio de risque serait de moins de 0,12 % compte tenu des données communiquées par la compagnie XL Insurance.

L'identification des points critiques

– Le risque d'erreur sur la date d'obtention du caractère définitif du permis de construire. – Le risque d'annulation du permis de construire disparaît le jour où le permis est définitif. Mais à quel moment le devient-il ? La réponse n'est pas si simple. Les délais de purge des recours sont susceptibles d'être allongés par l'application des délais de distance de l'article R. 421-7 du Code de justice administrative, ou par la demande d'aide juridictionnelle d'un requérant. Il en sera de même en cas de demande de pièces complémentaires par le préfet dans le cadre d'un déféré préfectoral. Le délai ne commencera à courir qu'à compter de la réception des pièces manquantes. D'autres configurations sont source d'insécurité : ainsi l'affichage du permis de construire peut être interrompu suite à une dégradation naturelle ou un acte de vandalisme. Dans pareil cas, trois constats de commissaires de justice peuvent ne pas permettre d'attester d'un affichage continu. Sans oublier l'hypothèse du permis obtenu par fraude, dont le retrait peut survenir à tout moment, sans condition de délai.
– Le risque de paralysie de la mise en œuvre d'un permis de construire définitif. – Temporaire ou non, la mise en œuvre d'un permis de construire définitif peut ne pas être possible compte tenu, d'une part, des modalités d'articulation entre les autorisations d'urbanisme et les projets soumis à autorisation / déclaration au titre de la police de l'eau (IOTA et AU-IOTA) et, d'autre part, des travaux nécessitant l'obtention d'une dérogation à l'interdiction d'atteinte aux espèces protégées. Il s'agit là d'une épée de Damoclès qui plane sur les opérations de construction.
Or, la GPC ne garantit que les conséquences financières de l'illégalité du permis de construire, et non celle consécutive à l'impossibilité juridique de le mettre en œuvre au jour de son caractère définitif.