– Problème de l’hypothèque conventionnelle. – Dans notre hypothèse, le coïndivisaire occupant doit souscrire un prêt pour l’acquisition de sa quote-part. Quelle garantie hypothécaire va-t-il donc pouvoir conférer pour le garantir ? À moins que tous les coïndivisaires ne consentent à l’affectation hypothécaire du bien acquis, l’hypothèque conventionnelle que pourrait conférer l’indivisaire est toujours dépendante du résultat du partage, ce qui, en fait, la rend impraticable.
La constitution de sûretés réelles sur le bien acquis indivisément
La constitution de sûretés réelles sur le bien acquis indivisément
Hypothèque conventionnelle et bien indivis : un couple mal assorti
1. Hypothèque conventionnelle sur l’immeuble entier. Pour pouvoir constituer une hypothèque conventionnelle, il faut être le propriétaire de l’immeuble en question en son entier. Or, un indivisaire ne peut, à lui seul, se prévaloir de cette qualité avant le partage. L’hypothèque conférée sur le bien indivis n’est pas nulle de plein droit ; sa validité dépend de l’issue du partage, ce qui, aux yeux du créancier soucieux d’être bien garanti, la prive de tout intérêt.
2. Hypothèque conventionnelle sur la quote-part indivise. Le Code civil admet aussi l’hypothèque grevant une quote-part indivise, mais le sort d’une telle sûreté dépend, là encore, de l’attribution du bien lors du partage, en raison du principe de l’effet déclaratif inhérent à cette opération.
3. Droits du créancier hypothécaire en présence d’une convention d’indivision. Il faut noter enfin que le créancier hypothécaire, qui a, en principe, le droit de provoquer le partage (en application de l’article 815-17 du Code civil) ne peut le faire que dans la mesure où la convention d’indivision ne fait pas obstacle à cette faculté, ce qui sera le cas si cette convention est à durée indéterminée.
– Solution de l’hypothèque légale spéciale du prêteur de deniers. – En revanche, l’hypothèque légale spéciale du prêteur de deniers est indépendante de l’issue du partage. La doctrine avait démontré, bien avant la réforme qui a vu disparaître le privilège de prêteur de deniers, qu’une telle crainte n’était pas fondée et que le prêteur avait bien pour garantie l’immeuble dans son entier. La « théorie de l’indivisibilité du privilège de prêteur de deniers » était que l’indivision qui naît du chef des acquéreurs ne change pas la nature de l’opération juridique qui procède d’une unique vente portant sur la totalité du bien et non de deux ventes portant sur des quotes-parts indivises. Cette indivisibilité du contrat de vente impliquerait alors nécessairement que le privilège de prêteur de deniers porte sur la totalité du bien indivis alors même que l’un seul des indivisaires aurait recours à un financement bancaire.
En pratique, il fallait stipuler dans l’acte authentique portant certification de l’origine des deniers et constatant leur destination, que le privilège grevait indivisiblement la totalité de l’immeuble, et le service de publicité foncière, qui n’est pas juge de la validité du privilège, n’était pas en droit d’opposer un refus.
Cette analyse a été validée par un arrêt de la Cour de cassation aux termes duquel « même dans l’hypothèse où un prêt est souscrit par l’un seulement des acquéreurs d’un bien immobilier pour financer sa part, l’assiette du privilège de prêteur de deniers est constituée par la totalité de l’immeuble ». Selon la doctrine, cette solution est transposable à l’actuelle hypothèque légale spéciale du prêteur de deniers.
Néanmoins, cette solution (qui revient, finalement, à considérer que l’ensemble des indivisaires a donné son accord à la constitution de l’hypothèque), n’est pas favorable à notre hypothèse de co-acquisition, car le créancier peut faire saisir l’immeuble avant même le partage. Un tel risque ne nous semble acceptable pour l’investisseur que s’il envisage le rachat des créances hypothécaires pour maîtriser la sortie de son coïndivisaire défaillant.