Un droit personnel

Un droit personnel

Le bail civil de droit commun

– Liberté contractuelle. – Défini par les articles 1713 et suivants du Code civil, le régime de droit commun du contrat de louage permet une grande liberté contractuelle. Il peut tout à fait être souscrit pour une longue durée et permet en outre une grande liberté pour définir les obligations de chaque partie. Concernant la durée, il faut néanmoins rappeler qu'une durée supérieure à douze ans nécessite l'accomplissement de la formalité de publicité foncière et donc le paiement de la taxe du même nom.
Cette liberté contractuelle permet en outre de prévoir une obligation de construction à la charge du preneur, une tacite reconduction, ou à l'inverse une clause résolutoire autorisant la résolution de plein droit. Elle constitue par ailleurs un avantage comparatif certain au regard des obligations générées par les baux dits « de superficie », lesquels, ainsi que nous le verrons par la suite, sont soumis à des dispositions d'ordre public plus contraignantes. C'est dans le cadre de ce contrat de louage d'ouvrage que le notaire ingénieur du contrat pourra trouver la plus vaste étendue de possibilités quant à la construction d'une relation contractuelle originale permettant à chaque partie de préserver au mieux ses intérêts.
Concernant cette obligation de construction, laquelle portera donc sur les ouvrages de production d'énergie renouvelable, il importera également de bien attirer l'attention des parties sur le droit de propriété de ces installations : elles devront, à notre sens, rester la propriété du preneur, afin de pouvoir obliger ce dernier à procéder à leur démantèlement en fin de bail, pour ainsi permettre la remise au bailleur de l'immeuble dans un état similaire, sinon identique à celui existant au jour de la conclusion du bail.
– Obligation des parties. – Les principales obligations du bailleur sont définies par l'article 1719 du Code civil. Parmi celles-ci, il faut précisément retenir l'obligation de délivrance qui ne peut faire l'objet d'une restriction contractuelle et permet donc au preneur d'appréhender totalement l'objet du bail. Il en va autrement de la répartition de la charge d'entretien, telle que portée par les articles 1720 et 1724 du même code, laquelle n'est que supplétive de la volonté des parties et oblige donc à une distribution précise des obligations de chacun. La rédaction de cette clause sera d'autant plus importante que, dans le cadre d'une installation de production d'énergie renouvelable, le bail comprendra l'obligation de construire et il conviendra dès lors de régler contractuellement la question de l'entretien de ces ouvrages de production.

Le bail commercial

– Application du statut des baux commerciaux. – Les dispositions des articles L. 145-1 et suivants du Code de commerce sont-elles applicables au bail consenti à un preneur qui exploiterait une installation de production d'énergie renouvelable ? La réponse nous semble devoir être négative en ce qui concerne une application obligatoire. En effet, l'application de ce régime est tout d'abord rendue impérative par l'exploitation d'un fonds. Or, l'espace dans lequel seront exploitées les installations ne peut être assimilé au lieu d'exercice d'un commerce. Dès lors, seule une soumission volontaire et conventionnelle des parties à ce régime pourra être envisagée. Toutefois, une telle soumission entraînera l'application intégrale et sans réserve du régime, de sorte qu'il ne sera pas possible d'en faire un usage « à la carte ». En principe, la volonté des parties de faire application du régime des baux commerciaux doit être expresse. L'expression de cette volonté pourra également être déduite de la renonciation par le bailleur à se prévaloir des clauses d'exclusion du statut.
– Bénéfices de l'application du statut des baux commerciaux. – Les avantages du statut bénéficient pour l'essentiel au preneur : durée minimale de neuf ans, droit au renouvellement et à la propriété commerciale notamment. Si l'on peut voir dans ces éléments un indéniable atout pour le preneur, ils peuvent également dans une certaine mesure profiter au bailleur qui bénéficiera d'une certaine garantie de stabilité, le preneur ne pouvant par exemple résilier le bail qu'à l'expiration de chaque période triennale. Il faut toutefois rappeler que les contraintes d'ordre public liées au statut des baux commerciaux peuvent constituer un obstacle à la construction d'un contrat optimal.

Quel bail choisir pour le rédacteur ?

Le choix entre le bail de droit commun ou le bail commercial doit s'opérer en fonction des objectifs poursuivis : le bail de droit commun, par sa souplesse et son contenu peu contraint par les dispositions d'ordre public, permettra au notaire d'élaborer un contenu obligationnel innovant, alors que le bail commercial dont le contenu est plus normé limitera la créativité du rédacteur, mais constituera une garantie plus solide pour le preneur, notamment dans l'optique de sa recherche de financement. Mais si ce financement ne devait pas être un souci pour l'exploitant, le notaire ingénieur trouvera dans le bail civil une liberté contractuelle particulièrement adaptée.

Les limites des baux conférant de simples droits personnels

– La problématique du financement. – Le principal inconvénient des baux ne conférant que des droits personnels est que, justement, ils ne confèrent pas de droits réels. Or pour le financement des installations, et dans le cas où elles ne pourraient être financées sur fonds propres de l'exploitant, les établissements prêteurs vont exiger des garanties, et notamment des garanties réelles : sans pouvoir bénéficier de tels droits, les exploitants se couperont donc de sources de financement. Mais l'absence de droit réel au titre du bail ne signifie pas absence de droit de propriété sur les installations de production : il conviendra alors, qu'il s'agisse d'un bail civil ou commercial, de veiller particulièrement aux dispositions de l'article 555 du Code civil, en spécifiant que les aménagements resteront la propriété du preneur aux termes du bail. Les modalités de transfert de propriété au profit du bailleur ou du démantèlement des constructions en fin de bail doivent également être prévues. Mais, même en prévoyant la conservation par le preneur de la propriété des constructions, l'assiette de la garantie proposée restera moins étendue, nous semble-t-il, qu'un droit réel valablement constitué.