– Modèle de contrat – modèle de garantie. – Àl'instar du contrat de vente qui est perçu comme le contrat-type, la matrice des contrats spéciaux, le contrat de vente d'immeuble à construire a quant à lui servi de modèle aux autres contrats de construction. Il est d'ailleurs considéré comme étant l'origine même du droit de la promotion immobilière. Cette influence se retrouve au stade des garanties financières mises en place ultérieurement pour les autres contrats de la promotion immobilière, qu'il s'agisse du contrat de promotion immobilière, du contrat de construction de maison individuelle, du contrat de location-accession, de la vente d'immeuble à rénover, et également en matière de lotissement, s'agissant des obligations d'achèvement des travaux de viabilisation préalables à la cession des lots.
L'obligation de garantie
L'obligation de garantie
En sa qualité de vendeur
– Plan. – Pris en sa qualité de vendeur d'un immeuble n'existant pas encore, le promoteur-vendeur est tenu de fournir à l'acquéreur une garantie financière de la réalisation effective des travaux jusqu'à leur achèvement. Cette obligation est d'ordre public dans le secteur protégé. Bien que facultative, elle est le plus souvent étendue par les parties à travers des conventions spéciales dans le secteur libre. Le régime de cette garantie financière d'achèvement, perçue exagérément comme la garantie ultime d'un achèvement effectif et en toute circonstance du programme de travaux prévu, nécessite d'en faire une rapide présentation (A) avant d'aborder le rôle de l'ingénierie notariale dans sa mise en œuvre (B).
Présentation du régime actuel
L'objet de la garantie : l'achèvement ou le remboursement
– Une première alternative pour le vendeur. – L'énoncé du principe même de l'obligation de garantie à la charge du promoteur-vendeur dans les Vefa du secteur protégé renvoie à une première alternative pour celui-ci. C'est ainsi qu'il peut choisir entre la délivrance d'une garantie de l'achèvement et une garantie du remboursement. On sait qu'en matière de Vefa, l'acquéreur procède à des versements avant même que n'intervienne l'achèvement des constructions. Àtravers la garantie financière de remboursement, le vendeur garantit à l'acquéreur le remboursement des versements effectués en cas de résolution du contrat à défaut d'achèvement. Àl'inverse, la garantie financière d'achèvement n'a pas vocation à garantir ces remboursements, mais à financer l'achèvement des constructions en cas de défaillance financière du promoteur-vendeur.
– Possibilité de substitution sous certaines conditions. – Dès lors que cette faculté a bien été prévue au contrat de Vefa, le promoteur-vendeur et le garant disposent chacun de la possibilité, au cours de l'exécution du contrat, de passer de l'une à l'autre des garanties d'achèvement et de remboursement. C'est ainsi que la substitution d'une garantie d'achèvement à une garantie de remboursement peut être valablement notifiée à l'acquéreur, et réciproquement. Cette substitution s'effectue souvent d'une garantie de remboursement vers une garantie d'achèvement en fonction de l'avancement des travaux. En effet, plus les travaux seront avancés, plus l'engagement de remboursement sera important (à hauteur des versements alors opérés) alors même que l'engagement d'achèvement s'appréciera sur le reliquat restant à réaliser des travaux de construction.
Les formes de la garantie
– Pour la garantie de remboursement : un cautionnement. – Le défaut d'achèvement peut justifier la résolution amiable ou judiciaire de la Vefa. Le remboursement des versements intervenus préalablement est garanti, dans l'hypothèse où le promoteur-vendeur a opté pour la remise d'une garantie de remboursement, par le biais d'un cautionnement aux termes duquel le garant s'oblige directement envers l'acquéreur.
– Pour la garantie d'achèvement : d'une double à une simple alternative. – Le promoteur-vendeur disposait, il y a peu encore, d'une double alternative dans la mise en place de la garantie d'achèvement en matière de Vefa du secteur protégé. Il lui était tout d'abord possible de choisir entre la remise d'une garantie extrinsèque et la justification de conditions dont la réunion était constitutive d'une garantie intrinsèque, entraînant une véritable dispense de garantie. Afin de relancer le secteur de la promotion immobilière, il est apparu nécessaire d'améliorer la sécurisation financière des acquéreurs, préalable nécessaire à un retour de la confiance des consommateurs dans le secteur de la promotion immobilière. L'ordonnance du 3 octobre 2013 a ainsi supprimé la possibilité de recourir à la garantie intrinsèque pour les opérations dont la demande de permis de construire a été déposée à compter du 1er janvier 2015. La tâche du notaire se trouve à cet égard simplifiée et le contour de sa responsabilité clarifié, en ce qu'il lui appartient désormais de s'assurer de l'existence et de la validité de la garantie extrinsèque délivrée, sans avoir à analyser l'existence de critères propres à justifier l'absence de garantie. En dehors de cette première alternative qui était offerte au promoteur-vendeur, une autre reste d'actualité, qui consiste à lui permettre de choisir entre la remise d'une garantie consistant en une ouverture de crédit et un cautionnement.
– Première possibilité : l'ouverture de crédit. – Le promoteur-vendeur peut tout d'abord garantir l'acquéreur à travers la justification d'une ouverture de crédit. L'engagement du garant, s'il bénéficie évidemment in fine à l'acquéreur, est néanmoins alors consenti au vendeur en ce que le garant « s'oblige à avancer à ce dernier ou à payer pour son compte les sommes nécessaires à l'achèvement ».
– Seconde possibilité : le cautionnement. – Le promoteur-vendeur peut décider de préférer à l'ouverture de crédit une véritable convention de cautionnement. Dans ce cas, l'engagement pris par le garant l'est directement au profit de l'acquéreur en ce qu'il s'oblige, solidairement avec le vendeur, à payer les sommes nécessaires à l'achèvement de l'immeuble. En pratique, il est constaté que la garantie remise par le promoteur-vendeur à son acquéreur prend le plus souvent la forme d'une garantie d'achèvement (et non de remboursement) délivrée à travers un cautionnement solidaire (et non une ouverture de crédit).
Le choix de la forme de la garantie : une singularité de la Vefa
Les garanties de bonne fin des travaux de construction « partagent toutes l'objectif essentiel de sécuriser la situation de l'accédant à la propriété de logements neufs ». Mais, au-delà d'un objectif commun, c'est à une différence essentielle qu'aboutissent les textes applicables. C'est ainsi qu'en matière de Vefa, le promoteur-vendeur a le choix entre ouverture de crédit (destinée à financer l'achèvement) et cautionnement (destiné, au choix, à rembourser ou à financer l'achèvement). Au contraire, la garantie de livraison prévue pour le contrat de construction de maison individuelle ne peut consister qu'en un cautionnement solidaire (garantissant la livraison), à l'instar de la vente d'immeuble à rénover ne prévoyant qu'une garantie financière d'achèvement. Le contrat de Vefa se singularise donc en ce qu'il offre au promoteur-vendeur un système de garantie « à choix multiple » là où les autres principaux contrats de construction ne comprennent qu'un modèle exclusif de garantie.
La qualification de la garantie
– Remise en question de la qualification de cautionnement. – La qualification de la garantie financière d'achèvement, dès lors qu'elle ne prend pas la forme d'une ouverture de crédit, paraît ressortir clairement des termes de l'article R. 261-21, b) du Code de la construction et de l'habitation. Il y est ainsi précisé qu'elle consiste en une convention de cautionnement solidaire. C'est pourtant à une remise en question permanente de cette qualification que nous assistons, à la faveur notamment de celles de « garantie autonome », de « cautionnement de caractère particulier » ou encore de « convention présentant un caractère autonome ne relevant pas du droit commun du cautionnement ».
– La qualification de « garantie autonome ». – Ce « reniement du texte » ou, plus simplement, cette qualification contra legem de la garantie d'achèvement retenue par la Cour de cassation et par une partie de la doctrine, était principalement motivé par des raisons qui, aujourd'hui, n'existent plus. Par ailleurs, la définition de la garantie autonome récemment consacrée par l'ordonnance no 2006-346 du 23 mars 2006 ne semble pas reprendre les critères de celle-ci. Si l'engagement au titre de la garantie d'achèvement l'est effectivement en considération d'une obligation souscrite par un tiers, la garantie financière d'achèvement (GFA) ne contient pas l'obligation de verser des sommes à première demande, pas plus que des modalités de versement (dans sa définition légale, tout au moins). Il a ainsi été relevé que la nécessité de constater la défaillance du débiteur était incompatible avec l'essence des garanties autonomes. La Cour de cassation semble néanmoins maintenir cette qualification, sans convaincre totalement la pratique comme la doctrine. Si les qualifications de cautionnement et de garantie autonome sont écartées, comment qualifier dès lors la garantie financière d'achèvement ?
– Vers une autre qualification de la GFA ? – La consécration d'une « garantie financière du droit de la construction », spécifique à ce secteur d'activité et fédérant les garanties existantes, a été proposée. Celle de porte-fort d'exécution l'a été également, en ce que le garant s'engage, en cas de défaillance du promoteur-vendeur, à financer l'achèvement des constructions tout en désignant un tiers devant disposer des pouvoirs du maître d'ouvrage pour ce faire.
Les bénéficiaires de la garantie
– L'acquéreur : bénéficiaire principal. – L'acquéreur en Vefa est bien entendu le bénéficiaire principal de la garantie financière d'achèvement. L'article L. 261-10-1 du Code de la construction et de l'habitation prévoit d'ailleurs expressément ce bénéfice au stade de la mise en œuvre de la garantie. Dans la mesure où elle serait qualifiée de cautionnement, la garantie d'achèvement devrait être neutralisée en présence d'un acquéreur défaillant, c'est-à-dire n'ayant pas respecté son obligation de paiement des échéances de prix prévues à la Vefa. Le renforcement du caractère accessoire du cautionnement issu de la réforme des sûretés opérée par l'ordonnance no 2021-1192 du 15 septembre 2021 confère à celui-ci une portée quasi absolue. C'est ainsi que le garant peut opposer à l'acquéreur en Vefa, pris en sa qualité de créancier de la garantie d'achèvement, les exceptions issues du non-respect par lui de cette obligation de paiement.
– Le cas particulier des syndicats de copropriétaires. – Par principe, le syndicat des copropriétaires d'un immeuble vendu en l'état futur d'achèvement a vocation à bénéficier de la garantie d'achèvement, et ce au titre de l'achèvement des parties communes. Ce point a été confirmé en jurisprudence. Mais il convient d'opposer à ce principe une limite inhérente au statut de la copropriété des immeubles bâtis. L'efficacité de l'action du syndicat des copropriétaires est évidemment conditionnée à son existence, et par conséquent au fait qu'il existe un immeuble « bâti » et donc achevé. Le syndicat des copropriétaires ne pouvant donc actionner la garantie d'achèvement qu'une fois que l'immeuble se trouve achevé, il apparaît qu'il ne pourra pas justifier d'un intérêt à agir au titre de cette garantie.
La mise en jeu de la garantie
– La notion de « défaillance financière ». – La garantie émise en application de l'article L. 261-10-1 du Code de la construction et de l'habitation, désormais qualifiée de garantie « financière », n'a vocation qu'à prendre en charge la défaillance financière du promoteur-vendeur. C'est ainsi que toute autre défaillance (administrative, technique, etc.), pouvant entraîner un retard ou une absence d'achèvement, n'est pas prise en charge par le garant d'achèvement. C'est une importante limite à la garantie dite « d'achèvement », que peu d'acquéreurs en l'état futur d'achèvement connaissent. Par ailleurs, cette défaillance financière est elle-même comprise strictement. Il ne s'agit pas simplement de la défaillance du promoteur-vendeur dans le paiement des entreprises appelées à réaliser les travaux de construction. Il convient également, depuis la loi Elan du 23 novembre 2018, que le défaut de paiement soit complété d'une absence de disposition des fonds nécessaires à l'achèvement de l'immeuble. Il ne suffit donc pas de prouver que le vendeur ne paye pas les entreprises de construction, il convient de justifier qu'il se trouve dans l'incapacité financière de le faire. Cette consécration par la loi Elan de la proposition faite par le groupe de travail constitué sous l'égide de la Fédération bancaire française (FBF) présente le mérite de définir ce que le garant a vocation à garantir. Elle semble néanmoins présenter une difficulté pratique : sur qui repose la charge de la preuve de la défaillance financière et comment se rapporte-t-elle ? Lorsqu'il est fait appel à l'esprit même de la réglementation applicable aux ventes en l'état futur d'achèvement, une présomption de défaillance financière est proposée. Il est à craindre néanmoins que l'acquéreur soit tenu de rapporter cette preuve, aussi difficile que cela puisse paraître. Au final, le cumul entre charge de la preuve (pesant sur l'acquéreur) et prise en compte de l'unique incapacité financière du promoteur-vendeur amène à s'interroger sur le bien-fondé du curseur proposé par la loi Elan sur cette notion de défaillance financière. L'arrêt des paiements des sommes nécessaires à l'achèvement de l'ouvrage ou l'arrêt du chantier pendant une durée déterminée pourraient utilement être retenus en lieu et place de la définition existante, ce qui nécessiterait toutefois de revenir à nouveau sur les textes applicables en matière de GFA… Par ailleurs, s'il paraît plus aisé pour l'acquéreur de rapporter ces évènements, ces derniers peuvent également résulter de circonstances indépendantes de la défaillance financière du promoteur/vendeur. Ainsi de l'arrêt des paiements qui peut tout aussi bien provenir d'un litige entre le promoteur/vendeur et une entreprise, et de l'arrêt de chantier pouvant être la conséquence d'une grève, de la survenance d'intempéries ou de tout autre cas relevant de la force majeur ou d'une cause légitime de suspension de délai.
– Le rôle plus moins actif du garant. – Le garant d'achèvement n'est pas tenu de poursuivre lui-même l'achèvement en cas de défaillance du promoteur-vendeur, ni d'en reprendre la maîtrise d'ouvrage. Chargé d'assumer financièrement le paiement des entreprises appelées à réaliser les travaux de construction, en cas de défaillance financière du promoteur-vendeur, le garant ne devait jouer qu'un rôle relativement passif, jusqu'à un passé récent. La loi Elan est à nouveau venue combler une importante lacune en matière de GFA. En effet, en cas de défaillance financière, ni le garant ni l'acquéreur ne pouvaient invoquer la qualité de maître d'ouvrage, réservée au seul vendeur en matière de Vefa. Il a donc été prévu que le garant financier peut faire désigner un administrateur ad hoc, lequel disposera des pouvoirs du maître de l'ouvrage, avec pour mission de réaliser les travaux nécessaires à l'achèvement de l'immeuble. Si l'ajout de cette solution doit être salué, il a été fort justement souligné que cette désignation est facultative et nécessite que soit respectée une procédure, à travers une ordonnance sur requête à l'initiative du garant (procédure néanmoins non contradictoire, par opposition à une désignation en référé). Le système retenu en matière de contrat de construction de maison individuelle pourrait inspirer une amélioration de la solution retenue par le législateur en 2018, en ce qu'il est plus protecteur de l'acquéreur en Vefa.
La fin de la garantie
– Le renvoi à la notion d'achèvement. – L'évidence n'est pas toujours de mise en matière juridique. Jusqu'à une intervention récente, l'absence de précision sur ce que la garantie d'achèvement avait vocation à couvrir, ainsi qu'une dualité de la notion même d'achèvement retenue en fonction du mode de constatation retenue par les parties en étaient de belles illustrations. Il aura fallu attendre un décret du 27 septembre 2010, modifié par un décret du 19 mai 2011, pour combler cette lacune et rompre avec cette conception duale, lourde de conséquences pratiques. Désormais, la garantie prend fin à l'achèvement de l'immeuble au sens de l'article R. 261-1 du Code de la construction et de l'habitation. Il y a donc unicité entre l'événement justifiant du respect de l'engagement pris par le promoteur-vendeur de construire et de livrer les constructions prévues au contrat et la garantie remise à l'acquéreur pour le sécuriser sur le respect de cet engagement.
– Une garantie couvrant l'achèvement, rien que l'achèvement. – La solution retenue d'un renvoi strict à la notion d'achèvement définie par l'article R. 261-1 du Code de la construction et de l'habitation est venue clarifier la situation des parties à l'acte (le promoteur-vendeur) autant que celle du garant. Mais elle présente néanmoins une limite fondamentale en ce que la garantie ne couvre donc que l'achèvement, et non le parachèvement, qui est un état distinct, au sens plus abouti, de la construction. La différence est ici frappante avec la solution retenue pour le contrat de construction de maison individuelle, sans que nous puissions expliquer cette différence. Au titre de ce dernier contrat, le garant est ainsi tenu, entre autres, jusqu'à la levée des réserves, et même de la prise en charge des éventuelles pénalités de retard de livraison. Bien que la solution retenue récemment d'un renvoi à la seule notion d'achèvement ait été saluée par la doctrine, et que la limitation à cette seule notion ait été perçue comme favorable, nous nous interrogeons sur une extension de l'objet même de la garantie d'achèvement aux éléments prévus en matière de garantie de livraison dans le contrat de construction de maison individuelle. Au prix d'un probable renchérissement du coût de la garantie, et donc du coût de l'opération pour le promoteur-vendeur et l'acquéreur, la situation de ce dernier n'en serait-elle pas néanmoins plus confortable ? Il s'agirait dès lors que soit garanti le financement de la « conformité contractuelle », le garant devant « financer l'ensemble des travaux prévus contractuellement, y compris donc les travaux de parachèvement, sauf lorsque ceux-ci auront été laissés à la charge de l'acquéreur ».
L'extension de la notion d'achèvement emporte-t-elle l'extension de l'objet de la garantie d'achèvement ?
Le caractère restrictif de la notion d'achèvement définie par l'article R. 261-1 du Code de la construction et de l'habitation conduit parfois les parties à étendre conventionnellement cette notion. Il s'agit d'une pratique courante dans le secteur libre, mais que rien ne nous paraît devoir interdire dans le secteur protégé, puisqu'il en va d'une protection accrue pour l'acquéreur.
Ces extensions peuvent porter sur les modalités d'accès aux biens, l'achèvement de plantations, la réalisation de certains aménagements dont le défaut n'empêcherait pas de constater l'achèvement au sens strict de l'article R. 261-1 du Code de la construction et de l'habitation.
Cependant, l'ajout de critères complémentaires dans le contrat de Vefa ne peut être rendu opposable au garant d'achèvement que dans la mesure où ces mêmes précisions figurent également dans la garantie délivrée. De la même manière que l'objet vendu doit être décrit aussi précisément dans la garantie délivrée que dans le contrat de Vefa (notamment le renvoi aux permis de construire obtenus et au descriptif), il convient de s'assurer que la définition retenue de l'achèvement soit identique dans le contrat de Vefa et le texte de la garantie d'achèvement. Àdéfaut, la garantie portera sur une notion d'achèvement plus restrictive de ce à quoi le promoteur-vendeur s'est engagé aux termes de la Vefa…
– La constatation de l'achèvement. – La constatation de l'achèvement, en ce qu'elle met fin à la garantie d'achèvement ou de remboursement, a elle aussi fait l'objet d'améliorations récentes. Le renvoi au dépôt de la déclaration « administrative » de l'achèvement des constructions prévue par l'article L. 462-1 du Code de l'urbanisme a ainsi été supprimé. Plusieurs questions se posent en pratique :
- Comment est constaté l'achèvement (mettant fin à la garantie) ? Désormais, l'achèvement résulte de la constatation qui en a été faite soit par un organisme de contrôle indépendant, soit par un homme de l'art. Il peut aussi être constaté grâce à l'intervention d'une « personne qualifiée » désignée par ordonnance du président du tribunal judiciaire du lieu de situation de l'immeuble.
- Le promoteur-vendeur peut-il librement choisir entre les deux principales modalités de constatation de l'achèvement ? Non. Il est apparu nécessaire de traiter la situation dans laquelle un lien de dépendance existerait entre le promoteur-vendeur et celui appelé à constater l'achèvement (l'homme de l'art), notamment dans le cadre d'un contrat de maîtrise d'œuvre. C'est pourquoi l'article R. 261-24 du Code de la construction et de l'habitation prévoit expressément que la constatation doit, dans cette hypothèse, être faite par un organisme de contrôle indépendant.
- La constatation de l'achèvement répond-elle à un formalisme strict ? Oui. L'article R. 261-24 du Code de la construction et de l'habitation dispose désormais que l'achèvement est constaté par la remise d'une attestation d'achèvement émanant du professionnel désigné (l'homme de l'art, l'organisme de contrôle indépendant ou la personne qualifiée désignée par le tribunal judiciaire compétent). Un arrêté est venu imposer un modèle d'attestation, dont un exemplaire doit être remis au notaire chargé de la vente.
- Est-il possible de saisir le juge en cas de désaccord des parties sur l'achèvement des constructions, et donc la libération du garant ? Oui. C'est d'ailleurs tout l'intérêt du renvoi qui est fait par l'article R. 261-24 du Code de la construction et de l'habitation au mécanisme mis en place en matière de vente à terme sous l'article R. 261-2 du même code. Alors même que par suite du décret du 27 septembre 2010, et avant celui du 19 mai 2011, cette procédure judiciaire de constatation de l'achèvement était même la seule possible, coexistent aujourd'hui deux possibilités de constatation : l'une, amiable, par désignation d'un homme de l'art ou d'un organisme de contrôle indépendant, l'autre, judiciaire, par la désignation d'une personne qualifiée. Ce dernier moyen de constatation de l'achèvement, emportant libération du garant, sera nécessaire chaque fois qu'une contestation naît au stade de la constatation de l'achèvement. Bien évidemment, cette solution n'est pas à privilégier, elle est même à éviter dans la mesure du possible. Les contraintes et coûts qui en résultent pour les parties (désignation d'un expert judiciaire, respect du contradictoire, saisine d'un avocat) doivent inciter celles-ci à privilégier, autant que possible, une solution amiable.Pour un modèle d'attestation d'achèvement d'un immeuble vendu en Vefa :
Une garantie efficace, mais perfectible
La garantie financière d'achèvement a servi de modèle aux autres garanties prévues par les contrats de construction. Néanmoins, elle n'a pas bénéficié de la stabilité d'ensemble de la loi du 3 janvier 1967 dont elle est issue.
Du fait d'interventions législatives récentes, il est désormais clairement établi que :
- cette garantie s'éteint lorsqu'est constaté l'achèvement au sens du premier alinéa de l'article R. 261-1 du Code de la construction et de l'habitation ;
- cette garantie est limitée à l'hypothèse de défaillance financière du promoteur-vendeur ;
- Sa mise en œuvre est condtionnée par la validité du permis de construire autorisant la réalisation des travaux nécessaires à l'achèvement ;
- le renvoi à la déclaration administrative attestant l'achèvement des constructions n'est plus de nature à justifier l'achèvement libérant le garant de ses obligations.
En revanche, sa nature juridique (cautionnement ?) est contestée, de même que le caractère restreint de son champ d'action, limité au seul achèvement. La désignation de la personne appelée à constater l'achèvement libératoire pour le garant est elle aussi source de difficulté.
L'intervention du notaire pour s'assurer du respect des textes applicables et apporter les explications nécessaires aux acquéreurs est indispensable. Son ingénierie sera également mise à contribution pour préciser ou améliorer conventionnellement les modalités de mise en œuvre de la garantie d'achèvement, voire même pour démontrer qu'une modification de son régime serait opportune.
Qui est l'homme de l'art ?
L'article R. 261-24 du Code de la construction et de l'habitation prévoit la possibilité que l'achèvement, nécessaire pour libérer la garantie financière d'achèvement (ou de remboursement), soit constaté par un « homme de l'art ». Aucune définition de celui-ci n'est donnée. Deux caractéristiques de l'homme de l'art semblent pouvoir être déduites des termes de l'article R. 261-24 :
- sa compétence tout d'abord ;
- son indépendance également. Son manque d'indépendance rendrait en effet nécessaire de retenir l'intervention d'un « organisme de contrôle indépendant ».
Au-delà, rien n'est précisé sur cet homme de l'art. C'est ainsi que, contrairement à ce qui a été retenu en matière de vente d'immeuble à rénover, l'homme de l'art de la Vefa n'est pas défini par référence au premier alinéa de l'article R. 262-7 du Code de la construction et de l'habitation, lequel prévoit qu'il doit être un professionnel relevant de la loi no 77-2 du 3 janvier 1977 sur l'architecture, indépendant, impartial et assuré à ce titre.
L'ingénierie notariale au service de la garantie d'achèvement
Les vérifications devant être opérées par le notaire
– S'assurer de l'indépendance de celui appelé à constater l'achèvement. – L'obligation d'indépendance de la personne ayant vocation à constater l'achèvement des travaux de construction, à l'égard du promoteur-vendeur n'est pas nouvelle. C'est ainsi qu'avant même que ne soit modifié l'article R. 261-24 du Code de la construction et de l'habitation par les décrets des 27 septembre 2010 et 19 mai 2011, la Cour de cassation avait précisé que la déclaration attestant l'achèvement ne pouvait être jugée libératoire pour le garant car elle émanait d'une personne ayant la double qualité de maître de l'ouvrage et de maître d'œuvre, et ne pouvait donc pas être considérée comme émise par un professionnel indépendant ayant la qualité d'homme de l'art. Cette exigence est désormais reprise par l'article R. 261-24. C'est ainsi que le défaut d'indépendance de l'homme de l'art impose de recourir à la constatation de l'achèvement par un organisme de contrôle indépendant. L'indépendance doit, selon nous, s'apprécier tant juridiquement qu'économiquement, et s'entendre de manière extensive pour protéger les intérêts de l'acquéreur, et éviter au promoteur-vendeur comme au garant des contentieux ultérieurs. Même si elle n'est pas obligatoire, l'indication dans l'acte de Vefa de l'identité de la ou des personnes appelées à venir constater l'achèvement nous paraît opportune. Par ailleurs, l'ajout de documents attestant de cette indépendance ou de déclarations spécifiques de l'homme de l'art venant confirmer celle-ci, (accompagné de sanctions pénales en cas de fausses déclarations) pourrait être utilement prévu.
– Vérifier l'absence de clauses de limitation de garantie dans la GFA. – L'effet combiné des crises économiques et des réformes opérées récemment, et notamment l'extension des engagements des garants du fait de la prise en compte de la notion d'achèvement pour les libérer, a conduit certains garants à proposer, ou certains promoteurs à demander que les engagements compris dans les garanties d'achèvement soient limités. L'objectif principal est alors de réduire les risques couverts par ces garanties et, ce faisant, d'en réduire les coûts. Il peut notamment s'agir de plafonner le montant de la garantie en se basant sur le budget initial des travaux de construction. Ces limitations sont entachées de nullité et devraient même être réputées non écrites en ce qu'elles limitent l'engagement des garants et contreviennent à l'objectif poursuivi par la réglementation d'ordre public du secteur protégé, qui est de protéger les acquéreurs. Le notaire devra s'assurer que la garantie d'achèvement ou de remboursement remise n'est pas affectée par de telles clauses restrictives de garantie, afin d'assurer la pleine efficacité de son acte et d'éviter d'engager sa responsabilité professionnelle à ce titre. Il convient de noter qu'en sens inverse, c'est-à-dire lorsque des clauses contiennent une extension ou une amélioration conventionnelle de la garantie (montant garanti, durée, définition de l'achèvement plus large que celle prévue par l'article R. 261-1 du CCH), l'objectif de protection poursuivi par le législateur n'est pas contrarié, au contraire. La validité de ces clauses ne semble donc pas devoir être contestée.
– Vérifier la validité du permis de construire. – La Cour de cassation a récemment eu l'occasion de rappeler le lien entre validité du permis de construire et efficacité d'une garantie financière d'achèvement (Cass. 3e civ., 8 juill. 2021, no 19-25.774, 19-25.775, 19-25.777, 19-25.778 et 19-25.779). Le garant d'achèvement n'étant pas tenu de s'assurer du bon déroulement des travaux, ne peut pas être engagé au titre de travaux ne pouvant plus être réalisés du fait de la péremption du permis de construire les ayant autorisé. Faute d'avoir prévu une garantie de remboursement, l'acquéreur se retrouve dès lors sans protection et sans recours à l'égard du garant. En dehors de ce manque d'efficacité de la garantie financière d'achèvement, la responsabilité du notaire a été confirmée au titre de l'obligation de validité et d'efficacité des actes qu'il reçoit. En ne s'assurant pas du démarrage effectif des travaux avant la signature des actes et du risque de péremption qui en découlerait, sa responsabilité se trouve engagée. Dès lors, le notaire se doit de vérifier la date de péremption du permis de construire et de confronter celle-ci aux réalités du dossier dont il a la charge. L'efficacité de l'acte et de la garantie d'achèvement en dépend, tout autant que sa responsabilité si cette efficacité devait un jour être contestée pour ces mêmes raisons. Des améliorations aux textes applicables ont été proposées, qui permettraient de limiter ces risques (J.-M. Berly & M. Lemue, GFA et permis de construire : une construction non achevée !, RDI 2022, p. 97). Mais en pratique, et au-delà des vérifications qui lui appartient d'effectuer, le notaire pourrait utilement et efficacement renseigner systématiquement dans l'acte de Vefa la date de péremption du permis de construire. Dès lors, le risque éventuellement encouru serait expressément renseigné tant pour les parties à l'acte que pour lui-même, permettant d'assurer une vigilance accrue sur une problématique trop souvent mise de côté.
– Lier modification de l'objet de la Vefa et GFA. – Les engagements du garant sont limités par les textes applicables ainsi que la rédaction retenue de la garantie d'achèvement. Il est loisible aux parties, y compris dans le secteur protégé, d'étendre les engagements du promoteur-vendeur en comparaison avec ce que la loi impose à ce dernier. Néanmoins, il importe que ces ajustements soient utilement reportés dans le texte même de la garantie d'achèvement devant être délivrée, afin que ces extensions soient couvertes par le garant d'achèvement au-delà des engagements du promoteur-vendeur (en cas de défaillance financière de ce dernier). Ce principe est évidemment valable pour une approche plus complète de la notion d'achèvement, mais il ne se limite pas à cette seule hypothèse. Le notaire a donc un rôle essentiel, en ce qu'il doit s'assurer que la rédaction de la garantie d'achèvement reprend bien les extensions prévues par les parties à la Vefa au titre des engagements du promoteur-vendeur. Àdéfaut, s'il n'avertissait pas son client de cette discordance défavorable à l'acquéreur, il en résulterait un manquement au titre de son devoir de conseil, susceptible de porter préjudice à l'acquéreur et d'engager la responsabilité du notaire.
La désignation de l'homme de l'art ou de l'organisme de contrôle indépendant
– Le silence des textes applicables. – Les modifications successives du régime applicable à la garantie financière d'achèvement ou de remboursement n'y ont rien fait : rien n'est dit sur les modalités de désignation de l'homme de l'art ou de l'organisme de contrôle indépendant. Seule l'hypothèse de désignation de la « personne qualifiée » prévue par l'article R. 261-2 du Code de la construction et de l'habitation renvoie expressément à une ordonnance du président du tribunal judiciaire du lieu de situation de l'immeuble. Ànouveau, les dispositions applicables à la vente d'immeuble à rénover sont plus précises. Il y est en effet expressément prévu que l'homme de l'art est désigné « d'un commun accord entre les parties ou, à défaut d'accord, par ordonnance, sur requête, non susceptible de recours, du président du tribunal judiciaire du lieu de situation de l'immeuble parmi celles que le tribunal commet habituellement ».
– La désignation dans le contrat. – L'absence de précision des textes applicables quant à la désignation de celui ( « homme de l'art » ou « organisme de contrôle indépendant ») appelé à constater l'achèvement ne nous paraît pas empêcher les parties d'en convenir. Bien au contraire, et bien que la désignation d'un commun accord du « constatant » par les parties ne soit pas prévue par les textes, il paraît opportun que le notaire invite les parties à s'accorder sur celle-ci dès la conclusion du contrat. La compétence et l'indépendance du constatant pourront dès lors être vérifiées par l'acquéreur, ce qui nous semble de nature à réduire les risques de contestation en justice. Le notaire remplirait, à ce titre, sa fonction de déjudiciarisation en prévoyant dans l'acte les mentions et prévisions de nature à empêcher la survenance d'un contentieux des parties porté devant le juge. Rappelons que les parties disposent de la possibilité de saisir le tribunal judiciaire compétent afin que son président se prononce, sur ordonnance, pour désigner une personne qualifiée pour constater l'achèvement et donc la libération du garant.
Une procédure de constatation de l'achèvement à parfaire
Si la procédure permettant de constater l'achèvement, emportant libération du garant, a été substantiellement améliorée ces dernières années, deux améliorations nous semblent de nature à parfaire le système et, surtout, à sécuriser plus encore l'acquéreur. L'inspiration pourrait être recherchée dans la réglementation applicable à la vente d'immeuble à rénover :
- Les modalités de désignation de l' « homme de l'art » ou de l' « organisme de contrôle indépendant » : sans revenir sur le rôle central joué par le promoteur-vendeur, lequel doit être force de proposition au stade de la désignation des « constatants » de l'achèvement, la désignation de ceux-ci d'un commun accord entre les parties, dès la signature du contrat, nous semblerait de nature à réduire les contentieux. La solution existante pour les ventes d'immeuble à rénover sous l'alinéa 2 de l'article R. 262-7 du Code de la construction et de l'habitation nous semblerait devoir être étendue.
- La qualité de l'homme de l'art et l'obligation d'assurance : l'absence de désignation précise de ce qu'est l'homme de l'art appelé à constater l'achèvement fait courir un double risque à l'acquéreur. Un risque technique (lié à la compétence du constatant) et un risque de couverture de son intervention (du fait de l'absence d'obligation d'assurance). Ici aussi, la solution retenue pour la vente d'immeuble à rénover pourrait être étendue, avec une adaptation. Il serait ainsi opportun de compléter l'article R. 261-24 du Code de la construction et de l'habitation en précisant que l'homme de l'art serait (i) soit un professionnel relevant de la loi no 77-2 du 3 janvier 1977 sur l'architecture, (ii) soit le maître d'œuvre de l'opération retenu pour attester que les différents stades d'avancement des travaux prévus par l'article R. 261-14 dudit code sont atteints (à la condition, dans ce dernier cas, que ce maître d'œuvre soit juridiquement et économiquement indépendant du promoteur-vendeur). Dans les deux cas, cet homme de l'art devra justifier que les missions qui lui seraient ainsi confiées seront couvertes par une assurance professionnelle bénéficiant à l'acquéreur.
Accompagner l'acquéreur en cas de défaillance du promoteur ET du garant
– La GFA : un parcours d'obstacles pour l'acquéreur. – Nous avons eu l'occasion de rappeler combien la garantie financière d'achèvement est susceptible de présenter d'importantes imperfections pour l'acquéreur. Loin d'être la panacée pour un acquéreur victime de la défaillance de son vendeur au titre de son obligation d'achèvement, elle ne couvre pas intégralement la conformité contractuelle des biens prévue au contrat. La mise en jeu de la GFA nécessite par ailleurs que l'acquéreur rapporte la difficile preuve de la défaillance financière de son vendeur. Enfin, elle n'entraînera, de la part du garant, qu'une action relativement passive ou dépendante de sa bonne volonté.
– Le recours à la faculté de remplacement ? – L'application du droit spécial de la vente d'immeuble à construire n'est pas exclusive de l'application des règles non contradictoires du droit commun des contrats. Peut alors se poser la question de l'application des dispositions de l'article 1222 du Code civil, instituant au profit du créancier d'une obligation non respectée une « faculté de remplacement ». En cas de défaillance du débiteur (le promoteur-vendeur dans notre cas), le créancier (l'acquéreur) pourra faire exécuter lui-même l'obligation non respectée dans un délai et à un coût raisonnables. Il est possible de s'interroger, dès lors, sur le rôle du notaire en présence d'une défaillancecombinée du promoteur-vendeur et du garant financier au stade de l'achèvement. Le recours à la faculté de remplacement semble pouvoir être envisagé. Le notaire pourrait conseiller à l'acquéreur de saisir le juge afin que soit désigné un administrateur ad hoc ou une société de promotion chargée de réaliser ou faire réaliser les travaux nécessaires à l'achèvement des constructions. Si la preuve de la défaillance financière du promoteur-vendeur est rapportée, rien ne semble justifier que la garantie financière d'achèvement ne puisse pas être activée pour financer dans ce cas les travaux à réaliser par cet administrateur ad hoc, quand bien même l'initiative de sa nomination ne relèverait pas au cas particulier du garant financier de l'achèvement.
Le rôle du notaire dans l'amélioration et la mise en œuvre de la garantie d'achèvement
La garantie d'achèvement n'est pas complète et sa mise en œuvre souvent compliquée. Le rôle du notaire dans l'amélioration et la mise en œuvre de la garantie d'achèvement est essentiel.
Le notaire est ainsi appelé à veiller à ce que la garantie délivrée soit efficace et protectrice pour l'acquéreur, ainsi que pour le vendeur et le garant, en ce que ces vérifications sont de nature à éviter les contestations futures. Les vérifications du notaire peuvent ainsi porter sur :
- le contrôle de l'indépendance de celui appelé à constater l'achèvement ;
- la vérification de l'identité et des qualités du garant ;
- la mise en cohérence de la rédaction de la GFA avec celle de la Vefa ;
- la vérification de l'absence de clause limitative de garantie dans la GFA ;
- la vérification de la non caducité du permis de construire.
Au-delà de ces vérifications, des compléments ou modifications peuvent être proposés par le notaire. Ils pourront porter notamment sur la désignation dans l'acte des personnes appelées à constater l'achèvement.
En sa qualité de constructeur
– Le notaire et l'obligation de garantie du promoteur. – En sa qualité de constructeur, le vendeur en l'état futur d'achèvement est tenu de garanties spécifiques à l'égard de son acquéreur. Dans certaines situations, ces garanties peuvent s'étendre au-delà du promoteur initial, pour rejaillir sur les propriétaires successifs. Le devoir de conseil auquel il est tenu et, plus encore, son rôle de pédagogue ou d'enseignant du droit, imposent au notaire de maîtriser les concepts en présence. Son ingénierie renvoie aussi à cette nécessaire maîtrise. Il sera alors en mesure d'expliquer ces garanties avec clarté aux parties, tant celles ayant vocation à garantir (principalement les promoteurs-vendeurs) que celles devant bénéficier de ces garanties et qui doivent donc connaître leurs modalités de mise en œuvre (principalement l'acquéreur en l'état futur d'achèvement). Ces problématiques font l'objet de développements complets dans les différents précis ou traités spécialisés et reconnus. Il ne sera donc pas question d'en reprendre ici l'ensemble des conditions. Un rappel de ces garanties spécifiques sera néanmoins proposé pour chacune d'elles, de manière synthétique, avant que ne soient proposés les points, essentiellement rédactionnels, sur lesquels le notaire peut y déployer son ingénierie.
La notion de réception dans le régime des garanties des constructeurs
Dans le cadre de son obligation de délivrance, la responsabilité du promoteur-vendeur en l'état futur d'achèvement est appréciée à l'aune de l'achèvement et/ou de la livraison des biens. S'agissant en revanche des garanties auxquelles ce même promoteur-vendeur est tenu en sa qualité de constructeur, il est renvoyé assez largement à la notion de réception.
Définie par l'article 1792-6 du Code civil comme étant « l'acte par lequel le maître de l'ouvrage déclare accepter l'ouvrage avec ou sans réserves », la date de réception correspond à la pierre angulaire ou élément déclencheur des régimes de garantie des constructeurs. Elle est le point de départ notamment des garanties biennale et décennale, et peut également l'être au titre de la garantie des dommages apparents si la réception est précédée par la prise de possession de plus d'un mois.
En tant qu'acte juridique, la réception répond aux conditions de fond de celui-ci. Elle doit ainsi refléter une volonté réelle et réciproque des parties au contrat, en respectant le principe du contradictoire.
Sur la forme, le Code civil n'a pas imposé de règles particulières pour la réception. L'application du droit commun de la preuve exige néanmoins un acte écrit, sans quoi elle pourra constituer simplement un commencement de preuve. Malgré le silence du législateur en 1978, la réception tacite a néanmoins été reconnue par la Cour de cassation.
– Une garantie en trois temps. – L'acquéreur en l'état futur d'achèvement déçu par l'ouvrage livré dispose classiquement de trois garanties spécifiques à l'encontre de son vendeur, pris en sa qualité de constructeur. Il pourra tout d'abord invoquer « ce qui se voit » dans un délai néanmoins contraint, à travers la garantie des dommages apparents (A). Bien évidemment, il disposera de plus de temps pour engager la responsabilité de son vendeur au titre de ce qui « ne se voit pas », en mettant en jeu la garantie des dommages non apparents (B). Àces deux garanties est venue s'ajouter une garantie faisant appel cette fois-ci à un autre sens, l'ouïe, à travers la garantie des défauts d'isolation phonique (C).
La garantie des dommages apparents
Régime applicable
– Périmètre de la garantie des dommages apparents. – Le périmètre de la garantie des dommages apparents a évolué. Initialement, la garantie spécifique portant sur « ce qui se voit » était réservée aux vices de la construction apparents. Les défauts de conformité, même apparents, étaient quant à eux appréhendés par le droit commun, et notamment sanctionnés à travers les articles 1217 et 1792-4-3 du Code civil. La loi Molle du 25 mars 2009 est venue étendre le régime spécifique de garantie des vices apparents aux défauts de conformité apparents, lesquels forment désormais ensemble la garantie des dommages apparents.
– Raison d'être de la garantie des dommages apparents. – L'existence d'une garantie portant spécifiquement sur les dommages apparents distingue très nettement la vente d'immeuble à construire du droit commun de la vente. On sait en effet que l'article 1642 du Code civil dispense le vendeur de la garantie des vices apparents dont l'acquéreur a pu se convaincre. Un tel mécanisme était évidemment inapplicable en matière de vente sur plans, l'acquéreur étant dans ce cas dans l'impossibilité de « se convaincre » du vice ou du défaut pouvant affecter un immeuble n'existant pas encore à la signature du contrat. C'est ce qui a conduit le législateur de 1967, complété par celui de 2009, à renvoyer au jour de la réception des travaux ou de la prise de possession des biens, l'appréciation de l'existence de dommages apparents. L'article 1642-1 du Code civil est donc une adaptation de l'article 1642 du Code civil à la vente d'immeuble à construire.
– Les modalités d'exercice de la garantie des désordres apparents. – La garantie des désordres apparents soulève principalement les questions pratiques suivantes :
(i) Le désordre apparent doit-il être d'une certaine importance/gravité ?
NON. C'est ici une différence fondamentale avec les garanties renvoyant à l'existence d'un dommage. S'agissant ici de sanctionner l'existence d'un désordre relevant d'un vice ou d'un défaut de conformité, il n'est pas nécessaire de justifier de l'importance ou de la gravité de ce désordre, lequel n'a pas besoin de rendre l'immeuble impropre à sa destination pour être invoqué par l'acquéreur.
(ii) La qualité de l'acquéreur entre-t-elle en ligne de compte dans l'appréciation du caractère apparent du désordre ?
NON. La notion d'apparence retenue ici renvoie aux diligences d'un acquéreur « moyen, dépourvu de connaissances techniques particulières », procédant à des diligences élémentaires. C'est ainsi que « seul le défaut facilement repérable, par une vérification élémentaire, doit être considéré comme apparent ».
(iii) Est-il nécessaire de rapporter la preuve d'une faute du vendeur pour invoquer la garantie des désordres apparents ?
NON. S'agissant d'une garantie, toute action fondée sur celle-ci ne nécessite pas que soit rapportée la preuve d'une éventuelle faute du promoteur-vendeur à l'origine du désordre apparent.
- la réception des travaux (avec ou sans réserves) ;
- un mois après la prise de possession par l'acquéreur.
– Le délai pour agir au titre de la garantie des désordres apparents. – Les désordres apparents peuvent être invoqués tant par l'acquéreur en l'état futur d'achèvement (à l'encontre de son vendeur), que par le vendeur en l'état futur d'achèvement (à l'encontre de ses locateurs d'ouvrage). C'est pourquoi le délai de mise en œuvre de cette garantie, qui est d'une année, commence à courir à compter de la plus tardive des deux dates suivantes :
Au cas particulier du délai d'un mois courant à compter de la prise de possession par l'acquéreur, qui sera l'hypothèse la plus couramment applicable, il s'agira donc pour l'acquéreur d'identifier pendant ce délai les désordres apparents pouvant affecter l'immeuble livré. Ce délai, qu'on qualifiera de délai d'apparition
, pourra être suivi, à son expiration, d'une décharge par l'acquéreur ayant pour effet de libérer le vendeur.
Les acquéreurs ne seront pas tenus de dénoncer les désordres apparents dans le délai d'un mois, mais le caractère apparent des désordres qui seraient invoqués dans le délai d'un an sera apprécié au plus tard à l'expiration de ce délai d'un mois.
Vigilance sur le délai de l'action en garantie au titre des désordres apparents
D'apparence simple, le régime proposé par l'article 1642-1 du Code civil est en réalité susceptible de soulever plusieurs difficultés :
- Àquoi correspond la date de prise de possession par l'acquéreur ? Alors même que ses effets sont importants, la date de prise de possession n'a pas été définie par le Code civil. Il conviendra dès lors de prendre soin de préciser dans le contrat ce que les parties entendent par « date de prise de possession » afin d'éviter toute discussion ultérieure.
- Qu'en est-il lorsque la prise de possession intervient avant la réception ? Cette situation n'a pas vocation à se produire régulièrement en matière de Vefa. En effet, le promoteur-vendeur prendra la plupart du temps la précaution de réceptionner les travaux avec ses locateurs d'ouvrage avant de consentir à la prise de possession des biens construits par son acquéreur en l'état futur d'achèvement. Cela n'empêche pas néanmoins de voir cette situation se produire. Les dispositions de l'article 1642-1 du Code civil sont sur ce point très claires, et ne laissent pas de place au doute : il convient de retenir le plus tardif des deux événements, et donc la date de la réception dans ce cas particulier. C'est ainsi que la Cour de cassation a eu l'occasion de confirmer qu'une installation dans l'immeuble, même avant son achèvement, ne faisait pas courir le délai d'un an, l'absence de réception laissant ce même délai se poursuivre.
- Le délai d'un an est-il interrompu en cas d'action ? Le délai d'un an prévu par l'article 1648 du Code civil est un délai de forclusion. Àce titre, il est susceptible d'être interrompu du fait d'une demande en justice, même en référé. Cette interruption entraîne l'application d'un nouveau délai d'un an, pouvant à nouveau être interrompu pour les mêmes raisons. La Cour de cassation a eu l'occasion de rappeler ainsi que des mécanismes propres aux délais de prescription, tel celui de l'interversion, ne pouvaient allonger le délai au-delà de ce que prévoit l'article 1648, alinéa 2 du Code civil, sauf à ce que ce délai ne recommence à courir du fait d'une interruption.
- Le délai d'un an s'applique-t-il au vendeur tenu de remédier aux désordres apparents valablement dénoncés ? Le délai prévu par l'article 1648 du Code civil ne porte que sur l'action entamée par celui qui subit le désordre apparent (l'acquéreur dans le cadre d'une Vefa). Ce délai ne vient donc pas s'appliquer au vendeur, tenu de remédier aux désordres valablement dénoncés.
– D'un délai d'action à un délai de garantie. – L'article 1648, alinéa 2 du Code civil prévoit un délai d'action d'un an, à peine de forclusion. Ce délai court, le plus souvent, à compter de l'expiration d'un délai d'un mois suivant la prise de possession des biens par l'acquéreur. Le délai global et cumulé de treize mois qui en résulte se décompose en délai d'apparition du désordre (le mois suivant la prise de possession), qui est lui-même compris dans un délai plus large, le délai d'action, pouvant même aller jusqu'à commencer avant le délai d'apparition. La lecture faite par la Cour de cassation des dispositions combinées des articles 1648 et 1642-1 du Code civil conduit donc à présumer que les désordres dénoncés dans le délai de l'article 1648 du Code civil sont apparus dans le délai d'apparition d'un mois. C'est ainsi que d'un délai d'action nous en arrivons à considérer le délai fixé par l'article 1648 comme un délai de garantie, d'une durée de treize mois courant à compter de la prise de possession ou, si la réception n'a pas encore été prononcée et que cela aboutit à une date ultérieure, dans un délai de douze mois courant à compter de la réception.
– Les sanctions applicables aux désordres apparents. – L'acquéreur déçu dispose, à son choix, de l'action rédhibitoire afin d'aboutir à la résolution de la vente, ou de l'action estimatoire, visant à obtenir une diminution de prix. En réponse, le promoteur-vendeur pourra s'obliger à réparer le désordre soulevé, et ainsi faire obstacle à l'action de l'acquéreur.
L'ingénierie du notaire dans la mise en œuvre de la garantie des dommages apparents
Pour ce faire, deux situations semblent devoir être distinguées, en fonction d'une occupation directe des biens par l'acquéreur ou, au contraire, d'une mise en location de ces biens :
- pour les immeubles occupés par l'acquéreur : il convient d'indiquer que la prise de possession des biens résultera de la remise des clés des biens construits (qui devra être formalisée afin que le vendeur puisse apporter la preuve de la date en question) ;
- pour les immeubles loués : faute d'occupation directe par l'acquéreur, la remise des clés ne semble pas être un critère efficace. Il sera dès lors possible de renvoyer à la signature avec le vendeur d'un procès-verbal venant constater l'achèvement des biens construits ou leur livraison à l'acquéreur.
– De l'intérêt de définir clairement la « date de prise de possession ». – Nous l'avons vu, la date de prise de possession est bien souvent celle à partir de laquelle commence à courir un délai de treize mois pour activer la garantie des désordres apparents. La notion même de prise de possession n'est pas définie par l'article 1642-1 du Code civil. Il apparaît dès lors essentiel de définir celle-ci au terme de l'acte de Vefa.
– Est-il possible de prévoir des clauses de décharge automatique ? – L'acquéreur, en qualité de bénéficiaire de la garantie des désordres apparents, peut libérer le vendeur de celle-ci dans certaines conditions. Il ressort ainsi de l'article 1642-1 du Code civil que le vendeur peut être déchargé de cette garantie à compter de la réception ou, si cette date est plus tardive, à l'expiration d'un délai d'un mois suivant la prise de possession. Cette décharge doit, par principe, être formalisée, afin que le vendeur puisse rapporter la preuve qu'il n'est désormais plus tenu par la garantie des désordres apparents. La question s'est également posée de savoir s'il était possible de prévoir conventionnellement une décharge automatique du vendeur à l'expiration du délai susvisé.
L'intérêt pratique d'une telle clause est évident. La décharge permet au promoteur-vendeur en l'état futur d'achèvement de ne pas demeurer dans l'incertitude d'une éventuelle action de l'acquéreur au titre des désordres apparents, jusqu'à l'expiration du délai d'un an prévu par l'article 1648 du Code civil. Elle permet surtout d'éviter qu'un acquéreur de mauvaise foi n'invoque le bénéfice de cette garantie au titre de désordres dont il pourrait lui-même être à l'origine, notamment dans le cadre de son installation et de la jouissance du bien pendant l'année écoulée. Prévoir que cette décharge s'opérera automatiquement permet au promoteur-vendeur de ne pas être soumis à la volonté de l'acquéreur au moment où la décharge s'avérera possible.
Les articles 1642-1 et 1648 du Code civil n'apportent pas de réponse à cette question. La Cour de cassation quant à elle a eu l'occasion d'adopter des positions fluctuantes, notamment basées sur une distinction entre les vices apparents et les défauts de conformité apparents.
- c'est ainsi qu'en matière de vices apparents, la Cour de cassation a rejeté une telle clause, qu'elle répute non écrite, l'acquéreur devant disposer de la totalité du délai d'un an pour dénoncer les vices apparents ;
- en revanche, s'agissant des défauts de conformité apparents, la Cour de cassation a admis que le contrat pouvait prévoir que l'acquéreur devait dénoncer lesdits défauts à la plus tardive des deux dates prévues par l'article 1642-1 du Code civil (et donc, bien souvent, à l'expiration du délai d'un mois suivant la prise de possession).
Le notaire peut-il donc valablement prévoir dans son acte une clause organisant une décharge automatique du vendeur au titre de la garantie des désordres apparents ? En l'état de la jurisprudence de la Cour de cassation, la prudence nous semble commander de refuser d'inclure de telles clauses, en ce compris au titre des défauts de conformité apparents. Seule une prise de position ferme de la Cour de cassation, portant sur des faits où s'appliquent les textes issus de la loi du 25 mars 2009, nous semble de nature à le permettre.
Nous l'avons vu, les vices apparents et défauts de conformité apparents relèvent désormais d'un régime unique par suite de l'extension aux seconds du régime applicable aux premiers. Cela n'a pas empêché la Cour de cassation de maintenir la jurisprudence précitée en reconnaissant la validité d'une clause prévoyant une décharge automatique du promoteur-vendeur à l'issue du délai d'apparition prévu sous l'article 1642-1 du Code civil. Cette solution, il est vrai rendue dans une affaire où le contrat litigieux avait été conclu avant l'adoption de la loi du 25 mars 2009, semble tout de même confirmer l'approche de la Cour de cassation sur cette question.
La garantie des dommages non apparents
Régime applicable
– L'objet de la garantie : un dommage caché. – Depuis la loi du 4 janvier 1978, et plus précisément pour les chantiers ayant fait l'objet du dépôt d'une déclaration d'ouverture à compter du 1er janvier 1979, la responsabilité du vendeur en l'état futur d'achèvement au titre des dommages non apparents est régie par le nouvel article 1646-1 du Code civil. C'est ainsi que ce vendeur est tenu, à compter de la réception des travaux, des garanties prévues aux articles 1792, 1792-1, 1792-2 et 1792-3 du Code civil. La garantie est plus large que le vice éventuel, puisque la notion de dommage, qui a été retenue, renvoie à toute anomalie ou défectuosité de l'immeuble, même non structurelle. Cette notion de dommage exclut les éventuels défauts de conformité, qui relèvent soit de la garantie des dommages apparents, soit du droit commun des défauts de conformité. Le caractère caché est classiquement retenu au jour de la réception, et permet d'inclure des dommages qui existaient à cette date, mais ne se sont véritablement et négativement révélés dans leur ampleur qu'après celle-ci. Dans ce cas, le vice ou dommage résulte plus particulièrement de l'évolution aggravante de ce qui a été relevé lors de la réception, et non en tant que tel des constatations faites initialement.
Appréciation du caractère non apparent du dommage
La garantie des dommages non apparents renvoie à une appréciation :
(i) au jour de la réception des travaux ;
(ii) par le maître d'ouvrage.
Nous savons que la réception intervient entre les constructeurs et le maître d'ouvrage, et qu'en matière de Vefa, le promoteur-vendeur conserve la qualité de maître d'ouvrage jusqu'à la livraison, souvent postérieure à la réception.
Partant, l'acquéreur en Vefa ne participe pas à la réception et n'est donc pas à même d'apprécier ou de déceler à cette date les éventuels dommages (apparents ou non apparents).
Le critère du caractère apparent ou non apparent du dommage est essentiel dans la mise en œuvre des garanties correspondantes. La garantie des dommages non apparents ne peut être actionnée si le dommage devait être considéré comme apparent au jour de la réception, ce dont l'acquéreur n'a donc pas pu se convaincre.
La Cour de cassation a dès lors rappelé que lorsque l'acquéreur agit en réparation contre le vendeur en l'état futur d'achèvement sur le fondement des dommages non apparents, le caractère éventuellement apparent du dommage s'apprécie au jour de la réception en la personne du maître de l'ouvrage (et donc du promoteur-vendeur).
– Champs d'application respectifs des garanties biennale et décennale. – La garantie des dommages non apparents est répartie entre garantie biennale et garantie décennale. Classiquement, et après qu'a été abandonnée la distinction entre les gros et les menus ouvrages, la distinction proposée portait sur l'origine du dommage. Celui-ci portait-il sur l'ouvrage lui-même ou l'un de ses équipements indissociables ? Le régime de la garantie décennale (avec ses critères d'application) devait alors s'appliquer. Au contraire, le dommage prenait-il sa source (ou se matérialisait-il) dans un élément d'équipement dissociable ? La garantie biennale devait alors être mise en œuvre. Cette approche est rapidement apparue comme erronée, puisque ne reprenant pas les termes mêmes des articles 1792 et suivants du Code civil. C'est ainsi que la différence fondamentale entre ouvrages et éléments d'équipements indissociables, d'un côté, et éléments d'équipements dissociables, de l'autre, semble devoir être tempérée voire écartée pour partie. L'essentiel n'est pas de savoir où le dommage prend son siège, mais s'il rend ou non l'ouvrage impropre à sa destination ou s'il en compromet ou non la solidité. Il convient dès lors de privilégier à « l'approche causale » du dommage une « approche fonctionnelle », consistant à se concentrer sur les effets du dommage invoqué pour en déduire s'il relève ou non de la garantie décennale ou de la garantie biennale. Le rattachement (direct ou indirect) à l'ouvrage et la circonstance d'une éventuelle impropriété à la destination de celui-ci semblent dès lors être les critères fondamentaux devant être appréhendés (V. ci-après, Figure 23]).
– Le promoteur-vendeur : un « garant relais ». – Le promoteur-vendeur est assujetti aux mêmes responsabilités que celles applicables aux constructeurs au regard du positionnement spécifique qui est le sien dans l'opération. Il a ainsi une position intermédiaire entre les constructeurs réalisateurs et l'acquéreur en Vefa. Eu égard à l'action récursoire dont il dispose envers les constructeurs réalisateurs, il supporte auprès du client final (l'acquéreur) la même responsabilité que ceux qui sont à l'origine des dommages (les constructeurs réalisateurs). C'est pourquoi le promoteur-vendeur est qualifié de « garant relais » tenu d'une « responsabilité relais ». Sa responsabilité n'a pas vocation à être définitive, par principe, en ce qu'elle est destinée à être répercutée directement aux entreprises responsables. Nous verrons toutefois que ce principe comporte une importante limite en ce que le promoteur-vendeur ne peut bénéficier du concours d'actions récursoires en garantie décennale et en responsabilité de droit commun, ce qui le transforme dans certaines situations en « garant final ».
– Les sanctions applicables aux désordres non apparents. – Reprenant très sensiblement la terminologie applicable aux désordres apparents, l'article 1646-1 du Code civil liste les deux mêmes sanctions et l'exception ou fin de non-recevoir pouvant y être opposée par le vendeur. C'est ainsi que l'acquéreur peut demander la résolution de la vente ou une diminution du prix, sauf si le vendeur s'oblige à réparer les dommages invoqués.
– Délais pour agir au titre des dommages non apparents. – Ainsi que leurs noms respectifs l'indiquent très clairement, les garanties biennale et décennale doivent être activées dans un délai courant à compter de la réception, égal à deux ans pour la première et dix ans pour la seconde. Ce délai court quand bien même des réserves auraient été émises.
– Cumul entre garantie de l'article 1646-1 du Code civil et garantie des dommages apparents. – L'importance des dommages pouvant être constatés, leur caractère apparent ou caché, et la date à laquelle ils sont identifiés conduisent régulièrement à des situations de concours d'actions. La question se pose dès lors de la possibilité de cumuler celles-ci. S'agissant des actions au titre des dommages apparents (C. civ., art. 1646-1) et des dommages non apparents (C. civ., art. 1642-1), la Cour de cassation a récemment validé le cumul entre ces deux actions dans des termes présentant le mérite de la clarté. Dès lors que les conditions de l'une et de l'autre de ces garanties sont réunies, l'acquéreur aura la possibilité d'actionner son vendeur sur l'un ou l'autre de ces fondements. En pratique, il s'agira le plus souvent d'actionner le vendeur sur le fondement de la garantie décennale, le délai d'action au titre de la garantie des dommages apparents étant bien souvent forclos. La position de la Cour de cassation semble s'expliquer par les modalités de constatation de la réception. Rappelons que seuls le promoteur-vendeur et les entreprises locateurs d'ouvrage ont vocation à intervenir à celle-ci. Ce faisant, le caractère non apparent des dommages est apprécié au stade de la réception en l'absence de l'acquéreur. Pour ce dernier, le caractère apparent du dommage, justifiant le recours à la garantie prévue sous l'article 1642-1 du Code civil, s'apprécie à la réception ou dans le mois suivant la prise de possession. Le dommage pourra ainsi être tout autant un dommage apparent justifiant l'action sur le fondement de l'article 1642-1 du Code civil et, en cas de forclusion de ce délai, un dommage non apparent justifiant l'appel à la garantie prévue sous les articles 1792 et suivants du même code dès lors que ses conditions d'application sont réunies.
– Non-cumul entre garantie de l'article 1646-1 du Code civil et garantie des vices cachés de droit commun. – La différence de régime, et tout spécialement de délai d'action, entre la garantie spéciale issue de l'article 1646-1 du Code civil et la garantie de droit commun des vices cachés de l'article 1641 du Code civil a rapidement suscité des contentieux. En effet, lorsque la première de ces deux garanties est atteinte de forclusion du fait de l'expiration du délai de deux ans ou de dix ans courant à compter de la réception, il peut en aller autrement de la garantie de droit commun au titre des vices cachés. Pour cette dernière, le délai d'action est en effet de deux ans à compter de la découverte du vice, ce qui peut donc dépasser les délais de garantie biennale ou décennale. La Cour de cassation a déclaré qu'en matière de vente d'immeuble à construire, la garantie de droit commun au titre des vices cachés était inapplicable et ne pouvait pas dès lors « rattraper » la forclusion des garanties spécifiques de l'article 1646-1 du Code civil.
– Le cas particulier des dommages intermédiaires. – Certains dommages à l'ouvrage, bien que non apparents, ne relèvent pas des champs d'application respectifs des garanties biennale et décennale. Il s'agit des dommages intermédiaires. Reconnus de longue date en jurisprudence, ils ont pendant un temps été considérés comme relevant d'une présomption de responsabilité avant que ne soit confirmée l'application du droit commun de la responsabilité pour faute prouvée. C'est ainsi que le vendeur en l'état futur d'achèvement se trouve tenu, en parallèle des garanties biennale et décennale, des dommages intermédiaires sur justification de sa faute, au même titre d'ailleurs que celui qui vend, après achèvement, un immeuble qu'il a construit ou fait construire (et qui se trouve, par ce biais, réputé constructeur). Cette solution est susceptible d'être à l'origine d'importantes difficultés pour l'acquéreur, y compris dans le secteur protégé. En effet, il apparaît que l'acquéreur ne peut donc engager la responsabilité de son vendeur en l'état futur d'achèvement au titre des dommages intermédiaires que pour faute prouvée. Or, il est rare que le promoteur-vendeur participe directement à la construction, laquelle relève de locateurs d'ouvrage dont il n'est d'ailleurs pas tenu de transmettre la liste et l'identité à l'acquéreur. Ce dernier devra donc bien souvent prouver la faute de locateurs d'ouvrage qu'il ne connaît peut-être pas ou dont il ne connaît pas le périmètre exact de l'intervention afin d'engager leur responsabilité au titre des dommages intermédiaires. Si la solution consistant à exiger de rapporter une faute pour bénéficier des dommages intermédiaires est cohérente avec le droit commun de la responsabilité, elle ne semble pas suffisamment protectrice de l'acquéreur ni cohérente avec le principe selon lequel le promoteur-vendeur est tenu à l'égard de son acquéreur d'une obligation de résultat.
L'ingénierie du notaire dans la mise en œuvre de la garantie des dommages non apparents
– L'intérêt de viser précisément la réception des travaux. – Nous l'avons vu, le jour de la réception des travaux correspond à la date à partir de laquelle courent les délais d'action en garanties biennale et décennale. Il est donc essentiel de tenir compte de cet événement et de le définir de manière expresse et précise dans les actes contenant vente en l'état futur d'achèvement. Àcet égard, il serait opportun de prévoir dans l'acte que le promoteur-vendeur sera tenu de remettre à l'acquéreur des procès-verbaux de réception régularisés entre le promoteur-vendeur et les entreprises de construction, ainsi que la liste des réserves y attachées. L'acquéreur sera par ce biais correctement et précisément informé de la date à compter de laquelle commenceront à courir les garanties biennale et décennale.
– Veiller à informer les parties sur les modalités de mise en jeu des garanties. – C'est une évidence, mais il convient d'informer aussi précisément que possible l'acquéreur des modalités de mise en jeu des garanties des dommages non apparents. Plusieurs illustrations de cet impératif peuvent être données :
- Exemple 1 : ainsi que nous l'avons évoqué, le délai de mise en jeu des garanties biennale et décennale commence à courir à compter de la réception des travaux, que celle-ci ait ou non donné lieu à l'émission de réserves. Àcet égard, il convient de rappeler à l'acquéreur que le délai pour lever les réserves ne vient pas suspendre le délai de mise en jeu des garanties.
- Exemple 2 : la possibilité de cumuler les garanties des dommages apparents et non apparents n'est pas une évidence pour les parties à l'acte. Au regard de la position retenue par la Cour de cassation et de la possibilité accordée à l'acquéreur de cumuler ces garanties, il convient que les parties en soient clairement informées dans l'acte.
– Impossibilité de prévoir de restreindre la durée des garanties de dommages non apparents. – La loi de 1978 est venue confirmer le caractère d'ordre public des garanties des dommages non apparents. Ce faisant, toute clause ayant pour objet d'exclure ou de limiter ces garanties est réputée non écrite.
La garantie des défauts d'isolation phonique
Régime applicable
- uniquement en présence de bâtiments d'habitation. Elle n'est donc pas due (légalement) pour toute autre construction (bureaux, commerces, etc.) ;
- pendant une durée d'un an à compter de la prise de possession ;
- uniquement au profit du premier occupant de chaque logement.
– Présentation de la garantie. – Dans le cadre de la construction de bâtiments d'habitation, le vendeur d'immeuble à construire doit garantir, au premier occupant de chaque logement, sa conformité avec les prescriptions légales ou réglementaires relatives aux exigences minimales requises en matière d'isolation phonique. Il ressort de la rédaction de l'article L. 124-4 du Code de la construction et de l'habitation que cette garantie, venant compléter celles prévues aux articles 1642-1 et 1646-1 du Code civil, s'applique :
- le bénéficiaire de la garantie – la notion de premier occupant : le texte renvoie au « premier occupant de chaque logement ». Qui est-il ? En cas d'acquisition pour y habiter directement, cela ne fait pas de doute qu'il s'agit dès lors de l'acquéreur. Mais en cas de mise en location du bien, il devrait s'agir du locataire. Celui-ci, non lié au promoteur-vendeur, au contraire de l'acquéreur, disposerait-il dès lors d'une action contre lui ? Qu'en serait-il dans ce cas de l'acquéreur qui ne disposerait plus d'aucune action ?
- le bénéficiaire de la garantie – la limite au premier occupant : par ailleurs, en dehors de l'identification du « premier occupant », la limitation à ce dernier peut surprendre. En effet, alors que les garanties des dommages apparents et non apparents se transmettent aux acquéreurs successifs, il en irait autrement pour la garantie des défauts d'isolation phonique ;
- la durée de la garantie : la limitation à une année peut apparaître trop courte s'agissant de désordres pouvant se révéler plus tardivement, et notamment à l'emménagement d'autres occupants dans l'immeuble ;
- la notion de prise de possession : à nouveau, la notion à laquelle il est renvoyé pour faire partir le délai de garantie est celle de « prise de possession ». L'imprécision relevée en matière de garantie des dommages apparents peut donc être regrettée ici aussi.
– Un régime vivement critiqué. – La rédaction de l'article L. 124-4 du Code de la construction et de l'habitation a été vivement critiquée. Les principales critiques ont porté sur les points suivants :
– Une jurisprudence « compréhensive ». – Au regard du feu nourri des critiques formulées à l'encontre de ces dispositions, et pour permettre néanmoins de protéger les acquéreurs en cas de défauts d'isolation phonique, la jurisprudence s'est montrée souple dans la prise en compte de ceux-ci. C'est ainsi que la garantie des dommages non apparents, et notamment la garantie décennale, peut être applicable dès lors que le défaut d'isolation phonique rend l'immeuble impropre à sa destination. De même, le défaut d'isolation phonique peut relever d'une non-conformité lorsqu'il résulte d'un manquement aux stipulations contractuelles.
L'ingénierie du notaire dans la mise en œuvre de la garantie des défauts d'isolation phonique
– L'importance d'une information précise sur une notion qui ne l'est pas. – Nous l'avons vu, les textes applicables au défaut d'isolation phonique sont particulièrement imprécis ou sont susceptibles de susciter des difficultés entre les parties. Il revient dès lors au notaire de rappeler aux parties l'existence de cette garantie, souvent méconnue, en leur précisant que sa mise en jeu peut relever d'un régime de garantie spéciale (celui de l'article L. 124-4 du Code de la construction et de l'habitation) ou de l'application d'autres régimes (la garantie des dommages non apparents, notamment la garantie décennale, ou le défaut de conformité avec les stipulations contractuelles), ainsi que la jurisprudence a eu l'occasion de l'admettre.
– Les apports possibles du contrat sur le régime légal. – Par ailleurs, les limites mises en avant ou critiques soulevées nous amènent à nous interroger sur les améliorations pouvant être apportées aux dispositions de l'article L. 124-4 du Code de la construction et de l'habitation par le contrat. Dès lors qu'il ne s'agira pas de renoncer au bénéfice de cette garantie ni de contraindre l'acquéreur dans sa mise en œuvre, certains compléments ou ajustements nous semblent pouvoir être apportés à travers le contrat :
- première précision – l'identité du premier occupant : s'il y a des situations où le doute ne sera pas permis (hypothèse de l'acquéreur futur occupant du logement), il n'en sera pas toujours ainsi. C'est pourquoi il paraîtrait raisonnable de préciser dans le contrat de vente quel sera l'occupant appelé à bénéficier de cette garantie (l'acquéreur, un locataire, etc.) ;
- seconde précision – la matérialisation de la prise de possession : sans revenir sur le principe d'une garantie applicable à compter de la prise de possession des biens, il paraît nécessaire d'adopter le même principe que celui recommandé en matière de garantie des dommages apparents. Il sera donc utile de préciser ce que les parties entendent par prise de possession des biens (remise des clés par exemple).