Les usages des signatures dématérialisées

Les usages des signatures dématérialisées

Très tôt, alors même que les contours de la technologie de la signature électronique n'étaient pas précisément maîtrisés comme ils le sont à ce jour, le notariat a choisi de s'appuyer sur un certificat qualifié de signature électronique. C'est ainsi qu'en 1998 est créée la carte Oscar, qui donna naissance à la carte Real devenue en 2005 la clé Real. Au-delà des actes nécessitant le degré le plus élevé de sécurité, ce qui est le cas des actes authentiques sur support électronique (Sous-section II) , une foultitude d'échanges dématérialisés occupe aujourd'hui le quotidien des Français. Très logiquement donc, la signature manuscrite sur une tablette graphique, la signature électronique simple et la signature électronique avancée ont trouvé leur place dans de nombreux cas d'usage (Sous-section I) . Ces très nombreux usages à vocation multiple, d'inégal degré de sécurité, soulèvent des difficultés en termes d'archivage et donc de preuve (Sous-section III) .

Les cas d'usage des signatures électroniques non qualifiées

Réserver la signature qualifiée en pratique principalement aux actes authentiques, aux actes produisant des effets hors de France et dans l'Union européenne, et aux actes auprès d'organismes publics exigeant des niveaux de confiance et de sécurité élevés (marchés publics) revient à dire qu'il reste pour un utilisateur trois autres catégories d'usage des signatures dématérialisées. Les premières reposent sur une signature manuscrite apposée sur une tablette (§ I) ; les deuxièmes impliquent une signature électronique simple proposée par un fournisseur externe (§ II) ; les troisièmes se trouvent scellées par une signature électronique avancée (§ III) .

Les usages de la signature manuscrite sur tablette graphique

Les exemples de conclusion d'une transaction par l'apposition d'une signature manuscrite sur une tablette graphique ou un smartphone sont fréquents, tout simplement parce que ce procédé peu sécurisé suffit à répondre aux contraintes de sécurité peu élevées entourant de nombreux actes de la vie courante. Ce sera par exemple le cas de la signature liée à la livraison d'un colis par La Poste ou par un opérateur privé.

Les usages de la signature électronique simple

Le niveau de sécurité restant faible mais suffisant pour des actes courants emportant des risques juridiques ou financiers faibles, cette signature est le plus souvent utilisée pour des contrats d'adhésion (assurance de complémentaire santé, conditions générales d'utilisation), des états des lieux d'entrée et de sortie d'un logement, des devis, contrats de bail, contrats fournisseurs.
L'identité n'étant pas vérifiée, il est assez loisible au signataire de contester le fait d'avoir signé. C'est la raison pour laquelle, sans pour autant remplir les conditions plus strictes d'une signature avancée, certains opérateurs ont renforcé le processus de la signature simple en ajoutant une étape d'authentification au moyen d'un SMS C'est le cas de YouSign, opérateur qui ne propose pas de service de signature qualifiée à distance certifiée par l'ANSSI. .
Quand bien même la vérification de l'identité du signataire ne serait guère développée, il reste les problématiques de stockage de documents pouvant constituer un faisceau de preuves relatives à l'identité du signataire. C'est ainsi que des fournisseurs de signatures simples proposent d'archiver dans un dossier de preuves horodatées les éléments tels que le numéro de téléphone, ou l'adresse IP de l'ordinateur utilisé pour signer le document.
Tout ceci reste très aléatoire en termes de preuve, et c'est la raison pour laquelle la signature avancée est un outil précieux conseillé dans le cadre d'opérations emportant des enjeux juridiques importants.

Les usages de la signature électronique avancée

L'utilisateur d'une signature électronique avancée ne peut se prévaloir de la présomption légale de fiabilité prévue par l'alinéa 2 de l'article 1367 du Code civil. Cependant, la signature avancée met en œuvre le téléchargement et la vérification de la pièce d'identité sans face à face. Le choix de cette signature peut être fait lorsque la portée des engagements au contrat ou le risque éventuel de contentieux ultérieur exclut l'usage d'une signature de niveau inférieur.
Cette signature est de plus en plus souvent proposée par les agents immobiliers pour la signature de compromis. Ainsi, une fois la négociation terminée, l'agent immobilier adresse aux parties, par courrier électronique, un projet de compromis de vente. Après d'éventuelles modifications opérées à la demande des clients, l'agent immobilier adresse aux parties, par le biais d'une plateforme proposant un service de signature avancée, un fichier numérique dénommé « enveloppe » à signer électroniquement. Cette enveloppe est signée par un premier signataire au moyen d'un clic. Il appose ensuite sa signature manuscrite sur le document, soit en la traçant sur l'écran tactile de son appareil, soit en la choisissant parmi celles proposées à l'écran. Enfin, il s'identifie au moyen d'une pièce d'identité présentée à la caméra de son smartphone ou de son ordinateur. Un dernier contrôle est opéré par l'envoi d'un code de validation sur le téléphone ou la boîte mail du signataire.
Cette première signature apposée, l'enveloppe est adressée au signataire suivant. Une fois toutes ces opérations terminées, l'agent immobilier, en qualité d'émetteur de l'enveloppe, réceptionne le compromis signé dans un fichier « pdf » complexe intégrant les attestations de signature de l'ensemble des parties et un certificat d'intégrité du fichier.
La plupart des établissements bancaires proposent la même solution de signature avancée pour la signature des offres de prêt.

Quelle signature électronique pour quel contrat ?

Il est possible de classer des cas d'usage de signature électronique en fonction de la technologie employée. Ainsi, en définissant les trois catégories de signature électronique créées par le règlement eIDAS, le rapport du 116<sup>e</sup> Congrès des notaires de Francea proposé des cas d'usage pour les signatures simples et avancées. Une corrélation était ainsi proposée entre les garanties fournies par le service technique et la portée des engagements.

De manière générale, la signature électronique simple sera utilisée pour des produits ou des marchés avec des conséquences juridiques et financières de faible importance, comme des opérations de caisse ou l'adhésion à des conditions d'utilisation pour des sites de commerce électronique.

La signature électronique avancée pourra quant à elle être utilisée dans une optique de déploiement national pour des produits financiers, comme le contrat de crédit à la consommation, le contrat d'assurance, le contrat d'ouverture de compte ou le contrat de crédit immobilier.

Dans le même ordre d'idées, en pleine crise de la Covid-19, le Conseil supérieur du notariat, par une note d'information du 4 avril 2020, recommandait <em>a minima</em> l'usage d'un dispositif de signature avancée pour la signature de procuration sous seing privé.

L'usage de la signature qualifiée dans le notariat

Alain Lambert, alors président du Conseil supérieur du notariat Alain Lambert a été président du Conseil supérieur du notariat de 1996 à 1998. , a le premier jeté l'ancre de l'authenticité dans l'univers numérique en contribuant fortement à la parution de la loi du 13 mars 2000 L. no 2000-230, 13 mars 2000, portant adaptation du droit de la preuve aux technologies de l'information et relative à la signature électronique. , et à l'éclairage des précisions apportées par le décret du 31 mars 2001 D. no 2001-272, 30 mars 2001, pris pour l'application de l'article 1316-4 du Code civil et relatif à la signature électronique. .
Partant du principe que « l'authenticité et ses modalités ne résultent pas de la volonté du notariat mais de celle du pouvoir législatif ou réglementaire » Affaires juridiques du Conseil supérieur du notariat, La procuration authentique avec comparution à distance. Aspects juridiques. Observations sur le décret no 2020-1422 du 20 nov. 2020, 21 nov. 2020. , le notariat a dû réfléchir à des outils répondant aux contraintes fortes de l'authenticité. Ainsi, très tôt, le Conseil supérieur du notariat a doté la profession d'un réseau sécurisé et les notaires d'une signature électronique répondant au plus haut degré de sécurité.
C'est sur ces deux socles – le réseau sécurisé, d'une part, et la signature sécurisée, d'autre part – que le notariat a construit et fait techniquement évoluer l'acte authentique électronique avec la constante préoccupation de faire en sorte que l'authenticité soit indépendante du support et que les diligences attendues d'un officier public ne changent pas.
Ainsi la notion d'authenticité reste la même alors que son support évolue. C'est ce principe qui sous-tend le décret du 10 août 2005 D. no 2005-973, 10 août 2005, modifiant D. no 71-941, 26 nov. 1971, relatif aux actes établis par les notaires. permettant de recevoir un acte authentique sur support électronique (§ I) . Si le support instrumentum de l'acte authentique évolue, c'est également le cas de son negotium puisque les décrets du 3 avril 2020 D. no 2020-395, 3 avr. 2020, autorisant l'acte notarié à distance pendant la période d'urgence sanitaire. d'application limitée et du 20 novembre 2020 D. no 2020-1422, 20 nov. 2020, instaurant la procuration notariée à distance. autorisent désormais la réception du consentement des parties à distance, sans présence obligatoire de deux notaires « à chaque bout de la chaîne » (§ II) .

La signature qualifiée à la suite du décret du 10 août 2005

L'article 17 du décret du 10 août 2005 précise les modalités de signature des parties et des témoins à l'acte (A) et impose au notaire d'authentifier l'acte au moyen d'un procédé de signature qualifiée (B) .

La signature des parties et des témoins

Présents physiquement, que ce soit devant le notaire instrumentaire Le troisième alinéa de l'article 17 du décret du 10 août 2005 précise que : « Pour leur signature, les parties et les témoins doivent utiliser un procédé permettant l'apposition sur l'acte notarié, visible à l'écran, de l'image de leur signature manuscrite ». ou devant un notaire dit « en participation » Le premier alinéa de l'article 20 du décret du 10 août 2005 précise que : « Lorsqu'une partie ou toute autre personne concourant à un acte n'est ni présente ni représentée devant le notaire instrumentaire, son consentement ou sa déclaration est recueilli par un autre notaire devant lequel elle comparaît et qui participe à l'établissement de l'acte ». , les parties et les témoins utilisent « un procédé permettant l'apposition sur l'acte notarié, visible à l'écran, de l'image de leur signature manuscrite ». Cette modalité de signature, bien que répondant à des consignes de sécurité minimale Toutefois, le Conseil supérieur du notariat impose aux notaires d'utiliser des tablettes graphiques recevant la signature manuscrite validées techniquement par l'ADSN. , ne pose aucune difficulté car elle se trouve intégrée dans la cérémonie de signature d'un acte authentique, consacrant ainsi les prérogatives du notaire recevant physiquement les parties. Comme pour un acte reçu sur support papier, dès lors que les parties sont physiquement présentes, le notaire qui reçoit un acte sur support électronique vérifie l'identité des comparants et la signature de ces derniers. Le support de signature n'est donc pas un élément déterminant de l'authenticité.

La signature du notaire au moyen d'un procédé de signature qualifiée

Le notaire signe son acte authentique sur support électronique au moyen de sa clé Real, répondant ainsi aux exigences de l'article 17 du décret du 10 août 2005 imposant un acte signé « au moyen d'un procédé de signature électronique sécurisé », expression modifiée par le décret du 20 novembre 2020 qui impose maintenant une « signature électronique qualifiée ». Cette obligation de recourir à une signature électronique qualifiée n'a aucune conséquence pour le notariat qui a fait le choix, depuis le début de la dématérialisation de l'acte authentique, de recourir à une signature électronique présentant le plus haut degré de sécurité La première signature électronique utilisée par le notariat répondait déjà aux exigences du RGS trois étoiles. .
Ainsi depuis fort longtemps, de manière très pragmatique, la signature électronique qualifiée des notaires repose sur deux piliers :
  • un certificat de signature électronique délivré par un prestataire de services de confiance qualifié (prestataire de services de certification électronique qualifié [PSCE]). Le PSCE doit s'assurer de l'identité du titulaire du certificat au travers de ses propres procédures ou bien en faisant appel à un prestataire de vérification d'identité reconnu, avant de lui délivrer le certificat ;
  • un dispositif de création de signature qualifiée (Qualified electronic Signature Creation Device ou QSCD) qui contient la clé privée de signature du titulaire du certificat de signature qualifié.
Le règlement eIDAS ne précise pas, même au travers de sa législation secondaire, les exigences techniques nécessaires pour qualifier un PSCE et un QSCD. Chaque État membre a désigné un organe de contrôle se chargeant de qualifier les prestataires de services de confiance et les dispositifs techniques. En France, l'ANSSI assure cette fonction et a défini ses propres exigences de qualification.
Le Conseil supérieur du notariat est le prestataire de services de certification électronique qualifié (PSCE) alors que l'ADSN assume le rôle d'opérateur de service de certification (QSCD).
La clé Real est délivrée au notaire qui a respecté strictement ces règles que le notariat maîtrise totalement. Ainsi l'identité du notaire prétendant à l'obtention d'un outil de signature qualifiée (la puce) est vérifiée par le Conseil supérieur du notariat alors même que cette puce est livrée par un prestataire qualifié, en l'espèce l'ADSN.
Cet environnement ne vaut que pour la délivrance des clés Real au notaire.

La signature qualifiée à la suite des décrets des 3 avril 2020 et 20 novembre 2020

Nombre de notaires ont découvert la notion même de signature qualifiée avec l'avènement de l'acte par comparution à distance et le décret du 3 avril 2020 D. no 2020-395, 3 avr. 2020, autorisant l'acte notarié à distance pendant la période d'urgence sanitaire. . La qualité du certificat intégré à la clé Real étant intégralement gérée par le CSN et l'ADSN, les notaires n'ont jamais eu à s'en soucier individuellement.
Afin de permettre le maintien de l'activité notariale dans le respect le plus strict des règles sanitaires alors en vigueur, le décret du 3 avril 2020 a instauré, dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire, un acte authentique par comparution à distance. Le fonctionnement de cet acte authentique est le suivant : le notaire donne lecture de son acte authentique aux parties en visioconférence ; à l'issue de la lecture, il recueille le consentement de chaque partie à cet acte en leur adressant par voie électronique une formule de recueil de consentement qu'elles doivent immédiatement signer au moyen d'une signature qualifiée et retourner au notaire, qui les annexe à son acte authentique électronique avant de le signer. Le tout doit se faire en visioconférence sans interruption de flux.
Le notaire doit donc s'assurer de l'usage par ses clients d'un dispositif de signature qualifiée. Dans les faits, il incombe au notaire d'adresser la formule de recueil de consentement au moyen d'un outil de signature qualifiée. Le notaire doit donc disposer d'un outil adapté. À la suite de la parution du décret du 3 avril 2020, le Conseil supérieur du notariat a publié une circulaire Affaires juridiques du Conseil supérieur du notariat, 16 avr. 2020, Circulaire modificative no 2020-1, Application du décret no 2020-395 du 3 avril 2020 autorisant l'acte notarié à distance pendant la période d'état d'urgence sanitaire. , une note d'information Affaires juridiques du Conseil supérieur du notariat, 4 avr. 2020, Note d'information sur les procurations sous seing privé électroniques et la comparution à distance pour les actes authentiques électroniques. et une foire aux questions Affaires juridiques du Conseil supérieur du notariat, 20 mai 2020, FAQ comparution à distance. soulevant cette difficulté pratique et informant les notaires que seule la société DocuSign était en mesure de proposer une telle solution.
Le décret du 3 avril 2020 a pris fin le 10 août 2020. Les retours d'usage de cet acte authentique par comparution à distance étant positifs, la Chancellerie a décidé de le pérenniser en autorisant par décret du 20 novembre 2020 D. no 2020-1422, 20 nov. 2020, instaurant la procuration notariée à distance ; voir infra no . , et pour une période de cinq années, la signature de procurations authentiques par comparution à distance, selon des modalités techniques d'échange de consentement et de signature équivalentes.
Les questions de fond sur la signature d'un acte authentique par comparution à distance sont traitées par la troisième commission du présent rapport V. infra, nos et s. .

La signature qualifiée du client dans l'acte avec comparution à distance

Le Conseil supérieur du notariat est habilité par l'ANSSI pour délivrer des signatures qualifiées aux notaires dans des cérémonies de face à face, mais les notaires ne sont pas habilités par l'ANSSI à délivrer des signatures qualifiées à leurs clients. Cette précision a son importance dans la compréhension du mécanisme de signature avec comparution à distance.
En effet, lorsque le notaire signe un acte authentique électronique au moyen de sa clé Real en la présence physique de ses clients, l'identité des signataires et le contenu de l'acte signé bénéficient de la présomption de fiabilité posée par l'article 1367 du Code civil. Le notaire est en mesure de vérifier en présentiel l'identité de son client, il en atteste bien souvent aux termes de l'acte et sa signature de niveau qualifié apposée sur l'acte électronique apporte toutes les garanties de fiabilité requises pour un acte authentique. Il convient toutefois de souligner que dans ce cas, le notaire ne fait que recueillir l'image de la signature manuscrite de ses clients, la signature de ces derniers n'étant pas de niveau qualifié comme celle du notaire qui authentifie l'acte.
En revanche, la signature d'un acte avec comparution à distance suppose la signature d'une attestation de consentement par le client au moyen d'une signature de niveau qualifié. Les décrets des 3 avril 2020 et 20 novembre 2020 n'ont en effet pas reconnu la possibilité pour le notaire de vérifier l'identité de son client comme il le ferait en présentiel, et c'est le niveau de signature qualifiée du client qui en apporte les garanties. Les notaires n'étant pas habilités par l'ANSSI à délivrer des signatures qualifiées à leurs clients, la signature d'un acte avec comparution à distance suppose donc de recourir à un prestataire extérieur à la profession pour répondre aux conditions édictées par les exigences de la signature qualifiée.
À ce jour, l'ANSSI, seul organe habilité à délivrer les qualifications nécessaires, n'a agréé qu'un seul opérateur capable de fournir un système de signature qualifiée à des clients, professionnels ou particuliers : la société DocuSign. La signature qualifiée proposée par DocuSign est cependant très lourde en pratique, puisqu'elle requiert une identification en face à face des signataires, qui ne peut se faire qu'en présentiel (donc inapplicable aux contrats en ligne et à distance, à moins que l'émetteur du contrat ait, dans certaines conditions, déjà rencontré les signataires et qu'à cette occasion ils lui aient remis leurs documents d'identité, leur numéro de téléphone et leur adresse e-mail), ou en visioconférence par un procédé techniquement contraignant qu'un seul opérateur en Europe est à même de fournir, la société IDnow.

La certification de signature à l'ère du numérique

Les notaires sont régulièrement sollicités pour procéder à des certifications de signature sur des documents papier. Cet usage non codifié ni réglementé se présente de la manière suivante : une personne connue du notaire ou en mesure de lui justifier de son identité signe devant lui un document sous signature privée et le notaire contresigne ce document à l'effet de certifier l'identité de la personne qui a signé. Cette certification de signature n'a d'efficacité que pour la vérification de l'identité du signataire et n'emporte pas vérification du consentement ou encore moins du discernement de la personne qui a signé. Il est d'ailleurs fréquent que le notaire appose une mention avant sa signature selon laquelle il ne fait que certifier l'identité et la signature matérielle du signataire. En aucun cas l'acte ainsi signé n'est un acte authentique, le notaire n'apposera d'ailleurs pas le sceau de la République sur un tel document.

Rien n'interdit <em>a priori</em> au notaire de faire la même chose sur support électronique. En empruntant la méthode technique utilisée pour l'acte authentique électronique, la contre-signature du notaire avec son dispositif de signature qualifiée permet aux signataires de l'acte sous seing privé de n'user que d'un système de signature par apposition d'une image de la signature manuscrite. En effet, la signature par le notaire emportera, par sa qualité d'officier public, certification de l'identité des signataires et, par l'usage de sa signature qualifiée, un cryptage asymétrique et donc la sécurisation du document. Le notaire veillera à remettre à chacun des signataires un fichier numérique sur lequel les certificats de signature sont existants et lisibles.

L'archivage des signatures électroniques à l'épreuve de la pratique

Le recours à un procédé de signature électronique qualifiée est évidemment très contraignant et coûteux dans le temps non seulement pour obtenir la qualification mais aussi pour la maintenir. Les difficultés ne s'arrêtent pas à cela. Les obligations liées à l'archivage des documents signés sont aussi importantes (§ I) et c'est sans compter les obstacles liés à la combinaison des signatures utilisées par d'autres professionnels (§ II) .

Les normes d'archivage des documents signés au moyen d'une signature qualifiée

Les professionnels utilisant une signature qualifiée sont soumis à des obligations de conservation. L'archivage à long terme d'une signature électronique qualifiée doit apporter des garanties d'intégrité, de traçabilité, d'imputabilité, de disponibilité et de pérennité du document signé.
Plus précisément, la pérennité ne suppose pas simplement de s'assurer de la persistance du fichier informatique mais de garantir aussi sa lisibilité comme l'exige expressément l'article 28 du décret du 10 août 2005 V. supra, no , réf. préc. : « L'acte établi sur support électronique doit être conservé dans des conditions de nature à en préserver l'intégrité et la lisibilité. (…) ».
Pour apporter la meilleure garantie possible de lisibilité et d'affichage fidèle des actes authentiques dressés sur support électronique au cours du temps, le notariat a naturellement fait le choix de la standardisation et s'est tourné vers l'usage du PDF/A, version normalisée au niveau international PDF/A-1 établi le 1er oct. 2005 en tant que standard ISO 19005 (International Standard Organization) dans une perspective de conservation à long terme des documents électroniques. V. infra, no . .
Le format PDF/A avance un certain nombre de conditions et restrictions relatives à la reproduction fiable de l'aspect visuel d'un document. Il est autonome, autodescriptif et indépendant du système utilisé pour l'exploiter.
Pour ce qui concerne l'acte authentique électronique, le Minutier central électronique du notariat (Micen) est ainsi conçu pour n'accepter que des documents au format PDF/A-1, pour l'acte lui-même comme pour ses annexes. Cette contrainte est la meilleure garantie de lisibilité des actes dans le temps.
Mais si le notariat, précurseur de l'archivage électronique et de la dématérialisation, a créé un écosystème garantissant le respect du format PDF/A-1 (via les outils de la profession mais également par le respect des exigences de la profession par les éditeurs de logiciels de rédaction d'actes), l'usage croissant de la dématérialisation et de la signature électronique chez ses nombreux partenaires génère aujourd'hui un défi supplémentaire : comment combiner la sécurité des documents échangés et leur conservation à long terme ?

Les difficultés relatives à l'archivage des documents combinant des signatures électroniques

Deux nouveaux cas d'usages de combinaison de signatures se font jour. Ainsi l'article 25 de la loi no 2019-222 du 23 mars 2019 L. no 2019-222, 23 mars 2019, de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice : JO 24 mars 2019, no 0071. modifiant l'article 1175 du Code civil prévoit la possibilité de dématérialiser les conventions de divorce contresignées par les avocats (B) . De même, la possibilité reconnue au comparant à distance de signer électroniquement une procuration à l'aide d'un procédé de signature qualifiée impose de nouvelles évolutions (A) . Dans ces deux hypothèses, des évolutions sont nécessaires.

L'archivage de la signature électronique d'une procuration d'un client comparaissant à distance au moyen d'une signature qualifiée

En l'état, et comme il est rapporté dans la « foire aux questions » mise en ligne sur le site du Conseil supérieur du notariat, la société DocuSign (seul prestataire en mesure de proposer à des particuliers d'effectuer une signature qualifiée à distance) propose à ses clients des polices de caractère non compatibles avec la norme PDF/A. Au regard des contraintes d'archivage du Micen rapportées ci-avant V. supra, no . , il est donc nécessaire de faire signer des documents distincts pour conserver la validité des signatures électroniques des différentes parties.
Cette solution est bien évidemment juridiquement fondée, mais techniquement pas totalement satisfaisante.
Dans l'attente que la profession puisse proposer à ses clients un outil de signature qualifiée, pour apporter plus de confort dans la réception d'une procuration à distance, il est nécessaire que DocuSign entame des développements permettant au client de signer un document au format PDF/A.

L'archivage d'une convention de divorce contresignée électroniquement par un avocat

La convention signée par les avocats doit respecter le format PDF/A-1. C'est un prérequis avant d'apposer leur signature électronique sur le document. Au fur et à mesure du développement de la dématérialisation avec ses partenaires, le notariat s'engage dans un nouveau partenariat pour s'assurer du bon usage du format PDF/A dans les cycles de traitement des documents.
Cela implique également des adaptations au sein des systèmes d'information du notariat. Ainsi l'ADSN et les éditeurs de logiciels de rédaction d'actes devront régulièrement adapter leurs outils pour gérer spécifiquement les annexes dématérialisées reçues par les notaires en validant leurs signatures, en vérifiant leurs formats et en les transformant en PDF/A-1 si nécessaire.