– Le BIM, un objet à identifier par les assureurs. – Le BIM intervient dans un contexte de déploiement de techniques, procédés et matériaux innovants qui, par définition, ne bénéficient pas d'un retour d'expérience suffisant pour en appréhender précisément les risques.
Les assurances construction et le BIM
Les assurances construction et le BIM
D'un côté, le BIM devrait permettre une meilleure traçabilité
L'utilisation de la technologie blockchain pourrait servir à assurer la traçabilité de chaque opération réalisée sur la maquette BIM, et pourrait donc être de nature à garantir cette traçabilité.
des échanges et contributions à l'acte de construire, que ce soit en phase de conception ou en phase de réalisation. À ce titre, le BIM est un puissant vecteur de maîtrise du risque et de gestion des coûts globaux d'une opération de construction, et offre au secteur de l'assurance la possibilité d'anticiper la maîtrise des risques et des coûts de leurs propres offres assurantielles
V. S. Rome, Assurance et construction durable : où en est-on ? : Opérations Immobilières mars 2018, no 103, 35381695.
. Dans l'hypothèse d'un sinistre, l'expert devrait pouvoir consulter la base BIM comme un élément permettant, le cas échéant, de déterminer les responsabilités, l'accès et le maintien de la base BIM devant être organisés dans les contrats, au moins pour la durée des garanties.
D'un autre côté, le BIM transporte de nouveaux risques en cas de dysfonctionnement de la base BIM (risques de détérioration, perte ou piratage des données numérisées, erreurs de conception ou d'alimentation de la maquette, etc.), dont la portée sur le chantier et l'exploitation sont difficilement appréciables à l'heure actuelle, mais qui ne semblent pas relever de la garantie légale des constructeurs soumis à assurance obligatoire.
En tant qu'outil futur d'exploitation de l'immeuble, la question d'un dysfonctionnement de la base BIM pourrait se traduire par une mauvaise performance énergétique de l'immeuble. Ce risque a été, de fait, écarté de la responsabilité décennale par le législateur dans sa rédaction de l'article L. 111-13-1 du Code de la construction et de l'habitation, qui subordonne le dommage à « une surconsommation énergétique ne permettant l'utilisation de l'ouvrage qu'à un coût exorbitant ». En pratique, il ne semble pas que l'outil informatique puisse être source d'une contre-performance aussi excessive du bâtiment en dehors d'autres facteurs externes. D'ailleurs, à ce jour, aucune compagnie d'assurance n'accepte de couvrir le contrat de performance énergétique.
– L'impact du BIM sur les obligations d'assurance des acteurs traditionnels de la construction. – Pour les acteurs traditionnels de la construction, reconnus comme constructeurs au sens du Code civil, l'utilisation du BIM ne semble pas devoir être assimilée à la situation où l'assuré exercerait une activité qui ne relèverait pas du secteur d'activité déclaré au sens qu'en retient la jurisprudence
V. Cass. 1re civ., 29 avr. 1997, no 95-10.187 : Bull. civ. 1997, I, no 131 ; D. 1997, 121 ; adde J. Roussel et S. Becqué-Ickowicz, op. cit., p. 240 et s.
. Le BIM resterait à ce titre un simple outil dont l'information ne serait pas obligatoire pour l'assuré. Il semble toutefois prudent que les constructeurs le mentionnent dans les contrats pour éviter toute difficulté à ce sujet, surtout s'ils endossent des missions de BIM Management.
La Mutuelle des architectes français, assureur historique de la profession d'architecte, a intégré dans ses polices d'assurance les missions BIM de ses sociétaires, des contrats qui fixent les définitions, les rôles, les responsabilités, avec des outils pour formaliser cette nouvelle acception du risque. Les architectes devront vérifier l'adéquation de leurs contrats avec ces dispositions.
Afin de couvrir les risques du numérique pendant la phase de construction, la Société mutuelle d'assurances du bâtiment et travaux publics (SMABTP) a lancé en mai 2018 le contrat « tous risques chantier cyber » (TRC cyber), qui couvre le risque de poursuite du chantier après une cyberattaque, en prenant en charge ses conséquences financières, y compris les pertes d'exploitation.
– Les assurances du
BIM Management
. – Dans l'hypothèse où le BIM Manager exerce une activité permettant de le qualifier de constructeur, il doit être titulaire d'une assurance permettant de couvrir sa responsabilité décennale. En revanche, dans l'hypothèse où le BIM Manager n'exerce pas d'activité permettant de le qualifier de constructeur, il est alors responsable sur le fondement du droit commun de la responsabilité. Certains auteurs recommandent, par défaut, d'intégrer cette garantie systématiquement dans les contrats d'assurance des BIM Managers
V. A.-C. Navarro, BIM, objets connectés… les défis de l'assurance pour demain : Opérations Immobilières juin 2019, no 116, 36832167.
. Le support informatique de la prestation pose également la question d'une assurance spécifique couvrant la responsabilité du BIM Manager au titre de ses activités de prestations de services informatiques. Compte tenu du caractère relativement récent du BIM, cette question reste ouverte.
– La pratique des assureurs et
BIM Managers
. – Il semble que les assureurs ont dans un premier temps eu un positionnement prudentiel, en imposant aux spécialistes du BIM Management de souscrire une assurance dommages ouvrage et responsabilité civile. Aujourd'hui, avec plus de recul, des assureurs acceptent de moduler l'assurance professionnelle des BIM Manager, en excluant les assurances décennales, dès lors que le BIM Manager s'interdit toute intervention à l'acte de construire et d'effectuer des activités de synthèse et de détection des erreurs. Il est primordial que les contrats passés avec le maître d'ouvrage et les autres contrats tiennent compte de cette exclusion. Faute de respecter cet engagement, le BIM Manager qui participerait activement à l'acte de construire, en offrant spontanément des services de synthèse ou des conseils sur les techniques constructives, engagerait sa responsabilité pénale et ne serait pas assuré pour les éventuels dommages dont il serait l'auteur. Par ailleurs, il semble que la maîtrise d'œuvre, qui assistera le maître d'ouvrage dans la conclusion des contrats, aura le devoir d'alerter le maître d'ouvrage sur l'absence d'assurance décennale du BIM Manager.