Les actifs numériques à l'épreuve des régimes matrimoniaux

Les actifs numériques à l'épreuve des régimes matrimoniaux

– Les difficultés de qualification des actifs numériques : biens personnels, biens communs ou biens propres ? – Tant que les cryptomonnaies ou les tokens ne sont pas échangés contre un bien ou un service ou ne sont pas convertis en une monnaie ayant un cours légal, doit-on considérer que ces actifs appartiennent à leur seul titulaire ou également à son conjoint ? Peut-on considérer qu'un blog ou un compte de réseaux sociaux tenu par l'un seulement des conjoints appartient aux deux époux ?
Au cours du mariage, ces questions suscitent des interrogations en présence d'un régime matrimonial communautaire.
Dans les autres régimes matrimoniaux, les actifs numériques resteraient des biens personnels de l'époux titulaire et ne soulèveraient donc aucune espèce de difficulté.
– Une assimilation des actifs numériques au régime des stock-options ? – Un parallèle pourrait tout d'abord être effectué avec l'analyse faite en son temps pour les stock-options dès lors que ces options de souscription ou d'achat d'actions n'ont pas été exercées à la date de la dissolution de la communauté.
La qualification des stock-options au regard du régime matrimonial légal a fait l'objet d'une vive controverse en doctrine, opposant « patrimonialistes » et « commercialistes » V. not. J. Casey, Les stock-options et le régime de communauté : JCP N 2006, 1213. – A. Couret, Le sort des stock-options dans les liquidations de communauté ou de succession : approche critique d'idées nouvelles : JCP N 1999, no 12, p. 525. – A. Depondt, Le sort des stock-options en cas de divorce : Rev. Lamy dr. civ. 2006/30, no 2199. – G. Hublot et H. Lécuyer, Liquidation des stock-options en cas de divorce : JCP N 2009, 1002. – C. Larrivière et J.-F. Desbuquois, Les stock-options lors d'un divorce : AJF 2013, p. 111. – C. Laye-Baffert et M. Dadoit, Le sort des stock-options dans les partages de communauté et les transmissions familiales : Defrénois 2002, art. 37581. – J.-Ph. Mabru, Stock-options et liquidation de communauté : arguments pour une controverse : Dr. et patrimoine 1999, no 67, p. 33. – E. Naudin, Les « stock-options » à la dissolution du régime matrimonial : AJF 2002, no 8/9, p. 290. – F. Sauvage, Communauté, succession et « stock-options » : Dr. et patrimoine 1998, no 65, p. 38. – V. Voisin, Controverses sur les contingences du régime légal des stock-options : Dr. et patrimoine 2005, no 135, p. 53. .
Rappelons que pour les premiers, ces options étaient des biens de communauté, que ce soit en nature (acquêts issus de l'industrie des époux) ou en valeur (distinction du titre qui est propre et de la finance qui est commune).
Alors que pour les seconds, les options de souscription et d'achat d'actions ne pouvaient échapper à la qualification de biens propres en raison de leur nature, ne serait-ce que parce qu'elles constituent des créances incessibles.
Par un arrêt de principe, la Cour de cassation a tranché en adhérant à la qualification « commercialiste » de bien propre par nature Cass. 1re civ., 9 juill. 2014, no 13-15.948 : JurisData no 2014-016002 ; D. 2014, p. 1544 et 2434, obs. J.-C. Hallouin, E. Lamazerolles et A. Rabreau ; LPA 22 oct. 2014, p. 7, obs. J.-G. Mahinga ; Dr. famille 2014, comm. 145, obs. B. Beignier ; RTD civ. 2014, p. 933, note B. Vareille ; AJF 2014, p. 508, obs. P. Hilt. – Adde : E. Naudin Stock-options et divorce des époux : JCP N 2014, p. 1318. – P. Simler, Les stock-options saisies par le droit patrimonial de la famille : Defrénois 2017, p. 446. , sans doute parce que le droit d'option est incessible par application de l'article L. 225-183 du Code de commerce, mais aussi parce que l'attribution des droits a été faite à l'époux en reconnaissance de ses qualités personnelles mises au service de la société.
Ainsi, lors de la dissolution de la communauté par divorce, l'époux titulaire des options non encore exercées les reprend comme n'importe quel bien qui ne serait pas entré en communauté.
Dans ce même arrêt, il est précisé que « les actions acquises par l'exercice de ces droits entrent dans la communauté lorsque l'option est levée durant le mariage ».
Toutefois à la différence des stock-options qui sont attribuées à titre gratuit À noter toutefois que les attributions de stock-options sont gratuites mais rarement sans contrepartie, car les plans d'action prévoient généralement des clauses d'objectifs à réaliser pour se voir attribuer des stock-options. , les cryptomonnaies ou les tokens sont acquis à titre onéreux. Et rappelons que tout bien acquis pendant le mariage au moyen de deniers communs, ou propres sans déclaration d'emploi, est un acquêt tombant en communauté. L'assimilation des actifs numériques au régime des stock-options pour ce qui concerne leur qualification est donc discutable. La présomption de communauté de l'article 1402 du Code civil a vocation à concerner tous les biens des époux, y compris les actifs numériques qui, par principe, n'échappent pas à cette présomption. Dans un régime de communauté, les actifs numériques sont donc censés être des acquêts de communauté, sauf preuve contraire faite par l'un des conjoints, ou ses héritiers, ou les tiers, du caractère propre de tel ou tel bien B. Beignier et S. Torricelli-Chrifi, Régimes matrimoniaux, Pacs, concubinage, LMD, 2018, nos 70 et s., p. 102. – R. Cabrillac, Les régimes matrimoniaux, Montchrestien, 11e éd. 2019, no 144, p. 121. – A. Colomer, Droit civil, Régimes matrimoniaux, Litec, 12e éd. 2004, no 405. – G. Cornu, Les régimes matrimoniaux, PUF, coll. « Thémis », 9e éd. 1997, no 44, p. 278. – S. David et A. Jault, Liquidation des régimes matrimoniaux, Dalloz, 4e éd. 2018, no 111-71. – I. Dauriac, Les régimes matrimoniaux et le Pacs, LGDJ, 5e éd. 2017, nos 384 et s. – J. Flour et G. Champenois, Les régimes matrimoniaux, Armand Colin, 2e éd. 2001, nos 328 et s., p. 320. – M. Grimaldi, Droit patrimonial de la famille, ss dir. F. Bicheron, Dalloz Action, 2018-2019, chap. 134, p. 150. – G. Goubeaux et P. Voirin, Droit civil, t. 2, Régimes matrimoniaux, successions et libéralités, LGDJ, 30e éd. 2018, nos 123 et s., p. 68. – A. Lamboley et M.-H. Laurens Lamboley, Droit des régimes matrimoniaux, Litec, 7e éd., 2015, no 84. – Ph. Malaurie et L. Aynès, Les régimes matrimoniaux, LGDJ, 6e éd., 2017, nos 377 à 385, p. 177. – S. Piedelièvre, Les régimes matrimoniaux, Bruylant, 3e éd., 2020, no 137, p. 176. – Rapport du 106e Congrès des notaires de France, Bordeaux, 2010, Couple et patrimoine, spéc. p. 319. – F. Terré et Ph. Simler, Les régimes matrimoniaux, Dalloz, 8e éd., 2019, no 283, p. 226. .
– Une assimilation des actifs numériques à des biens à caractère personnel ? – Le principe selon lequel les actifs numériques acquis à titre onéreux pendant le mariage sont communs en vertu de la présomption posée par l'article 1402 du Code civil fait toutefois l'objet d'exceptions prévues par la loi et notamment par les articles 1404, 1405, alinéa 2, 1406, 1407 et 1408 du Code civil Il existe également d'autres exceptions telles que les salaires différés, les œuvres de l'esprit, le capital d'assurance au cas de décès, etc. .
Parmi ces exceptions, il convient de relever que l'article 1404, alinéa 1 du Code civil prévoit que « forment des propres par leur nature, (…) tous les biens qui ont un caractère personnel et tous les droits exclusivement attachés à la personne ».
En présence d'actifs numériques, ne doit-on pas ainsi opérer une distinction entre ceux dominés par un caractère personnel très fort qui formeraient des propres par nature et ceux qui ne le sont pas qui dépendraient de la communauté ?
À titre d'exemple, les cryptomonnaies, les tokens, les applications, les logiciels n'ont pas un caractère personnel ; ils ne sont pas attachés à la personne d'un époux. Au regard de la composition de la communauté, ces actifs numériques acquis à titre onéreux, par les époux ensemble, ou par l'un ou l'autre, au moyen des revenus provenant de leur industrie personnelle, ou des économies faites des fruits et revenus de leurs biens propres, sont donc des biens communs.
En revanche, pour d'autres actifs numériques ou « choses numériques » V. supra, no . , tels qu'un site web ou un compte Facebook, il n'est pas possible de faire complètement abstraction du rattachement particulièrement étroit que présentent ces biens avec la personne même de leur titulaire.
– Une distinction possible du titre et de la finance ? – Pour d'autres actifs numériques qui ont à la fois une valeur patrimoniale et un caractère intuitu personae très fort avec l'un des époux, on pourrait envisager l'application de la distinction traditionnelle du titre et de la finance qui entraînerait une qualification mixte de bien commun en valeur seulement.
Nous savons qu'en matière d'offices ministériels, la jurisprudence a très vite procédé à une distinction entre, d'une part, la valeur patrimoniale attachée à l'office (qualifiée « finance ») et, d'autre part, l'exercice même des fonctions professionnelles (qualifié « titre »). La « finance » entre en communauté et a donc vocation à faire partie de la masse partageable, mais non le « titre », qui demeure un élément du patrimoine propre de l'époux concerné Cass. civ., 4 janv. 1853 : DP 1853, 1, p. 73. – Cass. req., 6 janv. 1880 : DP 1880, 1, p. 461. – Cass. 1re civ., 21 oct. 1959 : JCP 1959, II, 11353. – Cass. 1re civ., 8 janv. 1980 : Bull. civ. 1980, I, no 14 ; JCP N 1980, prat. 7771 ; Defrénois 1980, art. 32503-118, p. 1555, obs. G. Champenois. – Cass. 1re civ., 8 déc. 1987, no 86-12.426 : JurisData no 1987-799040 ; JCP G 1989, II, 21336, Ph. Simler ; Defrénois 1988, art. 34229, no 533, obs. G. Champenois ; D. 1989, p. 61, note Ph. Malaurie. .
Par la suite, cette distinction s'est opérée pour diverses situations : une clientèle civile d'un époux exerçant une profession libérale Cass. 1re civ., 12 janv. 1994 : JCP N 1994, II, p. 184 et p. 329, note J.-F. Pillebout ; JCP N 1995, II, p. 123, chron. Ph. Simler. , un exploitant de taxi Cass. 1re civ., 16 avr. 2008 : JurisData no 2008-043632 ; JCP N 2008, no 18, act. 429. , les allocations et secours bénéficiant aux rapatriés d'Algérie Cass. 1re civ., 9 juin 2010, no 08-16.528 : JurisData no 2010-008663 ; Dr. famille 2010, no 9, comm. 131, note B. Beignier ; JCP N 2011, no 1, 1001-14, note Ph. Simler. .
Ainsi, en présence d'un actif numérique ayant un lien étroit avec son titulaire et qui a malgré tout une valeur patrimoniale, cette qualification pourrait également être retenue. Ce serait par exemple le cas du compte Instagram d'une influenceuse très suivie dès lors que l'on peut penser que ce compte Instagram a une valeur patrimoniale. Les contrats passés avec cette influenceuse ont un caractère intuitu personae et seule cette dernière peut poster des photos ou alimenter son compte Instagram. Autrement dit, la titulaire du compte exerce le « titre » d'influenceuse. En revanche, la « finance » de ce compte liée aux nombreux abonnés qui le suivent serait commune et le compte aurait alors vocation à figurer à l'actif de communauté.
– Quelle place pour l'actif numérique également instrument de travail de l'un des époux ? – S'agissant d'actifs numériques nécessaires à l'exercice de la profession de l'un des époux, il faut toutefois composer avec les dispositions du second alinéa de l'article 1404 du Code civil qui prévoit que « forment aussi des propres par leur nature, mais sauf récompense s'il y a lieu, les instruments de travail nécessaires à la profession de l'un des époux, à moins qu'ils ne soient l'accessoire d'un fonds de commerce ou d'une exploitation faisant partie de la communauté » (C. civ., art. 1404">Lien).
La règle est destinée notamment à éviter toute gêne professionnelle à l'un des époux, au moment de la dissolution de la communauté.
Ainsi un actif numérique composé de documents numériques (logiciels) ou de documents multimédia (images, sons, graphiques et vidéo) qui sont soit en circulation soit stockés sur des supports numériques (ordinateurs, disques durs) peut être un instrument de travail pour l'un des époux. L'actif numérique renvoie plutôt ici au « support numérique », l'« outil numérique » qui permet l'exercice de la profession et moins à la matérialité de ce qu'il contient.
Ce genre d'actif numérique restera donc propre à l'époux qui les exploite pour ses besoins professionnels. Pour reprendre l'exemple précédent du compte Instagram d'une influenceuse très suivie, on pourrait se demander si ce compte ne constituerait pas un instrument de travail au sens du second alinéa de l'article 1404 du Code civil si cette dernière en fait son activité professionnelle.
Cette qualification n'empêchera pas toutefois d'appliquer les règles afférentes aux récompenses et à la théorie de l'accessoire.
En matière d'instruments de travail, les juges ont affirmé le droit à récompense spécifié par l'article 1404 du Code civil. Quand bien même leur acquisition a été faite au moyen de deniers communs, l'époux restera propriétaire en propre des instruments de travail mais devra une récompense à la communauté Cass. 1re civ., 14 nov. 2007 : JurisData no 2007-041364 ; JCP N 2007, no 48, act. 776. .
De la même manière, un époux qui s'est porté acquéreur, durant la communauté, de son instrument de travail/actif numérique, comme par exemple un outil numérique spécifique à sa profession, devra récompense comme pour n'importe quel autre instrument de travail.
À l'inverse, un logiciel ne peut être que l'accessoire d'un fonds de commerce faisant partie de la communauté. Même s'il est un instrument de travail, le lien d'accessoire à principal l'emporte sur l'usage professionnel. L'actif numérique sera donc un bien commun.

Quel régime juridique pour le ?

Si le blog peut être qualifié d'œuvre de l'esprit, le régime juridique de la propriété intellectuelle trouvera alors à s'appliquer.
Dans ce cas, peu importe les régimes matrimoniaux ; à peine de nullité de toutes clauses contraires portées au contrat de mariage, le droit de (…) fixer les conditions de son exploitation (…) reste propre à l'époux auteur ou à celui des époux à qui de tels droits ont été transmis. Ce droit ne peut être apporté en dot, ni acquis par la communauté ou par une société d'acquêts (CPI, art. L. 121-9">Lien).
Le droit moral, « droit personnellissime » selon la formule de Gérard Cornu, reste « propre » à l'auteur quel que soit le régime choisi, y compris la communauté universelle avec clause d'attribution intégrale au dernier vivant.
Cependant les produits pécuniaires provenant de l'exploitation d'une œuvre de l'esprit ou de la cession totale ou partielle du droit d'exploitation sont soumis au droit commun des régimes matrimoniaux, uniquement lorsqu'ils ont été acquis pendant le mariage ; il en est de même des économies réalisées de ces chefs (CPI, art. L. 121-9, al. 2).
– Application des règles de gestion et de pouvoirs aux actifs numériques en fonction de leur nature propre ou commune. – Une fois le caractère propre ou commun des actifs déterminé, en fonction des différentes spécificités énoncées ci-dessus, il conviendra d'appliquer les règles légales en la matière.
En présence de biens communs, le principe est celui du pouvoir concurrent de gestion. Chacun des époux ayant seul le pouvoir d'accomplir tous actes d'administration et de disposition, sans distinction entre biens communs ordinaires et réservés ou selon qu'ils sont tombés en communauté du chef de l'un ou de l'autre (C. civ., art. 1421, al. 1er ">Lien).
Le législateur a émis deux réserves à la gestion concurrente.
Tout d'abord, afin de préserver l'autonomie professionnelle, l'époux qui exerce une profession séparée de celle de son conjoint a seul le pouvoir d'accomplir les actes d'administration et de disposition nécessaires à celle-ci (gestion exclusive ; C. civ., art. 1421, al. 2">Lien).
Ensuite, un époux ne peut disposer à titre gratuit entre vifs de biens communs quelconques et ne peut disposer à titre onéreux des biens communs considérés comme les plus importants, y compris ceux à usage professionnel, sans le consentement de son conjoint (gestion conjointe ; C. civ., art. 1422">Lien).
En présence de biens propres, l'époux propriétaire se voit reconnaître par le législateur un pouvoir indépendant (C. civ., art. 1428">Lien).
Toutefois, il faudra également ne pas omettre les règles du régime primaire qui s'appliquent à tous les époux.
Rappelons qu'en présumant le pouvoir de chaque époux de librement gérer les fonds, titres ou meubles qu'il détient, les articles 221 et 222 du Code civil (C. civ., art. 221">Lien et 222">Lien) dispensent celui-ci d'établir la réalité de ses pouvoirs comme ils dispensent les tiers de toute vérification. Dès lors, chaque époux peut exercer sans entraves les pouvoirs que lui confère son régime matrimonial, mais aussi, paradoxalement, les pouvoirs dont son conjoint est investi.
– Difficultés pratiques liées à l'application des règles de gestion et de pouvoirs aux actifs numériques. – L'application de ces règles n'est pas sans soulever certaines difficultés s'agissant de la gestion d'actifs numériques. Peut-on en effet considérer que les époux exercent réellement des pouvoirs concurrents lorsque les codes de connexion à des comptes bancaires communs ne sont connus que de l'un des époux seulement ? Peut-on parler de gestion concurrente d'actifs numériques lorsque l'un des époux est frappé d'illectronisme Sur la notion d'illectronisme, V. supra, nos et s. ? Dans l'univers numérique, l'application des règles de gestion et de pouvoirs prévues par le Code civil suppose comme forme de « prérequis » que chacun des époux ait les connaissances et les moyens d'accéder à internet. Cette difficulté pratique liée à l'accès au numérique est particulièrement manifeste s'agissant de l'accès aux comptes bancaires d'une banque en ligne. Elle ne fait que renforcer la possibilité pour l'un des époux de disposer d'un pouvoir de gestion exclusive sur des fonds dont il n'a peut-être pas la propriété exclusive, et par là même d'ôter tout pouvoir de gestion de l'autre époux sur ledit compte en vertu de l'application du principe de l'autonomie bancaire J.-B. Dassy et M.-G. Migeon-Cros, Couples, patrimoine : les défis de la vie à deux. Le compte bancaire joint et les différents modes de conjugalité. Quels pouvoirs ? Quelle propriété ? Quels engagements ? : JCP N 2010, 1200. .
– Aménagements judiciaires de pouvoirs et actifs numériques. – Cette difficulté pratique se retrouve également dans l'exécution des mesures judiciaires consistant soit en l'interdiction pour l'un des époux d'accomplir certains actes, soit en l'autorisation pour le conjoint d'effectuer les actes nécessaires aux intérêts de la famille (C. civ., art. 217 et 219, al. 1 ; C. civ., art. 220-1 à 220-3). Ces mesures judiciaires sont justifiées par le comportement préjudiciable d'un époux ou encore l'impossibilité pour ce dernier de manifester sa volonté Sous un régime de communauté, le dessaisissement des pouvoirs de l'un des époux de manière durable peut être obtenu si ce dernier se trouve hors d'état de manifester sa volonté, ou si sa gestion atteste l'inaptitude ou la fraude (C. civ., art. 1426 et 1429). Pour une étude détaillée, V. JCl. Notarial Répertoire, Vo Communauté légale – Administration des biens communs. – Modifications dans la répartition ordinaire des pouvoirs, fasc. 26, par V. Brémond. . Comment alors mettre en œuvre ces mesures judiciaires et les rendre efficaces lorsque la gestion d'actifs numériques tels que les cryptomonnaies se fait sur une plateforme exchange dont les codes d'accès ne sont connus que de l'époux concerné ? Et quand bien même ces mesures judiciaires seraient opposables aux plateformes hébergeant des actifs numériques, leur exécution concrète demeure délicate compte tenu de l'absence d'interlocuteur et de guichets « physiques ».