La définition des besoins du maître d'ouvrage public en BIM

La définition des besoins du maître d'ouvrage public en BIM

La définition de la programmation par le maître d'ouvrage public est particulièrement importante dans le domaine de la construction et précède nécessairement l'ouverture d'une procédure de mise en concurrence. Il n'est en effet pas souhaitable de permettre aux acteurs publics d'ouvrir à la concurrence des marchés en blanc sous peine de rendre la procédure de mise en concurrence totalement arbitraire, faute de cahier des charges précis. La loi MOP impose notamment que le maître d'ouvrage public soit à l'origine de la programmation, le maître d'œuvre et subséquemment les entreprises du chantier ne faisant qu'apporter une réponse à un besoin et une stratégie clairement exprimée. Cet impératif d'impartialité et la charge de la programmation qui pèse sur les acteurs publics les contraignent dans leur capacité à innover et à faire innover leurs prestataires À contre-courant, la ville de Paris a innové avec l'appel à projets urbains innovants « Réinventer Paris » – lancé en mai 2017 par la ville de Paris et sept partenaires (Efidis, Paris Habitat, RATP, Renault, la RIVP, SNCF et Gares & connexions), qui implique des fonciers publics, mais destinés à être vendus et portés par des maîtres d'ouvrage privés, donc sans commande publique de travaux. Ils sont donc d'inspiration publique, mais sans la contrainte des marchés publics. . Mais qu'en est-il des marchés en BIM ?
Le BIM en phase programmation n'impacte pas directement la nature et la qualité de l'objet à construire, mais la maquette constitue déjà en tant que tel un objet. Aussi un maître d'ouvrage qui souhaite commander un ouvrage à édifier en BIM doit se soucier de la construction de deux ouvrages, l'immeuble à construire et son avatar numérique en BIM. L'impact du BIM va dépendre du niveau du BIM mis en œuvre Niveaux du BIM décrits supra, nos à . . Si le BIM n'est employé qu'à un faible niveau de collaboration et/ou de détails, notamment en niveau 0/1, il n'y a pas d'impact organisationnel significatif sur la séquence. Mais à partir du niveau 2, le BIM devient une procédure collaborative et un outil de conception et de représentation de l'ouvrage qui doit être pensé dès la programmation afin que la conception puisse traiter en BIM la réponse aux besoins du maître d'ouvrage.
La maquette BIM doit être très précise dès le stade de conception, ce qui déplace une grande partie du travail en amont du projet. Le BIM impacte également la manière de construire l'ouvrage en brouillant la séquence habituelle d'intervention des acteurs et du maître d'œuvre, tout en faisant émerger de nouveaux acteurs tels que le BIM Manager.
C'est cet impact particulier du BIM qui pose le plus de difficultés au regard de la loi MOP qui délimite le rôle, la responsabilité et les missions respectives du maître de l'ouvrage et du maître d'œuvre, en définissant des périmètres et séquences de missions qui n'ont pas évolué depuis sa promulgation en 1985, malgré sa récente codification à droit constant. Avec l'emploi du BIM, il est encore plus difficile de dessiner la frontière entre ce qui relève de la programmation, ce qui pèse sur le maître d'ouvrage, et ce qui relève de la mise en musique par la maîtrise d'œuvre.
– La loi MOP, un dispositif ancien, avant informatisation. – Bien qu'aucune disposition de la loi MOP, rédigée avant adoption de l'informatique dans la construction, n'interdise l'utilisation du BIM, elle semble aujourd'hui inadaptée au BIM en distinguant de manière étanche programmation, conception et réalisation des constructions. La phase programmation repose sur le maître d'ouvrage. La phase conception pèse sur le maître d'œuvre avec la séquence obligatoire de la mission du maître d'œuvre (ESQ, APS, APD, PRO, ACT, DET, AOR), qui se veut progressive dans la définition de l'objet et des prestations, mais qui ne correspond pas à l'enchaînement des tâches dans un projet en BIM. Ainsi, l'emploi du BIM bouleverse une séquence légale dont le maître d'ouvrage public et le maître d'œuvre ne peuvent pas sortir en confiant une mission particulière, même optionnelle, car elle ne figure pas dans le Code de la commande publique qui est exhaustif. Faute de texte particulier, le recours au BIM ne justifie pas à lui seul une rémunération supplémentaire. Aussi le maître d'œuvre se trouve-t-il dans la situation de ne pas pouvoir être payé spécifiquement pour cette mission, qui peut toutefois être incluse dans sa mission globale. Cette situation explique en partie la réticence des architectes à adopter la technologie BIM sans une refonte des modalités de fixation et de facturation de leur mission pour les contrats soumis à la loi MOP.
– Le problème du format des livrables en BIM. – Le support même du BIM, qui est une base de données informatique représentée par une maquette, ne correspond pas du tout aux livrables obligatoires prévus par l'annexe 20 A. 22 mars 2019, ann. 20, précisant les modalités techniques d'exécution des éléments de mission de maîtrise d'œuvre confiés par des maîtres d'ouvrage publics à des prestataires de droit privé. du Code de la commande publique. À titre d'exemple, l'annexe 20 prévoit des « plans des niveaux significatifs établis au 1/500 » ou encore « des plans établis au 1/200, avec certains détails significatifs au 1/100 », ce qui semble avoir peu de sens par rapport au bénéfice d'une représentation complète en trois dimensions. La codification de la loi MOP n'a pas donné lieu à une évolution de la matière, et il semble impératif d'intégrer la possibilité d'un rendu exclusivement numérique et d'une maquette numérique BIM pour éviter, à terme, de devoir doubler les livrables BIM d'un rendu papier pour les opérations de constructions publiques.
– La séparation entre maîtrise d'œuvre et entreprise. – La séparation stricte entre la maîtrise d'œuvre et les entreprises imposée par la loi MOP rend encore plus difficile la collaboration en amont autour d'une même maquette CCP, art. L. 2431-1 : « La mission de maîtrise d'œuvre est distincte de celle confiée aux opérateurs économiques chargés des travaux, sous réserve des dispositions relatives aux marchés globaux du chapitre Ier du titre VII du livre Ier ». . À ce titre, toute intervention de l'entreprise en phase de conception est formellement prohibée. Ce qui fait peser sur le maître d'ouvrage la responsabilité d'organiser la transition entre la maquette BIM élaborée en phase de conception à celle élaborée en phase de réalisation par les entreprises, sauf à imposer cette mission à la maîtrise d'œuvre avec le problème de la rigidité des missions et de la facturation de la loi MOP. En l'état actuel, les entreprises devront très souvent effectuer un travail de ressaisie de leur propre maquette BIM construction/réalisation, sauf à avoir une parfaite confiance dans la maquette de conception, ce qui semble ne pas être le cas actuellement.

Témoignage : Quel est l'intérêt du BIM dans la transition numérique du bâtiment ?

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Témoignages d'intervenants de la filière de la construction sur les enjeux et intérêts du BIM dans le bâtiment.
– Le cumul des missions conception-réalisation dans le cadre du BIM. – En préambule, il faut rappeler que l'emploi d'un marché de conception-réalisation est un régime d'exception qui n'a pas pour effet de modifier la charge et la responsabilité de la programmation, qui pèsent toujours sur la maîtrise d'ouvrage et dont elle ne peut se défaire. Ainsi le marché de conception-réalisation ne permet pas une association en amont du projet entre le maître d'ouvrage, le maître d'œuvre et des entreprises ; cette collaboration n'étant possible qu'en matière de marché privé de travaux. L'intérêt du recours à un contrat global de conception-réalisation est certain pour favoriser une approche homogène de la conception-réalisation des travaux.
En dehors des contrats sectoriels et des ouvrages d'infrastructures visés supra V. supra, no . , le maître d'ouvrage public ne peut recourir au marché global « que si des motifs d'ordre technique ou un engagement contractuel portant sur l'amélioration de l'efficacité énergétique ou la construction d'un bâtiment neuf dépassant la réglementation thermique en vigueur rendent nécessaire l'association de l'entrepreneur aux études de l'ouvrage ». Un usage erroné du contrat marché de conception-réalisation peut entraîner la nullité du contrat CAA Lyon, 29 mai 2008, no 06LY01546, Ville de Lyon : Contrats-Marchés publ. 2008, comm. 185, note G. Eckert. . Le BIM pourrait-il être un motif de recours au marché global ?
– Recours au marché global, critère de technicité en BIM. – Le juge administratif fait une interprétation très stricte des critères d'application du marché global, qui est un contrat d'exception. Concernant le critère de technicité, ne peuvent pas faire l'objet d'un marché de conception-réalisation :
  • la réalisation d'un complexe multisport qui, malgré une superficie très importante, « ne présente toutefois pas des dimensions exceptionnelles pouvant être regardées comme constituant un motif d'ordre technique au sens des dispositions du Code des marchés publics » ;
  • la réalisation d'un centre de secours hospitalier « dont les spécifications ne diffèrent en rien des contraintes auxquelles est assujetti tout bâtiment de même importance ».
Le BIM n'est pas en lui-même le témoignage d'une technicité particulière d'un projet de construction. Même si le BIM en tant qu'outil présente une certaine technicité, il ne préjuge pas d'un besoin technique sur le projet de construction justifiant une approche globale de la conception-réalisation.
– Recours au marché global, critère de performance énergétique en BIM. – Concernant le critère de la performance énergétique, le juge exige également une forme de spécificité particulière du projet au-delà même de l'ambition énergétique du projet. Ainsi la cour administrative d'appel de Nantes, aux termes de trois arrêts du 9 novembre 2018, a annulé trois marchés de conception-réalisation au motif notamment que l'objectif de performance énergétique supérieure de 10 % à la norme thermique RT 2012 invoqué par le département n'était pas, « au regard de la nature de la construction envisagée comme du procédé constructif retenu et des matériaux dont l'emploi était prévu », « une contrainte ou une complexité telle qu'elle exigeait d'associer nécessairement les opérateurs de maîtrise d'œuvre et les entreprises de construction dès le stade de l'établissement des études ».
Même si cette jurisprudence a été rendue avant la loi Elan L. no 2018-1021, 23 nov. 2018, portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, JORF no 0272, 24 nov. 2018. V. infra, no . , il semble que le juge recherche toujours si l'ouvrage justifie objectivement une coopération des entreprises dès le stade des études. Le BIM ne participe pas directement en phase de construction à la réglementation thermique et ne semble pas à ce titre justifier en lui-même le recours au marché global. Toutefois, s'il accompagne un projet avec des procédés constructifs novateurs reposant sur le BIM exploitation, comme par exemple des bâtiments à énergie positive (parfois abrégé en « Bepos ») La spécificité de tels ouvrages a pu justifier le recours à la procédure de dialogue compétitif dans le cas d'une cité municipale (cf. CAA Bordeaux, 15 sept. 2015, relatée infra, no ). , il nous semble que le maître d'ouvrage pourrait avoir un intérêt à passer un contrat groupé avec la maîtrise d'œuvre et des entreprises spécialisées.

LE BIM n'est pas un critère de recours au marché global

En l'état actuel de la jurisprudence, il nous semble prudent d'affirmer que l'utilisation du BIM dans un projet ne répond, à lui seul, à aucun critère autorisant le maître d'ouvrage public à recourir systématiquement au marché de conception-réalisation.
– La loi MOP, un frein au développement du BIM ? – Le maître d'ouvrage privé est libre de définir sa démarche BIM comme il l'entend, avec le séquençage, la répartition et la rémunération des tâches qui lui sembleront à propos, sans aucune contrainte réglementaire. Le maître d'ouvrage public est soumis à la loi MOP qui lui impose un formalisme particulier dans la conclusion, la conduite et le périmètre des marchés qu'il peut passer avec ses conseils, la maîtrise d'œuvre et les entreprises.
Compte tenu de la rigidité actuelle de la loi MOP et de l'incapacité pour le maître d'ouvrage d'associer la maîtrise d'œuvre à la programmation, ou de mieux associer la maîtrise d'œuvre aux entreprises, des auteurs appellent à une évolution de la loi MOP P. Devillers, in Contrats-Marchés publ. janv. 2019, no 1, dossier 10 : « Critiquée aussi en raison de sa rigidité, inadaptée à des petits projets telles la mise en accessibilité ou l'amélioration de la performance énergétique. En raison encore du bouleversement des pratiques induit par la nouvelle méthodologie du « Building Information Model » (BIM), méthode de travail collaborative de modélisation électronique des données du bâtiment, susceptible d'être exigée des pouvoirs adjudicateurs pour les marchés publics de travaux (Dir. 2014/24/UE, art. 22.4) ». afin de tenir compte de l'évolution de la filière et du BIM. Dans certains cas, des marchés de conception-réalisation peuvent être envisagés pour faire collaborer en amont maître d'œuvre et entreprise.
La loi MOP fait peser sur la maîtrise d'ouvrage public la responsabilité de l'initiation de la démarche BIM, le plus souvent avec un maître d'ouvrage délégué et/ou un assistant au maître d'ouvrage ayant la compétence en matière de BIM, de manière indépendante de la maîtrise d'œuvre et des entreprises. Il serait souhaitable d'initier une réflexion sur une atténuation circonstanciée de la délimitation entre ces trois phases de programmation/ conception/ réalisation et leurs acteurs respectifs afin de permettre un emploi collaboratif et plus efficient du BIM. L'incitation au BIM pourrait passer par un assouplissement ciblé des règles de la loi MOP et des dérogations ponctuelles pour permettre une intervention plus en amont du maître d'œuvre et de l'entreprise, en prévoyant par exemple qu'un projet en BIM niveau 2 V. supra, no . avec un objectif précis de BIM exploitation bénéficie automatiquement de dérogations, comme l'accès au marché de conception-réalisation avec des entreprises spécialisées.
Il serait également souhaitable de prévoir une nouvelle mission de BIM Management / maquette BIM dans le dispositif de la loi MOP, qui pourrait être une mission optionnelle pour la maîtrise d'œuvre ou les entreprises, afin d'y associer une rémunération et d'encadrer en annexe du Code de la commande publique une liste de livrables adaptés aux opérations en BIM.

Rappel des principales dispositions de la loi MOP intéressant le BIM

– Quels sont les contrats entrant dans le champ d'application de la loi MOP ?
1) Quels maîtres d'ouvrage ? Article L. 2411-1 du Code de la commande publique : les contrats conclus par l'État et ses établissements publics, les collectivités territoriales, leurs établissements publics et autres EPCI, ou encore les organismes publics et privés d'HLM.
2) Quels travaux ? Article L. 2411-1 du Code de la commande publique : toutes opérations de construction neuve ou de réhabilitation d'un ouvrage qui « est le résultat d'un ensemble de travaux de bâtiment ou de génie civil destiné à remplir par lui-même une fonction économique ou technique ». Des exceptions sont prévues concernant notamment les infrastructures situées dans le périmètre d'une zone d'activité concertée (ZAC) ou d'une opération d'intérêt national (OIN). Les travaux de maintenance ou d'entretien ou portant uniquement sur un équipement technique destiné à l'exploitation d'un bâtiment sont également exclus.
Le champ d'application de la loi MOP est plus large que celui des marchés publics, en soumettant à la loi l'État et ses établissements publics, sans autre précision, en ce compris les établissements publics nationaux qui présentent un caractère industriel et commercial qui sont exclus du champ d'application des dispositions relatives à la passation des marchés publics (CCP, art. L. 1211-1).
– Présentation du régime de la loi MOP. – La loi MOP définit les attributions du maître de l'ouvrage public, sa responsabilité propre et les fonctions qu'il doit assumer personnellement Loi MOP, art. 2 ; CCP, art. L. 2421-1. , sauf à les déléguer à un mandataire dans certaines limites et conditions. Le maître d'ouvrage public a ainsi la responsabilité de s'assurer lui-même de la faisabilité et de l'opportunité de l'opération envisagée, de sa localisation et de sa programmation, dans un budget prévisionnel et selon des modes de financement donnés. Le maître d'ouvrage assume ainsi « la direction technique des actions de construction » CE, 17 juin 2009, no 297509, SAEMN Bibracte : JurisData no 2009-075623. et un manquement à ses obligations est susceptible d'engager sa responsabilité ou d'amoindrir la responsabilité de ses prestataires en cas de contentieux (par ex., mauvais choix du lieu d'implantation de l'ouvrage CE, 25 nov. 1987, nos 50179 et 50620, Sté pour l'incinération des résidus de l'agglomération caennaise. , ou encore l'introduction d'indications erronées dans les documents de la consultation CAA Nantes, 7 févr. 1996, no 95NT00163. ).
Le maître d'ouvrage public se trouve ainsi obligé d'assumer des missions et responsabilités en matière de travaux alors qu'il est souvent dépourvu en interne de personnes ayant les compétences, tant juridiques que techniques, nécessaires à la programmation d'un projet de construction. Pour cette raison, le maître d'ouvrage public a la faculté de se faire assister, soit par un conducteur d'opération (assistant au maître d'ouvrage [AMO]), qui est une forme de conseil qui apporte une assistance générale à caractère administratif, financier et technique (CCP, art. L. 2422-3), soit par un mandataire externe Loi MOP, art. 3, 4 et 5 ; CCP, art. L. 2422-5 et s. , qui va pouvoir exercer une partie de ses missions de maître d'ouvrage aux termes d'un mandat (maître d'ouvrage délégué [MOD]). Le mandat ne peut cependant pas porter sur les missions relatives à la définition du programme des travaux ou à la fixation de l'enveloppe financière, qui relèvent de la responsabilité obligatoire du maître d'ouvrage CAA Nancy, 27 janv. 2005, no 98NC02300, Cne d'Amnéville. . Aussi, si le maître d'ouvrage a besoin d'assistance pour définir la programmation et le chiffrage des travaux, il devra recourir aux services d'un conducteur d'opération.
Le maître d'ouvrage délégué et le conducteur d'opération ont l'interdiction de cumuler leur mission avec celle de maîtrise d'œuvre, de réalisation de travaux ou encore de contrôle technique, tant directement qu'indirectement par des « entreprises liées » Les entreprises liées sont celles couvertes par la notion « d'influence dominante ». . Le contrat de mandat et le contrat de conduite d'opération sont des marchés de prestation de services, soumis aux règles générales du Code de la commande publique et des directives communautaires quant à la passation des marchés.
Le maître d'ouvrage public, même s'il se dote d'une compétence particulière en maîtrise d'œuvre intégrée à ses équipes, doit obligatoirement recourir à un maître d'œuvre pour la réalisation des missions obligatoires de conception. Le maître d'œuvre fait l'objet du titre II de la loi MOP CCP, art. 7 à 11-1, nouveau titre III (CCP, art. L. 2430-1 et s.). . Cette dernière assigne à la maîtrise d'œuvre la mission de « permettre d'apporter une réponse architecturale, technique et économique au programme » défini par le maître d'ouvrage.
Le contrat de maîtrise d'œuvre inclut une mission de base faisant l'objet d'un contrat unique, dont le contenu est fixé réglementairement selon la catégorie d'ouvrage ou la nature de l'opération neuve ou de réhabilitation Loi MOP, art. 8 ; CCP, art. R. 2431-3. . Ainsi la mission de construction neuve inclut obligatoirement un pack de sept missions distinctes CCP, art. R. 2431-4 : « 1o Les études d'esquisse ; 2o Les études d'avant-projet ; 3o Les études de projet ; 4o L'assistance apportée au maître d'ouvrage pour la passation des marchés publics de travaux ; 5o La direction de l'exécution des marchés publics de travaux ; 6o L'assistance apportée au maître d'ouvrage lors des opérations de réception et pendant la période de garantie de parfait achèvement ; 7o L'examen de la conformité au projet des études d'exécution et leur visa lorsqu'elles ont été faites par un opérateur économique chargé des travaux et les études d'exécution lorsqu'elles sont faites par le maître d'œuvre ». (ESQ, APS, APD, PRO, ACT, DET, AOR), parmi les dix missions possibles définies par l'article R. 2431-1 du Code de la commande publique Les missions non obligatoires pour les constructions neuves sont les études préliminaires, les études de diagnostic ainsi que l'ordonnancement, le pilotage et la coordination du chantier. . Il n'est ainsi pas possible de confier à un maître d'œuvre une mission complémentaire non prévue par le Code de la commande publique.
L'article L. 2432-1 du Code de la commande publique dispose que : « Le marché public de maîtrise d'œuvre privée prévoit une rémunération forfaitaire du titulaire qui tient compte de l'étendue de la mission, de son degré de complexité et du coût prévisionnel des travaux », dont le montant est fixé selon les modalités prévues à l'article R. 2432-6 du même code. ▪▪Exceptionnellement le maître d'œuvre peut bénéficier d'honoraires supplémentaires, en cas de « modification de programme ou de modification de prestations décidées par le maître de l'ouvrage », en cas d'exécution de « missions ou prestations non prévues au marché de maîtrise d'œuvre, non décidées par le maître d'ouvrage » si « elles ont été indispensables à la réalisation de l'ouvrage selon les règles de l'art » ou encore si le maître d'œuvre a été confronté à « des sujétions imprévues présentant un caractère exceptionnel et imprévisible, dont la cause est extérieure aux parties et qui ont pour effet de bouleverser l'économie du contrat » CE, 29 sept. 2010, no 319481, Sté Babel : Rec. CE 2010, tables p. 851. .▪▪
Enfin, les contrats de maîtrise d'œuvre et des entreprises sont obligatoirement distincts et séparés. Il est ainsi prohibé de confier à un même prestataire à la fois la conception et l'exécution des travaux d'un ouvrage public.
Par exception le maître d'ouvrage public peut recourir à un marché global intégrant les missions de la maîtrise d'œuvre et des entreprises, dit « marché de conception-réalisation » en application des articles L. 2171-2 et suivants du Code de la commande publique. « Le marché de conception-réalisation est un marché de travaux permettant à l'acheteur de confier à un opérateur économique une mission portant à la fois sur l'établissement des études et l'exécution des travaux » (CCP, art. L. 2171-2, al. 1).
Le recours à ce type de contrat n'est autorisé que « si des motifs d'ordre technique ou un engagement contractuel portant sur l'amélioration de l'efficacité énergétique ou la construction d'un bâtiment neuf dépassant la réglementation thermique en vigueur rendent nécessaire l'association de l'entrepreneur aux études de l'ouvrage. Un tel marché est confié à un groupement d'opérateurs économiques. Il peut toutefois être confié à un seul opérateur économique pour les ouvrages d'infrastructures » (CCP, art. L. 2171-2, al. 2).
Le recours à ce type de contrat est également autorisé dans certains secteurs sous le qualificatif de « marchés globaux sectoriels » aux termes des articles L. 2171-4 et suivants du Code de la commande publique. Parmi les secteurs les plus notables autorisant les marchés globaux sectoriels, on peut citer certains ouvrages construits par l'État (locaux affectés à la police nationale, gendarmerie nationale, aux armées ou aux services du ministère de la Défense), les locaux affectés aux établissements publics de santé, ou encore les équipements construits par la Société du Grand Paris.
La stricte séparation entre maîtrise d'œuvre et entreprise de travaux s'oppose à ce que la mission facultative d'ordonnancement, de pilotage et de coordination des travaux (OPC) puisse être confiée à une entreprise de travaux CAA Lyon, 26 nov. 2009, no 06LY00786, Sté Pygmalion SA : JurisData no 2009-018197 ; Contrats-Marchés publ. 2010, comm. 71 et 75, obs. F. Llorens. .