Optimiser, dans la durée, les opérations portant sur le capital de l'entreprise

Optimiser, dans la durée, les opérations portant sur le capital de l'entreprise

– Restructurer le patrimoine en reportant l'imposition de la plus-value par « l'apport-cession ». – Fort du constat de la nécessité de désensibilisation aux droits sociaux, coupables du déséquilibre patrimonial évoqué, le conseil pourra être de céder ces droits sociaux pour dégager des liquidités, et avancer dans la stratégie de rééquilibrage. La cession aura dans cette hypothèse un impact fiscal important puisque la plus-value réalisée subira la fiscalité idoine.
Une opportunité a pourtant été ouverte au travers des dispositions de l'article 150-0 B ter du Code général des impôts. Son utilisation consiste à procéder à un apport de droits sociaux au profit d'une société à l'IS contrôlée par l'investisseur, laquelle peut être constituée pour les besoins de la cause, et sous toute forme sociale, y compris la société civile patrimoniale. Dans ce cadre, l'imposition de la plus-value constatée chez l'apporteur est reportée. La société bénéficiaire de l'apport constatera une éventuelle plus-value entre la valeur retenue lors de l'apport et le prix de vente.
Ce report durera, d'abord, tant que le contribuable conserve les droits sociaux émis en rémunération de l'apport et conserve son domicile en France. Il pourra être remis en cause si la société bénéficiaire de l'apport cède elle-même les droits sociaux qui lui ont été apportés. Cette dernière disposition peut sembler contradictoire avec l'objectif poursuivi, qui consiste justement à céder ces mêmes droits sociaux pour les « convertir » en liquidités.
Cependant, deux exceptions existent à ce terme du report d'imposition : si la cession intervient plus de trois ans après l'apport, ou si la société bénéficiaire de l'apport réinvestit plus de 60 % du produit de cession, dans les deux ans de celle-ci, dans une ou plusieurs activités économiques diverses.
Ainsi, la stratégie de réalisation de ce patrimoine composé de droits sociaux pourra être efficace totalement en cas de cession postérieure à trois années, ou à hauteur d'au moins 40 % en cas de cession dans le délai de trois années.
Dans ce dernier cas, le patrimoine sera tout de même désensibilisé des droits sociaux qui posaient initialement « problème », mais le patrimoine sera tout de même exposé au risque d'entreprise via l'obligation de réinvestissement. Cette donnée n'est pas à négliger lorsqu'il s'agit de volumes financiers importants, car un réinvestissement de 60 % est loin d'être négligeable.
Il peut devenir très complexe de trouver des investissements éligibles, relativement sécurisés et à des prix « d'entrée » raisonnables, notamment dans le contexte financier rappelé ci-dessus. Le conseil prudent sera de réaliser cette opération « d'apport-cession » très en amont de la cession (plus de trois années), ou seulement après avoir identifié les réinvestissements significatifs possibles.
Nous noterons qu'en cas de transmission à titre gratuit, le report d'imposition perdurera un temps en cas de donation et sera définitivement purgé en cas de transmission par décès.
– Bénéficier de la neutralisation fiscale des plus-values sur titres. – Soumise à une pression internationale forte sur le régime des holdings, la France s'est dotée d'une législation permettant à ces structures de neutraliser les conséquences fiscales des plus-values sur titres détenus par ces dernières. Cet enjeu était essentiel pour éviter la fuite des capitaux, puisque les structures de détention sont naturellement beaucoup plus mobiles que les citoyens.
  • il s'agit des titres qui, en créant un lien durable avec la participation, sont destinés à contribuer à l'activité du holding. Le droit comptable définit les titres de participation comme ceux dont la possession durable est estimée utile à l'activité du holding, notamment parce qu'elle permet d'exercer une influence sur la société émettrice des titres ou d'en assurer le contrôle ;
  • il existe une présomption si ces titres représentent plus de 10 % du capital de la société émettrice, ou plus de 5 % du capital et des droits de vote s'ils ont été inscrits en comptabilité au compte dédié ;
  • le holding doit les avoir conservés au moins deux ans.
Cette fiscalité favorable va donc permettre :
  • d'exonérer la plus-value d'une cession future (et souvent programmée) des titres de l'entreprise détenus par le holding ;
  • d'exonérer la plus-value en cas de réduction de capital de l'entreprise par annulation des titres détenus par le holding. Cette hypothèse est fréquente, car les entreprises rentables constituent souvent au fil des années des réserves importantes de trésorerie. Ces réserves deviennent souvent inutiles quand l'autofinancement ou le recours au financement externe est assuré par ailleurs.
La stratégie consistera donc à apporter une partie des droits sociaux de l'entreprise à une société patrimoniale, holding, assujettie à l'IS, en prévision d'opérations futures sur le capital.
Le holding va bénéficier des liquidités issues des opérations capitalistiques dans des conditions fiscales très attractives, et pourra les réinvestir aisément dans d'autres actifs patrimoniaux.
L'article 219 du Code général des impôts exonère d'IS les plus-values réalisées sur titres de participation. Les conditions pour bénéficier de cette qualification sont détaillées par la doctrine fiscale, mais peuvent être résumées comme suit :
Ces conditions réunies, la plus-value taxable à l'IS en cas de revente de ces titres sera exonérée (à l'exception d'une quote-part dite de « frais et charges » représentant 12 % du montant de la plus-value).
Les conseils du notaire seront ici essentiels pour anticiper ces opérations sur titres puisqu'il s'agira de se positionner au moins deux ans à l'avance et de déterminer quelle quote-part de titres doit être logée à l'actif du holding.
L'associé personne physique ne disposera plus de liquidités dans son propre patrimoine et devra donc déterminer, avant de loger les droits sociaux de l'entreprise à l'actif du holding, le montant des sommes nécessaires pour financer son futur train de vie.
– Faire perdurer la société patrimoniale, comme outil multi-usage. – Au-delà de la diversification patrimoniale atteinte grâce à l'utilisation habile de la société patrimoniale, d'autres usages sont tout à fait pertinents, une fois cédés les titres dont elle était propriétaire :
  • la société patrimoniale pourra octroyer à son dirigeant une rémunération pour son travail de recherche et de gestion d'actifs ;
  • la rémunération du dirigeant lui permettra de maintenir une couverture santé, et de continuer de cotiser en vue de sa retraite ;
  • la société patrimoniale pourra distribuer régulièrement des dividendes et assurer, sous cette autre forme, un revenu de remplacement au dirigeant.