– La protection de l'environnement par le contrat. – Imaginer un contrat qui aurait pour finalité la mise en place d'une pratique vertueuse en matière de protection de l'environnement est une idée en réalité assez ancienne. Il faut citer ici l'exemple des conservation easements en droit américain, que l'on pourrait traduire par « servitude de conservation » et qui possèdent une nature juridique assez particulière. Le Uniform Conservation Easement Act définit cet outil juridique comme « un droit réel sur un bien foncier qui impose des limites ou des obligations expresses, dont les objectifs comprennent la rétention ou la protection des valeurs naturelles, panoramiques ou des espaces ouverts de la propriété ; l'assurance de sa disposition à des fins d'utilisation agricole, forestière, récréative ou d'espace ouvert ; la protection des ressources naturelles, le maintien ou l'amélioration de la qualité de l'air ou de la qualité de l'eau ainsi que la protection de l'aspect historique, architectural, archéologique ou culturel de la propriété ». Ce contrat engage un propriétaire auprès d'une organisation publique ou privée, comme une organisation non gouvernementale ou un Land Trust. La convention crée un droit réel, lequel est donc attaché au bien (Run with the land, pour reprendre l'expression juridique américaine). Elle fixe un ensemble d'obligations de faire ou de ne pas faire, tempéré par l'ordre public de l'État fédéré dans lequel se trouve la propriété grevée. On retrouve de semblables servitudes écologiques en droit australien, suisse, ou encore tchèque. Sans reprendre le principe d'une servitude environnementale ou écologique, la création de l'obligation réelle environnementale (ORE) s'inspire de ce concept et constitue tout de même une innovation majeure dans notre droit de l'environnement. Il reste toutefois nécessaire de s'interroger sur la nature de cette obligation (Sous-section I), ainsi que sur son régime (Sous-section II).
Nature et régime juridique de l'ORE
Nature et régime juridique de l'ORE
La nature de l'obligation réelle environnementale
– Incertitudes. – La lecture de l'article L. 132-3 du Code de l'environnement peut laisser interrogatif quant à la détermination de la nature juridique de l'ORE. Cette question n'a pas qu'une importance doctrinale, car de cette nature dépendra son régime, lequel n'est qu'insuffisamment fixé par cet article. Il convient donc d'analyser l'ORE au regard des droits réels (§ I) puis des droits personnels (§ II), avant de proposer une qualification innovante (§ III).
Droits réels et ORE
– ORE et droit réel. – Il est en réalité assez complexe de rattacher la nature de l'ORE à celle d'un droit réel. Création de la loi et donc non concernée par le principe doctrinal du numerus clausus des droits réels (dont l'existence est de toute manière largement sujette à caution depuis les arrêts Caquelard
et Maison de la Poésie), il convient tout de même, pour rattacher l'ORE à la catégorie des droits réels, d'en respecter les principes constitutifs. Il nous faut alors confronter cet outil aux principaux droits réels.
– ORE et usufruit. – Défini à l'article 578 du Code civil comme « le droit de jouir des choses dont un autre a la propriété, comme le propriétaire lui-même, mais à charge d'en conserver la substance », l'usufruit est donc un droit de jouissance qui ne peut en aucun cas concerner le créancier d'une ORE : la personne morale de droit public ou de droit privé agissant pour la protection de l'environnement, cocontractante, ne disposera d'aucun droit de jouissance sur le bien grevé. En outre, le propriétaire-débiteur ne sera quant à lui privé d'aucune utilité de son bien, et en conservera l'essentiel des prérogatives. Dès lors, il ne semble pas possible d'assimiler le droit créé par le souscripteur d'une ORE au profit de son cocontractant à un usufruit.
– ORE et servitude. – Là encore, il paraît hasardeux d'assimiler la nature de l'ORE à celle d'une servitude. Une servitude suppose un fonds servant et un fonds dominant, puisque l'article 637 du Code civil la définit comme « une charge imposée sur un héritage pour l'usage et l'utilité d'un héritage appartenant à un autre propriétaire ». L'ORE ne peut concerner qu'un seul fonds, celui du propriétaire, et rien n'impose en outre que le cocontractant de ce dernier soit lui-même propriétaire d'une unité foncière voisine. Par ailleurs, l'article 686 du même code prohibe les servitudes imposées à la personne, lesquelles ne peuvent dès lors consister en une obligation de faire. C'est la stricte application de l'adage Servitus in faciendo non consistit.
– ORE et autres démembrements. – La question de savoir si une ORE est constitutive d'un démembrement de propriété reste pendante. La réponse nous semble devoir être négative. Le but d'un démembrement de propriété doit être de conférer une certaine utilité du bien objet du démembrement à un tiers. Dans le cadre de cette obligation, le créancier ne va en aucun cas pouvoir directement bénéficier de l'utilité à laquelle renonce le constituant. Imaginons par exemple qu'un propriétaire s'engage dans le cadre de son ORE à recréer une zone humide ou à planter une micro-forêt : il s'interdit ainsi de construire et renonce donc à cette utilité. Pour autant, celle-ci ne bénéficiera pas à son cocontractant. Cela ne pourrait être le cas que si une servitude nonædificandi était constituée. Mais il faudrait alors un fonds dominant. Certains auteurs ont toutefois vu dans la possibilité de constituer ainsi un droit réel « négatif » un élément susceptible de constituer la nature réelle de l'ORE.
ORE et droits personnels
– L'éventualité du caractère personnel de l'ORE. – L'idée de savoir si, à défaut de conférer à l'ORE un caractère réel, il ne faudrait pas lui reconnaître un caractère personnel doit être étudiée. L'obligation souscrite par le propriétaire vis-à-vis de la personne morale ou publique agissant pour la protection de l'environnement serait donc personnelle, et le cocontractant resterait par conséquent titulaire d'un droit personnel. On peut opposer deux arguments à ce raisonnement :
- le législateur a lui-même qualifié cette obligation de réelle, et par conséquent il peut sembler délicat de réduire sa portée à celle d'un simple contrat ;
- d'autre part, l'article L. 132-3 du Code de l'environnement prévoit le transfert de cette obligation aux différents propriétaires successifs du bien grevé, ce qui ne saurait être évidemment le cas d'une obligation personnelle, attachée à la personne du débiteur, et non à une chose.
Il apparaît donc difficile de rattacher l'ORE au registre des droits personnels. Dès lors, il apparaît tout de même important de qualifier cet objet juridique, car de cela peuvent dépendre ses modalités de mise en œuvre et d'exécution.
Proposition de qualification
Cela peut consister en l'obligation pour l'acquéreur d'un immeuble qui n'aurait pas pris soin d'éteindre les droits des créanciers hypothécaires d'acquitter les obligations de l'auteur de l'hypothèque, sans pouvoir toutefois être tenu au-delà de la valeur de l'immeuble, n'étant pas lui-même engagé avec le créancier. C'est donc une dette transmise avec l'immeuble.
Il peut également s'agir d'une obligation (créance ou dette), transmise comme accessoire de l'immeuble cédé :
- les droits et actions que pouvait par exemple détenir le vendeur contre un tiers, et notamment son propre vendeur : ainsi, en matière de garantie des vices cachés, nous avons par exemple pu analyser (V. supra, no ) que le sous-acquéreur disposait d'une action contre le vendeur initial quand bien même aucun lien contractuel n'existe entre eux ;
- le bail afférant à l'immeuble objet de la vente, que l'acquéreur se doit de poursuivre, selon les dispositions de l'article 1743 du Code civil ;
- l'adhésion au règlement de copropriété à l'occasion de l'acquisition d'un lot est également considérée comme une obligation propter rem : l'obligation de poursuivre l'exécution du contrat que constitue le règlement de copropriété étant attachée au lot. Selon le même raisonnement, l'adhésion impérative au cahier des charges d'un lotissement par l'acquéreur d'un lot constitue également une obligation de ce type.
– Obligation
propter rem
. – La notion d'obligation réelle existe dans notre droit civil, même si l'on doit plutôt parler d'obligation propter rem
. Concept doctrinal absent de la terminologie du Code civil, cette obligation peut se définir comme « une obligation liée à une chose (et dite propter rem) qui pèse non sur un débiteur personnellement mais sur le propriétaire de cette chose en tant que telle, de telle sorte, que celui-ci peut s'en affranchir en aliénant la chose (l'obligation passe à l'acquéreur, même à titre particulier) ou en délaissant sa propriété (abandon, déguerpissement) ». Cette notion diffère de l'obligation scripta in rem qui est une obligation qui grève le bien en lui-même.
Dès lors, peut-on reconnaître à l'ORE le caractère d'une obligation propter rem ? Oui si l'on considère sa transmissibilité impérative avec la propriété du terrain sur lequel elle est constituée. Àl'inverse, on peut également soutenir qu'une ORE ne saurait être qualifiée d'accessoire du droit réel conféré au tiers cocontractant : elle est en effet souscrite à titre principal par le propriétaire, et ne saurait donc recouvrir ce caractère accessoire. On pourrait conclure la réflexion en indiquant que la nature de l'ORE se rapproche de la notion de charge foncière telle qu'elle existe dans le droit suisse. L'article 782 du Code civil suisse la définit en ces termes : « La charge foncière assujettit envers un tiers le propriétaire actuel d'un fonds à certaines prestations pour lesquelles il n'est tenu que sur son immeuble ».
– L'ORE, un contrat accessoire à l'immeuble. – Le troisième alinéa de l'article L. 132-3 du Code de l'environnement précise : « La durée des obligations, les engagements réciproques et les possibilités de révision et de résiliation doivent figurer dans le contrat ». Dès lors, un auteur a pu parler de l'ORE comme d'un droit réel à structure obligationnelle, puisqu'elle crée à la charge du débiteur (le propriétaire) une obligation de faire (ou de ne pas faire d'ailleurs) à l'égard du cocontractant, lequel est également débiteur au titre des engagements réciproques nécessaires à la constitution de l'ORE. Ces engagements réciproques restent toutefois à définir, puisque le texte ne le fait pas. On peut donc en déduire que c'est aux parties de définir la contrepartie due par le cocontractant. Il est toutefois possible d'aller plus loin et d'émettre l'hypothèse que l'ORE constituerait un contrat accessoire à la propriété de l'immeuble. C'est l'idée suivie par le professeur William Dross. Pour cet auteur, l'article L. 132-3 du Code de l'environnement met en place un mécanisme similaire à celui de l'article 1743 du Code civil, concernant la vente de l'immeuble loué, et à celui que la jurisprudence a établi pour l'adhésion au règlement de copropriété de l'acquéreur d'un lot dans un immeuble soumis à ce régime. Si nous retenons cette qualification, la détermination du régime de l'ORE devient alors plus aisée.
Le régime de l'obligation réelle environnementale
– ORE et ingénierie notariale. – Cette qualification de contrat accessoire à la propriété permet d'imposer naturellement le rôle du notaire dans la conception et la rédaction de l'ORE, en sa qualité de juriste spécialiste de la propriété foncière et de la mécanique contractuelle ayant trait à la transmission et l'exploitation immobilières. L'étude du régime de l'ORE nécessite d'analyser tout d'abord les principes régissant sa conclusion (§ I), avant d'étudier la problématique de sa transmission (§ II).
La conclusion de l'obligation réelle environnementale
– Conditions de validité. – La loi du 8 août 2016 a prévu un certain nombre de conditions nécessaires à la validité de l'ORE :
- elle doit être établie par contrat, ce qui exclut les actes unilatéraux tels que le testament, et pose donc le principe d'une négociation ;
- le contrat doit être passé par acte authentique, sans que le texte indique si cet instrumentum est exigé à titre de validité, ou simplement à titre de preuve en vue de l'exécution de la formalité de publicité foncière. On peut cependant émettre l'hypothèse d'un instrumentum exigé ad probationem seulement car, d'une part, l'obligation de publication est reprise dans l'article 28 du décret no 55-22 du 4 janvier 1955 relatif à la publicité foncière et, d'autre part, les travaux préparatoires ne font pas apparaître la volonté du législateur d'imposer l'authenticité à peine de nullité ;
- le contrat doit prévoir la durée de l'obligation : on en conclut donc qu'une ORE, bien qu'attachée à un immeuble, ne saurait être perpétuelle, et dès lors sa durée ne saurait excéder quatre-vingt-dix-neuf ans. Cela se déduit également de sa nature : ne pouvant être assimilée à une servitude, faute de fonds dominant, sa durée ne peut être que limitée. On peut également citer dans ce sens les arrêts de la Cour de cassation relatifs au droit réel de jouissance spéciale excluant le caractère perpétuel d'un tel droit ;
- le contrat doit également prévoir les modalités de révision et de résiliation, ainsi que les engagements réciproques de chaque partie ;
- seul le propriétaire peut s'engager, ce qui pose la question de l'ORE souscrite par l'usufruitier : quid de sa validité ? Une solution pourrait être de se référer au texte de l'article 595 du Code civil relatif aux baux passés par l'usufruitier. Les baux exigeant le consentement du nu-propriétaire étant ceux ouvrant un droit au renouvellement au profit du locataire, la conclusion d'une ORE ne semble pas devoir être soumise à cet accord unanime. En cas d'immeuble indivis, l'accord unanime des indivisaires semble indispensable. Et ces derniers seront par conséquent débiteurs solidaires des engagements souscrits ;
- si le fonds fait l'objet d'un bail rural, l'accord du fermier est nécessaire à peine de nullité absolue de l'ORE. Le praticien devra alors s'assurer de l'absence de bail rural (qui, sauf le cas du bail rural à long terme, ne fait pas l'objet d'une publication au service de publicité foncière), ou en cas d'existence de l'accord du fermier, en faisant intervenir ce dernier à l'acte constitutif de l'ORE afin qu'il y exprime son consentement. Par ailleurs, la conclusion d'une ORE ne saurait remettre en cause les droits liés à la chasse ou aux réserves cynégétiques ;
- la qualité du cocontractant : la collectivité publique, ou l'établissement public cocontractant ne pose pas de problème. En revanche, tout autre est le cas de la personne morale de droit privé agissant pour la protection de l'environnement. Le texte ne prévoyant pas d'agrément particulier par une quelconque autorité administrative ou autre, l'attention du propriétaire devra être attirée sur les capacités du cocontractant à honorer les engagements nécessairement convenus aux termes de l'ORE. Si ceux-ci sont financiers (par ex., la prise en charge de travaux visant à réhabiliter une zone endommagée), il sera alors essentiel pour préserver la bonne exécution du contrat de constituer des garanties à ce titre ou, à tout le moins, de vérifier les capacités financières du cocontractant. De notre point de vue, la reconnaissance d'utilité publique de la personne morale de droit privé agissant pour la protection de l'environnement peut être une information de grande importance ;
- le régime fiscal : afin de rendre attractif ce dispositif, le législateur a pris soin d'exonérer l'ORE de tout droit d'enregistrement et de taxe de publicité foncière. La loi de finances pour 2021 a étendu cette exonération à la contribution de sécurité immobilière.
La transmission de l'obligation réelle environnementale
– La problématique de la transmission. – Le premier alinéa de l'article L. 132-3 du Code de l'environnement, que nous avons repris in extenso ci-dessus, précise que l'ORE est transmise aux « propriétaires ultérieurs du bien », de sorte que les engagements du souscripteur originel sont obligatoirement transmis aux ayants-droit de ce dernier, qu'il s'agisse d'ayants-droit universels ou à titre particulier.
Si la transmission aux ayants-droit universels se comprend parfaitement, il en est autrement de la transmission aux ayants-droit à titre particulier, à commencer par l'acquéreur de l'unité foncière grevée de l'ORE. En effet, les engagements du propriétaire du bien grevé de l'ORE consistant en un ensemble d'obligations (de faire ou de ne pas faire), leur transmission doit être considérée comme une transmission de dettes. Or, nous avons vu (V. supra, no
et s.) que l'ORE ne pouvait constituer un accessoire de l'immeuble grevé. Par conséquent, sa transmission ne peut se faire à la charge de l'ayant-droit particulier, le principe de l'intransmissibilité des dettes étant maintenu par la jurisprudence de la Cour de cassation depuis plus d'un siècle, cette dernière estimant « qu'il est de principe que l'acheteur, en tant qu'ayant cause à titre particulier du vendeur, est un tiers à l'égard des obligations antérieurement contractées par celui-ci, à l'occasion de la chose cédée ». Cette intransmissibilité trouvant sa cause dans le caractère personnel du lien d'obligation, cela confirme le fait que la nature de l'ORE ne saurait être personnelle, compte tenu de sa transmissibilité.
Nous avons également pu voir que la qualification d'obligation propter rem n'était que difficilement envisageable, compte tenu de l'absence du caractère accessoire de l'ORE. Pourtant ces obligations sont transmissibles en raison de la règle Accessorium sequitur principale, la charge réelle pesant sur le fonds « le suit en quelque main qu'il passe ».
C'est donc bien, selon nous, la qualification de contrat accessoire de la propriété de l'immeuble qu'il nous faut retenir, cette qualification permettant de définir le régime de sa transmission, et d'en organiser les modalités.
– La transmission du contrat accessoire au droit de propriété. – En raison de cette nature juridique, la cession de l'ORE doit s'opérer comme une cession accessoire de contrat, et selon les termes des articles 1216 et suivants du Code civil, établissant le régime des cessions de contrat. Deux hypothèses sont alors à considérer : la cession du contrat à titre principal, d'une part, la cession du contrat comme accessoire de la cession de l'immeuble grevé, d'autre part. La technicité du notaire sera primordiale pour assurer la parfaite exécution de la cession, qu'il faudra alors établir par acte authentique pour pouvoir en assurer la formalité de publicité foncière.
– Cession du contrat à titre principal. – Cette cession peut parfaitement s'envisager par le propriétaire qui souhaite se désengager, au profit d'un propriétaire voisin, qui reprendra les obligations souscrites par le cédant à charge de les exécuter sur sa propriété foncière. Dans ce cas, il faudra recueillir l'accord exprès du cocontractant qui deviendra le cédé au titre de l'article 1216-1 du Code civil afin de libérer le cédant de toute obligation à son égard au titre du contrat cédé.
La cession peut également s'envisager par le cocontractant de l'ORE, au profit d'une autre personne dont la nature lui permet de régulariser une telle obligation (collectivité publique, établissement public ou personne morale de droit privé agissant pour la protection de l'environnement). L'accord exprès du propriétaire-cédé sera obligatoire pour libérer le cédant de ses engagements souscrits au titre de l'ORE. Il conviendra alors, si des garanties ont été constituées au profit du propriétaire, d'en organiser également le transfert.
- tout d'abord dès la rédaction de la convention contenant l'ORE, en prévoyant ab initio, l'accord de chaque cocontractant quant à une cession future du contrat : l'article 1216 du Code civil permet en effet cet accord initial, lequel aura pour effet de libérer le cédant pour l'avenir à compter de la prise d'effet de la cession de contrat. Attention toutefois, le cédé devra être notifié de la cession ou en prendre acte. Nous ne pouvons que conseiller ici l'intervention du cocontractant non propriétaire à l'acte de vente de l'immeuble grevé, pour lui permettre de prendre connaissance de la cession et, en tant que de besoin, libérer expressément le vendeur-cédant de tout engagement quant à l'exécution de l'ORE ;
- si cela n'a pas été le cas, peut-être faudrait-il réfléchir à considérer les deux contrats que sont la cession de l'immeuble et la cession du contrat d'ORE comme deux contrats principaux (et non la cession de l'ORE comme accessoire de la cession d'immeuble). Il conviendrait alors de soumettre la cession de l'ORE à la condition suspensive de l'accord exprès du cocontractant. La double cession devant alors s'envisager comme deux opérations de sort lié, la non-réalisation de l'une entraînant de plein droit la caducité de l'autre. C'est une pratique assez connue des notaires, notamment en matière de cession conjointe d'un fonds de commerce et de l'immeuble dans lequel il est exploité.
– Cession du contrat concomitante à la vente de l'immeuble grevé de l'ORE. – En pratique, c'est la situation qui sera probablement le plus souvent rencontrée. Il conviendra, pour le notaire en charge d'une telle opération, d'être particulièrement rigoureux quant au traitement de l'ORE cédée à titre accessoire de l'immeuble vendu. En effet, une telle cession n'apparaîtra pas comme devant nécessiter l'accord du cocontractant de l'ORE (compte tenu de son caractère accessoire), et pourrait entraîner par conséquent le maintien du lien contractuel entre le vendeur-cédant et ce dernier. Le risque sera alors de voir le propriétaire-cessionnaire ne pas respecter les engagements souscrits par le vendeur-cédant au titre de l'ORE et donc de permettre au titulaire de l'ORE d'engager la responsabilité du vendeur-cédant, lequel ne maîtrisant plus le bien, sera de toute manière dans l'incapacité d'exécuter les obligations découlant de l'ORE. Pour éviter une telle situation, nous pouvons imaginer deux manières de procéder :
Il peut également être envisagé que, s'agissant d'une cession légale de contrat, la cession de l'immeuble grevé d'ORE engendre les mêmes conséquences que celles prévues par l'article 1743 du Code civil en matière de cession d'immeuble loué : le bail oblige l'acquéreur parce qu'il est transmis accessoirement à l'immeuble, et le vendeur est donc en principe libéré de toute obligation vis-à-vis du locataire par l'effet de cette transmission. Si le même régime devait être reconnu à la cession de l'immeuble grevé d'une ORE, il ne serait alors plus nécessaire de soumettre cette transmission à l'accord du cocontractant.