– Un système incitatif. – En matière d'investissement forestier, la créativité du législateur ne s'est pas arrêtée à l'élaboration d'un régime d'exploitation, ni à la mise en place d'un régime de faveur. Les terribles dommages causés aux massifs forestiers du territoire par les tempêtes survenues au cours des dernières décennies ont poussé les pouvoirs publics à mettre en place un système original de prévoyance financière : le compte d'investissement forestier et d'assurance (§ I), ainsi que des aides financières particulières (§ II).
Les mécanismes d'aides financières
Les mécanismes d'aides financières
Le compte d'investissement forestier et d'assurance
– Assurance et prévoyance. – Àla suite de la tempête Klaus ayant frappé le littoral aquitain le 24 janvier 2009, un important contentieux a été porté devant les juridictions administratives. Ce contentieux reposait essentiellement sur le reproche fait à l'État de ne pas avoir reconnu l'état de catastrophe naturelle pour les dommages causés aux bois par cette tempête, les contrats d'assurance alors souscrits ne prévoyant pas ce risque. La cour administrative de Bordeaux, par un arrêt du 30 juin 2016, a reconnu la responsabilité de l'État. Certains auteurs en ont conclu que la cour posait la question de la non-assurabilité des bois sur pieds contre les risques liés à des événements météorologiques d'intensité anormale. Le législateur n'avait toutefois pas attendu l'issue de ces procédures pour se désengager de la charge des travaux de reconstitution des forêts après tempête : l'ordonnance no 2012-92 du 26 janvier 2012 précise que concernant les tempêtes survenues à compter du 1er janvier 2017, « les surfaces forestières considérées comme assurables contre le risque de tempête dans les conditions prévues au même article ne peuvent plus faire l'objet d'une prise en charge de l'État en matière de nettoyage et reconstitution des peuplements forestiers ». Toutefois, et comme réponse préalable à ce désengagement, la loi no 2010-874 du 27 juillet 2010 a institué un compte épargne-assurance pour la forêt, remplacé par un compte d'investissement forestier et d'assurance (Cifa) par la loi de finances rectificative pour 2013.
– Le régime du Cifa. – Le régime du compte d'investissement forestier et d'assurance est défini aux articles L. 352-1 à L. 352-6 et suivants du Code forestier. L'ouverture de ce compte est réservée aux personnes physiques ou groupements forestiers propriétaires de bois et forêts, engagés dans une démarche de garantie de gestion durable, et ayant souscrit une assurance couvrant notamment le risque de tempête. Le compte peut être abondé jusqu'à 2 500 € par hectare exploité avec engagement de gestion durable. Par la suite, les sommes déposées sur ce compte ne peuvent en principe être utilisées que pour « financer les travaux de reconstitution forestière à la suite de la survenance d'un sinistre naturel d'origine sanitaire, climatologique, météorologique ou lié à l'incendie, ou les travaux de prévention d'un tel sinistre ».
Le compte sera clôturé en cas de vente totale des parcelles forestières détenues par le titulaire. En cas de vente partielle, le compte ne sera pas clôturé mais le montant des dépôts devra être ramené à la proportion des surfaces détenues, et toujours à concurrence de 2 500 € par hectare détenu.
- l'émission par la DDTM d'un certificat attestant que les bois et forêts du titulaire sont susceptibles de présenter une des garanties de gestion durable mentionnées aux articles L. 124-1 et L. 124-3 du Code forestier ;
- l'engagement par le donataire ou l'héritier attributaire d'affecter les sommes ainsi transmises conformément aux dispositions des articles L. 352-3 et L. 352-4 du Code forestier, et ce pendant une durée de trente ans.
En revanche, en ce qui concerne les intérêts générés par les sommes épargnées, aucun régime de faveur n'a été prévu, de sorte que ceux-ci seront taxés selon le droit commun des produits financiers, c'est-à-dire soumis à l'impôt sur le revenu.
– Traitement fiscal. – Lorsqu'il est ouvert par une personne physique, la transmission du Cifa suit le même régime en matière de droit de mutation à titre gratuit que les parcelles forestières pour la sauvegarde desquelles il a été souscrit. L'assiette taxable sera donc réduite de 75 %, à la double condition suivante :
Les subventions et aides aux investissements
– Multiples dispositifs. – En matière d'exploitation forestière, il existe un grand nombre de dispositifs d'aides financières et de subventions venant à l'appui des propriétaires et exploitants. Ces aides se déclinent au niveau national comme au niveau régional. Parmi les plus importantes au niveau national, nous pouvons citer :
- le label « Bas-Carbone » : ce label concerne les travaux de reconstitution de peuplements forestiers dégradés, de boisement, et de conversion de tailles en futaies sur souche. Les travaux peuvent être subventionnés jusqu'à environ 80 % du coût global du projet ;
- le fonds de dotation « Plantons pour l'avenir ». Financé par des dons d'entreprise et de particuliers, ce fonds permet une prise en charge des travaux de préparation du sol, de boisement ou de reboisement et d'entretien sur cinq ans jusqu'à 20 000 € hors taxes, avec une condition d'autofinancement par le propriétaire de 20 000 € en cas de coupe au cours des cinq dernières années ou 25 000 € dans les autres cas ;
- les subventions publiques de soutien des investissements « améliorant la résilience et la valeur environnementales des forêts » : ces subventions concernent l'amélioration des taillis et mélanges de taillis sous futaie, l'amélioration de jeunes accrus, la conversion en futaie irrégulière, la régénération naturelle de peuplements feuillus, ou la régénération artificielle de peuplements forestiers. Le taux de subvention peut atteindre 50 à 80 % du montant des travaux ;
- le plan de relance post-pandémie : l'objectif forestier du plan de relance est de planter ou replanter 45 000 hectares de forêts en France en augmentant les surfaces plantées, en régénérant les forêts existantes, et en reconstituant celles qui ont péri. Pour sa mise en place, le ministère de l'Agriculture et de l'Alimentation a lancé mi-décembre 2020 un appel à manifestation d'intérêt intitulé « Aider la forêt à s'adapter au changement climatique pour mieux l'atténuer » ;
- enfin, il existe également un dispositif de prêts bonifiés, accordés par la Société de développement de l'économie forestière (Sodef) à ses actionnaires en vue de travaux de sylviculture, d'équipements forestiers ou d'infrastructures, mais également d'achat d'outillage, ainsi que de prêts relais dans l'attente du versement des subventions d'État.
Aides financières et épargne encouragée : un régime unique
La possibilité d'obtenir d'importantes subventions et des aides à la reconstruction des massifs, ainsi que l'incitation à placer des sommes importantes en prévision de travaux de réparation rendus nécessaires par la survenance de catastrophes naturelles, le tout sous la condition de respecter les objectifs de gestion durable édictés par le Code forestier, participent tout autant que le régime fiscal de faveur de l'exploitation forestière à l'attractivité de ce secteur économique.