– Une sûreté imaginée pour le financement des énergies renouvelables. – La lecture du Rapport au Président de la République relatif à l'ordonnance de réforme du droit des sûretés évoque très précisément ce point : « L'article 2334 autorise le gage portant sur un immeuble par destination. Il s'agit de biens, souvent d'une valeur importante, qui ont vocation à être intégrés à des immeubles, par exemple des turbines, des transformateurs, des panneaux solaires ou autres équipements des parcs éoliens, des centrales solaires ou des installations industrielles ou minières ». Ce point nous semble essentiel, car il faut en outre le rapprocher des dispositions de la loi Climat et résilience no 2021-1104 du 22 août 2021 qui incitent, voire imposent la rénovation énergétique des bâtiments. Àtitre d'exemple, citons simplement l'obligation de doter tout nouveau bâtiment professionnel d'une emprise au sol supérieure à 500 mètres carrés d'une toiture végétalisée ou d'un dispositif d'énergie renouvelable. Un besoin de financement spécifique va donc naître, et y adapter une garantie existante semblait particulièrement opportun.
Les conditions du gage sur immeuble par destination
Les conditions du gage sur immeuble par destination
– Les conditions nécessaires à la validité du gage. – Il faut tout d'abord que le bien objet du gage constitue bien un immeuble par destination et non un immeuble par nature. Il faut également que le bien en question entretienne avec l'immeuble un rapport économique ou de situation, et enfin que le meuble devenu immeuble par destination soit détenu par une personne disposant elle-même d'un droit réel sur l'immeuble-support : soit en en étant directement propriétaire, soit en bénéficiant d'un droit réel sur cet immeuble (bail superficiaire, notamment). Concrètement, l'exploitant titulaire d'un simple bail de droit commun ne pourrait offrir ce type de garantie à son prêteur, tandis que celui titulaire d'un bail à construction le pourrait. En matière d'usufruit, la question de l'accession immédiate ou différée se pose : si les constructions édifiées par l'usufruitier ne sont acquises au nu-propriétaire qu'à l'extinction de l'usufruit, il sera alors possible de constituer un gage sur, par exemple, les pales des éoliennes édifiées. En revanche, si l'accession doit jouer immédiatement, il ne saurait alors y avoir d'identité de propriété entre le meuble et l'immeuble. La question a toutefois été tranchée par la Cour de cassation aux termes d'un arrêt de la troisième chambre civile du 19 septembre 2012 : « Mais attendu que la cour d'appel ayant retenu a bon droit qu'il n'existait aucun enrichissement pour le nu-propriétaire qui n'entrera en possession des constructions qu'à l'extinction de l'usufruit, l'accession n'a pas opéré immédiatement au profit du nu-propriétaire du sol ». Le report de l'accession à l'extinction de l'usufruit permet donc, selon nous, la constitution du gage, l'identité de propriété du meuble et de l'immeuble étant acquise.
– Indifférence du moment de l'immobilisation. – Le texte de l'article 2334 du Code civil ne précise pas si l'immobilisation doit être antérieure à la prise de garantie, ou si le gage peut être constitué avant même l'immobilisation. C'est le Rapport au Président de la République sur la réforme du droit des sûretés qui apporte une réponse claire : « Ce texte couvre aussi bien les situations dans lesquelles un bien meuble sur lequel un gage a été constitué est par la suite intégré à un immeuble et devient immeuble par destination, que celles où le gage est constitué ab initio sur un bien immobilisé par destination ».
Le gage peut donc être constitué ab initio sur un immeuble par destination, ou sur un meuble non encore immobilisé mais qui le sera postérieurement.