La convention des partenaires : un conseil notarié luxueux

La convention des partenaires : un conseil notarié luxueux

– Convention de Pacs. – Selon le Code civil, le Pacs est « un contrat conclu par deux personnes physiques majeures, de sexe différent ou de même sexe, pour organiser leur vie commune ».
Sous le visa de l'article 515-3 du Code civil, les futurs partenaires doivent établir une convention. La possibilité leur est offerte d'utiliser, à cet effet, la convention-type, laquelle fait l'objet du formulaire cerfa no 15726 (intitulé « Convention-type de Pacs ») :
http://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/R48755">Lien
Aux termes de cette convention-type, ils devront choisir les modalités de l'aide matérielle, proportionnelle ou forfaitaire (art. 1, qui fait référence à l'article 515-4 du Code civil) (pour plus de précisions sur l'aide matérielle entre partenaires, V. infra, nos et s., et et s.), ainsi que le régime des biens, régime légal de la séparation des patrimoines ou régime de l'indivision des biens (art. 3).
Ils peuvent également rédiger eux-mêmes une convention spécifique de Pacs, qui devra a minima mentionner la référence à la loi instituant le Pacs : « Nous, A et B, concluons un pacte civil de solidarité régi par les dispositions de la loi du 15 novembre 1999 modifiée et les articles 515-1 à 515-7 du Code civil ».
Les futurs partenaires peuvent également avoir recours au Pacs notarié, afin d'offrir à leur convention les attributs d'un acte authentique. Depuis le 30 mars 2011, si la convention est notariée, le notaire est chargé de l'enregistrement de la déclaration des partenaires et de la publicité. Les modalités ont été précisées par le décret no 2012-966 du 20 août 2012. Les pactes notariés postérieurs au 30 mars 2011 doivent être enregistrés sur le registre des conventions notariées de pacte civil de solidarité institué par le décret. Le Conseil supérieur du notariat a mis en place un registre informatique, dit « Pacsen », accessible au moyen de la clé Real. Pour mémoire, seule la convention authentique engendrera le paiement d'un droit sur état d'un montant de 125 €.
– Controverse générale : la place de la liberté contractuelle dans le Pacs. – La rédaction de la convention spécifique de Pacs, c'est-à-dire distincte de la convention-type susvisée, qu'elle soit faite directement par les parties ou bien par leur notaire, appellera une vigilance toute particulière. En effet, plusieurs sujets divisent actuellement les auteurs et méritent d'être approfondis. Parmi ceux-ci, l'aide matérielle entre partenaires qui sera étudiée dans le titre suivant (V. infra, nos et s., et et s.) et les contours de la liberté contractuelle qui existe pour les partenaires au regard des deux régimes pacsimoniaux.
Pour les couples mariés, le principe est celui de la liberté des conventions matrimoniales. Énoncé à l'article 1387 du Code civil, le principe bien connu « se présente comme une intervention subsidiaire de la loi dans l'association conjugale, laissant ainsi à la volonté le rôle principal en la matière, dont elle se borne à suppléer la carence ». Les couples non mariés ne bénéficient pas de cette liberté. Toutefois, rien ne les empêche de contracter, dans le respect de la liberté de droit commun, pour organiser leur vie commune, voire leur rupture. Peu usités, les contrats de concubinage demeurent possibles. S'agissant des partenaires, la question est plus délicate : pour l'heure, la liberté contractuelle n'a pas encore trouvé sa place dans la législation relative au Pacs. « Il est certain qu'ils bénéficient, comme les concubins, d'une liberté contractuelle de droit commun. On ne saurait les en priver sans ruiner l'attractivité du pacte civil. Cependant, peuvent-ils avoir recours à une organisation partenariale libre ? Existe-t-il une « liberté pacsimoniale », pendant de la liberté des conventions matrimoniales des époux, qui coexisterait avec la liberté contractuelle de droit commun ? ». En d'autres termes, les partenaires peuvent-ils aménager conventionnellement leur contrat de Pacs ? Le Pacs est-il un « contrat de liberté » ?
Les auteurs estiment que la rédaction des articles du Code civil est particulièrement équivoque. Il n'existe à ce jour aucune jurisprudence ayant tranché cette difficulté. La doctrine est divisée ; le débat est donc ouvert.
Une majorité des auteurs estiment que les règles fixées par le législateur sont indicatives. Ces derniers prônent la liberté contractuelle qui caractérise le Pacs. Ils émettent une opinion libérale sur la question. Leur argumentaire repose notamment sur les travaux parlementaires. Ceux-ci laisseraient à penser que les textes doivent être interprétés de manière libérale.
Néanmoins, quelques auteurs considèrent que le Pacs a été pensé par le législateur comme un dispositif impératif. Aucune personnalisation de la convention de Pacs ne serait possible : les partenaires prendraient un bien trop grand risque à s'aventurer dans cette voie. La rupture du contrat pourrait s'avérer litigieuse et conflictuelle, et ce d'autant plus en l'absence de réponses légale ou jurisprudentielle certaines.
– Controverse spécifique : l'aménagement du régime de l'indivision des acquêts prévu à l'article 515-5-1 du Code civil. – Depuis de nombreuses années, la doctrine se prononce plus spécifiquement sur l'espace de liberté dont disposent les partenaires, notamment lorsqu'ils sont soumis au régime de l'indivision des biens.

Controverse spécifique : l’aménagement du régime de l’indivision des acquêts prévu à l’article 515-5-1 du Code civil

La doctrine s'interroge quant à l'espace de liberté dont disposent les partenaires dans la rédaction de leur convention dès lors qu'ils optent pour le régime de l'indivision des acquêts prévu à l'article 515-5-1 du Code civil.
Est-il possible d'aménager conventionnellement le régime de l'indivision des acquêts prévu à l'article 515-5-1 du Code civil en réduisant la masse indivise ? « Les dispositions organisant le régime de l'indivision d'acquêts (C. civ., art. 515-5-1 et 515-5-2) sont-elles d'ordre public ? Organisent-elles un « prendre ou à laisser » qui s'impose aux partenaires animés d'un esprit communautaire ou sont-elles susceptibles d'aménagements ? ».
Une faible majorité des auteurs se prononce plutôt en faveur d'une impossibilité de déroger au régime instauré par les articles 515-5-1 et 515-5-2 du Code civil. L'argument principal étant que le dispositif de l'indivision des acquêts de l'article 515-5-1 dudit Code constitue un véritable mode d'acquisition de la propriété. Parce qu'il n'est pas seulement un mode de preuve de la propriété, ce dispositif serait un véritable contrat d'adhésion.
Nous renvoyons sur cette question à l'étude effectuée par la deuxième commission du rapport du 106e Congrès des notaires de France :
Rapport du 106e Congrès des notaires de France, Bordeaux, 30 mai au 2 juin 2010, Couples, Patrimoine, les défis de la vie à 2, 2e commission, no 2092, p. 339 à 342.">Lien
Comme indiqué précédemment, ces couples qui choisissent de se soumettre à l'indivision spéciale de l'article 515-5-1 du Code civil sont à la recherche d'un esprit communautaire, sans pour autant être unis par le mariage. Leurs argumentaires contre le mariage peuvent être multiples et concerner tant les droits en cas de décès que la prestation compensatoire en cas de divorce.
Seul le législateur est à même de se prononcer sur les contours de la liberté dont ils disposent dans leur convention. Cette demande a d'ores et déjà été formulée par le 106e Congrès des notaires de France. Aux termes de la première proposition de la deuxième commission, ledit congrès a proposé que « la loi clarifie le régime de l'indivision spéciale de l'article 515-5-1 du Code civil en interdisant toute convention visant à aménager son périmètre » :
Propositions du 106e Congrès des notaires de France, Bordeaux, 30 mai au 2 juin 2010, Couples, Patrimoine, les défis de la vie à 2, 2e commission – INVESTIR – Proposition 1.">Lien
– Question. – Et si l'on paraphrasait W. Baby : « Quel avenir pour le Pacs ? » : « contrat d'adhésion » ou « contrat de liberté » ?
– Réponse 1/2 : considérer le contrat de Pacs comme un « contrat d'adhésion ». – Les données chiffrées préalablement évoquées confirment incontestablement le succès de ce mode de conjugalité. Elles confirment que le Pacs répond aux besoins d'une partie importante de la population.
Puisque tous les couples peuvent, désormais, donner à leur union un cadre juridique plus complet en se mariant, il n'est plus nécessaire de rapprocher le Pacs du mariage (comme cela avait pu l'être avant le « mariage pour tous »). Dorénavant, il est opportun de conserver les atouts du Pacs et de préserver le pluralisme des modes de conjugalité. L'objectif est de continuer à répondre aux besoins, à dimension variable, de tous les concitoyens. Considérer le contrat de Pacs comme un « contrat d'adhésion » plutôt que comme un « contrat de liberté » semble rentrer dans cette logique de conservation du pluralisme des modes de conjugalité.
Les futurs partenaires doivent être particulièrement attentifs sur le choix de leur régime de Pacs et son éventuelle personnalisation. À ce stade, l'accompagnement d'un notaire est loin d'être automatique. Il est même luxueux. Les partenaires peuvent à loisir personnaliser une convention, laquelle pourrait s'avérer, plus tard, bien controversée, et ce notamment au regard des divergences doctrinales à l'œuvre actuellement. Notre mission d'anticipation, afin d'éviter les conflits, prend tout son sens ; malheureusement, dans un domaine où les portes de nos offices sont rarement poussées… Limiter les conventions sui generis et prôner, de ce fait, la convention-type susvisée permet de pallier le manque d'information des futurs partenaires.
– Réponse 2/2 : considérer le contrat de Pacs comme un « contrat de liberté » uniquement si la convention est notariée. – En ce sens, il pourrait, par analogie avec le mariage, être prévu que le contrat de Pacs devienne un « contrat de liberté » seulement s'il fait l'objet d'une convention notariée.
Cet argumentaire a été soutenu par W. Baby : « réserver la voie sous seing privé à un contrat-type exprimant la volonté d'adopter le dispositif légal et imposer la forme notariée pour toute volonté d'y déroger. (…) La solution ici suggérée se veut un compromis en proposant un contrat pré-imprimé aux partenaires, auquel ils ne pourraient déroger que par voie notariée ».
Afin d'accompagner le véritable succès de ce mode de conjugalité, et à l'instar du régime matrimonial légal, le législateur pourrait prévoir que si les partenaires souhaitent être soumis au régime de la séparation des biens, une déclaration en mairie suffit. En revanche, un contrat authentique deviendrait obligatoire si les parties souhaitent aménager conventionnellement leur régime de Pacs en restant soumises à la séparation des biens, ou si elles souhaitent adopter le régime de l'indivision des acquêts, avec ou sans aménagement conventionnel.
Le risque ici analysé d'une absence d'information des partenaires pourrait être limité, dès lors que le contrat serait forcément « d'adhésion » si les parties ne se font pas accompagner d'un notaire. À l'inverse, il s'agirait d'un « contrat de liberté » si les parties demandent au notaire de faire preuve d'ingénierie et de personnalisation dans la rédaction de leur convention.

La place de la liberté contractuelle dans le Pacs : le contrat de Pacs est-il un « contrat d'adhésion » ou un « contrat de liberté » ?

Prévoir l'aménagement conventionnel de la convention de Pacs uniquement lorsqu'elle fait l'objet d'un acte authentique.
Considérer que le Pacs « en mairie » n'est pas susceptible d'aménagements conventionnels.
Laisser la possibilité aux futurs partenaires de composer un régime pacsimonial sur-mesure, grâce à l'acte authentique.