Des usages inattendus de l'entreprise individuelle

Des usages inattendus de l'entreprise individuelle

Des usages inattendus de l'entreprise individuelle

– Devenir entrepreneur par accident. – Comme nous l'avons évoqué ci-dessus, devenir entrepreneur nécessite uniquement d'exercer à titre individuel une activité qualifiée de « professionnelle ». Cette activité peut présenter des formes multiples, et le défaut de réalisation des formalités légales déclaratives n'a pas pour conséquence d'annihiler l'existence même du statut.
Dans un certain nombre de situations, le citoyen peut donc parfaitement devenir entrepreneur à son insu, notamment s'il réalise des actes de commerce et en fait sa profession habituelle. Tel sera par exemple le cas des personnes qui achètent des biens mobiliers en vue de les revendre, qui louent du matériel ou rendent des services à domicile, ce qui est désormais très commun grâce aux nombreux sites internet dédiés à ces sujets.
Plusieurs conséquences sont attachées à la reconnaissance d'une activité professionnelle, notamment commerciale : interdiction de cumul avec certaines autres activités (professions réglementées par exemple), obligation de tenue comptable (assortie de sanctions pénales), extension du domaine de la preuve, compétence des juridictions consulaires. Ainsi, il existe de nombreux intérêts à cette reconnaissance pour qui souhaiterait agir dans le cadre d'une procédure à l'encontre d'un commerçant « subi ».
Ce risque doit être bien mesuré en amont, puisque ses conséquences peuvent avoir un impact colossal sur le plan patrimonial. L'intervention notariale a toute sa place pour anticiper et analyser ces situations, puis conseiller le porteur de projets imprudent.
– La diversité fiscale de l'entrepreneur accidentel. – En outre, la qualification professionnelle d'une activité va engendrer immédiatement un traitement fiscal différencié, qui aura des conséquences financières importantes pour le contribuable. Par exemple, depuis la loi de finances du 30 décembre 2008, codifiée à l'article L. 96 G du Code général des impôts, les agents des impôts peuvent notamment se faire communiquer par les plateformes internet de mise en relation les données qu'elles conservent.
Ainsi, les ventes en ligne considérées comme occasionnelles ne seront pas imposables (exception faite de certains biens au-delà de 5 000,00 €). En revanche, si ces ventes sont habituelles et commerciales (quel que soit leur montant), s'appliquera l'IRPP dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux (assorti de sanctions pécuniaires en cas de défaut de comptabilité).

Accidentellement entrepreneur

Une personne devient entrepreneur individuel dès qu'elle débute une activité qualifiée de « professionnelle ». Cette reconnaissance, au-delà de tout formalisme, implique des conséquences juridiques significatives, et assujettit l'entrepreneur à un traitement et des contraintes fiscales différenciés.
– La révolution de l'auto-entreprise. – D'un statut fiscal initial (micro-entrepreneur issu de la loi du 1er août 2003 pour l'initiative économique) est né le 4 août 2008 (loi de modernisation de l'économie) le statut de l'auto-entrepreneur, qui a totalement bouleversé le paysage de l'entreprise individuelle. Celui-ci connaît un succès tout à fait fulgurant :
Trois points clés, tous basés sur le critère de la simplicité d'accès à l'entrepreneuriat, peuvent expliquer le succès du statut de l'entrepreneur individuel :
  • l'accès en ligne à la création de l'auto-entreprise, soit via un guichet unique, soit auprès de l'Urssaf ;
  • une fiscalité simple et lisible, pouvant être basée sur un pourcentage du chiffre d'affaires réalisé (versement libératoire de l'impôt de 1 % pour les ventes de marchandises, 1,7 % pour les prestations de services commerciales ou artisanales, et 2,2 % pour les activités libérales), avec une comptabilité simplifiée et une dispense de facturation de TVA en dessous de certains seuils ;
  • un régime social simple et lisible, basé sur un pourcentage du chiffre d'affaires réalisé (12,8 % pour les ventes de marchandises, 22 % pour les prestations de services commerciales ou artisanales, et pour les activités libérales).
Ces facteurs ont abouti à un engouement incroyable pour la création d'entreprises durables, alors que le modèle était initialement conçu pour organiser simplement une activité professionnelle souvent complémentaire à une activité principale.
– Révolution non exempte de controverse. – Cependant, un effet sans doute mal mesuré de la création de ce régime est apparu au fil des années. De plus en plus d'entreprises et d'auto-entrepreneurs ont considéré que ce statut était plus attractif que la conclusion d'un contrat de travail. En effet, les coûts sociaux et fiscaux sont notoirement inférieurs à ceux réservés aux salariés (puisque les coûts sociaux procurent des niveaux de prestation assurantiels nettement inférieurs en termes de maladie/retraite/prévoyance, sans omettre l'absence totale d'assurance chômage). Et l'absence de contrat procure une flexibilité totale dans la conclusion et la cessation de la relation de travail.
Chacun des contractants (donneur d'ordre et prestataire) y a donc vu des avantages importants : absence de charges salariales pour l'entreprise, liberté de collaborer ou non, faibles coûts sociaux et fiscaux pour le prestataire, et absence de TVA à reverser. Les plafonds pour rester éligible au statut (72 600 € en 2021, par exemple, pour les prestataires de services) ont conduit les travailleurs à le considérer comme une possible rémunération d'activité principale.
De nombreux « faux » entrepreneurs sont donc apparus, ne travaillant que pour un seul « client », qui peut bien entendu être considéré comme un employeur. On les retrouve notamment dans des secteurs que les plateformes numériques mondialisées ont préemptés, tels que la livraison de biens à domicile, les services à domicile, le transport de personnes. Du fait de la précarité évidente des citoyens ayant choisi ce statut pour activité principale, la justice a eu l'occasion de se pencher sur cette question de longue date, et de nombreuses requalifications sont intervenues depuis, malgré toute la complexité de l'analyse.
On peut consulter sur ce sujet le dossier « Requalification d'auto-entrepreneurs en salariés », réalisé par la Fédération nationale des auto-entrepreneurs et micros entrepreneurs et actualisé au 14 mars 2019 :
Lien web : « Requalification d'auto-entrepreneurs en salariés », actualisé au 14 mars 2019, réalisé par la Fédération nationale des auto-entrepreneurs et micro-entrepreneurs. Je ne comprends pas ce qu'il faut de + dans un lien…