Lorsqu'une vente immobilière est envisagée par nos clients, différentes modalités peuvent leur être suggérées afin d'optimiser l'opération. Nous mentionnerons ici les opérations de donation-cession (§ I) et la vente en viager ou avec réserve du droit d'usage et d'habitation (§ II).
Cession et techniques d'ingénierie immobilière
Cession et techniques d'ingénierie immobilière
La cession précédée d'une donation : les opérations de donation-cession
– La donation-cession comme technique d'ingénierie notariale. – Les opérations dites de « donation-cession » consistent à procéder à la donation préalable du bien avant la vente de ce dernier. Nous les abordons ci-après (V. infra, no
) sous l'angle des limites de l'abus de droit et du mini-abus de droit. Nous les mentionnons ici puisqu'elles constituent une des techniques d'ingénierie notariale à connaître dans le cadre de l'anticipation et des conseils délivrés à nos clients en amont d'une opération de cession immobilière. Elles ont en effet pour conséquence fiscale de purger la plus-value latente sur l'immeuble du chef du donateur, avant sa cession (la donation étant hors champ d'application du régime des plus-values immobilières). La vente ne générera pas de plus-value imposable, car cette plus-value aura été purgée à l'occasion de la donation. En conséquence, le prix de cession sera équivalent au prix d'acquisition, la donation préalable ayant permis de « revaloriser » le bien dans le patrimoine du nouveau vendeur et ainsi de purger la plus-value latente.
Intérêt de la donation avant cession, exemple chiffré
Le propriétaire d'un bien immobilier souhaite transmettre à ses enfants une somme d'argent. Le bien immobilier a été acquis moyennant un prix de 100. Sa valeur vénale actuelle est de 1 000.
Première hypothèse : vente de l'immeuble et donation du prix de vente
Plus-value : 1 000 – 100 = 900.
Impôt de plus-value (arrondi à 30 %) = 270.
Prix de vente net à donner : 1 000 – 270 = 730.
Base taxable de la donation du prix de vente net aux deux enfants, chacun bénéficiant d'un abattement fiscal de 100, soit 730 – 200 = 530.
Soit des droits de donation de 530 × 20 % (environ) = 106.
Soit un prix de vente net revenant aux enfants de 730 – 106 = 624.
Soit une taxation de 376 / 1 000 = 38 % environ sur le prix de vente de départ.
Seconde hypothèse : donation de l'immeuble puis vente
Donation de l'immeuble d'une valeur de 1 000.
Base taxable de la donation aux deux enfants, chacun bénéficiant d'un abattement fiscal de 100, soit 1 000 – 200 = 800.
Soit des droits de donation de 800 × 20 % (environ) = 160.
Puis vente de l'immeuble moyennant un prix de 1 000.
Plus-value : 1 000 – 1 000 = 0 pas d'impôt sur la plus-value à payer.
Soit un prix de vente net revenant aux enfants de 1 000 – 160 = 840.
Soit une taxation de 160 / 1 000 = 16 % environ sur le prix de vente de départ.
La donation avant cession a donc permis de majorer de 22 points environ la valeur réellement donnée aux enfants.
– Donation-cession et date de cession. – L'arrêt précité du Conseil d'État du 29 décembre 2020 en matière d'impôt sur la plus-value appelle également notre vigilance en matière d'opération de donation-cession : pour que l'opération ne soit pas considérée comme abusive, la donation doit intervenir avant la cession. En pratique, l'acte de donation est souvent dressé, régularisé entre l'avant-contrat et la vente. Si la date de la cession peut être considérée comme étant celle de la promesse synallagmatique, la donation interviendra juridiquement après la cession et l'opération pourrait être remise en cause (conduisant à une donation de liquidités issues de la cession, après déduction de l'impôt sur la plus-value à charge du donateur, sans qu'il dispose alors forcément des liquidités nécessaires). Nous renvoyons à cet égard à nos explications ci-dessus (V. supra, nos
et s.).
En cas de vente sous condition suspensive, il convient également, d'une part, d'être attentif à la date de donation, qui ne doit pas être postérieure à la date de levée de la dernière condition et, d'autre part, de vérifier qu'elle n'a pas de caractère rétroactif.
Quasi-usufruit et temporalité de la donation-cession
Lorsque la cession porte sur un immeuble démembré suite à une donation préalable de la nue-propriété et qu'elle prévoit un quasi-usufruit, il conviendra d'être vigilant et d'organiser le quasi-usufruit en amont de l'opération de cession, afin d'éviter que la donation de nue-propriété soit considérée comme fictive et l'usufruitier tenu pour seul vendeur du bien.
La vente en viager ou avec réserve du droit d'usage et d'habitation
La vente en viager ou la vente avec réserve du droit d'usage et d'habitation constituent également des techniques de cession optimisée à conseiller dans une optique d'ingénierie notariale et d'anticipation des modalités possibles de cession. Nous renvoyons ici aux développements en la matière (vente en viager ou avec réserve du droit d'usage et d'habitation) par le 116e Congrès des notaires de France :