L'exécution des obligations d'information précontractuelle au moyen d'outils numériques

L'exécution des obligations d'information précontractuelle au moyen d'outils numériques

Les outils mis à la disposition des futurs cocontractants par le monde du numérique s'avèrent particulièrement utiles dans le domaine de la transmission de données et plus particulièrement pour l'exécution de l'obligation d'information de droit commun (Sous-section I) . Au-delà de ces outils, certains contrats dits « de commerce électronique » sont proposés à distance et conclus par voie électronique. Le législateur les a encadrés en créant notamment une obligation spéciale d'information (Sous-section II) .

Le numérique et l'obligation d'information de droit commun

Le Code civil, tel que remanié par la réforme du droit des obligations résultant de l'ordonnance no 2016-131 du 10 février 2016, intègre désormais officiellement une obligation d'information lors de la phase des pourparlers. Cette obligation d'information est en pratique fréquemment confrontée à l'univers du numérique (§ I) , dont les outils permettent le transfert et la délivrance de l'information (§ II) .

L'obligation d'information dans l'univers du numérique

? La délivrance de l'information au stade de la formation du contrat a fait l'objet d'une évolution lente. ? Pendant longtemps, le législateur a considéré que chaque partie aux négociations était responsable et donc apte à s'informer par elle-même. Ce n'est qu'à partir du milieu du XX e siècle qu'un mouvement se crée avec une différenciation entre les parties destinée à assurer leur protection en fonction de leur vulnérabilité Sur l'évolution chronologique de l'obligation d'information, V. F. Terré, P. Simler, Y. Lequette et F. Chénedé, Précis de droit civil, Les obligations, Dalloz, 12e éd., p. 369. . Certaines sont considérées plus faibles que d'autres et donc méritant une protection particulière. L'économie évolue et creuse les différences entre les cocontractants. Il est établi qu'un marché efficient est un marché sur lequel l'information est fluide, transparente et fiable O. Cachard, Le contrat électronique dans la loi pour la confiance dans l'économie numérique : Rev. Lamy dr. civ. 1er sept. 2004, no 8. . Afin d'assurer la confiance des parties faibles, la jurisprudence d'abord Cass. 3e civ., 21 juill. 1993, no 91-20.639.?Cass. 1re civ., 5 déc. 1992, no 94-12.376.?Cass. com., 23 sept. 2014, no 13-22.763. , la loi ensuite L'ordonnance no 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des obligations a introduit un nouvel article 1112-1 dans le Code civil instaurant une obligation d'information précontractuelle, laquelle complète les nombreuses dispositions spéciales déjà existantes protégeant des catégories de contractants réputés faibles, au premier rang desquels les consommateurs (cf. C. consom., Livre 1er, Titre 1er, chapitre 1, relatif à l'obligation générale d'information précontractuelle). , a instauré une obligation précontractuelle d'information. Le nouvel article 1112-1 du Code civil (C. civ., art. 1112-1">Lien) impose ainsi à « celle des parties qui connaît une information dont l'importance est déterminante pour le consentement de l'autre [de] l'en informer dès lors que légitimement, cette dernière ignore cette information ou fait confiance à son cocontractant ». L'information sur l'estimation de la valeur de la prestation est ensuite expressément exclue par l'alinéa 2 du même article. Ce devoir, d'ordre public (al. 5), peut mener à une mise en cause de la responsabilité extracontractuelle de la partie défaillante, et si le contrat est conclu, à son annulation sur le fondement des vices du consentement Pour une étude plus approfondie de l'obligation précontractuelle d'information du Code civil, V. F. Terré, P. Simler, Y. Lequette et F. Chénedé, Précis de droit civil, Les obligations, Dalloz, 12e éd., p. 367 et s. .
La voie électronique est aujourd'hui omniprésente dans les échanges, notamment lors des négociations. Elle s'avère particulièrement pratique pour les communications entre les parties, outre les outils ci-après analysés facilitant les transmissions d'informations. Une directive européenne 2000/31/CE du 8 juin 2000 PE et Cons. UE, dir. 2000/31/CE, 8 juin 2000, relative à certains aspects juridiques des services de la société de l'information, et notamment du commerce électronique, dans le marché intérieur (« directive sur le commerce électronique »). transposée dans le Code civil aux articles initialement numérotés 1369-1 à 1369-9 et désormais 1125 à 1127-6 (C. civ., art. 1125 à 1127-6">Lien), encadre les contrats conclus par voie électronique.
? La transmission des informations et stipulations par voie électronique. ? L'article 1125 du Code civil (C. civ., art. 1125">Lien) entérine la possibilité de transmettre par voie électronique des stipulations contractuelles ou des informations sur des biens et des services. L'obligation précontractuelle d'information peut donc être exécutée de manière dématérialisée. Toutefois, le courrier électronique ne peut être utilisé que sur autorisation expresse et préalable de son destinataire (C. civ., art. 1126">Lien) pour toute transmission d'information en vue de la formation d'un contrat. En pratique, il semble opportun, si une convention encadrant les négociations est signée entre les parties, d'y intégrer une autorisation d'utilisation des courriers électroniques. Pour les professionnels mettant à disposition de leurs clients des formulaires de renseignements, un système de case à cocher d'autorisation préalable est également à privilégier.
S'agissant des professionnels, le Code civil les distingue des particuliers, ce qui est suffisamment rare pour être souligné dans ce réceptacle du droit commun des contrats. L'article 1127 du Code civil (C. civ., art. 1127">Lien) présume en effet l'accord préalable du professionnel nécessaire à la transmission par voie électronique des informations précontractuelles dès lors que ce dernier aura transmis son adresse e-mail. Il en sera par exemple ainsi lorsque le site internet d'une société mentionnera une adresse de contact. Cette présomption permet de fluidifier les échanges et d'éviter une remise en cause de l'exécution de l'obligation d'information. Il serait d'ailleurs peut-être opportun de l'étendre aux particuliers en supprimant simplement la mention de professionnel de l'article 1127 du Code civil. En effet, dans l'hypothèse où une adresse e-mail est transmise par un client, il semble légitime de penser que l'on peut librement l'utiliser pour lui transmettre valablement les informations précontractuelles sans lui demander son autorisation préalable.
L'obligation précontractuelle d'information peut donc s'exécuter par la voie numérique, notamment pour les professionnels. Les nouvelles technologies permettant de faciliter la communication et plus spécialement l'exécution de cette obligation d'information sont par ailleurs très nombreuses.

Les outils numériques transférant et délivrant l'information

Le numérique offre de nombreux outils susceptibles d'assister les parties dans la délivrance de l'information due dans le processus de formation du contrat. Certains d'entre eux facilitent uniquement la mise à disposition de l'information, d'autres vont plus loin en délivrant eux-mêmes cette information.
Parmi les outils de support des données, le principal est la plateforme d'accès, ou data room. Celle-ci consiste en un espace dématérialisé accessible à plusieurs avec des logins et mots de passe. Elle présente plusieurs avantages, disponibles ou non en fonction de son perfectionnement, parmi lesquels on répertorie :
  • un accès sécurisé ;
  • une capacité de stockage bien plus importante que les e-mails par exemple ;
  • une possibilité de télécharger les éléments partagés pour en assurer la conservation ;
  • un système de questions-réponses permettant les échanges entre les parties à la négociation au sujet des pièces communiquées ;
  • la mise à disposition de questionnaires clients avec une intégration automatique des données enregistrées ;
  • une conservation des données pour la période de la data room.
Dans une moindre mesure, les simples liens de téléchargement sont également des outils permettant de délivrer l'information de manière plus fluide. Ceux-ci ont pour avantage de transmettre en un envoi des données d'une taille bien supérieure à la capacité d'un e-mail Par ex., la société WeTransfer propose des envois gratuits de fichiers d'une taille maximale de deux gigaoctets, et des envois payants d'une taille maximale de vingt gigaoctets. . Cela a pour effet d'éviter une information diluée, un e-mail oublié, ou encore un envoi non abouti passé inaperçu dans une masse plus importante. Toutefois ces liens ont des durées de validité limitées, et certains utilisateurs n'ont pas encore pris l'habitude de télécharger les pièces dans le temps qui leur était imparti.
  • le visuel design : lequel consiste à utiliser des schémas, des vidéos, des bandes dessinées pour expliquer une notion juridique ;
  • le design de service : le concept est ici de créer des outils répondant aux besoins des utilisateurs afin de leur délivrer l'information qu'ils attendent. Cela nécessite donc une étude de marché destinée à identifier les inquiétudes et les interrogations des clients, pour ensuite réfléchir aux moyens les plus efficaces de les rassurer et de les informer ;
  • le design organisationnel : cela consiste à établir une stratégie de management destinée à répondre aux attentes des utilisateurs.
? Un autre outil de support est le legal design Pour des développements sur le legal design : V. infra, no . . ? Ce terme est apparu en France dans le courant de l'année 2015, reprenant les développements de Margaret Hagan M. Hagan, Law by design (www.lawbydesign.co/">Lien). apportant la première approche réfléchie en la matière. Le legal design a pour objectif, au moyen d'une approche empathique, d'adapter un discours à son interlocuteur. Ce n'est alors plus au client d'essayer de comprendre l'information qui lui est communiquée, mais au professionnel de personnaliser son discours de manière à ce qu'il soit compréhensible par son destinataire. L'objectif est ici de transmettre l'information, mais surtout qu'elle soit intelligible et donc assimilée, en vue d'une bonne exécution des engagements contractuels.
Le legal design a pu être divisé en trois catégories A. Boyer (avec la participation de C. Charles et F. Duthille), Innovation. Legaldesign : buzzword ou révolution ? : Rev. pratique de la prospective et de l'innovation mai 2019, no 1, prat. 1. :
Il existe deux types de chatbot :
  • celui qui n'est pas doté d'intelligence artificielle et ne fait donc que rechercher dans sa base de données une réponse prédéfinie à une question prédéterminée ;
  • celui doté d'intelligence artificielle pouvant tenir une conversation plus fluide et naturelle en s'alimentant des réponses de son interlocuteur.
S'agissant des outils délivrant eux-mêmes l'information, le principal est le chatbot, ou agent conversationnel. Celui-ci est l'addition d'un bot, c'est-à-dire un robot consistant en un programme informatique destiné à reproduire un comportement humain, et d'un chat, c'est-à-dire une conversation instantanée. Un chatbot est donc un robot destiné à tenir une conversation en langage naturel avec un interlocuteur Pour une définition en images : www.youtube.com/watch?v=CieBKkR_RzA">Lien .
On retrouve aujourd'hui les chatbots très couramment sur un certain nombre de sites internet Pour quelques exemples de sites avec des chatbots : SNCF.com (www.digital.sncf.com/actualites/venez-discuter-avec-le-1er-chatbot-transilien# :~ :text=Le%20chatbot%20a%20%C3%A9t%C3%A9%20con%C3%A7u%20pour%20vous%20aider,sur%20Facebook%20Messenger%2C%20en%20fran%C3%A7ais%20ou%20en%20anglais">Lien) ; la préfecture d'Île-de-France (www.prefectures-regions.gouv.fr/ile-de-france/Region-et-institutions/L-action-de-l-État/Economie-et-finances-publiques/Innovation-Recherche/Le-chatbot-NOA-une-nouvelle-offre-de-service-pour-les-start-up">Lien) ; laposte.fr. . Leur but est d'informer les utilisateurs sur des sujets récurrents et généralement simples. L'avantage est double : il permet une information immédiate et désengorge les services « humains » destinés à répondre aux questions plus complexes, de manière donc plus rapide et efficace. En outre, il existe souvent des traductions automatiques permettant un accès aux données dans plusieurs langues.
Les chatbots posent plusieurs questions juridiques :
  • tout d'abord celle de la preuve de la délivrance de l'information : suffit-il de mettre à disposition un chatbot avec une base de données pour considérer que l'information était accessible à l'utilisateur et donc délivrée ? L'article 1112-1 du Code civil (C. civ., art. 1112-1">Lien) dispose qu'« il incombe à celui qui prétend qu'une information lui était due de prouver que l'autre partie la lui devait, à charge pour cette autre partie de prouver qu'elle l'a fournie ». Une fois que l'utilisateur aura prouvé qu'une information lui était due, il reviendra à l'entreprise ayant recours au chatbot de prouver que ce dernier a bien délivré l'information. À ce jour, il n'y a pas de jurisprudence en matière de chatbot et de preuve de la délivrance de l'information par ce biais. Il semble toutefois possible de considérer que le partage d'un chatbot avec une base de données permet de préconstituer la preuve de la mise à disposition de l'information, et donc de sa délivrance, à condition de pouvoir établir que le chatbot savait délivrer l'information conflictuelle ;
  • ensuite, celle de la perception par le robot de la compréhension de l'information par son destinataire. Certes, l'obligation d'information ne porte que sur la transmission, et non la compréhension. Toutefois le chatbot trouve ici ses limites par rapport à l'humain car, contrairement à ce dernier, l'agent conversationnel n'est pas capable de percevoir si l'information transmise est assimilée ou non. L'obligation d'information est donc remplie, mais sans assurer la protection souhaitée par le Code civil ;
  • enfin, celle de la responsabilité en cas d'erreur du chatbot : l'obligation d'information ne sera pas exécutée, et donc la responsabilité de son débiteur pourra être engagée, voire le contrat annulé.
L'obligation précontractuelle d'information s'intègre donc au monde du numérique, dont les outils permettent une exécution plus fluide et efficace. Les données et informations ainsi transmises présentent toutefois le risque d'être surabondantes et de ne pas mettre en évidence les informations essentielles.
À cette obligation de droit commun, s'ajoute une obligation spéciale aux contrats de commerce électronique.

L'obligation d'information spéciale au contrat de commerce électronique

Le commerce électronique est défini par l'article 14 de la loi pour la confiance dans l'économie numérique (LCEN) du 21 juin 2004 L. no 2004-575, 21 juin 2004, pour la confiance dans l'économie numérique, dite « LCEN » : JO 22 juin 2004, no 0143. comme « l'activité économique par laquelle une personne propose ou assure à distance et par voie électronique la fourniture de biens ou de services. Entrent également dans le champ du commerce électronique les services tels que ceux consistant à fournir des informations en ligne, des communications commerciales et des outils de recherche, d'accès et de récupération de données, d'accès à un réseau de communication ou d'hébergement d'informations, y compris lorsqu'ils ne sont pas rémunérés par ceux qui les reçoivent ». Cette définition crée un large champ d'application, sans distinction des professionnels et des consommateurs, auxquels l'obligation précontractuelle d'information spécifique au commerce électronique s'applique donc. Cette obligation se distingue de celle du Code civil par son contenu, d'une part (§ I) , et par son régime, d'autre part (§ II) .

Le contenu de l'information précontractuelle dans le commerce électronique

La LCEN transpose pour partie la directive précitée du 8 juin 2000 V. supra, no . notamment son article 5 créant une obligation d'information spéciale. Il est précisé que celle-ci s'ajoute aux autres informations dont la transmission est déjà imposée par le droit communautaire. L'article 19 de la LCEN intègre donc au droit français cette obligation d'information qui a vocation à s'appliquer « sans préjudice des autres obligations d'information prévues par les textes législatifs et réglementaires en vigueur ».
  • l'un relatif au prestataire ;
  • l'autre relatif à la prestation.
Les auteurs Sur l'obligation d'information dans le commerce électronique, V. JCl. Commercial, fasc. 872, Vo Droit commun des plateformes numériques. Le déroulement de la relation entre la plateforme et les usagers, par S. Zinty.?N. Mathey, Commerce électronique. Le commerce électronique dans la loi no 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique : Contrats, conc. consom. oct. 2004, no 10, étude 13.?JCl. Commercial, fasc. 860, Vo Commerce électronique et protection du consommateur, par J.-M. Bruguière.?JCl. Contrats-Distribution, fasc. 2420, Vo Pratique des contrats électroniques, par J. Huet.?P. Stoffel-Munck, La réforme des contrats du commerce électronique : JCP E 16 sept. 2004, no 38, 1341.?O. Cachard, Le contrat électronique dans la loi pour la confiance dans l'économie numérique : Rev. Lamy dr. civ. 1er sept. 2004, no 8. divisent traditionnellement cette nouvelle obligation d'information en deux contenus distincts :
L'information relative au prestataire Loi pour la confiance dans l'économie numérique (LCEN), art. 19. est destinée à permettre l'identification de la personne assurant ou proposant la fourniture d'un bien ou d'un service par la voie électronique. Les informations requises pour une personne physique sont ses prénom et nom, et pour une personne morale sa raison sociale, ainsi que pour tous, une adresse postale et électronique et un numéro de téléphone. Si le prestataire est inscrit au répertoire des métiers ou au registre du commerce et des sociétés, son numéro d'inscription doit également être fourni, avec son capital social et l'adresse du siège social. En cas d'assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée, le numéro individuel d'identification est à fournir. Si le prestataire est soumis à un régime d'autorisation, l'autorité ayant délivré cette autorisation doit être rappelée. Enfin, s'il est membre d'une profession réglementée, les règles applicables à la profession exercée, le titre professionnel, l'État membre dans lequel il a été octroyé et l'ordre professionnel auquel il appartient doivent être indiqués. Il a ainsi été évoqué l'émergence d'un véritable « principe d'identification des parties » O. Cachard, La régulation internationale du marché électronique, LGDJ, 2002, préf. Ph. Fouchard, no 239. . Cette obligation s'explique par la dématérialisation du contrat conclu à distance entre des parties qui ne se rencontrent pas physiquement et n'échangent pas de vive voix. Il est donc important, pour assurer la confiance nécessaire à la conclusion de toute convention, que le destinataire de cette proposition de service puisse identifier son auteur. D'autant plus qu'il existe désormais de nombreux labels et certifications permettant ensuite de s'assurer de la qualité du prestataire et de ses produits Par ex. en matière de restauration et d'hôtellerie, le système des notes attribuées à des établissements par le biais de sites internet comme TripAdvisor, ou encore les « Avis Vérifiés », voire les labels de qualité officiels comme les normes ISO. .
L'article 19 de la LCEN ajoute que ces informations doivent être mises à disposition des utilisateurs via « un accès facile, direct et permanent utilisant un standard ouvert ». Cela tend à exclure les liens hypertextes et impose la communication des données de manière lisible par des logiciels classiquement présents sur des ordinateurs personnels, sans qu'il soit nécessaire d'installer des programmes particuliers.
Pour les sociétés, cette « obligation d'identification » ne présente pas une grande innovation dans la mesure où un certain nombre de ces informations sont déjà à communiquer sur les documents officiels Par ex., l'art. L. 441-3 du Code de commerce prévoit les mentions obligatoires sur les factures et l'article L. 221-9 du Code de la consommation liste les informations à communiquer au consommateur relativement équivalentes. . L'apport de la LCEN en la matière concerne surtout la chronologie dans la mesure où ces données sont à indiquer avant la conclusion de tout contrat, et même en dehors de toute offre de contracter.
L'article 19 de la LCEN constitue en revanche une avancée dans les relations C to C pour lesquelles aucune obligation d'identification n'existait. Elle apparaît d'autant plus importante dans ces rapports que les consommateurs n'ont pas les obligations renforcées que peuvent avoir les professionnels. Il est donc primordial que les utilisateurs puissent s'identifier avant de contracter, notamment pour vérifier le sérieux de l'auteur de la proposition. L'idée ici encore est de créer la confiance nécessaire préalablement à la signature d'un contrat.
L'information relative à la prestation est double : elle concerne le prix et, pour les professionnels uniquement, les conditions contractuelles.
S'agissant de l'information sur le prix, celle-ci doit être communiquée de manière « claire et non ambiguë » LCEN, art. 19. , et ce même si la proposition de service ou de bien n'emporte pas offre de contracter. Les éventuels frais et taxes de livraison doivent également être renseignés. L'article 19 de la LCEN précise que cette obligation d'information n'est pas exclusive des autres obligations tant législatives que réglementaires pouvant exister en matière de prix.
S'agissant de l'information sur les conditions contractuelles, l'article 1127-1 du Code civil (C. civ., art. 1127-1">Lien) impose au professionnel uniquement de mettre à disposition de ses clients les dispositions contractuelles « d'une manière qui permette leur conservation et leur reproduction ». L'objectif du législateur est de sécuriser et mettre le destinataire de l'offre en confiance préalablement à la prise de tout engagement par la communication des conditions du contrat à venir. L'emplacement de cette disposition dans le Code civil fait bénéficier de cette information tant le destinataire professionnel que consommateur. Toutefois, l'article 1127-3 (C. civ., art. 1127-3">Lien) du même code prévoit le caractère supplétif de cette obligation dans les relations entre professionnels et pour les contrats conclus exclusivement par voie de courriers électroniques. Il s'agit du résultat de la transposition de la directive précitée du 8 juin 2000 impérative dans les relations B to C Lesquelles relations sont également régies par l'obligation spéciale d'information du consommateur de l'article L. 221-14 du Code de la consommation prévoyant dans le cadre d'un contrat conclu par voie électronique la transmission des « caractéristiques essentielles des biens ou des services qui font l'objet de la commande, à leur prix, à la durée du contrat et, s'il y a lieu, à la durée minimale des obligations de ce dernier au titre du contrat ». , mais simplement supplétive dans les relations B to B et C to C.
Cette obligation d'information imposée aux professionnels dépasse les seules conditions contractuelles puisqu'il est ensuite prescrit de transmettre également les étapes de conclusion du contrat par voie électronique ; les moyens techniques offerts au destinataire de l'offre pour détecter et corriger les éventuelles erreurs avant la conclusion du contrat ; les langues proposées pour le contrat, en ce compris le français ; les modalités d'archivage du contrat et de sa consultation ; et éventuellement, les règles professionnelles et commerciales auxquelles le professionnel se soumet.
Le contenu de l'information devant être communiqué dans le cadre du commerce électronique étant déterminé, il y a lieu de définir son champ d'application et les sanctions de son non-respect.

Le champ d'application et les sanctions de l'information précontractuelle dans le commerce électronique

Le champ d'application de l'obligation précontractuelle d'information dans le commerce électronique dépasse tout d'abord le seul cadre de l'offre de contracter. Les articles 14 et 19 de la LCEN, reprenant l'article 5 de la directive du 8 juin 2000, visent « la proposition » de biens ou de services. Les auteurs P. Stoffel-Munck, La réforme des contrats du commerce électronique : JCP E 16 sept. 2004, no 38, 1341. distinguent cette proposition de la véritable offre au sens de l'article 1114 du Code civil (C. civ., art. 1114">Lien). Pourtant, l'obligation faite de fournir les informations relatives au prix et à la prestation ou le service proposé peuvent rapprocher cette proposition de l'offre. La différence se fait alors sur la volonté de son auteur d'être lié en cas d'acceptation, laquelle volonté ne se retrouve pas toujours avec les simples propositions. On peut d'ailleurs observer que l'article 1127-1 du Code civil (C. civ., art. 1127-1">Lien) crée le trouble sur ce point en évoquant tout d'abord la « proposition » puis « l'offre », tendant à la confusion des deux notions.
Ensuite, l'obligation relative à l'identité du prestataire et aux prix s'impose tant aux professionnels qu'aux particuliers, conformément à la directive transposée. Cette dernière fait la différence entre les « prestataires » et les « prestataires établis ». Les « prestataires » sont définis par la directive comme « toute personne physique ou morale qui fournit un service de la société de l'information », tandis que le prestataire établi est défini comme « le prestataire qui exerce d'une manière effective une activité économique au moyen d'une installation stable pour une durée indéterminée ». Contrairement à l'obligation d'information de l'article 1127-1 du Code civil réservée aux professionnels, comme rappelé dans les développements qui précèdent V. supra, no . , cette obligation relative à l'identité du prestataire et aux prix s'impose dans toutes les relations, y compris dans les relations B to B et C to C.
Enfin, l'obligation d'information de l'article 19 de la LCEN s'impose également aux « services tels que ceux consistant à fournir des informations en ligne, des communications commerciales et des outils de recherche, d'accès et de récupération de données, d'accès à un réseau de communication ou d'hébergement d'informations, y compris lorsqu'ils ne sont pas rémunérés par ceux qui les reçoivent » LCEN, art. 14 ci-dessus rappelé définissant le prestataire concerné par l'obligation d'information. . Ce qui signifie que les plateformes numériques, bien que ne jouant qu'un rôle d'intermédiaire, sont également concernées, tout comme les comparateurs et autres moteurs de recherche. Cela s'explique par le fait que l'utilisateur doit avoir un accès simple et direct à l'information.
Les sanctions de l'obligation précontractuelle d'information dans le commerce électronique ne sont pas évoquées par la directive du 8 juin 2000, ni par la LCEN et le Code civil. Il y a lieu de distinguer les sanctions en fonction de la nature des informations non transmises En ce sens : JCl. Commercial, fasc. 860, Vo Commerce électronique et protection du consommateur, par J.-M. Bruguière. .
Si le défaut de transmission porte sur les conditions contractuelles, l'article 1119 du Code civil (C. civ., art. 1119">Lien) dispose en son premier alinéa que « les conditions générales invoquées par une partie n'ont effet à l'égard de l'autre que si elles ont été portées à la connaissance de celle-ci et si elle les a acceptées ». La sanction est donc l'inopposabilité.
Si le défaut de transmission porte sur les informations relatives au prix, à la prestation ou au service, à la langue, ou encore à l'identification du prestataire, tout dépend des conséquences de ce manquement. Dans la mesure où ces informations peuvent être essentielles au consentement, notamment le détail de la prestation, le défaut de communication peut être sanctionné sur le terrain du droit commun des contrats par la nullité. Celle-ci résulte alors d'un vice du consentement : erreur ou dol. S'agissant de l'erreur sur la valeur, elle n'est pas en elle-même cause de nullité (C. civ., art. 1136">Lien), sauf en cas d'erreur sur une qualité essentielle se répercutant sur la valeur ou en cas de dol portant sur la valeur de la prestation contractuelle (C. civ., art. 1139">Lien). Si le défaut de communication empêche la rencontre des volontés sur les éléments essentiels du contrat, comme le prix, alors le contrat n'a même pas pu se former. Dans l'hypothèse où le défaut d'information n'entraînerait pas un vice du consentement, la responsabilité du prestataire pourrait être engagée avec l'octroi de dommages-intérêts. L'intérêt d'une convention régissant les négociations se retrouve ici aussi avec l'encadrement de cette responsabilité basculant dans le domaine contractuel. Toutefois, les contrats de commerce électronique ne sont pas majoritairement ceux pour lesquels de tels accords se retrouvent. La responsabilité du prestataire relève donc a priori du domaine délictuel. La doctrine reste dans l'attente de jurisprudence en la matière.

Responsabilité délictuelle et contractuelle, enjeux de la qualification

La responsabilité délictuelle est plus intéressante pour la victime pour deux raisons :
  • �la première concerne l'étendue du dommage réparé : lorsque la responsabilité est de nature délictuelle, la totalité du préjudice est indemnisée, alors que la responsabilité contractuelle se limite à la réparation du seul dommage prévisible ;
  • �la seconde concerne la prohibition des clauses limitatives ou élusives de responsabilité en matière délictuelle, alors qu'elles peuvent être autorisées en matière contractuelle.
En dehors du secteur des plateformes numériques, où le contrat d'adhésion est roi, le monde numérique connaît également des contrats négociés par les parties. La tenue des pourparlers devant ou non mener à des accords contractuels doit se faire dans le respect du principe de confidentialité (C. civ., art. 1112-2">Lien). Lequel principe est en pratique mis à l'épreuve dans l'environnement digital.