Pour un urbanisme négocié

Pour un urbanisme négocié

L'urbanisme de projet est le marchepied vers l'urbanisme négocié, de plus en plus prôné pour la production d'un foncier constructible 1507490036005. L'urbanisme négocié se différencie de l'urbanisme de projet en ce qu'il correspond à une contractualisation des relations entre l'administration et ses interlocuteurs. Cette contractualisation existe d'ores et déjà dans le cadre d'un urbanisme concerté (§ I), qu'il faudrait dépasser pour aboutir à un véritable urbanisme négocié (§ II).

L'urbanisme concerté

– Une contractualisation encadrée. – La contractualisation dans le cadre d'un urbanisme concerté laisse le pouvoir de décision à la collectivité et vise essentiellement au financement d'équipements publics. Ainsi, l'aménagement étant une prérogative de puissance publique, l'autorisation du projet d'urbanisme reste toujours de la compétence administrative. L'aménageur bénéficiaire d'une concession d'aménagement ne fait que réaliser un projet décidé par la collectivité avec laquelle il contracte et ayant d'ailleurs souvent fait l'objet de décisions unilatérales d'urbanisme 1507578897329.
Le projet urbain partenarial (PUP) est de cette même veine contractuelle, limité à l'urbanisme concerté et s'arrêtant aux confins de la négociation. Les premiers projets de rédaction de la loi le concernant prévoyaient une contractualisation sur l'évolution des documents d'urbanisme. Mais, le Conseil d'État ayant manifesté sa désapprobation, le PUP est resté la convention financière que l'on connaît, même s'il est évident qu'il engendre des négociations et que les préoccupations d'urbanisme n'en sont jamais éloignées. Les retours d'expérience sont plutôt positifs quant à ces PUP 1508267193832, même si la question du sort des espaces collectifs pose souvent difficultés.
– Les SEMOP. – La société d'économie mixte à opération unique (SEMOP) 1508266422605peut également être un outil de coopération entre le secteur public, représenté par une collectivité ou un groupement de collectivités locales détenant entre 34 % et 85 % du capital social, et le secteur privé, constitué d'un ou plusieurs opérateurs économiques détenant entre 15 % et 66 % du capital. La compétition entre promoteurs ou aménageurs n'a pas lieu pour l'attribution d'un contrat, mais en amont, pour la sélection des partenaires privés de la collectivité publique. Ce type de partenariat paraît d'autant plus propice à la qualification d'urbanisme concerté que la SEMOP n'a vocation à exécuter que le seul et unique objet du contrat attribué par la personne publique. En cas d'opération de construction d'un programme de logements par exemple, la société sera dissoute dès la réalisation de son objet.
– La concertation citoyenne. – La concertation n'est pas l'apanage des acteurs directs de l'urbanisme. La population est prête à accepter l'adaptation des règles du paysage urbain, dès lors qu'elle a lieu en concertation avec les habitants, et qu'elle recherche un équilibre entre mutation raisonnée et caractère du quartier. Indépendamment de toutes les règles d'urbanisme, dont elle n'a d'ailleurs souvent pas une connaissance précise, elle cherche surtout à éviter les transformations brutales et sans transition. À cet égard, elle est demanderesse d'implication.
L'ordonnance du 3 août 2016 1507322321132démocratise le dialogue environnemental. En ouvrant la prise de décision à la participation du public, elle cherche à lui donner une légitimation démocratique.
De plus en plus de projets sont ainsi soumis à la concertation de la population, quand ils ne sont pas « coproduits » avec les usagers 1508269283011.

L'urbanisme réellement négocié

– L'urbanisme, un pouvoir de police administrative. – Les professionnels sont demandeurs d'une administration autorisée à négocier directement avec eux, comme cela se pratique parfois à l'étranger 1507580881955.
Mais l'urbanisme constitue un pouvoir de police administrative. Ainsi, l'autorité compétente pour délivrer une autorisation d'urbanisme ne peut contracter avec un promoteur en dehors des cas prévus par la loi, et s'engager à lui délivrer un permis d'aménager ou de construire en contrepartie d'avantages pour la collectivité 1507580162417.
Dès lors, les outils contractuels tolérés demeurent modestes et d'application limitée. Il s'agit principalement de conventions et de chartes conclues entre les collectivités locales et les professionnels ou les propriétaires. Malheureusement, sans doute soucieuses de contracter au mieux des intérêts des citoyens qu'elles représentent, les collectivités se montrent souvent très exigeantes. Ainsi, la plupart de ces chartes ou conventions reposent sur une série d'obligations contraignantes. La conception des bâtiments, leur insertion dans l'environnement, leur commercialisation mais également leur densité sont alors contrôlées par la puissance publique 1507150025833. Quant aux promoteurs, il n'est pas toujours facile de leur faire comprendre que ces contrats ne sont pas conçus pour leur permettre de dépasser les limites réglementaires !
L'une des objections majeures à une réforme en profondeur du droit de l'urbanisme vers une contractualisation semblant pourtant de nature à faciliter la densification est la crainte de l'arbitraire. Un changement de l'échelon décisionnaire quant à la délivrance des autorisations d'urbanisme serait peut-être de nature à aplanir en partie cette inquiétude.
– La négociation sans texte. – Plus que tous les outils juridiques créés ces dernières années, il apparaît que la meilleure matière première de l'urbanisme négocié est encore le discours permanent basé sur la confiance que certains promoteurs et aménageurs parviennent à nouer avec les élus sur certains projets ciblés. Les premiers accords de discussion, sous forme de « conventions d'objectifs » ou de « conventions de partenariat », échappent à la loi des marchés publics. Après des mois de mise au point en commun, de concertations, d'efforts réciproques pour faire coïncider des calendriers souvent différents, la loi MOP ne gêne pas les prises de décisions finales 1508268224326.