Les modalités de sortie des associés

Les modalités de sortie des associés

– Le contexte. – Le départ d'un actionnaire, majoritaire ou minoritaire et notamment, dans cette dernière hypothèse, lorsqu'il s'agit d'un investisseur, peut être un moment critique pour l'entreprise car cela bouleverse sa table de capitalisation et par extension sa gouvernance et ses finances. Les pactes d'associés prévoient donc systématiquement des clauses de sortie organisée. Certaines auront vocation à s'appliquer dans l'hypothèse d'une situation de crise ou de blocage (comme par exemple la clause de buy or sell) ; d'autres organiseront une sortie ordonnée d'un actionnaire (comme la clause de sortie conjointe).
Nous allons donc étudier ces principales clauses rencontrées dans les pactes d'associés.
Il convient ici de préciser que toutes ces clauses sont nées de la pratique ; pour certaines, les conditions de validité peuvent être parfois discutées, ce qui impliquera une rédaction particulièrement fine, fondée essentiellement sur les règles générales du droit des contrats.

La clause de rachat

– Sa philosophie. – Elle a pour but de permettre à un associé minoritaire d'être certain que ses titres seront rachetés à un prix minimum, en général au prix d'acquisition ou de souscription augmenté d'un intérêt conventionnel. Cet engagement est pris par l'associé majoritaire.
– Sa validité juridique. – Cette clause, issue de la pratique, comme souvent en la matière, a interrogé la doctrine sur sa validité. Cette dernière considérant qu'une telle stipulation permettait à l'actionnaire d'échapper aux pertes de la société.
Malgré ces interrogations, la jurisprudence en a admis la validité dès les années 1980 sur le fondement de l'équilibre de l'opération, l'existence d'une promesse de vente ou le maintien d'un certain aléa.
Ce type de clause figurera essentiellement dans un pacte extrastatutaire qui offrira une plus grande liberté que des statuts.

La clause de retrait

– Sa philosophie. – La clause de retrait permet à l'investisseur de se retirer de la société à l'occasion de certains événements qui devront être définis, comme par exemple une fusion ou une augmentation de capital réservée.
– Sa mise en œuvre. – Dans ce contexte, les associés majoritaires s'engagent à acquérir ou faire acquérir la participation de l'associé minoritaire à un prix déterminé ou déterminable.
L'investisseur bénéficiera alors d'une promesse d'acquisition de ses titres qu'il pourra lever selon les termes qui auront été convenus.

Les clauses de déblocage

La clause de buy or sell

– Sa philosophie. – La clause de buy or sell est généralement insérée dans un pacte d'associés pour sortir d'une situation de blocage, très souvent en présence de deux associés qui sont à égalité.
Très variable dans sa rédaction, cette clause se définit comme permettant « à un actionnaire de proposer la vente de ses titres à un prix déterminé à un autre actionnaire à défaut de quoi il sera tenu d'acquérir les siens au prix auquel il était prêt à les lui céder ».
– Le mécanisme. – Dans sa forme la plus simple, la clause de buy or sell repose sur une offre faite à l'un des associés de céder ses titres à un prix qu'il propose et, en cas de refus, d'acheter les titres de son associé pour un prix identique. Il y a donc une double offre : une offre de cession de ses titres et, à défaut, une offre d'achat des titres de l'autre partie. Rédigée ainsi, la clause ne permettra pas de sortir d'un conflit, car tant qu'il n'y a pas eu d'acceptation d'une offre, c'est le statu quo.
En pratique, afin d'être certain que la clause permettra la sortie d'un des deux associés, chaque partie aura la possibilité de déclencher la clause, ce qui aboutira, nécessairement, à la sortie de la société de l'une d'entre elles. La clause combine alors une offre et une double promesse.
– Un exemple concret. – Un associé A prend l'initiative d'offrir à son partenaire B de vendre ses titres. Si B refuse, la clause de buy or sell déclenchera le jeu de deux promesses. B ayant refusé d'acquérir les titres de A sera tenu de vendre ses titres à A qui sera tenu de les lui acquérir par une promesse d'achat aux mêmes conditions que l'offre qu'il avait faite.
La clause peut-être en sens inverse où A prend l'initiative d'acquérir les titres de B, qui, s'il refuse, déclenchera le jeu d'une promesse d'achat et d'une promesse de vente corrélative.
– Le point de vigilance. – Cette clause présente un réel intérêt en présence de deux associés, à égalité, qui ont le même poids économique ou décisionnel. Elle offre en effet à chacune des parties la possibilité soit de vendre ses titres, soit en cas de refus, d'acquérir les titres de son partenaire. Encore faut-il que l'associé en ait la capacité économique et c'est là la limite de cette clause.
L'autre limite tient au fait que l'on ne peut être certain de l'associé qui restera dans la société, dans la mesure où chacun peut mettre en œuvre cette clause et donc, in fine, sortir de la société. En conséquence, si l'un des associés est clé pour l'entreprise, cette clause n'est pas souhaitable car sa sortie potentielle pourrait la déstabiliser.

La clause d'impasse

– Son contexte. – La clause d'impasse a pour objet de régler par avance la situation de blocage dans laquelle se trouve la société du fait des dissensions entre ses associés. Ce type de clause trouvera particulièrement à s'appliquer en présence d'une société détenue à parts égales par deux associés.
La notion d'impasse doit être définie, notamment quant au degré d'intensité requis pour la mettre en œuvre, avec une procédure faisant appel à un tiers indépendant qui sera là pour l'activer. Il s'agit en pratique de définir les modalités de séparation qui s'imposeront, comme par exemple le recours à un mode alternatif de règlement des différends (type médiation). Cet accord peut parfaitement concerner la dissolution de la filiale commune, par exemple.

Les clauses de cession coordonnée

– Le cadre. – Sous cette appellation, plusieurs mécanismes trouvent leur place.

La clause de sortie conjointe

– La clause de sortie conjointe. – En premier lieu, il s'agit de la clause de sortie conjointe aux termes de laquelle un actionnaire, généralement majoritaire, s'engage à faire acquérir par le cessionnaire de ses titres les actions détenues par un ou plusieurs autres actionnaires qui n'avaient pas exercé leur droit de préférence. La cession des titres du bénéficiaire de la clause s'effectue normalement aux mêmes conditions financières que celles de l'actionnaire qui s'oblige ; mais il peut arriver que le prix payé au minoritaire subisse une décote, compte tenu du moindre intérêt de sa participation.
– Son régime juridique. – La clause de sortie conjointe s'analyse classiquement en une promesse de porte-fort prévue par les articles 1204 et suivants du Code civil. En cas de ratification par le tiers acquéreur, le promettant est libéré de son obligation. Dans le cas contraire, le promettant s'expose à une condamnation à des dommages-intérêts en raison de l'inexécution de son obligation, dont le montant est très souvent fixé à l'avance sous la forme d'une clause pénale.
– Les conséquences de son inexécution. – Néanmoins, l'inexécution de la clause, même assortie d'une indemnisation, ne satisfera pas le bénéficiaire de la clause qui restera associé, bien souvent minoritaire, et donc sans liquidité de ses titres. Ainsi est-il souvent préférable de prévoir, par la stipulation d'une promesse unilatérale d'achat sous condition suspensive, le rachat des titres du minoritaire par le promettant (ayant également la qualité de cédant) en cas de refus du tiers cessionnaire de les acquérir en vertu de la clause de sortie conjointe.
– Une alternative. – De façon plus contraignante, les parties peuvent retenir une clause de sortie forcée qui permettra d'obliger l'autre partie contractante à céder ses actions au tiers cessionnaire en même temps que les siennes et à un prix généralement identique. L'intérêt pour le minoritaire est d'être certain de pouvoir rendre liquide sa participation aux mêmes conditions sans décote que l'associé majoritaire en obligeant l'associé majoritaire à respecter la clause. Elle permet également au cédant majoritaire de s'assurer que l'associé minoritaire ne bloquera pas la cession en conservant une minorité du capital social alors que le cessionnaire souhaite acquérir 100 % du capital social.

La clause de sortie proportionnelle

– Son mécanisme. – Variante de la clause de sortie conjointe, la clause de sortie proportionnelle s'en distingue en ce que la cession ne porte pas sur la totalité des actions du bénéficiaire, mais seulement sur un pourcentage défini proportionnellement à la cession opérée par le promettant. Foncièrement, le mécanisme de cette clause est donc identique à celui de la clause de sortie conjointe et n'en diffère que par ses modalités. Parmi celles-ci, à mi-chemin de la clause de sortie proportionnelle et de la clause de sortie conjointe, il peut être prévu qu'en cas de franchissement à la baisse d'un certain seuil de participation par le majoritaire du fait de la cession, celui-ci s'oblige à faire racheter ou à racheter lui-même la totalité des actions du minoritaire.

La clause de sortie prioritaire

– Sa philosophie. – La clause de sortie prioritaire permet à un actionnaire, en règle générale un investisseur, de sortir de la société par priorité aux autres associés, lesquels s'engagent à ce qu'un éventuel tiers cessionnaire acquière d'abord les titres du bénéficiaire du pacte. La mise en œuvre de la clause peut être conditionnée par la survenance d'un élément objectif.
– Son régime juridique. – Cette clause s'analyse soit en une promesse de porte-fort, lorsqu'un des membres du pacte entend céder ses actions, soit en une obligation de faire, sorte de promesse de bons offices consistant à rechercher un tiers acquéreur.
Afin de rendre cette clause véritablement efficace, elle est fréquemment doublée d'une promesse unilatérale d'achat par les signataires du pacte permettant à son bénéficiaire de lever l'option si aucun tiers acquéreur ne se présente et, au besoin, d'obtenir l'exécution forcée de la vente.

La clause de sortie pactée

La clause de sortie pactée
– Sa philosophie. – La clause de sortie pactée est destinée à assurer aux acquéreurs de titres faisant partie d'un pacte d'actionnaires qu'ils deviendront automatiquement membres du pacte. Généralement le pacte d'associés comprend une clause aux termes de laquelle il est stipulé qu'aucune partie au pacte ne pourra céder ses actions à un tiers sans que celui-ci y ait expressément adhéré.
À titre de variante, il peut être prévu que certaines clauses bénéficieront au tiers acquéreur sur sa simple demande.
– Les conséquences de la non-exécution de la clause. – Si la rédaction de la clause prend la forme d'une promesse de porte-fort, la non-exécution se résoudra en dommages-intérêts.
Si, en revanche, la clause de sortie pactée prend la forme d'une obligation de ne pas faire, les autres associés ne pourront demander que des dommages-intérêts, sauf en cas de collusion frauduleuse entre le cédant et le cessionnaire. Dans cette dernière hypothèse, les autres associés, membres du pacte, pourront obtenir l'annulation de la cession en vertu du principe fraus omnia corrumpit .
Pour plus d'efficacité de la clause, nous pourrons prévoir que cette obligation est attachée à l'action par le mécanisme des actions privilégiées, de telle sorte que la cession de l'action entraînera automatiquement l'adhésion au pacte « encapsulé » dans ladite action.

La clause d'exclusion forcée

– Le contexte. – Nous réservons volontairement pour la fin de ce développement consacré aux clauses extrastatutaires, l'examen d'une clause d'exclusion forcée incluse dans un tel pacte.
– Son objectif et ses limites. – La clause d'exclusion permet d'évincer un associé de la société en lui imposant le rachat forcé de ses titres. Si l'on voit aisément l'intérêt d'une telle clause en cas de mésentente ou d'obstruction d'un associé, sa validité est fragile et discutée car elle heurte plusieurs droits fondamentaux de l'associé : le droit de rester associé, le principe d'égalité des actionnaires, le droit de propriété. Toutefois, une forme sociale en reconnaît expressément la validité. Pour les autres formes sociales, la validité dépendra de sa nature et de ses modalités.
– La validité de la clause. – Si une partie de la doctrine valide a priori la clause d'exclusion concernant l'ensemble des associés, au sein d'une convention extrastatutaire, et pour des motifs et selon des modalités prédéfinis, cette position est loin de faire l'unanimité, quand la jurisprudence semble la condamner.
Si les principes de liberté contractuelle et d'autonomie de la volonté devraient en théorie permettre de prévoir l'exclusion d'un associé dans un pacte extrastatutaire, il est évident que cette convention ne doit contredire ni la loi, ni les statuts.
Néanmoins, en raison de la très grande diversité des clauses d'exclusion rencontrées en pratique, qui ne sont pas des « clauses d'exclusion directe » au sens de la jurisprudence précitée et qui prennent le plus souvent la forme de promesses unilatérales de vente, il ne faudrait pas en conclure trop hâtivement que ce type de clause n'a pas sa place dans un pacte extrastatutaire.
À ce niveau là, faire un renvoi à l'annexe dénommée « Bible clauses pactes d'ationnaires ». C'est dans les annexes fournies.