Le législateur, par la codification

Le législateur, par la codification

Le législateur, par la codification

– Proposition : codifier l'obligation de contribuer aux charges du ménage. – La modification du Code civil semble être la meilleure solution, à long terme, afin de permettre à chaque notaire d'anticiper, conseiller et pacifier la contribution aux charges du ménage pour une société harmonieuse, et ce tant pour les couples en union libre (Sous-section III) que ceux pacsés (Sous-section II) et mariés (Sous-section I).

Pour les époux : les articles 214 et 1537 du Code civil

– Codifier le périmètre de la contribution aux charges du mariage. – Cette codification pourrait s'effectuer en deux temps : pour tous les époux (C. civ., art. 214) et pour les époux séparés de biens (C. civ., art. 1537).

Codifier le périmètre de la contribution aux charges du mariage

Au regard de l'argumentaire dans les développements qui précèdent, une proposition émanera de nos travaux.
Elle consistera à modifier les articles 214 et 1537 du Code civil afin, d'une part, d'entériner la jurisprudence de la Cour de cassation concernant la contribution aux charges du mariage, et, d'autre part, de prévoir le périmètre de cette contribution auquel les époux pourraient déroger conventionnellement.

Pour tous les époux

– Rédaction actuelle de l'article 214 du Code civil. Version en vigueur depuis le 1er juillet 1976. – « Si les conventions matrimoniales ne règlent pas la contribution des époux aux charges du mariage, ils y contribuent à proportion de leurs facultés respectives.
Si l'un des époux ne remplit pas ses obligations, il peut y être contraint par l'autre dans les formes prévues au Code de procédure civile. »
– Proposition d'une nouvelle rédaction de l'article 214 du Code civil. – « Si les conventions matrimoniales ne règlent pas la contribution des époux aux charges du mariage, ils y contribuent à proportion de leurs facultés respectives.
La notion de charges du mariage est entendue largement, et dépend du train de vie que les époux se sont donné d'un commun accord. Sont concernés les dépenses de nourriture, de logement, de vêtements des époux et des enfants, de transport, ainsi que les frais d'entretien et d'éducation des enfants.
Si l'un des époux ne remplit pas ses obligations, il peut y être contraint par l'autre dans les formes prévues au Code de procédure civile ».

Pour les époux séparés de biens

– Rédaction actuelle de l'article 1537 du Code civil. Version en vigueur depuis le 1er février 1966. – « Les époux contribuent aux charges du mariage suivant les conventions contenues en leur contrat ; et, s'il n'en existe point à cet égard, dans la proportion déterminée à l'article 214. »
– Proposition d'une nouvelle rédaction de l'article 1537 du Code civil. – « Les époux contribuent aux charges du mariage suivant les conventions contenues en leur contrat ; et, s'il n'en existe point à cet égard, dans la proportion déterminée à l'article 214.
Relèvent de la contribution aux charges du mariage, les dépenses d'investissements immobiliers concernant le financement du logement de la famille, ainsi que de tous les biens immobiliers à l'usage de la famille lorsque ceux-ci sont conformes au train de vie du ménage.
En revanche, ne relèvent pas de la contribution aux charges du mariage les dettes d'impôt sur le revenu, les dépenses d'investissements portant sur des biens immobiliers n'étant pas à l'usage de la famille, notamment des immeubles de rapport et les dépenses en capital de toutes sortes.
Les époux séparés de biens peuvent convenir, conventionnellement, d'inclure et d'exclure certaines dépenses de la contribution aux charges du mariage. »

Pour les partenaires : l'article 515-4 du Code civil

– Codifier les contours de l'aide matérielle réciproque entre partenaires, cousine de la contribution aux charges du ménage et non petite sœur . – Il semble également opportun que le législateur s'attache à mettre un terme au contentieux afférant à l'aide matérielle réciproque. À ce jour, il apparaît comme une évidence que l'évolution suggérée par la jurisprudence n'est ni envisageable ni souhaitable pour les partenaires qui choisissent de s'unir en mairie ou pour ceux qui régularisent un contrat notarié. Utiliser l'outil législatif pour entériner les contours de l'aide matérielle réciproque nous semble une opportunité à saisir.
Il convient désormais de proposer au législateur d'appréhender les partenaires séparés de biens, en entérinant une solution antinomique à la contribution aux charges du mariage. Aujourd'hui les partenaires choisissent en majorité le régime légal de la séparation des patrimoines et refusent ainsi un esprit communautaire de leur mode de conjugalité, lequel est pourtant sous-entendu par la jurisprudence. L'insécurité juridique à laquelle sont actuellement confrontés les partenaires est évidente du fait du silence de la loi. Ainsi désormais, ces couples, qu'ils le veuillent ou non, rentrent de facto dans l'esprit communautaire au regard de leur logement commun. Ce faisant, ayant peu à peu compris l'attrait de leur mode d'union, ils peuvent attendre du législateur non pas une assimilation au mariage, mais une véritable indépendance patrimoniale.
Les propos qui précédent nous invitent à considérer le Pacs comme une source de contentieux inutile, notamment concernant les partenaires séparés de biens trop généreux. Par suite, le législateur est invité à aller au-delà du régime légal de la séparation des patrimoines. Afin de respecter le pluralisme des modes de conjugalité, imposé par la Cour européenne des droits de l'homme, le législateur doit continuer de renoncer à l'idée de rapprocher le Pacs du mariage. Rester dans la logique de l'indépendance patrimoniale des partenaires, tel sera l'objectif de cette évolution. La jurisprudence émergente en matière de contribution aux charges du ménage des partenaires devrait guider le législateur contemporain. Plus précisément, il doit absolument s'en écarter.

Supprimer l'aide matérielle réciproque entre les partenaires et mettre un terme à la jurisprudence relative à la contribution aux charges du ménage des partenaires

Au regard de l'argumentaire dans les développements qui précèdent, une proposition émanera de nos travaux.
Elle comprendra les deux volets suivants :
  • modifier l'article 515-4 du Code civil pour supprimer toute référence à l'aide matérielle ;
  • proposer un nouvel article 515-4-1 à la suite, afin de neutraliser la jurisprudence émergente de la Cour de cassation concernant la contribution aux charges du ménage des partenaires.

Modifier l'article 515-4 du Code civil

Rédaction actuelle de l'article 515-4 du Code civil. Version en vigueur depuis le 19 mars 2014. – « Les partenaires liés par un pacte civil de solidarité s'engagent à une vie commune, ainsi qu'à une aide matérielle et une assistance réciproques. Si les partenaires n'en disposent autrement, l'aide matérielle est proportionnelle à leurs facultés respectives.
Les partenaires sont tenus solidairement à l'égard des tiers des dettes contractées par l'un d'eux pour les besoins de la vie courante. Toutefois, cette solidarité n'a pas lieu pour les dépenses manifestement excessives. Elle n'a pas lieu non plus, s'ils n'ont été conclus du consentement des deux partenaires, pour les achats à tempérament ni pour les emprunts à moins que ces derniers ne portent sur des sommes modestes nécessaires aux besoins de la vie courante et que le montant cumulé de ces sommes, en cas de pluralité d'emprunts, ne soit pas manifestement excessif eu égard au train de vie du ménage. »
– Proposition d'une nouvelle rédaction de l'article 515-4 du Code civil. – Le législateur actuel est, préalablement, encouragé à modifier l'actuel article 515-4 du Code civil pour supprimer toute référence à l'aide matérielle réciproque.
Les termes retenus pourraient alors être les suivants : Les partenaires liés par un pacte civil de solidarité s'engagent à une vie commune, ainsi qu'à une assistance réciproque.
Le second alinéa de l'article 515-4 du Code civil reste inchangé.

Introduire l'article 515-4-1 du Code civil

– Introduire un nouvel article dans le Code civil. – Le législateur actuel est encouragé à proposer un nouvel article 515-4-1 à la suite de l'article 515-4 du Code civil pour déterminer le sort des partenaires séparés de biens trop généreux, et préciser les modalités de la contribution aux charges du ménage.
Celui-ci pourrait comprendre les deux alinéas détaillés ci-après.
Premier alinéa de l'article 515-4-1 du Code civil
– Faire échec à une « matrimonialisation » du Pacs. – Comme explicité précédemment, les juges de la Haute juridiction ont fait tendre le Pacs, sous le régime légal de la séparation des patrimoines, vers le mariage, sous le régime de la séparation de biens pure et simple. Cette évolution jurisprudentielle, instaurant une contribution aux charges du ménage des partenaires, est particulièrement aléatoire et contraire tant à la volonté des concitoyens qu'à la dynamique apportée en 2006 par le législateur en faisant du régime séparatiste le régime légal.
Les contours de l'aide matérielle réciproque qui émergent de la jurisprudence contemporaine semblent mettre fin au pluralisme des modes de conjugalité. L'étude approfondie des concubins dans la sous-section suivante nous invite à considérer une solution quasi identique pour les partenaires, et ainsi les éloigner des époux. L'objectif pourrait être d'éviter, à nouveau, la logique du « tout ou rien » (admission ou rejet de l'indemnisation), et de réaffirmer le pluralisme des modes d'union.
– Proposition de rédaction. – Le législateur actuel est invité à se positionner sur la problématique, de la même manière qu'il est encouragé à le faire pour les concubins (V. infra, nos et s.). Plus précisément, l'idée pourrait être que le partenaire n'a pas l'obligation de contribuer aux charges de la vie commune, mais qu'il ne pourra en solliciter le remboursement s'il s'en acquitte spontanément.
Les termes retenus par le législateur pourraient alors être les suivants, savoir : Compte tenu des principes de la séparation de patrimoines et de l'indépendance financière qui est propre au pacte civil de solidarité, et en l'absence de convention prévoyant les modalités de contribution aux charges de la vie commune, chacun des partenaires doit supporter seul et définitivement les dépenses de la vie courante qu'il a engagées. La volonté commune des partenaires d'effectuer seuls ces dépenses est le critère unique.
Second alinéa de l'article 515-4-1 du Code civil
– Encourager la logique du juste milieu, à l'image du concubinage. – Le législateur a tout intérêt à entériner cette nouvelle contribution aux charges du ménage des partenaires afin de faire définitivement échec à la « matrimonialisation » du Pacs et de lui conférer un esprit séparatiste voulu, actuellement, par les concitoyens. À l'instar de la contribution aux charges du ménage des concubins, l'objectif est de bloquer la fameuse logique du « tout ou rien », largement défavorable pour les partenaires. Le fondement qui resterait à envisager pour les partenaires séparés de biens trop généreux serait alors le quasi-contrat de l'article 1301 du Code civil : la gestion d'affaires intéressée, qui ouvrirait la voie à la logique du juste milieu. Le législateur pourrait l'envisager dans le second alinéa de ce nouvel article.
Si l'on reprend les conditions légales permettant d'invoquer la gestion d'affaires intéressée, le partenaire trop généreux doit spontanément, consciemment et utilement construire sur le terrain appartenant à l'autre partenaire ou améliorer un immeuble appartenant à l'autre. L'immeuble concerné peut sans difficulté être le logement du couple ou de la famille. Par suite, même si le législateur a entériné l'absence de contribution aux dépenses de la vie courante des partenaires, l'article 1301 du Code civil pourrait, tout de même, être invoqué par un partenaire séparé de biens trop généreux qui souhaiterait obtenir une compensation de la dépense faite. Il ne semble même pas nécessaire, en outre, de faire référence à ce quasi-contrat dans le cadre des articles sur le Pacs, sauf pour le cas précis du financement par emprunt bancaire d'un immeuble indivis.
À l'aune des propositions émises pour les concubins, la règle de calcul du montant de la gestion d'affaires intéressée mérite un approfondissement. Afin de déterminer le montant de ladite compensation, il convient, en vertu du second alinéa de l'article 1301-4 du Code civil, de prendre en considération les « intérêts de chacun dans l'affaire commune ». Dès lors, il peut s'avérer utile que le législateur précise que, dans le cas du Pacs, cela concerne à la fois la contribution aux charges du ménage et l'intérêt personnel de celui qui s'est appauvri.
– Proposition de rédaction. – Le législateur actuel est donc invité à confirmer et à préciser ce recours à la gestion d'affaires intéressée.
Les termes pourraient alors être les suivants, savoir : Si un partenaire construit sur le terrain appartenant à l'autre partenaire ou améliore un immeuble appartenant à l'autre partenaire ou finance au-delà de sa quote-part dans un bien indivis, il sera fait application des articles 1301 et suivants du Code civil afin de déterminer le montant de la compensation due. Dans ce cas, de la dépense faite seront déduits les intérêts du gérant dans l'affaire commune. Ceux-ci tiendront compte d'une part de la contribution aux charges du ménage des partenaires, ainsi que de l'intérêt personnel du gérant.
– Exemples chiffrés.

La contribution aux charges du ménage des partenaires ouvrant la voie à une action sur le fondement de la gestion d'affaires intéressée – immeuble indivis des partenaires séparés de biens – dépenses d'investissement – résidence principale

Au cours de l'union, A et B, partenaires séparés de biens, acquièrent un bien immobilier en indivision, à hauteur de moitié chacun. Le bien est acquis pour 100 000,00 €, sans apport, au moyen d'un prêt bancaire commun. Ledit bien sert de logement au couple et à la famille. Finalement, l'emprunt est remboursé uniquement par B.
Lors de la rupture, il convient, dans un premier temps, de répondre à cette quadruple question successivement (si oui à la question, passer à la suivante) :
  • Le bien acquis est-il destiné à l'usage de la famille ? Oui, dès lors qu'il s'agit du logement du couple ou de la famille.
  • Était-ce une dépense d'investissement ? Oui, un remboursement de l'emprunt par versements successifs est considéré comme une dépense d'investissement.
  • Existait-il une volonté commune des partenaires que cette dépense soit effectuée uniquement par B ? Si oui, passer à la question suivante.
  • Est-ce que la dépense effectuée par B a excédé ses facultés contributives, au regard des revenus perçus par chaque partenaire pendant les années du Pacs, ainsi que les économies réalisées par A ?
Si non, alors B assume le financement du bien à hauteur de 100 % et A à hauteur de 0 %. Il ne reçoit aucune indemnité de A.
Si oui, alors une créance pourra être constatée afin que B n'assume pas le financement du bien à hauteur de 100 %.
Il convient, dans un second temps, de déterminer le montant de l'indemnité que A doit à B. Pour ce faire, les parties doivent déterminer et justifier la proportion de leurs intérêts dans l'affaire commune, afin de déduire du droit à indemnisation de B, savoir :
  • le montant de la contribution aux charges du ménage des partenaires, pour laquelle aucune compensation ne sera possible ; par exemple, le quart : 25 000,00 € ;
  • le montant de l'intérêt personnel de B d'être hébergé dans le bien appartenant pour moitié à A ; par exemple, la moitié : 50 000,00 €.
Par suite, B reçoit de A une indemnité de 25 000,00 € (= 100 000,00 – 25 000,00 – 50 000,00), équivalente au quart restant. Donc B assume le financement du bien à hauteur de 75 % et A à hauteur de 25 %.

La contribution aux charges du ménage des partenaires ouvrant la voie à une action sur le fondement de la gestion d'affaires intéressée – immeuble appartenant à l'un des partenaires séparés de biens – dépenses d'investissement – résidence principale

Au cours de l'union, B effectue une dépense de 100 000,00 € pour la réhabilitation d'un immeuble appartenant à A et servant de logement au couple.
Lors de la rupture, il convient dans un premier temps de répondre à cette quadruple question successivement (si oui à la question, passer à la suivante) :
  • Le bien concerné est-il destiné à l'usage de la famille ? Oui, dès lors qu'il s'agit du logement du couple ou de la famille.
  • Était-ce une dépense d'investissement ? Oui.
  • Existait-il une volonté commune des partenaires que cette dépense soit effectuée uniquement par B ? Si oui, passer à la question suivante.
  • Est-ce que la dépense effectuée par B a excédé ses facultés contributives, au regard des revenus perçus par chaque partenaire pendant les années du Pacs, ainsi que les économies réalisées par A ?
Si non, alors B assume le financement à hauteur de 100 % et A à hauteur de 0 %. Il ne reçoit aucune indemnité de A.
Si oui, alors une créance pourra être constatée afin que B n'assume pas le financement à hauteur de 100 %.
Il convient, dans un second temps, de déterminer le montant de l'indemnité que A doit à B. Pour ce faire, les parties doivent déterminer et justifier la proportion de leurs intérêts dans l'affaire commune, afin de déduire du droit à indemnisation de B, savoir :
  • le montant de la contribution aux charges du ménage des partenaires, pour laquelle aucune compensation ne sera possible ; par exemple, le quart : 25 000,00 € ;
  • le montant de l'intérêt personnel de B d'être hébergé dans le bien appartenant à A ; par exemple, la moitié : 50 000,00 €.
Par suite, B reçoit de A une indemnité de 25 000,00 € (= 100 000,00 – 25 000,00 – 50 000,00), équivalente au quart restant. Donc B assume la dépense à hauteur de 75 % et A à hauteur de 25 %.

Pour les concubins : l'article 515-8-1 du Code civil

– Codifier les contours de la contribution aux charges du ménage des concubins, à l'image des partenaires. – À ce jour, il apparaît comme une évidence que l'évolution suggérée par la jurisprudence est envisageable et souhaitable. Il s'agit d'une opportunité à saisir pour le législateur, lequel est invité à intervenir afin de sécuriser bon nombre de couples de concitoyens et supprimer considérablement le contentieux afférent aux concubins trop généreux.
Avant de proposer au législateur d'appréhender les couples vivant en union libre, en entérinant la jurisprudence émergente de la contribution aux charges du ménage (§ II), il convient d'analyser ce mode de conjugalité au regard du droit positif. Effectivement, il serait désormais erroné d'affirmer que le concubinage évolue dans une sphère de non-droit. Le juge et le législateur l'ont imprégné de règles juridiques propres : d'abord en l'ayant défini il y a plus de vingt ans dans le Code civil, et surtout en lui ayant, ensuite, induit des droits et des devoirs (§ I).

Les droits et les devoirs des concubins au regard du droit positif

– Effets du concubinage. – Le concubinage est traditionnellement présenté comme un mode d'union bénéficiant de droits, tout en étant exempté de devoirs. C'est précisément ce particularisme qui a favorisé l'attrait du concubinage et son ascension aux dépens du mariage. Toutefois, de nos jours, la réalité est tout autre et des nuances doivent être apportées à cette affirmation.
D'une part, les droits dont bénéficient les concubins sont très limités et restreints. Ils n'ont pas tous les droits dévolus aux époux, et ne bénéficient donc pas de la protection inhérente au mariage. D'autre part, ils sont astreints à certains devoirs, même si ceux-ci sont allégés par rapport à d'autres formes d'union. Par suite, à ce jour, le concubinage peut être présenté comme une union bénéficiant de droits restreints (A), tout en étant, finalement, exempté de peu de devoirs (B). Cette dernière affirmation, contraire aux souhaits des concubins, résulte de l'analyse de la jurisprudence ainsi que de l'intervention du législateur dans d'autres sphères que celle du droit civil.
Un mode de conjugalité source de droits restreints
– Droit positif. – L'union libre est un mode de conjugalité source de divers droits, lesquels restent, à ce jour, limités et restreints. Seuls quelques textes épars permettent aux concubins de se voir reconnaître des droits équivalents à ceux des autres formes de conjugalité. D'une part, les droits des concubins s'affirment à travers des règles spéciales prévues en dehors du Code civil (I). D'autre part, le Code civil prévoit quelques droits pour les concubins (II).
L'existence de droits hors Code civil
– Droit social et droit fiscal. – Depuis de nombreuses années, le droit social et le droit fiscal accordent aux concubins des avantages équivalents à ceux des époux et des partenaires. Certaines distinctions persistent cependant.
Les tableaux ci-après le résument.
Nous invitons le lecteur à consulter sur ce point le rapport du 106e Congrès des notaires de France :
Rapport du 106e Congrès des notaires de France, Bordeaux, 30 mai au 2 juin 2010, Couples, Patrimoine, les défis de la vie à 2, 1re commission, nos 1383 à 1430, p. 240 à 267.">Lien
Nous renvoyons ici également au rapport du 106e Congrès des notaires de France :
Rapport du 106e Congrès des notaires de France, Bordeaux, 30 mai au 2 juin 2010, Couples, Patrimoine, les défis de la vie à 2, 1re commission, nos 1324 à 1382, p. 207 à 240.">Lien
– Droit des baux d'habitation. – Cette assimilation des droits des concubins avec ceux des époux et des partenaires se retrouve également dans le cadre de la conclusion d'un bail d'habitation. Selon l'article 14 de la loi no 89-462 du 6 juillet 1989, en cas d'abandon du domicile par le locataire, le contrat de location continue, notamment au profit du concubin notoire qui vivait avec lui depuis au moins un an à la date de l'abandon du domicile. L'article 15 de cette même loi prévoit que le bailleur est autorisé à donner congé à son locataire lorsqu'il souhaite reprendre le local à la faveur de son partenaire, conjoint ou concubin.
– Droit rural. – Quelques dispositions plus récentes s'ajoutent aux précédentes, à l'instar de la loi d'orientation agricole no 2006-11 du 5 janvier 2006, qui étend aux partenaires et aux concubins certaines dispositions du Code rural et de la pêche maritime autrefois réservées aux époux.
– Représentation en justice. – De même, la loi no 2007-1787 du 20 décembre 2007 de simplification du droit permet la représentation en justice entre concubins (CPC, art. 828).
L'existence de droits dans le Code civil
– Filiation. – Depuis la loi no 72-3 du 3 janvier 1972 sur la filiation, celle-ci est détachée du couple. Le législateur ne rend plus le mariage nécessaire en matière de filiation, et les règles tendent à s'unifier pour tous les couples.
Nous invitons le lecteur à consulter sur ce point le rapport du 106e Congrès des notaires de France :
Rapport du 106e Congrès des notaires de France, Bordeaux, 30 mai au 2 juin 2010, Couples, Patrimoine, les défis de la vie à 2, 1re commission, nos 1240 à 1293, p. 160 à 186.">Lien
L'article 311-20 du Code civil relatif à la filiation de l'enfant conçu par procréation médicalement assistée avec tiers donneur est applicable aux couples de concubins.
– Personnes protégées. – L'article 449 du Code civil, issu de la réforme du 5 mars 2007, prévoit la désignation du concubin comme curateur ou tuteur à défaut de choix du majeur protégé et en l'absence de mandat de protection future.
Un mode de conjugalité contraint par des devoirs
– Droit positif. – Traditionnellement, comme son nom l'indique, l'union libre est un mode de conjugalité libre de toute forme de contrainte. D'après le principe directeur prôné depuis toujours, les concubins ne sont pas, de droit, astreints à des devoirs. Leur relation est dépourvue d'un quelconque engagement pour l'avenir. Le concubinage ne soumet pas, en principe, les concubins à un régime impératif.
Néanmoins, à l'instar de la « contribution aux charges du ménage des concubins » qui émerge de la jurisprudence, ces couples qui vivent en union libre se voient de plus en plus assujettis à différents devoirs et obligations.
– Existence de devoirs dans le Code civil : le devoir de communauté de vie. – Depuis la loi du 15 novembre 1999, il ressort de la définition du concubinage, prévue à l'article 515-8 du Code civil, que le législateur a fait de la communauté de vie l'élément constitutif de ce mode de conjugalité.
Dès lors, il en résulte que la cohabitation est fondamentale pour des concubins. Mais le simple partage d'un même domicile ne permet pas toujours d'en déduire l'existence d'un concubinage. La cohabitation comme la colocation ne suffisent pas à constituer le concubinage. Il est nécessaire que les concubins mènent une vie de couple. Il y aura l'existence d'un concubinage, malgré l'absence de cohabitation, s'il existe des relations stables et continues entre deux personnes. En somme, deux personnes vivant ensemble dans un même lieu ne sauraient être assimilées à des concubins, quand bien même elles auraient acheté en commun un bien immobilier.
Nous renvoyons sur ce point au rapport du 106e Congrès des notaires de France :
Rapport du 106e Congrès des notaires de France, Bordeaux, 30 mai au 2 juin 2010, Couples, Patrimoine, les défis de la vie à 2, 1re commission, nos 1203 à 1218, p. 137 à 145.">Lien

Preuve de l’existence d’un concubinage

La preuve est en principe libre afin d'établir l'existence d'un concubinage entre deux personnes.
– Absence d'acte. – Les concubins, à l'inverse du mariage et du Pacs, ne disposent, de droit, d'aucune preuve préétablie de leur union. En effet, le concubinage n'est pas un acte d'état civil, lequel serait mentionné dans l'acte de naissance des parties. Son existence doit, dès lors, être démontrée.
– Preuve par tout moyen. – En principe, c'est le droit commun de la preuve qui s'applique. En qualité de fait juridique, l'union libre doit être prouvée par tout moyen. Ladite liberté probatoire devrait conduire à admettre tout mode de preuve.
– Refus de la simple déclaration. – De jurisprudence constante, lorsqu'une seule personne invoque son état de concubinage, la preuve n'est pas valablement rapportée. Des éléments extrinsèques s'avèrent indispensables.
– Preuve préconstituée. – Les concubins peuvent, à titre préventif, se préconstituer la preuve, savoir :
  • soit par une déclaration sur l'honneur sur papier libre, laquelle précise l'état civil des concubins, leur identité, leur domicile et mentionne la date à laquelle il y a eu le commencement du partage de la vie commune. Ladite déclaration peut être rédigée sur le simulateur « service-public.fr » (www.service-public.fr/simulateur/calcul/Concubinage">Lien) ;
  • soit par un certificat de concubinage, autrement appelé « certificat de vie commune », délivré par la mairie du lieu du domicile du couple. Toutes les mairies ne délivrent pas ce certificat.
Les pièces demandées pour justifier que deux personnes vivent en union libre au même domicile diffèrent selon les mairies. Certaines peuvent demander des témoignages de deux personnes majeures et sans lien de parenté avec les concubins, pour attester de l'existence d'une vie de couple durable et stable entre les deux concubins.
– Soupçon par les administrations. – En droit social et en droit fiscal, les administrations sont autorisées à effectuer des vérifications. Elles pourront établir le concubinage par tous moyens, à partir de faisceaux d'éléments, comme une adresse commune ou des déclarations de voisinage.
– Jurisprudence. – Compte tenu du silence du législateur concernant les autres devoirs des concubins, le juge, en sa qualité de créateur du droit des concubins, précise l'étendue de leurs obligations.
« Si bien qu'il existe un ersatz de statut judiciaire des concubins, statut venant combler l'absence de dispositions conventionnelles ou légales. Cependant, la difficulté découle de l'appréciation souveraine des juges. Aussi, le statut demeure fragile. Certains devoirs sont consacrés, d'autres niés ».
De tels devoirs, tant personnels (I) que pécuniaires (II), semblent s'imposer aux concubins, à moins qu'ils n'aient établi entre eux une convention pour les préciser.
Les devoirs personnels controversés des concubins
– Existence d'un devoir de fidélité de fait. – De nombreux auteurs considèrent que le concubinage ne génère aucune obligation de fidélité, puisqu'il n'est prévu par aucun texte.
Cet avis doctrinal est confirmé par certains juges du fond et par ceux de la Haute juridiction. La Cour de cassation a pu indiquer que la fidélité naît dans le mariage, sans vérifier si cette fidélité était respectée antérieurement au mariage.
Pourtant, en pratique, la majorité des concubins respectent un tel devoir de fidélité. Ce qui laisse à penser qu'il s'agit d'une fidélité de fait et non d'une fidélité de droit. Une fidélité qui serait équivalente à celle existant dans le mariage, mais à un degré différent.
– Existence d'un devoir de respect. – De nombreux auteurs considèrent que « le concubinage est un contrat de couple respectable au sein duquel doit régner le respect et non l'incivilité », même si ce devoir n'est prévu par aucun texte.
À ce propos, le concubin peut compter sur tout un arsenal de protection pénale, lequel ne tient pas compte de la situation matrimoniale des victimes. Depuis la loi du 4 avril 2006, le dispositif pénal de protection contre les violences conjugales est unifié pour l'ensemble des couples, quel que soit le mode de conjugalité.
Sur le plan civil, la loi no 2010-769 du 9 juillet 2010, relative aux violences faites spécifiquement aux femmes, aux victimes au sein des couples et aux incidences de ces dernières sur les enfants, a permis l'adoption d'un dispositif de protection à l'égard de l'ensemble des femmes vivant en couple ou ayant vécu en couple. Aussi, le législateur a institué un titre spécial au sein du livre I du Code civil, intitulé « Des mesures de protection des victimes de violences », lequel introduit de nouveaux articles – 515-9 à 515-13 du Code civil – qui protègent la femme (et l'enfant) en danger. Les lois no 2014-873 du 4 août 2014 et no 2015-1402 du 5 novembre 2015 sont venues compléter et renforcer ce dispositif. L'ensemble de ces textes permettent notamment au juge aux affaires familiales de délivrer en urgence une ordonnance de protection lorsqu'une femme est victime de violences portées par l'époux ou l'ancien époux, le partenaire ou l'ancien partenaire, ou le concubin ou l'ancien concubin, et mettant en danger sa personne.
Nous renvoyons sur ce point au rapport du 106e Congrès des notaires de France :
Rapport du 106e Congrès des notaires de France, Bordeaux, 30 mai au 2 juin 2010, Couples, Patrimoine, les défis de la vie à 2, 1re commission, nos 1222 à 1225, p. 147 à 150.">Lien
– Existence d'un devoir d'entraide. – De nombreux auteurs considèrent que le concubinage comprend une obligation naturelle et spontanée de secours et d'assistance, même si elle n'est prévue par aucun texte.
La Cour de cassation l'a confirmé dans un arrêt rendu par sa première chambre civile le 2 avril 2008. Un concubin peut voir sa responsabilité engagée sur le fondement de l'article 1240 du Code civil (ancien art. 1382) pour défaut d'assistance.
Les devoirs pécuniaires controversés des concubins
– Existence d'un devoir de contribution aux charges du ménage. – En théorie, le concubinage est régi par les principes de l'indépendance financière et de la séparation du patrimoine. Pourtant en pratique, cette présomption d'indépendance n'existe pas forcément. Il arrive souvent qu'un concubin mette à la disposition de l'autre l'usage de ses biens et de ses ressources. Cette confusion de patrimoine peut leur poser problème lors de la séparation, dans le cadre de la liquidation de leurs intérêts.
À ce propos, comme développé précédemment, les juges de la Haute juridiction ont érigé une sorte de « contribution aux charges du ménage des concubins ».
– Absence d'un devoir de solidarité. – En revanche, pour l'heure, les concubins ne connaissent pas une solidarité équivalente à celle des époux et des partenaires. La Haute juridiction refuse de se substituer au législateur et de reconnaître la solidarité entre les concubins pour leurs dépenses de la vie courante.

Les droits et les devoirs des concubins au regard du droit prospectif : l'affirmation des principes de la contribution aux charges du ménage des concubins par le législateur

– Intervention du législateur. – Aujourd'hui le concubinage n'est plus dans une sphère de non-droit, dès lors que ce mode de conjugalité bénéficie de droits et de devoirs, par déduction de la doctrine et création prétorienne. L'insécurité juridique à laquelle sont actuellement confrontés les concubins est évidente du fait du silence de la loi. Ainsi désormais, ces couples en union libre, qu'ils le veuillent ou non, rentrent de facto dans le cadre juridique. Ce faisant, ayant peu à peu perdu ce qui faisait l'attrait de leur mode d'union, ils sont légitimes à attendre du législateur des règles qui leur conféreraient une bien meilleure sécurité.
Les propos qui précédent nous invitent à considérer le concubinage comme une source de contentieux inutile, notamment concernant les concubins trop généreux. Par suite, le législateur est invité à aller au-delà de la définition du concubinage. Oui, mais comment ? Cette interrogation soulève, depuis de nombreuses années déjà, des débats en doctrine. Si plusieurs auteurs ont proposé l'affirmation d'un statut réglementé pour les concubins, d'autres y étaient réticents.
Afin de respecter le pluralisme des modes de conjugalité imposé par la Cour européenne des droits de l'homme, le législateur doit continuer de renoncer à l'idée de codifier un véritable « statut du concubinage » dans le Code civil. Seul le droit patrimonial des concubins nous semble devoir faire l'objet d'une codification.
Rester dans la logique de règles éparses concernant le concubinage, tel sera l'objectif de cette évolution. La jurisprudence émergente en matière de « contribution aux charges du ménage des concubins » devrait guider le législateur contemporain. En effet, insérer un nouvel article dans le Code civil pour déterminer le sort des concubins trop généreux pourrait être la solution.
Celui-ci pourrait comprendre les deux alinéas détaillés ci-après.

Codifier le droit patrimonial des concubins

Insérer un nouvel article dans le Code civil visant à entériner la jurisprudence émergente de la Cour de cassation concernant la contribution aux charges du ménage des concubins.
Le premier alinéa du nouvel article du Code civil
– Faire échec aux textes de droit commun. – Comme explicité précédemment, les juges de la Haute juridiction ont apporté de nombreuses réponses à certaines situations particulières, à l'instar de celle relative à la liquidation des comptes existants entre les concubins lors de la rupture, et plus précisément lorsqu'un concubin construit sur le terrain appartenant à l'autre ou améliore un immeuble appartenant à l'autre, ou encore participe au financement par emprunt bancaire d'un immeuble indivis. Les réponses jurisprudentielles sont particulièrement aléatoires et défavorables pour l'un d'eux en fonction de l'existence ou non de la fameuse « contribution aux charges du ménage des concubins ».
Ledit devoir pécuniaire qui émerge de la jurisprudence contemporaine fait échec aux textes de droit commun que sont les articles 555, 815-13 et 1303 du Code civil. Dès lors qu'il existe une obligation de contribuer aux dépenses de la vie courante entre les concubins, et qu'il a existé, explicitement ou implicitement, une volonté commune de la part des concubins que seulement l'un d'eux effectue cette dépense, les articles précités du Code civil ne peuvent plus être invoqués par les concubins trop généreux afin d'obtenir compensation de la dépense faite. Faire échec à ces textes de droit commun semble cohérent à partir du moment où l'on souhaite éviter la logique du « tout ou rien » : admission ou rejet de l'indemnisation.
– Proposition de rédaction du premier alinéa du nouvel article du Code civil. – Le législateur actuel est donc invité à se positionner sur la problématique. Plus précisément, il est encouragé à intégrer dans le Code civil un nouvel article indiquant que le concubin n'a pas l'obligation de contribuer aux charges de la vie commune, mais que s'il s'en acquitte spontanément, il ne pourra en solliciter le remboursement.
Les termes retenus par le législateur pourraient alors être les suivants, savoir : Compte tenu des principes de la séparation de patrimoines et de l'indépendance financière qui est propre au concubinage, et en l'absence de convention prévoyant les modalités de contribution aux charges de la vie commune, chacun des concubins doit supporter seul et définitivement les dépenses de la vie courante qu'il a engagées. La volonté commune des concubins d'effectuer seuls ces dépenses est le critère unique.
En somme, le législateur a tout intérêt à entériner cette nouvelle « contribution aux charges du ménage des concubins » afin de faire définitivement échec aux règles générales de l'indivision, au principe du tiers possesseur des travaux et à l'enrichissement injustifié, et donc à la fameuse logique du « tout ou rien », largement défavorable aux concubins. L'unique fondement qui resterait pour les concubins trop généreux serait alors le quasi-contrat de l'article 1301 du Code civil : la gestion d'affaires intéressée, qui ouvre la voie à la logique du juste milieu.
Le second alinéa du nouvel article du Code civil
– Encourager la logique du juste milieu. – Si l'on reprend les conditions légales permettant d'invoquer la gestion d'affaires intéressée, le concubin trop généreux doit, spontanément, consciemment et utilement construire sur le terrain appartenant à l'autre concubin ou améliorer un immeuble appartenant à l'autre. L'immeuble concerné peut sans difficulté être le logement du couple ou de la famille. Par suite, même si le législateur a entériné l'absence de contribution aux dépenses de la vie courante des concubins, l'article 1301 du Code civil peut, tout de même, être invoqué par un concubin trop généreux qui souhaiterait obtenir une compensation de la dépense faite. Il ne semble pas nécessaire, en outre, de faire référence à ce quasi-contrat dans le cadre des articles sur le concubinage, sauf pour le cas précis du financement par emprunt bancaire d'un immeuble indivis.
La règle de calcul du montant de la gestion d'affaires intéressée mérite un approfondissement. Afin de déterminer le montant de ladite compensation, il convient, en vertu du second alinéa de l'article 1301-4 du Code civil, de prendre en considération, les « intérêts de chacun dans l'affaire commune ». Dès lors, il peut s'avérer utile que le législateur précise que, dans le cas du concubinage, cela concerne à la fois la contribution aux charges du ménage et l'intérêt personnel de celui qui s'est appauvri.
– Proposition de rédaction du second alinéa du nouvel article du Code civil. – Le législateur actuel est donc invité à confirmer et à préciser ce recours à la gestion d'affaires intéressée. Les termes pourraient alors être les suivants, savoir : Si un concubin construit sur le terrain appartenant à l'autre concubin ou améliore un immeuble appartenant à l'autre concubin ou participe au financement au-delà de sa quote-part dans un bien indivis, il sera fait application des articles 1301 et suivants du Code civil afin de déterminer le montant de la compensation due. Dans ce cas, de la dépense faite seront déduits les intérêts du gérant dans l'affaire commune. Ceux-ci tiendront compte d'une part de la contribution aux charges du ménage des concubins, ainsi que de l'intérêt personnel du gérant.
– Exemples chiffrés.

La contribution aux charges du ménage des concubins ouvrant la voie à une action sur le fondement de la gestion d'affaires intéressée – immeuble indivis des concubins – dépenses d'investissement – résidence principale

Au cours de l'union, A et B, concubins, acquièrent un bien immobilier en indivision, à hauteur de moitié chacun. Le bien est acquis pour 100 000,00 €, sans apport, au moyen d'un prêt bancaire commun. Ledit bien sert de logement au couple et à la famille. Finalement, l'emprunt est remboursé uniquement par B.
Lors de la rupture, il convient, dans un premier temps, de répondre à cette quadruple question successivement (si oui à la question, passer à la suivante) :
  • Le bien acquis est-il destiné à l'usage de la famille ? Oui, dès lors qu'il s'agit du logement du couple ou de la famille.
  • Était-ce une dépense d'investissement ? Oui, un remboursement de l'emprunt par versements successifs est considéré comme une dépense d'investissement.
  • Existait-il une volonté commune des partenaires que cette dépense soit effectuée uniquement par B ? Si oui, passer à la question suivante.
  • Est-ce que la dépense effectuée par B a excédé ses facultés contributives, au regard des revenus perçus par chaque concubin pendant les années du concubinage, ainsi que les économies réalisées par A ?
Si non, alors B assume le financement du bien à hauteur de 100 % et A à hauteur de 0 %. Il ne reçoit aucune indemnité de A.
Si oui, alors on passe à la question suivante : une créance pourra être constatée afin que B n'assume pas le financement du bien à hauteur de 100 %.
Il convient, dans un second temps, de déterminer le montant de l'indemnité que A doit à B. Pour ce faire, les parties doivent déterminer et justifier la proportion de leurs intérêts dans l'affaire commune, afin de déduire du droit à indemnisation de B, savoir :
  • le montant de la contribution aux charges du ménage des concubins, pour laquelle aucune compensation ne sera possible ; par exemple, le quart : 25 000,00 € ;
  • le montant de l'intérêt personnel de B d'être hébergé dans le bien appartenant pour moitié à A ; par exemple, la moitié : 50 000,00 €.
Par suite, B reçoit de A une indemnité de 25 000,00 € (= 100 000,00 – 25 000,00 – 50 000,00), équivalente au quart restant. Donc B assume le financement du bien à hauteur de 75 % et A à hauteur de 25 %.

La contribution aux charges du ménage des concubins ouvrant la voie à une action sur le fondement de la gestion d'affaires intéressée – immeuble appartenant à l'un des concubins – dépenses d'investissement – résidence principale

Au cours de l'union, B effectue une dépense de 100 000,00 € pour la réhabilitation d'un immeuble appartenant à A et servant de logement au couple.
Lors de la rupture, il convient, dans un premier temps, de répondre à cette quadruple question successivement (si oui à la question, passer à la suivante) :
  • Le bien acquis est-il destiné à l'usage de la famille ? Oui, dès lors qu'il s'agit du logement du couple ou de la famille.
  • Était-ce une dépense d'investissement ? Oui.
  • Existait-il une volonté commune des partenaires que cette dépense soit effectuée uniquement par B ? Si oui, passer à la question suivante.
  • Est-ce que la dépense effectuée par B a excédé ses facultés contributives, au regard des revenus perçus par chaque concubin pendant les années du concubinage, ainsi que les économies réalisées par A ?
Si non, alors B assume le financement du bien à hauteur de 100 % et A à hauteur de 0 %. Il ne reçoit aucune indemnité de A.
Si oui, alors on passe à la question suivante : une créance pourra être constatée afin que B n'assume pas le financement du bien à hauteur de 100 %.
Il convient, dans un second temps, de déterminer le montant de l'indemnité que A doit à B. Pour ce faire, les parties doivent déterminer et justifier la proportion de leurs intérêts dans l'affaire commune, afin de déduire du droit à indemnisation de B, savoir :
  • le montant de la contribution aux charges du ménage des concubins, pour laquelle aucune compensation ne sera possible ; par exemple, le quart : 25 000,00 € ;
  • le montant de l'intérêt personnel de B d'être hébergé dans le bien appartenant à A ; par exemple, la moitié : 50 000,00 €.
Par suite, B reçoit de A une indemnité de 25 000,00 € (= 100 000,00 – 25 000,00 – 50 000,00), équivalente au quart restant. Donc B assume le financement du bien à hauteur de 75 % et A à hauteur de 25 %.